«J’habitais Guediawaye à Daroukhane (banlieue dakaroise). Un quartier où je suis bien connu. Ma famille y réside, mais je n’ai plus de contacts avec elle. La délinquance, c’est pendant mes études que je l’ai connue. Finalement, au collège, en classe de Troisième, j’ai claqué la porte pour devenir charretier. Ce n’était pas facile de voir ma famille sombrer dans la pauvreté. J’ai commencé par de petits vols, puis j’ai intégré une bande pour m’attaquer aux gens la nuit. En plus des agressions, il m’arrivait d’affréter, la nuit, ma charrette pour «visiter» les enclos. Je ne peux dire combien de fois j’ai escaladé un mur d’une maison la nuit avant de me retrouver dans une chambre au moment où l’occupant ou les occupants dorment profondément. Il m’arrivait certes de rater mon coup, mais le plus souvent, je réussissais à prendre quelque chose que j’allais ensuite brader à vil prix. Le prix importait d’ailleurs peu pour moi, du moment que cela ne m’appartenait pas. Pour me donner du courage, je n’hésitais pas à me doper. C’est ainsi que j’ai découvert l’alcool, puis la drogue. A l’occasion, il m’arrivait, ivre que j’étais, de m’attaquer aux membres de ma famille. Allez-y à Guédiawaye et demandez à mes parents et à mes frères et sœurs. Ils savent de quoi je parle. Je me battais avec eux. Finalement, personne n’a été surpris, lorsque la police m’a arrêté. C’était à la suite d’un vol commis avec violence. J’ai été jugé et condamné à un mois ferme. Aujourd’hui, j’ignore si ma famille m’a pardonné. A mes camarades qui sont restés dans le «milieu» à Guédiawaye, je leur demande de me rejoindre dans ce centre. Ils savent qu’en son temps, nous étions plus dangereux qu’eux. Je leur dis qu’il est possible de changer. L’Etat doit également jouer sa partition s’il veut convaincre ces jeunes et venir ainsi à bout de l’insécurité.»
L’Observateur