Décidément, l’affaire Segura refuse de se faire ensevelir dans les décombres de l’oubli. Elle resurgit encore à la faveur de la correspondance que la Coalition «Bennoo Siggil Senegaal» a adressée, le 11 février dernier, à la Commission nationale de lutte contre la non-transparence, la corruption et la concussion, non sans évoquer les lois et autres articles en la matière. Par Daouda GBAYA
L’affaire avait défrayé la chronique. Aujourd’hui, l’affaire Alex Segura, du nom de l’ex-représentant du Fonds monétaire international(Fmi) au Sénégal que le président de la République aurait tenté de corrompre en lui remettant une mallette d’argent en devises composées de 100 000 euros et 50 000 dollars, soit l’équivalent d’environ 90 000 000 francs Cfa, est jetée dans les limbes. Et c’est pour ne pas faire passer cette «grave atteinte aux règles de bonne gouvernance par pertes et profits» par les autorités sénégalaises, qui «comptent sur la faculté d’oubli» des Sénégalais, que Bennoo Siggil Senegaal (Bss) avait saisi la Commission nationale de lutte contre la non-transparence, la corruption et la concussion (Cnlcc). Dans une lettre datée du 11 février dernier dont Le Quotidien détient copie, 23 signataires de partis membres de Bennoo mettent les autorités de ladite commission devant leurs responsabilités en invoquant la loi n°2008 du 24 novembre 2003. Cette loi qui institue cette commission dispose en son article 2, 3e tiret, qu’elle est chargée «de recevoir les réclamations des personnes physiques ou morales se rapportant à des faits de corruption ou de délits connexes».
Mieux, ajoute Bss, le règlement intérieur de la Cnlcc, en son chapitre 2 article 23, dispose que «sous réserve des cas où elle se saisie d’office, la commission statue sur les cas de non-transparence, de corruption ou de concussion à la suite des réclamations effectuées dans les conditions prévues par les articles 245 et suivants du présent règlement». Donc, «la réclamation s’entend ici de toute demande adressée à la commission relativement aux faits de non-transparence, de corruption et concussion».
Autant de dispositions qui, selon l’opposition, justifient que des investigations soient menées. Ces dispositions l’obligent à donner suite à la présente lettre. Cela permettra de «donner un sens et une portée à la lutte contre le fléau de la corruption qui gangrène le développement des pays pauvres et pour promouvoir les principes de la bonne gouvernance publique et privée».
Dans la lettre, Bss n’a pas manqué d’indiquer le nom des personnes qui pourraient être auditionnées pour la «manifestation de la vérité». Et de citer Abdoulaye Wade, président de la République, le colonel Bara Cissokho, aide de camp du chef de l’Etat, Alex Segura, agent du Fmi aujourd’hui en poste à Washington, Valeria Fichera, représentante résident du Fmi à Dakar.
Pour rappel, le 25 septembre 2009, Alex-Segura, s’apprêtant à quitter définitivement le pays, était l’hôte du président de la République. Au moment de prendre congé, une mallette bourrée d’argent (90 millions) lui a été remise. Une fois à Barcelone, l’argent, dit-on, a été restitué aux autorités sénégalaises par le canal de l’ambassadeur du Sénégal. L’affaire ayant fait grand bruit, le ministre de la Communication, Moustapha Guirassy, avait rendu public un communiqué pour déclarer que «le gouvernement du Sénégal n’est ni de près ni de loin, mêlé à l’affaire». Il sera démenti par le Fmi qui, dans un communiqué, confirma l’existence de la remise de la mallette et sa restitution à l’Etat du Sénégal. Avant de demander des «explications» au chef de l’Etat. Ce que ce dernier n’a pas tardé à faire. Dans un communiqué du 27 octobre, Me Wade avait reconnu avoir remis un «cadeau» à l’ex-fonctionnaire résident du Fmi et que c’est son aide de camp, le colonel Bara Cissokho, qui s’est «trompé sur le montant» initial. Mais une enquête diligentée par le Fmi désignera le président de la République comme étant le seul responsable dans ce qu’il est convenu d’appeler le Seguragate.
AFFAIRE ALEX SEGURA – WADE : Bennoo saisit le Commission nationale de lutte contre la corruption
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