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Alternance AN 10 * I – Le conte d’un changement de régime : Dixième anniversaire de l’Alternance politique ; Le jour où le Sénégal renaissait à la démocratie

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Lorsque le 19 mars 2000, le candidat du FAL (Front pour l’Alternance) Abdoulaye Wade réussit à déboulonner le candidat du PS (Parti socialiste) Abdou Diouf à l’issue du second tour de la présidentielle, une page entière de l’histoire du Sénégal était tournée. L’événement est d’autant plus historique que les Socialistes ont régné sans partage à la tête du Sénégal depuis son accession à l’indépendance et que l’alternance s’est déroulée dans un esprit démocratique exemplaire. Retour sur les péripéties d’un événement démocratique fondateur.

« Il faut le réveiller, dites lui que c’est le Président de la République qui veut lui parler. C’est très important ! » Quelques heures plus tard, il revient à la charge : « Je vous félicite Abdoulaye, vous avez gagné l’élection présidentielle ! » A peine le président en exercice, Abdou Diouf, eût prononcé ces quelques mots le lundi 20 mars que les médias les firent se répandre comme une traînée de poudre à travers le pays et dans le monde entier. A l’issue du second tour de l’élection présidentielle le 19 mars 2000, Abdoulaye Wade, après 26 ans d’opposition politique, venait de remporter avec ses alliés du FAL (Front pour l’Alternance)- 58,49 pour cent contre 41,51 pour cent pour le PS-, l’élection présidentielle la plus surveillée et disputée de l’histoire politique du Sénégal. Nous sommes en 2000 et depuis l’indépendance du Sénégal survenue en 1960, le pays est gouverné par le régime socialiste, l’UPS (Union progressiste sénégalaise) qui devient le PS (Parti socialiste) en 1976 Senghor jusqu’au 31 décembre 1980, puis sous Abdou Diouf jusqu’en mars 2000. Le climat sociopolitique est tendu et après une quarantaine d’années de régime socialiste ponctuées par les douloureux Programmes d’ajustement structurel (PAS) imposés par les institutions de Bretton Woods, la majorité des Sénégalais n’aspirent qu’au changement. Un mot d’ordre que relaye la coalition de partis politiques autour du PDS (Parti démocratique sénégalais) dont le slogan lui et son leader et fondateur a toujours été le Sopi. En dépit de la tension qui entoure cette présidentielle dont l’enjeu- apporter l’alternance politique au sommet de l’Etat- l’exacerbe au plus haut point, tous les dispositifs semblent être en place pour un bon déroulement du scrutin : matériel électoral en place, un électorat motivé, présence des observateurs internationaux…, le tout sous la supervision de l’organe en charge de l’organisation technique des élections, l’Onel (Observatoire national des Elections). Signe que les temps ont changé, pour la première fois de son histoire, le PS (Parti socialiste), en dépit de la coalition de partis qui soutiennent son principal challenger, Abdoulaye Wade candidat du CA 2000, est mis en ballotage faute d’avoir obtenu la majorité (51 pour cent) dès le premier tour du 27 février 2000. La Commission nationale de recensement des votes, présidée par le 1er Président de la Cour d’Appel, Arona Diouf proclame les résultats provisoires du 1er tour à l’issue de deux jours de délibération : Abdou Diouf arrive en tête avec 41,33 pour cent suivi d’Abdoulaye Wade avec 30, 97 pour cent. Ils sont talonnés par le candidat de l’Alliance des Forces de Progrès (AFP), Moustapha Niasse avec 16, 76 pour cent et Djibo Leity Ka de l’Union pour le Renouveau (URD) avec 7, 09 pour cent. Ils sont suivis de loin par Iba Der Thiam (1,20 pour cent) ; Ousseynou Fall (1, 12 pour cent) ; Cheikh Abdoulaye Dièye (0, 97 pour cent) et Mademba Sock (0,57 pour cent). Rebelote le 19 mars 2000. A l’issue d’une campagne consistant en des promenades à travers la ville- les fameuses « marches bleues » – dignes des Péripatéticiens, et s’acharnant à rallier à la cause sopiste les ultimes sceptiques, La CA 2000 redescend dans l’arène afin de croiser le fer avec le candidat socialiste. A peine les bureaux de vote eurent-ils fermé leurs portes que les résultats commencèrent à tomber. Média chaud par définition, les radios privées distillent les résultats les grandes tendances qui se dessinent en temps réel ! Une première dans l’histoire du Sénégal. Une à une, les grandes villes (Dakar, Pikine, Rufisque, Kaolack, Saint-Louis…) ainsi que des fortins naguère réputés inexpugnables tombent une à une dans l’escarcelle de la coalition de l’opposition dont le porte-étendard est le PDS. Le peuple retient son souffle, le changement tant espéré depuis 40 ans est en passe de se réaliser sous ses yeux ! A 20 heures, le sort en est jeté. La victoire de la Coalition Sopi ne fait plus aucun doute. Les principaux établissements humains situés dans les zones rurales historiquement acquises aux Verts virent cette fois-ci au bleu (le Sud, le Sud-Est, le Cayor, le Bassin arachidier…). Tous les militants du Sopi ainsi que ceux des principaux partis qui constituent le FAL (AFP, LD MPT, PIT, AJ PADS…) convergent vers le Point E au domicile du Secrétaire-Général du PDS Abdoulaye Wade transformé en quartier général de la Coalition. L’atmosphère est survoltée partagée entre des militants chavirant presque de bonheur et l’état-major politique de la Coalition procédant au monitoring des derniers résultats qui affluent et au recomptage des voix.

