À Abidjan, les ambassadeurs préparent leur «résistance»

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Le Canada et la Grande-Bretagne rejettent le renvoi par Gbagbo de leurs représentants.

Entretenir des relations diplomatiques avec une République à deux chefs d’État ne constitue pas, sur le terrain, une gymnastique extrêmement simple. C’est pourtant à cet exercice que se préparent les grandes chancelleries occidentales en Côte d’Ivoire. Depuis l’élection présidentielle du 28 novembre, le pays dispose à sa tête de deux présidents rivaux. Le premier est Alassane Ouattara: il a été déclaré élu par la commission électorale indépendante, dont les résultats ont été certifiés par l’ONU; il a été reconnu comme le président légitime de Côte d’Ivoire par la totalité des pays de l’UE, par les États-Unis et le Canada, ainsi que par la grande majorité des États africains. Le problème est qu’il est enfermé, sur la lagune, avec 500 de ses partisans, dans l’hôtel du Golf -protégé en permanence par les forces de l’ONU- et que son pouvoir ne s’exerce pas au-delà des 14 hectares du parc de l’hôtel. Le deuxième président est Laurent Gbagbo, qui, ayant refusé de reconnaître sa défaite, s’accroche à son palais présidentiel, d’où il continue à commander l’armée, la police, et une administration civile continuant à fonctionner cahin-caha.

Procédure d’agrément
Le Canada et l’Angleterre ayant donné leur agrément à deux nouveaux ambassadeurs nommés par Ouattara, et ayant prié les anciens ambassadeurs ivoiriens de quitter Ottawa et Londres (dans un «délai raisonnable» que les usages diplomatiques établissent à un mois), le ministre des Affaires étrangères de Gbagbo a publié une note de réciprocité s’appliquant aux ambassadeurs canadien et britannique accrédités à Abidjan. Le Britannique, étant en résidence au Ghana voisin, s’abstiendra donc désormais de se rendre en Côte d’Ivoire, où le gouvernement Gbagbo ne lui garantit plus l’immunité. Isabelle Massip, ambassadrice du Canada, qui, elle, réside à Abidjan, n’a aucunement l’intention de quitter le pays, car ce serait obtempérer à l’invitation d’un gouvernement «illégitime». N’ayant pas encore reçu de lettre de l’administration Gbagbo, elle continuait hier à se déplacer normalement entre sa chancellerie et sa résidence. Si on commençait à lui faire des difficultés aux barrages de police, elle se retrancherait dans sa résidence.

Ce scénario risque de s’appliquer très prochainement aux ambassadeurs de France et des États-Unis, pays qui ont entamé la procédure d’agrément de nouveaux ambassadeurs envoyés par Ouattara. Jean-Marc Simon, l’ambassadeur de France, a fait son choix: il s’installera à la Résidence de France, très vaste villa en bordure de lagune, et qui dispose de 800 mètres de murs mitoyens avec… le palais présidentiel, où réside Laurent Gbagbo. L’ambassadeur des États-Unis a, lui, opté pour une installation permanente à la chancellerie, à 400 m de l’hôtel du Golf.

La chancellerie et le consulat français continueront à fonctionner normalement, car on n’en est pas encore à une situation de «rupture des relations diplomatiques». Jean-Marc Simon recevra ses collaborateurs et ses visiteurs à la Résidence -située à plus de quatre kilomètres en voiture de la chancellerie. Toutes les semaines, il rendra visite au président Ouattara, seul chef d’État reconnu à Paris. Un hélicoptère du dispositif Licorne de l’armée française le prendra sur la pelouse de la Résidence, pour l’amener à l’hôtel Sebroko, siège des forces de l’ONU, d’où un hélicoptère de l’organisation internationale l’amènera à l’hôtel du Golf.

Du temps du président Houphouët-Boigny, un tunnel secret reliait le palais présidentiel à la Résidence de France. À la fin des années 1990, le président Bédié le fit murer. Une simple paroi de parpaings. Au cas où Laurent Gbagbo changerait d’avis et décidait de s’exfiltrer discrètement du pays, il pourrait facilement faire retirer les parpaings, passer chez l’ambassadeur de France, et embarquer dans un hélicoptère de l’armée française. Mais outre qu’il préférerait sans doute un refuge chez les Chinois ou les Russes, le président Gbagbo n’est pas du tout aujourd’hui dans un tel état d’esprit. Guère impressionné par cette gymnastique diplomatique, il joue tranquillement la montre, espérant sans doute qu’une autre crise africaine viendra détourner l’attention que porte actuellement l’Occident à la Côte d’Ivoire…

lefigaro.fr

1 COMMENTAIRE

  1. La Grande Bretagne et le Canada sont tout a fait mal avisés de protester et de dire qu ils ne reconnaissent pas la décision de Gbagbo de mettre fin a la mission de leurs ambassadeurs.

    Car en fait en ne reconnaissant plus Gbagbo comme Chef de l’ Etat ivoirien ils ont eux-mêmes mis fin automatiquement à cette mission.

    Ce qu’ ils peuvent faire s’ ils le souhaitent c’est reprendre une nouvelle procédure d’ agréation auprès de Ouattara afin d’ accréditer un nouvel ambassadeur avec de nouvelles Lettres de Créance ou notifier, sans solennité supplémentaire, s’ il s’ en contente, la poursuite auprès de lui de la mission du même ambassadeur que celui anciennement désigne auprès de Gbagbo.

    Et il appartiendrait des lors au Gouvernement Ouattara de prouver son effectivité en permettant dans les faits l’ accomplissement de cette mission c’ est a dire en premier lieu de l’ accueillir, de la pourvoir de nouveaux locaux au cas fort probable ou le Gouvernement Gbagbo empêcherait le déroulement de la mission sur le territoire qu’ il contrôle.

    Dans l’immédiat cela ne peut se faire que sur le territoire de la République du Golf ou le territoire de tout autre Etat étranger qui l’ accepterait a titre non résident.

    Il n’ y a vraiment pas lieu d’ ouvrir une controverse là-dessus ni. Devrait-on avoir a rappeler a des pays de tradition diplomatique fort ancienne les principes et les rouages les plus élémentaires de la diplomatie.

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