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AIMER MASLA : Les tyrannies du Sénégal virtuel par A. Aziz Mbacke Majalis

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Ne sommes-nous pas entrain de transposer, sans le savoir, nos traditions de masla et de défanté dans le monde virtuel ? Surtout à l’aune de certaines pratiques et attitudes assez singulières de nombre de nos sœurs sur Facebook dont nous avons pris récemment connaissance.
En effet, il semblerait que beaucoup de celles qui aiment une publication ne le font souvent que par simple masla. Si si, sérieux. Pour simplement éviter d’être catégorisée parmi les « noon » (ennemies) qui n’aiment pas sincèrement la posteuse. D’où cette exclamation surprenante qu’il nous est arrivé d’entendre d’une cousine : « Ah ! Kou doul aimer sama photo, manit dou ma meusseu aimer sa photo, mou dieekh ! ». Ou ces réflexions pleines d’amertume et de dépit : « Diw deh massoula aimer samay publications. Massouleena commenter. Pourtant guiss na ko deh ! Man maa ko neekhoul kham na…» Il est alors très facile d’imaginer la frustrée scrutant soigneusement et régulièrement la liste des j’aimeurs pour dénicher un éventuel like repentant de la perfide criminelle 😐 Xalaass !
Cette problématique (des « détails de femmes ») peut devenir si sérieuse au point même de détériorer ou d’envenimer des relations entre amies ou même la stabilité des couples. Incitant souvent les femmes mariées, intuitivement conscientes de cette transposition sociologique, à être les premières à aimer les publications de leur belle-famille et autres proches du mari. Même si celles-ci peuvent être quelques fois hyper « niakk khorom » ou contraires à leurs propres visions. Yoonou diamm soriwoul. Té, comme l’on dit, soukk dou la térée yobbou say oom.
Pour « defar seen seuy », les pauvres épouses – ndeysaan – sont ainsi obligées d’aimer (un j’adore en cœur rouge, même non convaincu, étant de rigueur), de commenter et de partager les photos de leurs ndieukés (souvent bari histoires), beaux-frères et amis de monsieur. Sous peine de potentielles représailles (psychologiques ou réelles). Avec cette même logique impitoyable des terangas et autres ndawtal qui peuvent tout raser sur leur passage. Absolument tout.
Les anniversaires sont devenus une redoutable illustration de cette nouvelle tyrannie des « khew ». Tellement les posts de « Tay la tay », « Dou ma khaar ba minuit », « Wakh diou bari diarou ko », agrémentés des plus belles photos de l’anniverseuse sont devenus une obligation canonique (fardul ayn). Gare à celle qui n’aura pas remboursé le ndawtal virtuel, soigneusement retranscrit dans le cahier de facebook, que l’on avait reçu lors de son « BuzzDay ». Les « merci ma puce », en guise de ndokalé sa wàll, et autres commentaires des amies ndeye-dikké, viendront raffermir ces mbootaay improvisés de j’aimeuses entretenant de solides et impitoyables relations de aimerlanté.
Il arrive même que ces nouveaux et non moins passionnants phénomènes socio-virtuels s’immiscent dans les « defanté » et « gaarouwaalé » entre coépouses connectées au même mari. Si si, sérieux. Ainsi en est-il, avons-nous appris de bonne source, de certaines publications qui n’ont pour effet que de « nakharal » la rivale honnie, en termes de « kheuppanté asip » et de « dagg kholam ak samay sagnsé » (quitte même à se 360tiser à outrance, ou à publier lou nior ak lou nioroul), pour montrer que « maa fi nékk » et que Monsieur le mari « sama yeuf la ».
Thiey Yalla !
Des « sannanté tarak » virtuels qui peuvent atteindre des sommets incroyables, avec les innombrables détails, du genre « lou takh nga aimer lii wala laa », « lou takh aimer woo laa wala lii » etc., germes potentiels de divorces et peu maîtrisables par les hommes, souvent dépassés par le niveau extrême de détails microscopiques dans lequel leurs douces moitiés, apparemment, se complaisent. D’où cette nouvelle crainte : autant de plus en plus de couples se forment désormais sur les réseaux sociaux, autant il risque de s’y défaire beaucoup plus dans le futur.
En effet, l’un des avantages de Facebook est qu’il permet à de plus en plus de célibataires de se mettre en valeur dans le marché de l’offre et de la demande de maris, régi par la bourse fluctuante des mariages virtuels. Tout en permettant aux divorcées de « dem défarouwaat » pour « nakharal » à distance leur ex-mari et coupables ndieukés, par des selfies sophistiqués et triés sur le volet, avec l’objectif militaire de le sanctionner et lui faire regretter amèrement sa forfaiture. Attitudes faisant ainsi des réseaux le nouvel espace public, la « rue mondiale » où se nouent et se dénouent désormais, devant une assistance internationale, la plupart des conflits personnels.
À chaque fois donc que tu verras une de tes amies enlever subitement, dans son nom de profil, toute référence à son mari (comme une Fatou Cheikh Diop redevenant mysterieusement une sobre Fatou Diop), n’aie aucun doute, le couple bat de l’aile, s’il n’est pas encore complètement carbonisé.
Quand tu remarques qu’unetelle n’aime plus systématiquement les posts d’une autre telle et ne les commente plus, c’est officiel, am na lou leen diakhassé. Seytaané fa diaar.
La même chose pour les partages intempestifs de citations « gaarouwaalé » sur son mur. Genres : « Dans la vie, les vrais amis sont khaw ma lan ak lan », « Celui qui t’aime vraiment nangam sangam ». Pourquoi pleurnicher devant le monde entier pour les épreuves dont Seul ton Seigneur peut réellement te sauver ? Compte d’abord sur toi-même, sur ta volonté personnelle. Qu’est-ce que les autres ont à voir dans tes affaires personnelles ?
Et le fameux soutoureu dans le néegou sey dans tout ça ? Que fait-on, de nos jours, du sens de la dignité (ngor), de la retenue (am sago) et de la discrétion ?
Il est apparemment temps que nos sociologues se penchent sérieusement sur ce Sénégal virtuel qui est entrain de refaçonner profondément nos réalités…
A moins qu’il faille sérieusement envisager d’exclure un de ces jours les sénégalaises des réseaux sociaux pour am jàmm.
A. Aziz Mbacke Majalis

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