Le raz-de-marée bleu

Au fur et à mesure que les minutes, les heures s’égrènent et que les résultats parviennent de tous les coins et recoins du pays, chacun se rend à l’évidence d’une réalité dont il n’entrevoyait l’accomplissement que dans un rêve : la Coalition Sopi est en train de remporter l’élection présidentielle du 19 mars 2000. Dans le camp opposé, coup de tonnerre et stupeur, le sol semble se dérober sous les pieds du baobab socialiste. Tous les dirigeants du PS se sont alors emmurés dans une posture mutique. Lorsqu’au matin du 20 mars, le président Abdou Diouf téléphone à Wade pour le féliciter de sa brillante victoire, il coupe court à toute tergiversation et la messe est désormais dite pour les Socialistes. Le geste, aussi élégant que rare dans une Afrique hélas accoutumée aux lendemains électoraux dantesques, est salué dans le monde entier. Tard dans la soirée, le vainqueur de la présidentielle Abdoulaye Wade, flanqué de ses compagnons de la Coalition FAL Moustapha Niasse, Abdoulaye Bathily, Landing Savané, Iba Der Thiam et Mademba Sock, savoure sa victoire et la qualifie « d’étape historique dans la libération du Sénégal ». Le sentiment de délivrance et la liesse qui animent le peuple sénégalais n’a d’équivalent que la nature historique de l’alternance politique qui est en passe de survenir à la tête de l’Etat du Sénégal. Pendant ce temps, les messages de félicitations saluant ce changement en douceur, affluent du monde entier. S’ouvre alors une longue séance de visites de Wade dans les différentes familles religieuses du Sénégal afin de les remercier mais aussi de solliciter leurs prières et bénédictions. Dans la nuit de lundi à mardi 21 mars, le président nouvellement élu fonce vers Touba, y passe la nuit afin de recueillir, dit-il, « les prières et bénédictions de son guide spirituel le Cheikh Serigne Saliou Mbacké, alors Khalife général des Mourides. Sur le chemin du retour, il passe par Louga pour une visite de courtoisie et de remerciements à Adja Coumba Dème, mère du président de la République sortant Abdou Diouf. Celle-ci lui avait adressé ses vives félicitations par téléphone dès l’annonce de sa victoire. Après l’étape lougatoise, cap sur sa ville familiale, Kébémer. Moments d’émotion et de recueillement : Il s’incline sur la tombe de ses parents puis s’ébranle vers le domicile familial ou une foule monstre l’attend. C’est le retour de l’enfant prodigue. Un des temps forts de l’après- 20-mars 2000, le jeudi 23 mars, le président Diouf reçoit au Palais de l’Avenue Léopold Sédar Senghor, Abdoulaye Wade. Dans une ambiance de lendemain de Révolution, il est 10 h 30 mn, la Mercedes de Wade, immatriculée DK 0355 M, se range devant le bâtiment du Conseil des ministres. Wade en sort, il est accueilli par Abdou Diouf accompagné par son Chef du Protocole, Bruno Diatta, son Chef de Cabinet Talla Cissé ainsi que de son Conseiller en Communication Cheikh Tidiane Dièye. Sourires et chaleureuses accolades comme on peut le deviner. A l’issue de deux tours de pendule dans la salle d’audience de la présidence, pendant lesquels le président en exercice et celui fraîchement élu ont évoqué divers dossiers tels qu’entre autres, la démocratie sénégalaise, sa situation économique ainsi que son avenir dans le monde…, Wade déclare à l’intention de la presse nationale et internationale : « le président Diouf a accepté de me représenter les 3et 4 avril 2000 au Caire ou se tiendra un important sommet OUA-UE ». La prestation de serment ainsi que la passation de service auront lieu le samedi 04 avril, a-t-il ajouté. Lundi 27 mars, Wade reprend reprends son bâton de pèlerin en rendant visite au Khalife général des Layènes, Mame Alassane Laye à Yoff puis le Cardinal Hyacinthe Thiandoum, Archevêque de Dakar en sa résidence des Badamiers à Dakar. Le 29 mars, il est reçu tour à tour à Tivaouane par Mouhamadou Mansour Sy, Khalife général des Tidianes et à Ndiassane par son Khalife général Cheikh Bouh Mohamed Kounta. Le 1er avril 2000, une date-repère désormais dans l’histoire du Sénégal, Abdoulaye Wade prête serment pour entrer dans son costume officiel de 3e président de la République du Sénégal. Pour la première fois, la cérémonie ne se déroule pas derrière la solennité des lourds battants de l’Assemblée nationale ou du Conseil Constitutionnel. Dans son adresse solennelle devant plus de soixante mille personnes, il justifie ainsi son choix démotique – au sens premier du mot -porté sur le Stade Léopold Sédar Senghor : « la vérité est que nous avons été très tôt taraudés par l’exigence pressante de la participation directe des Sénégalaises et des Sénégalais au premier acte qui consacre leur choix du Président de notre pays. Il devient alors évident que nos concitoyens, à défaut d’accéder à l’Assemblée nationale dont la salle offrait un plus grand espace que le Conseil constitutionnel, feindraient de croire que la proximité leur assurerait la participation et se masserait devant l’Assemblée nationale ». 16 h 30 mn. Le cortège présidentiel arrive devant le salon d’honneur du stade Léopold Sédar Senghor. Dans un costume bleu marine impeccable sur une chemise bleu ciel assortie d’une cravate colorée, Abdoulaye Wade accompagné de sa femme et de ses deux enfants, reçoit les honneurs militaires sur fond de la musique de la fanfare des forces armées sénégalaises. 17 h 15 mn. Wade prend place sur l’estrade aménagée pour la circonstance devant la tribune couverte, en face des cinq Sages du Conseil constitutionnel qui doivent recevoir son serment. Le temps semble avoir suspendu son vol et en dépit de la solennité de l’instant, on a du mal à étouffer la clameur de l’assistance. Devant le président du Conseil constitutionnel Youssou Ndiaye ainsi que son vice-président Ibou Diaité, les juges Marie-José Crespin, Mamadou Lô et Amadou So, par la formule “sacrée” tirée de l’Article 31 de la Constitution, Abdoulaye Wade « jure devant la Nation sénégalaise de remplir fidèlement la charge de président de la République du Sénégal, d’observer et de faire observer scrupuleusement les dispositions de la Constitution et des lois (…) ». Lorsqu’à ce moment précis, les juges constitutionnels ont accepté son serment, Abdoulaye Wade est ainsi installé dans ses nouvelles fonctions de 3e président de la République du Sénégal. Au milieu des centaines de milliers de Sénégalais qui ont été témoins de la prestation de serment, des dizaines de chefs d’Etats, de gouvernements et d’altesses royales (Omar Bongo, Alpha Omar Konaré, Yaya Jammeh, Blaise Compaoré, le prince Moulaye Rachid, le Premier ministre du Cap-Vert Carlos Vega…) ont tenu à honorer de leur présence la cérémonie. A l’issue des adresses du président du Conseil constitutionnel Youssou Ndiaye et du président de la République Abdoulaye Wade à l’endroit des citoyens sénégalais, l’Hymne qu’il a dédié à l’Afrique est entonné par la chorale des Martyres de l’Ouganda et mis en musique par le commandant Fallou Wade de la Musique principale des Forces armées sénégalaises. Alors que les rideaux se sont baissés sur la cérémonie de prestation de serment, le cortège présidentiel s’ébranle vers le Palais présidentiel de l’Avenue Senghor Ou l’attend le président sortant Abdou Diouf et toute sa famille afin de recevoir les insignes symboliques présidentiels et ainsi parachever le solennel régalia républicain. Accueilli dans la plus grande convivialité par Diouf au Palais, le désormais nouveau locataire des lieux se fait arborer par le Grand Chancelier Doudou Diop, l’insigne de Grand Croix de l’Ordre national du Lion sous forme de collier et de cordon. Après une dernière entrevue avec le président sortant, Abdoulaye Wade accompagne Diouf qui passe, pour une dernière fois, en revue la garde présidentielle familièrement appelée Garde rouge puis lance au chef du détachement : « je vous souhaite beaucoup de chance ! » Instants poignants, instants historiques, sous les vivats des derniers militants, inconditionnels et de la foule, il s’engouffre dans sa berline et son cortège toutes sirènes hurlantes déchirent la quiétude la nuit dakaroise. Une page de l’histoire du Sénégal vient de se fermer. Presque simultanément, une autre s’ouvre. Retour dans les salons présidentiels, l’eternel Bruno Diatta, pour la photo, enlève au nouveau président ces insignes et colliers, sauf la rosette, comme lui avait conseillé Diouf. Fin de la séance photo, la presse se retire, le président en exercice Abdoulaye Wade, entouré de sa famille, mais seul face à son destin, s’apprête à écrire après Léopold Sédar Senghor et son prédécesseur Abdou Diouf, une nouvelle page de l’histoire du Sénégal.

