Depuis Sao-Tomé où je me trouve avec des femmes engagées, les résultats de Podor sont perçus comme un coup de force, une injustice face à laquelle nous devons réagir.
Le cas de Podor doit interpeller toutes les femmes du Sénégal qui doivent se mobiliser pour dénoncer, ce qui semble être un programme délibéré de destruction de l’élite féminine.
Aïssata Tall Sall fait partie de ces femmes qui ne doivent leur réussite au plan professionnel et politique qu’à leur propre capacité, ce qui est le résultat d’un caractère bien trempé et non compatible avec la compromission de quelque nature que ce soit.
Le mouvement social féminin, s’il est conséquent, doit aussi se pencher sur les cas de ces femmes, qu’elles soient militantes ou pas, car leurs succès comme leurs échecs ont des retombées sur le combat des femmes.
Il est donc venu l’heure de construire ce mur de défense pour toutes les femmes victimes d’un système, qui silencieusement est entrain de s’installer au Sénégal, et pouvant anéantir tous les efforts des luttes féminines, depuis Ndaté Yalla Fall et Soukeyna Konaré, qui ont obligé la France à accepter que les citoyennes du Sénégal puissent voter au même titre que celles originaires de la métropole, en passant par celles de l’Union des Femmes Sénégalaises (UFS) comme Arame Tchoumbé Samb, Aida Sarr, ainsi que les porteuses de pancarte (véritables artisanes de cette journée et pourtant laissées dans l’ombre) et toutes celles qui ont donné leur part pour l’acquisition de notre indépendance. Il faut aussi penser au travail des générations de femmes qui se sont consacrées à un travail de longue haleine qui a abouti à la loi sur la parité.
Afin que tout ces efforts ne soient pas anéantis, les sénégalaises doivent se mobiliser pour servir de bouclier à toutes celles qui mènent un combat juste, toutes celles qui, dans leur parcours méritent le respect, l’estime et l’appui de tous les sénégalais.
Reprenant la théorie de Mao Tsé-toung sur l’encadrement des villes par la campagne, nous disons qu’il faut un encerclement des politiques par les femmes de la société civile, pour les amener à entendre raison, pour leur imposer le respect des femmes de valeur dans leurs partis et dans l’espace politique en général.
Au moment où les politiques ont décidé de manière cynique de ne pas respecter les lois de la République, en refusant d’appliquer le principe de la parité dans les bureaux des conseils municipaux, on ne doit pas s’étonner d’une tentative d’ôter à Aïssata sa victoire ; mais ce combat ne doit pas être son combat elle toute seule, mais celui de toutes les femmes et de tous les démocrates. Car ce qui est entrain de se dessiner est lourd de danger pour les femmes, en atteste l’évolution des nominations aux postes de responsabilité (12,8% en 2012 à 8,8% en 2014), et qui si la tendance actuelle se poursuit va consacrer l’exclusion des femmes de qualité des espaces décisifs de la gouvernance de la République bien sur qu’il y en aura toujours, mais quelles femmes.
Nous avons besoin de figures comme Aïssata Tall Sall et Aida Mbodj. Elles font partie de celles qui vont prouver dans cinq ans que la place des femmes dans la gouvernance locale est non seulement légitime mais aussi utile à la société, car comme le disait Aïssata le 8 mars 2013 à l’université Gaston Berger « Quand les femmes accèdent au pouvoir c’est pour faire de résultats et la preuve de leur capacité … ». Ce qui est le cas de la quasi-totalité de toutes celles qui ont géré les collectivités locales.
Aïssata Tall a réussi à se bâtir une image de respect et d’admiration pour tous les sénégalais. Ni l’éthique, ni la décence ne voudraient que cette victoire lui soit volée.
Fatou SARR
Présidente du
Caucus des Femmes Leaders