Le mouvement civil, « Y’en a marre », a l’ambition de se battre pour une meilleure justice sociale au Sénégal. Avec son programme « Daas Fanaanal » qui consiste à sensibiliser les jeunes à massivement s’inscrire sur les listes électorales pour la présidentielle de 2012, il fait face à des tentatives de corruption destinées à dérouter ses membres. Mais le rappeur « Thiaat » du groupe « Keur gui », membre fondateur du mouvement, demande aux politiciens, à l’occasion de cet entretien qu’il a accordé à Sud Quotidien, de les laisser tranquille, car ils ne pourraient nullement les corrompre.
Pourquoi en avez-vous réellement marre ?
Thiaat- Je crois que ça nous l’avons énormément expliqué. La raison du mouvement « Y’en a marre », c’est le ras-le-bol des Sénégalais qui est d’ordre social, politique et économique. C’est tout ce qu’on a compilé pour en avoir vraiment mare quoi. Il est destiné à lutter contre tout ce que vivent les populations comme difficultés sur tous les plans. C’est pour cette raison que le mouvement a été créé.
L’engagement d’un artiste doit-il être politique ? « Y’en a marre » roule-t-il pour quelque parti politique ?
Non. Je pense que notre engagement ne date pas d’aujourd’hui. On a fait la prison, on a été tabassé. On vit tous les jours des tentatives de corruption. Notre engagement politique n’est rien d’autre qu’un engagement citoyen. Nous sommes d’abord des citoyens avant d’être des artistes. Nous avons alors une casquette citoyenne que nous devons revêtir de temps à autre pour montrer à cette société que nous lui sommes utiles. Si nous sommes des porteurs de voix et que nous ne pouvons rien servir à notre pays, cela ne vaudrait pas la peine. Ce sera déplorable. Nous sommes politiquement engagés parce que je pense que la politique, c’est l’affaire de tout le monde. Et les affaires de tout le monde sont les affaires politiques. Occupe-toi de la politique, sinon la politique s’occupe de toi. Et la politique, c’est l’art de gérer la cité, ça c’est Platon. Donc, je pense que nous faisons tous de la politique, mais d’une manière objective ou d’une manière politicienne. Ce que nous nous voulons, c’est une politique objective et surtout un engagement citoyen. Ce n’est pas de la politique qui aspire à être Président ou autre chose, mais c’est une politique qui aspire à conscientiser, à être la conscience du peuple réel pour amener ce peuple à réfléchir et à concevoir et comprendre que c’est lui le pouvoir.
Des gens prédisent la fin imminente du mouvement. Pourrait-il y avoir des corrompus parmi vous ?
C’est leur affaire. Que ce soit moi, que ce soit quelqu’un d’autre, si je suis acheté ou quelqu’un d’autre est acheté, c’est son problème. « Y’en a marre » n’appartient plus à nous qui l’avons créé, ça appartient à tout le peuple Sénégalais. C’est l’affaire de tous. De toute façon comme on dit que tout le monde a un prix, au contraire le peuple n’a pas de prix. On l’a dit partout. Les politiciens, s’il vous plaît, laissez-nous tranquilles, vous ne pouvez pas nous acheter. En tout cas, tant qu’il y aura ce noyau dur qui constitue le mouvement « Y’en a marre », ils ne pourront pas nous acheter. Ils sont en train d’essayer de nous diviser de toute part, d’appeler les uns et les autres pour les acheter d’une manière quelconque. Ils sont en train de nous diviser d’une autre façon, mais ce n’est pas possible.
Quels sont les types de moyens qu’ils ont utilisés jusqu’ici ?
Ce n’est pas intéressant ni même important d’en parler. Tout ce que je peux dire c’est qu’on ne peut pas monnayer « Y’en a marre » parce que c’est le combat de tout un peuple. La manière la plus simple de monnayer le combat d’un peuple, c’est d’avoir des résultats concrets par rapport à notre combat. Si le peuple sénégalais vit dans une justice sociale, là nous aurons fini de monnayer le « Y’en a marre ». Si le peuple sénégalais vit dans une politique où l’exécutif n’a aucun droit sur le judiciaire, ni sur le législatif, que la justice soit autonome, que l’économie soit en marche, qu’on puisse avoir une autosuffisance alimentaire, vivre de par nos propres moyens, la libre circulation des biens et des individus, les investissements puissent se faire, les jeunes puissent émerger, l’éducation puisse avancer, et que la santé soit réglée pour tous, je pense que c’est à ce moment là que nous aurons fini de monnayer le « Y’en a marre ». Mais la corruption est impensable, elle n’est même pas à l’ordre du jour. Ce n’est pas possible.
Quel est le principal défi de « Y’en a marre » ?
Notre principal aujourd’hui est de réussir notre programme qui s’appelle « Daas Fanaanal » (être fin prêt) qui consiste à massifier les trois millions de sénégalais qui doivent avoir leur carte d’électeur et qui ne l’ont pas encore. C’est ça notre objectif aujourd’hui.
Que faites-vous pour le réussir ?
Une tournée de sensibilisation qui commence samedi (16 avril 2011) dans tout le Sénégal. Nous avons un programme qui est déjà disponible sur le net. Toute la presse en est informée.
Quelles sont les circonstances qui vous avaient conduit en prison ?
Les mêmes. Nous étions accusés de diffamation et d’outrage à la personne d’Abdoulaye Diack à l’époque qui fut maire de Kaolack.
C’était en quelle année ?
C’était en 1998.
Vous aviez fait combien de temps ?
Au total, nous avions fait 10 jours, entre le parquet, le violon et le camp pénal.
Vous étiez combien ?
Nous étions quatre personnes, membres du groupe « Keur Gui ».