Amadou Oury DIALLO

LES PENSÉES POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DE Me WADE : Un destin africain

Le président Wade a la particularité d’appliquer depuis dix ans les idées qu’il défend depuis la veille des indépendances africaines. C’est avant tout, un grand universitaire qui accède au pouvoir au Sénégal le 19 mars 2000. Il y a l’articulation de plusieurs disciplines autant dans son parcours académique que dans les propositions qu’il fait pour le Sénégal et l’Afrique.

« C’est un homme pluriel qui parvient à se dédoubler pour conquérir plusieurs espaces différenciés », résume le ministre-conseiller Amadou Lamine Faye et évoque « un homme total ». Certes, les gens, qui ne le comprennent pas, le prennent pour « un expert en tout », là où ils devaient observer la pluridisciplinarité de l’homme d’Etat. « A son niveau, il y a une unité des sciences pour aborder la réalité sous tous ses aspects », une démarche compréhensible et qui était courante chez les premiers chercheurs africains « extrêmement motivés dans la recherche de la connaissance globale » pour déconstruire les thèses colonialistes, très souvent à soubassements racistes. Dans sa thèse de 1959, le Pr. Abdoulaye Wade s’opposait déjà à la balkanisation et à l’émiettement en micro-Etats de l’Ouest-africain. Il posait d’emblée le débat sur la pertinence de la réalisation d’un marché sous-régional intégré et en faisait la condition « essentielle d’un développement accéléré ». Mais c’est dans le fameux « Un destin pour l’Afrique » que le président Wade explicite son projet. « Un destin pour l’Afrique » est le plaidoyer d’un homme politique pour un projet d’avenir visant une Afrique unifiée et capable de relever les défis d’ordre écologique, comme la lutte contre la sécheresse, ou économique, comme le développement durable, ou même culturel. Il préconise des stratégies conciliant modernisme et tradition. Cet ouvrage est une profession de foi en un avenir libéré des démons du passé. La prise de conscience des femmes et des hommes de leur propre histoire doit être le levain qui les poussera à se mobiliser autour d’objectifs permettant de parvenir à créer un continent riche de l’apport fécond de ses filles et de ses fils. Pour M. Amadou Lamine Faye, « il a eu raison sur les premiers dirigeants africains qui ont expérimenté le marxisme-léninisme au début des indépendances. Très vite, le président Wade s’est fortement démarqué des enseignements du célèbre barbu de Trèves. Dans le chapitre III, intitulé Problématique de l’idéologie et de la doctrine, de la dernière édition de « Un destin pour l’Afrique », l’opposant d’alors (l’ouvrage a été publié la première fois en 1989 lors d’une retraite politique) disséquait le terme idéologie et en faisait la genèse. Il démontrait que toute idéologie renferme ses mythes. Pour le Marxisme, il s’agit de la dictature du prolétariat et de la solidarité prolétarienne, tandis que l’idée de l’État-patron sous-tend l’idéologie socialiste et le libéralisme met en exergue l’harmonie des intérêts.

Wade Formula

Le Dr Pierrette Herzberger-Fofana, lectrice avertie de l’universitaire, souligne que, partant de ces idéologies qui se sont développées dans des sociétés occidentales, Me Wade s’interroge sur la place de l’Afrique qui cherche sa voie dans ce dédale politique. Déjà, dans le document de travail qu’il utilisait lors du colloque de Berlin, l’auteur traçait une nette ligne de démarcation entre idéologie et doctrine. Les intellectuels africains ont, pour la plupart, épousé la théorie marxiste, alléchante et réconfortante. Ce fut notamment le cas des premiers théoriciens qui ont pour noms, par exemple : Lamine Senghor et Tiémoko Garan Kouyaté. Avec Léopold Sédar Senghor, la notion de socialisme prend une nouvelle dimension et devient le « socialisme africain ». « Il a le premier prévenu de l’inéluctabilité de la faillite socialiste. Le référentiel a échoué, tout comme les praticiens qui l’ont testé. Ces thèses n’ont pas été validées par l’Histoire et les professeurs Cheikh Anta Diop et Wade voient leurs thèses confirmées, en minorant l’idéologie pour s’approprier une démarche scientifique », ajoute le ministre Lamine Faye, premier auteur à se pencher sur « le Sénégal sous Wade ». Alors que le président Senghor était surtout poète et homme de Culture, en montrant que le Noir avait une parfaite intelligibilité de la langue française et pouvait exprimer sa beauté nègre, l’homme de Kébémer, lui, a inscrit son action sur le front du développement ; en clair, il propose de rompre la dépendance économique des Etats africains et propose une alternative à l’ordre post-colonial. La bataille pour le Nepad en est une parfaite illustration : « les Africains pensent par eux-mêmes leur propre développement. » Me Wade, en tant qu’homme de science, pour le ministre Lamine Faye, se distingue par son aptitude à « prendre ses distances avec des normes jugées absolues et à relativiser les modèles. » Surtout que Me Wade a été au cœur du combat panafricaniste comme l’atteste le long développement qu’il accorde à la question dans ses recherches et ses premiers engagements politiques ; l’un des tournants de sa vie a sans doute été l’échange épistolaire qu’il a entretenu avec Nkwame Nkrumah en 1957 et sa participation au congrès des organisations panafricanistes de Londres. En juillet 2002, la mise en place de l’Union africaine à Durban, prélude aux Etats unis d’Afrique et l’élaboration du Nepad concrétisent l’un des rêves de l’homme politique. Dans le chapitre intitulé « La stratégie des Etats unis d’Afrique », partant des citations de Kwame Nkrumah et de Julius Nyerere, fondateurs de conscience parmi les pères, Me Wade propose des stratégies de création d’un espace géopolitique et économique qui inclurait la Diaspora comme sixième région, avec un gouvernement à l’échelle continentale composé de 9 ministères, d’une monnaie unique et de voies de communication reliant le Nord au Sud et l’Est à l’Ouest de l’Afrique. Les « libertés » intellectuelles qu’il se permet se comprennent au regard du fait qu’il n’est pas un « élément » de l’Enfom, cadre par excellence de reproduction de l’ordre colonial. « Il est issu du milieu académique universitaire où la règle est la critique scientifique pour conquérir le réel, pour connaître ses mécanismes et ses lois », fait remarquer M. Faye. Quid des comparaisons entre les trois grandes figures intellectuelles du Sénégal indépendant ? « Le discours de Senghor a été un plaidoyer pour le maintien d’un lien très fort avec la puissance coloniale ; Cheikh Anta Diop, lui, était aux antipodes de ces préoccupations. Il a été d’un apport inestimable pour la reconnaissance de la conscience historique noire. Son apport ? Il a restauré la vérité historique. Et si cette question n’avait pas été réglée, on n’aurait pas eu la possibilité cognitive et épistémologique pour aborder la problématique du développement endogène. Ce que fait justement le président Wade », résume le chercheur. Comment le modèle wadien se décline-t-il ? Il consiste d‘abord à identifier les secteurs prioritaires et stratégiques. L’auteur développe dans « Un destin pour l’Afrique » la doctrine du travail qui constitue la charpente de son projet de société, une idée qui s’accorde avec ses convictions religieuses, d’où sa sentence : « Plus tu travailles, Plus vite tu vas Sur le chemin du Paradis ». (p.93)

Cette doctrine du travail va de pair avec celle d’un État libéral interventionniste qui concilierait libéralisme économique et solidarité. En un mot, l’État jouerait un rôle régulateur en créant les conditions pour une économie florissante où la concurrence et l’initiative auraient la place qui leur revient de droit. Dans un ouvrage intitulé « Abdoulaye Wade, sa pensée économique : l’Afrique reprend l’initiative », Mamadou Alpha Barry présente au grand public la pensée économique du président Wade : il analyse l’économie ouest-africaine à la veille des indépendances, dresse un tableau clinique de l’Afrique, quarante ans après et montre comment, grâce au Nepad, le continent peut sortir de la crise et reprendre l’initiative. C’est une synthèse de la pensée économique du président Wade, à partir de sa thèse de doctorat en Sciences économiques sur « L’économie de l’Ouest-africain : unité et croissance ».

L’Afrique, terre d’avenir

« Gabegie, pléthore de personnel, incompétence dues aux interventions politiques dans la nomination des cadres et dirigeants, absence d’esprit de concurrence », minent encore nos administrations. Me Wade est surtout préoccupé par la réduction « des gaps historiques. Et surtout, il continue à chercher, en dépit des lourdeurs de la charge présidentielle. Face à l’évolution incontrôlée du prix du baril de pétrole, il prévient que cette situation mènera vers l’impasse et propose la « Wade formula » Pt – 29) Qt = St, et initie une politique hardie de promotion des biocarburants. Par ailleurs, le président Wade soutient qu’une Mondialisation dans laquelle l’Afrique n’aurait pas sa place est illusoire. « A l’horizon du 21ème siècle, seule l’Afrique garde encore les meilleurs potentiels qui font d’elle la zone d’opportunités la plus attractive pour toutes les grandes économies. Au plan démographique, vers 2050, l’accroissement de notre population nous rendra incontournables. L’Afrique, sans être saturée, peut avoir plus (sic) que le cumul démographique des actuels pays émergents. La tranche d’âge (0-14 ans) la plus importante se trouve en Afrique, dans un espace globalement encore inexploité. Mais on ne pourra user de cette future position sans l’unité politique du continent », toutes idées brassées par le président Wade, selon M. Amadou Lamine Faye, qui relative toutefois la portée du Nepad en reconnaissant « un échec dans le mangement, pas la pertinence de l’idée ».  Sources : Un destin pour l’Afrique, Karthala, Paris, 1989. Me Abdoulaye Wade Le Sénégal sous Wade. Rupture avec les modèles d’adaptation, Les Éditions de l’Hémicycle, mars 2005. Par Amadou Lamine Faye Comprendre l’Alternative wadienne. Le juste équilibre entre priorité stratégique et priorité conjoncturelle, Édition du Panafricaniste, 2008. Par Amadou Lamine Faye Mamadou Alpha Barry, Abdoulaye Wade sa pensée économique : L’Afrique reprend l’initiative, Hachette, Essais, 2006

Par Samboudian KAMARA

De l’Alternance au nouveau projet de gouvernance Mamadou Diop « Decroix » : « Ce que Wade avait de plus… »

« Qui dit mieux ? » Mot de la fin pour un entretien. Propos qui ponctue un regard posé sur un très long compagnonnage avec le candidat Me Abdoulaye Wade porté au pouvoir le 19 mars 2000. La solitude des geôles, les temps de braises dans la rue comme dans les studieuses soirées d’élaboration des stratégies de lutte, les alliances et mésalliances… Dix ans, c’est le temps d’un bilan. C’est aussi, pour le Secrétaire général d’And-Jëf/Pads et Coordonnateur de l’Alliance « Sopi pour Toujours », Mamadou Diop « Decroix », un retour sur les coulisses du processus ayant conduit, au bout de quatre décennies, à l’évènement d’une Alternance démocratique. Des visages, des attitudes, des complicités, des vertus fédératrices : le projet de gouvernance, porté par Me Wade, s’est appuyé sur ces liants pour devenir un contrat avec les Sénégalais. Dans cette autre longue marche, les trajectoires personnelles épousent parfaitement les idées et aspirations dominantes d’un pays traumatisé, à l’époque, par les politiques d’austérité et la pauvreté galopante.

Un regard sur le rétroviseur. Quels ont été les moments les plus palpitants dans le processus politique ayant mené à l’avènement de l’Alternance ?

Le processus politique ayant mené à l’Alternance est un processus cumulatif. L’on peut considérer qu’à partir du moment où le régime de Senghor a été contesté et qu’une alternative à ses orientations et choix politiques a été mise en avant par des Sénégalais, le processus ayant conduit à l’Alternance a démarré. L’on pourrait même suggérer que ceux qui avaient voté NON au référendum de septembre 1958 et qui ont poursuivi cette ligne politique après l’indépendance en 1960 sont des acteurs de l’Alternance. C’est le cas du Pai. Ceux qui ont été massacrés par dizaines aux Allées du Centenaire en 1963 parce qu’ils s’opposaient au régime en place sont aussi, de mon point de vue, des acteurs du processus ayant mené à l’Alternance. Le Pra-Sénégal s’était distingué à cette période, de même que le Bms. Ainsi, chaque décennie a eu ses moments palpitants dans ce processus cumulatif. La décennie 60 a eu ses moments palpitants en mai 68. J’étais jeune élève au lycée Van-Vo, actuel Lamine Guèye et c’est Mai 68 qui m’a, en quelque sorte, propulsé, sans que je m’en rende compte, sur le champ politique. L’université de Dakar est fermée suite à une contestation scolaire et universitaire sans précédent. Les centrales syndicales s’impliquent en décrétant la grève générale, le pays est paralysé, les fondements du régime chancèlent. La réaction du pouvoir est foudroyante. Salomon Khoury meurt sur le campus. Des centaines d’étudiants sont arrêtés et emmenés dans les camps militaires pour y être parqués. Les étudiants non Sénégalais, qui venaient de tous les pays francophones d’Afrique, jusqu’au Tchad et au Cameroun (il n’y avait pas encore d’université dans nombre de ces pays), sont renvoyés par charters chez eux. Les leaders syndicaux sont déportés à Dodji dans le département de Linguère sous surveillance militaire. L’Etat de siège est décrété.

Dans la décennie 70, il y a eu la naissance du Parti démocratique sénégalais. Pour les années 80, le multipartisme intégral. Vous les avez vécus comment ?

La décennie 70 a eu ses moments palpitants. Ceux qui ont vécu la naissance du Parti démocratique sénégalais (Pds) avec Abdoulaye Wade en 1974 vous diront que ce fut un moment palpitant. Nous autres qui étions dans la clandestinité, chassés de l’université, enrôlés de force dans l’Armée, pourchassés et régulièrement envoyés en prison, avons aussi connu nos moments palpitants au cours de cette décennie. La décennie 80 a connu ses moments palpitants, particulièrement en 1988 (février-mars-avril-mai), lorsque le principal adversaire du président Diouf à l’élection présidentielle, Wade en l’occurrence, a été arrêté et jeté en prison avec ses principaux lieutenants dès la fin du scrutin, donc avant même la proclamation des premiers résultats. Le peuple descend dans la rue, notamment ses forces juvéniles des zones urbaines et péri urbaines pour exiger la libération de Wade et demander même son installation au palais présidentiel. Des dizaines de gens sont arrêtés et envoyés en prison au cours de ces quatre mois.

D’autres temps forts dans la marche vers l’Alternance ?

La décennie 90 aussi a connu ses moments palpitants, notamment la fin de l’année 96 et toute l’année 97 lorsqu’à la suite du simulacre d’élection locale de novembre 1996, l’opposition que nous constituions a exigé une réforme profonde du code électoral et du système électoral dans son ensemble, sous la houlette du Collectif des ‘19’, acronyme des 19 partis que nous étions. Ou encore lorsque le candidat de la Coalition Alternance 2000 (CA2000), Me Abdoulaye Wade, Secrétaire général national du Pds est rentré en octobre 1999 d’un long séjour à l’étranger qui avait fait penser qu’il avait définitivement renoncé à ses ambitions de diriger le pays. L’on dit qu’un million de personnes sont sorties l’accueillir à l’aéroport et l’accompagner jusqu’à sa résidence au Point E. Début 2000, nous avons aussi connu des moments palpitants avec la marche du Frte (Front pour la régularité et la transparence des élections) en janvier. Cette marche était destinée à obtenir l’audit du fichier électoral après avoir obtenu le départ du président de l’Observatoire national des élections (Onel). L’Onel a été institué en 1997 dans le cadre de la lutte du Collectif des ‘19’ évoquée tantôt. Cette marche, qui a regroupé des dizaines de milliers de Sénégalais prêts à tout pour des élections libres et honnêtes, a constitué un tournant décisif dans la situation politique du pays.

Vers la fin des années 90, vous avez pris une part active dans la lutte pour la transparence des élections, au sein du Frte. Racontez-nous les instants décisifs, les mesures et acquis démocratiques qui ont créé les conditions d’un scrutin sincère… Il convient de rappeler qu’après la crise de 88 que j’ai mentionnée tout à l’heure, le National democratic institute (Ndi), proche du Parti démocrate américain nous avait beaucoup aidés à trouver les conditions favorables à une rencontre des partis politiques pour rechercher un consensus autour du système électoral. Ainsi, en 1991 et 1992, le juge Kéba Mbaye, désigné par le président Diouf et accepté par les autres acteurs politiques, entouré de quelques experts triés sur le volet dans le cadre d’une commission restreinte appelée ‘commission cellulaire’, nous avait permis, grâce à son expertise avérée et ses talents multiples, d’obtenir effectivement un code consensuel après plusieurs semaines d’âpres discussions émaillées d’empoignades et de confrontations qui pouvaient laisser penser à tout moment que l’objectif ne serait pas atteint. Concernant le Frte, (Front pour la régularité et la transparence des élections), dont j’ai été le concepteur, il m’était clairement apparu, à l’analyse, en ma qualité de chargé des Elections à AJ/Pads, que la CA2000, autour du candidat Wade, avait réuni les facteurs nécessaires à sa victoire, mais qu’il restait sans doute une stratégie pour sécuriser cette victoire. Défi énorme car il y avait, à côté de la CA2000, d’autres leaders qui tenaient à se présenter à l’élection présidentielle. Et le pouvoir de l’époque, notamment ses secteurs les plus fascisants, était capable de confisquer le suffrage des électeurs et de justifier son coup, à l’extérieur du pays, par la dispersion de l’opposition. En accord avec quelques amis des autres partis dont Modou Amar de l’Urd, j’ai proposé une réunion de tous les partis au domicile du candidat de la CA2000, Abdoulaye Wade, au Point E, pour leur tenir le langage suivant : « Nous avons aujourd’hui plusieurs candidats potentiels pour la présidentielle de l’An 2000. Si nous nous engageons dans le désordre dans cette bataille, nous serons tous perdants parce que nos suffrages seront confisqués. Créons donc, ensemble, les conditions qui empêcheront quiconque de confisquer les suffrages qui se porteront sur nos candidats respectifs. Les résultats des législatives de 1998 ont montré que le Parti socialiste (parti au pouvoir à l’époque), avec 50,17% des suffrages, pouvait perdre en 2000 devant l’opposition qui, toutes listes réunies, avait obtenu 49,83% des suffrages à ces législatives de mai 98. Comment créer ces conditions ? C’est de nous regrouper dans un front commun pour contrôler le processus électoral et sécuriser le vote des citoyens ». Telle est l’origine du Frte.

Et vous êtes aussitôt passés à l’action ?

Aussitôt dit, aussitôt fait, en dépit de quelques réticences qui insistaient encore sur la nécessité de la candidature unique. Nous nous sommes donc mis immédiatement à quadriller le pays avec des tournées partout pour organiser nos gens, exactement comme l’Alliance Sopi pour Toujours est en train de le faire aujourd’hui. Ce front nous a aussi permis d’organiser et de réussir la marche du 02 janvier 2000 pour l’audit du fichier électoral. Enfin, l’existence du Frte avait permis de gommer les aspérités entre partis de l’opposition et a facilité les retrouvailles pour le deuxième tour. En effet, la mise en place du Fal (Front pour l’Alternance), au deuxième tour, a permis de regrouper, pour l’essentiel, les forces de cette opposition, notamment la CODE2000 (Coalition de l’Espoir 2000) de Moustapha Niasse, autour de Me Abdoulaye Wade, candidat de la Coalition Alternance 2000, arrivé en tête face au candidat du Parti socialiste, le président sortant Abdou Diouf.

1988, c’est la grande contestation pour fraudes. 1993, l’histoire des ordonnances. 1996, le Congrès dit « sans débats » du Parti socialiste et les locales controversées, des urnes s’étant retrouvées dans la rue. 1998, le Renouveau qui affaiblit le Ps. 1999, Moustapha Niasse qui lance son appel : « J’ai choisi l’espoir ». Comment avez-vous vécu ces moments ?

J’ai rappelé certains de ces moments au début de cet entretien. Je ne les reprendrai pas tous mais, pour faire bref, je dirai que l’alternance a été rendue possible grâce à la combinaison des quatre facteurs suivants : Premièrement : le peuple voulait réellement le changement. Les résultats de 1998 l’avaient prouvé. Ps : 50,17 % ; Oppositions réunies : 49,83 %. Deuxièmement : l’opposition a su dépasser ses clivages pour offrir aux électeurs, en dépit des candidatures multiples, grâce au Frte (Front pour la régularité et la transparence des élections), un visage uni. Troisièmement : le Ps était divisé et affaibli, comme vous l’avez dit, par le départ successif de deux de ses barons les plus importants : Djibo Leity Kâ et ses compagnons en 1996 qui créèrent, en 1998, l’Union pour le renouveau démocratique (Urd) et Moustapha Niasse et ses amis, en 1999, pour créer l’Alliance des forces de progrès (Afp). Ces départs ont été incontestablement des facteurs non négligeables de la défaite du Parti socialiste en l’an 2000. J’ai toujours dit que ce parti ne serait vaincu dans des élections que le jour où l’on aura le Ps face au Ps. C’est en quelque sorte ce qui s’est passé entre 1995 et 2000.

Vous êtes vous dit : « l’Alternance, c’est possible » ? Avec quelle organisation ?

C’est ce que je viens de vous dire. Nous étions unis et le Ps était divisé. La Gauche a cheminé avec Me Wade en 1988 et 1993. En 2000, la candidature unique a été sentie comme une nécessité historique. Pourquoi le choix porté sur Wade ? Déjà, en 1983, le Pit, avec Amath Dansokho, avait soutenu la candidature de Wade. En 1988, la Ld et le Pit ont soutenu Wade. En 1993, le Pit avait soutenu le candidat du Ps. Mais en 1998, la Gauche avait réussi à se retrouver dans le cadre de ce que nous appelions le Pôle de Gauche. J’avais en effet convaincu Amath, au cours d’une mission parlementaire sur St-Louis, de réunir Landing et Bathily chez lui pour formaliser quelque chose. Ensuite, tout le monde voyait bien que la victoire était à portée de main avec les résultats que je vous ai rappelés tout à l’heure mais à condition que nous soyons unis. Il fallait s’unir derrière quelqu’un. Le seul critère, alors, était le critère électoral. Il fallait s’unir derrière le plus fort et c’était, de loin, Me Wade.

Après « analyse concrète de la situation concrète », comme vous dites dans la Gauche, quels avantages avez-vous trouvés, en termes d’image et de leadership, à Me Wade et que les autres, y compris vos candidats potentiels, n’avaient pas ?

Je ne peux pas parler au nom des autres mais, me concernant, c’est lorsque nous avons séjourné ensemble en prison, en octobre 1985, à l’issue d’une marche anti-apartheid en soutien au peuple d’Afrique du Sud en lutte, que j’ai appris à connaître l’homme. Pour la petite histoire, cette année-là, nous avons passé la fête de la Tabaski en prison. Cela fait donc un quart de siècle. Plus tard, en 1990, au mois de février plus exactement, fut porté sur les fonts baptismaux la Conacpo (Conférence nationale des chefs de partis de l’opposition). De février 1990 à mars 1991, nous nous sommes retrouvés tous les mercredi soir chez le président Mamadou Dia, à la Zone B, parfois jusque très tard, pour élaborer et conduire des stratégies de lutte contre le régime en place. J’ai découvert chez le président Wade un homme affable, fécond au sens où il a toujours énormément d’idées sur les questions à l’ordre du jour et il les dispense généreusement. J’avais aussi noté qu’il travaillait énormément. Lorsqu’une question n’avait pas pu être élucidée et que nous étions obligés de nous séparer tard le soir, il était fréquent que le matin de bonne heure, un porteur vienne vous déposer une proposition que Me Wade avait élaborée dans la nuit et saisie dans son ordinateur avant de l’imprimer lui-même pour l’envoyer aux autres. Je respectais énormément cette puissance de travail, cette disponibilité. J’avais aussi été frappé par sa flexibilité. Je suis toujours étonné quand on présente le président comme quelqu’un qui ne croit qu’à son intelligence propre et qui n’écoute personne. Ce n’est pas l’expérience que j’ai de lui, bien au contraire. Il écoute tout le monde. Et, quand on le convainc, il change d’avis sans aucune difficulté. Même devenu président de la République, j’ai été plusieurs fois témoin de moments où un collaborateur du chef de l’Etat défend avec opiniâtreté son point de vue et où, au bout du compte, le président conclut en ces termes : « Vous ne m’avez toujours pas convaincu mais puisque vous tenez à votre idée, alors faites ». Donc, au total, Wade synthétise, dans une large mesure, les qualités attendues d’un leader. Il écoute beaucoup. Il cherche toujours les synthèses dynamiques. Il n’est pas dogmatique mais ouvert ; il travaille dur.

C’est tout ce qu’il a de plus par rapport à d’autres leaders ?

Je pense que ce qu’il avait de plus sur beaucoup d’autres leaders, c’était cette capacité à sentir, au quart de tour, le pouls du peuple sénégalais. A être en osmose avec celui-ci. Quand il s’adresse aux populations, il a toujours les mots justes que les gens retiennent et qu’ils vont rapporter dans leur entourage. « Ablaay wax na dëgg » (Abdoulaye a vu juste) est un leitmotiv que l’on entend souvent chez les populations, après ses sorties. Enfin, je pense que, pour lui, la politique est un humanisme. Il sait oublier ; il a l’art de mettre à l’aise son interlocuteur, en somme de couper la distance… C’est peut-être la raison pour laquelle, à l’époque, on l’avait choisi. En tout, nous étions déjà assez proches.

Était-il difficile, à des partis ayant mené des luttes dans la clandestinité et dont les membres ont été traqués et emprisonnés, de se ranger derrière un Libéral face à des Socialistes ?

Libérale, socialiste, les doctrines existent. Mais nous devrions nous méfier des épithètes et des étiquettes en nous efforçant ici, en Afrique, d’en découvrir les contenus au regard de nos urgences et de nos exigences. Qui étaient au pouvoir au temps des Programmes d’ajustement structurel du Fmi et de la Banque mondiale ? Les Socialistes ou plutôt ceux qui se réclamaient du Socialisme. Ce sont ces programmes qui ont liquidé l’agriculture, déstructuré l’industrie, anémié l’Ecole et finalement déresponsabilisé l’Etat. Le coût que le pays et le peuple ont payé, pendant toute la décennie 80 et la première moitié de la décennie 90, jusqu’à la dévaluation du franc Cfa en 1994, a été exorbitant à tous égards pour des résultats plus que maigres à l’arrivée. En effet, après ces programmes supposés devoir nous installer sur les rampes du développement, nous sommes plutôt passés à des programmes de lutte contre la pauvreté. Ça dit tout ! Wade, à l’époque, a critiqué ces politiques et revendiqué le rôle de l’Etat dans l’édification économique du pays. Dans « Un destin pour l’Afrique », publié en 1989, il s’est posé la question suivante : « Qui va construire les routes, les écoles et les hôpitaux si vous éliminez l’Etat ? ». De fait, celui qui revendique la doctrine libérale censée accorder peu de place au sort du plus grand nombre, se retrouve en train de défendre les populations contre des politiques ultra libérales mises en œuvre par des socialistes.

A défaut de prendre le pouvoir par vous-mêmes, l’Alternance politique, en 2000, était-il un moyen de mettre en œuvre votre projet politique, économique et social ?

Le programme d’une coalition politique est toujours l’expression d’un compromis, d’un consensus minimum. Le programme de la CA2000 a été élaboré par le Pôle de Gauche et préfacé par Abdoulaye Wade. Encore une fois, Wade aborde largement les questions d’alliance dans ses ouvrages et donne beaucoup d’exemples sur l’Europe où des socialistes et même des communistes se regroupent pour former des gouvernements. Au demeurant, ici au Sénégal, la Ld, le Pit, le Pds et le Ps ont partagé le même gouvernement et donc exécuté le même projet. Par conséquent, il nous faut nous écarter des schémas stéréotypés et des clichés.

Quels axes de convergence avez-vous trouvés entre les idées de Gauche et la pensée politique et économique de Me Wade, un Libéral qui affirme un fort penchant social ?

Vous me donnez l’occasion de rebondir sur l’interview que le président a accordée récemment à des journalistes dans le cadre de l’émission « La tribune ». Wade, répondant à une question du genre de celle que vous venez de poser, a affirmé avec force qu’il a fait infiniment plus de social que les Socialistes au cours de ses dix ans à la tête du pays. Et tout le monde en convient. Je voudrais insister particulièrement sur le fait que ceci n’est pas un hasard car, n’oublions pas que le programme fondamental du Parti démocratique sénégalais, en 1974, était fondé sur la doctrine socialiste travailliste. Et ce n’était qu’une continuité d’ailleurs parce que, dans ses années d’étudiant, Wade avait déjà fait une publication sur la doctrine mouride du travail. Devenu président de la République, il a lancé le slogan : « Travailler, encore travailler, toujours travailler ». Ensuite, puisque vous parlez de Gauche, je rappellerai que lorsque le Pds a obtenu des députés en 1978 pour la première fois, Wade a revendiqué les bancs de Gauche à l’hémicycle. Senghor a revendiqué la même chose et un âpre débat s’en est suivi. Mais, puisque Senghor avait le pouvoir, il a imposé les bancs de Droite à Wade dans le cadre de sa loi sur les courants politiques. Après l’Alternance, lorsque Wade a eu la majorité à l’Assemblée, les libéraux occupent les bancs de Gauche à l’hémicycle. Voilà l’Histoire. Je pourrai encore poursuivre les exemples… Donc, il n’y a pas lieu de batailler sur les étiquettes et les épithètes mais sur les réponses concrètes qui sont apportées aux problèmes concrets qui se posent au pays et à ses habitants et à l’Afrique et ses populations.

Au sein de la CA 2000 puis du Fal, quels ont été les apports de la Gauche aux Libéraux ?

Certains parlent d’une meilleure organisation… Ce serait trop prétentieux de ma part de parler en ces termes, mais c’est vrai que les organisations qui ont connu la clandestinité ont acquis un sens aigu de l’organisation. Toutefois, il y avait une symbiose qui faisait le charme et la force de la coalition.

La Gauche avait-elle comme arrière-pensée de soutenir le candidat Wade et de le remplacer assez vite ? Est-ce la raison des ruptures successives ?

Je ne peux parler au nom de toute la Gauche qui était avec Wade. Je ne peux pas savoir ce qui peut se passer dans la tête de tel ou tel leader. Mais je pense qu’il y avait quelques problèmes qui peuvent expliquer les ruptures. D’abord, une compréhension non partagée de comment une coalition au pouvoir doit travailler. Ainsi, les uns pensaient qu’ils n’étaient pas suffisamment associés à la gestion du pouvoir, les autres considéraient qu’il s’agissait-là d’une volonté de confisquer le pouvoir à celui qui était élu par les Sénégalais.

Quelque temps après, il y a eu l’idée de la Direction politique unifiée. Les alliés ne sont pas tombés d’accord. Avec un recul de dix ans, était-ce nécessaire ?

En réalité, on a beaucoup épilogué sur la Direction politique unifiée (Dpu). Certains en ont même revendiqué la paternité. Pour ce que j’en sais, l’idée m’a été exposée par le président Wade dans son bureau plusieurs semaines ou mois avant qu’elle ne soit abordée dans la presse. Il est possible que, par la suite, le concept lui-même n’ayant pas été discuté, certains pouvaient ne pas partager la perspective de ce qui apparaissait comme un renforcement des alliés du président. Aujourd’hui, l’existence de l’Alliance Sopi pour Toujours, avec sa réunion mensuelle des leaders autour du président Wade, la répartition des tâches aux différents partis à travers les commissions techniques de l’Alliance, l’existence, parmi ces commissions, de celle chargée de la Veille politique, sont autant d’éléments qui vont dans le bon sens. J’ai toujours été d’avis et je l’ai toujours dit au président, qu’un organe de concertation politique est toujours nécessaire. Ma conviction est que si un tel organe existait, beaucoup de malentendus auraient été évités. Cela dit, n’y avait-il pas des agendas cachés ici ou là ? La politique est trop complexe pour autoriser des certitudes.

Comment avez-vous vécu la sortie du gouvernement des acteurs de l’Alternance comme Niasse, Dansokho et Bathily ?

Pour ne rien vous cacher, avec beaucoup de peine. J’en ai parlé dans mon livre mais je préfère ne pas m’étendre là-dessus. C’était une expérience inédite. Je suppose que, quelque part, l’on a pensé que les rapports entre leaders dans l’opposition devraient gouverner le travail à la tête de l’Etat ; autrement dit, que toute décision du chef de l’Etat devait être soumise à l’approbation des alliés. De même, des frustrations ont pu naître du fait que des questions qui pouvaient faire l’objet de concertations sans que cela ne constitue un empiétement sur les prérogatives du président de la République n’ont pas été soumises effectivement à concertations. Ce sont des jeux de pouvoir qui existent partout.

Allié du Pds, avez-vous craint un remake du syndrome Ps, avec les épisodes Idrissa Seck et Macky Sall ?

Non ! Pas du tout ! Idrissa Seck est revenu et les contextes sont bien différents. Là-bas, c’était un parti à bout de course après 40 ans de gouvernance, qui sortait de deux décennies d’ajustement avec leur lot de souffrance et de paupérisation des populations. Un parti qui, au surplus, était profondément divisé avec refondateurs, rénovateurs, barons et j’en passe… Ici, la décennie Wade, en dépit d’une conjoncture internationale unanimement reconnue comme défavorable, a été marquée par des succès que personne ne conteste dans l’ensemble des secteurs de l’activité nationale. Naturellement, nous venons de très loin et c’est pourquoi, malgré les énormes pas qui ont été faits, les difficultés continuent de nous défier. Mais la direction est bonne et le peuple, dans sa sagesse légendaire le sait et le montrera le moment venu. Aj, sous votre houlette, reste ancré dans la majorité. Politiquement, comment vivez-vous, aux côtés du président Wade, cette fracture ?

La page que vous évoquez est tournée. Les missions que l’Alliance vient d’effectuer dans quarante départements du pays ont clairement montré la mobilisation et la prégnance du parti dans tout le pays. Les missionnaires ont, en effet, rencontré, de Saraya à Ranérou, de Goudomp à Kanel ou de Goudiri à Oussouye, des militants Aj/Pads debout, dont des maires, des présidents de conseil rural, des sénateurs des députés, des membres du Conseil économique et social et des centaines de conseillers municipaux, ruraux et régionaux. Cela suffit. La cause est entendue depuis longtemps.

Il y a maintenant l’Alliance Sopi pour Toujours dont vous êtes d’ailleurs le coordonnateur. A l’horizon 2012, sous quels aspects apparaîtra votre engagement aux côtés du chef de l’Etat ?

Ne conjuguez pas le verbe au futur ! Notre engagement est à conjuguer au présent. Au passage, vous me permettrez de remercier, du fond du cœur, le président pour m’avoir proposé comme coordinateur de notre alliance et aux leaders des partis d’avoir accepté cette proposition. Comme vous l’avez constaté, nous sommes en train de mailler le territoire national avant d’engager le travail dans l’émigration. Dans chaque département, chaque commune ou commune d’arrondissement, et dans chaque Communauté rurale, se dresseront des directoires de l’Alliance qui fédéreront toutes les forces qui soutiennent le président Wade dans ce qu’il fait pour le Sénégal et pour l’Afrique et qui portent sa candidature pour 2012.

Vous avez soutenu Wade sur la base d’un projet politique, économique et social. Quelle lecture faites-vous de sa mise en œuvre en dix ans ?

Cette interview ne suffirait pour une réponse exhaustive. La Convention nationale de notre parti, qui se réunit en juin, à l’occasion du premier anniversaire de notre congrès extraordinaire, y répondra. Deux documents y seront présentés : l’un sera pour un plaidoyer pour la candidature ; nous y exposerons les raisons pour lesquelles nous pensons que Wade doit être réélu et l’autre sera une plate-forme pour une nouvelle offre politique prenant en charge les interpellations et les urgences de notre pays et de l’Afrique, en somme, pour un Sénégal émergent, dans une Afrique unifiée et occupant une place de choix dans les affaires du monde.

Pouvez-vous lire le bilan du président Wade en termes d’actifs et de passifs dans les domaines économique, politique, social, culturel, diplomatique et institutionnel ?

Comme dit tantôt, je vous renvoie à notre Convention nationale. Naturellement, comme vous le savez d’ailleurs et comme tous les Sénégalais le savent, dans tous ces domaines que vous évoquez, les acquis l’emportent de loin sur le passif.

Avez-vous l’impression que, malgré les difficultés, le Sénégal soit viable et respecté dans le monde ? Que reste-t-il à faire ?

Le président Wade, dès les débuts de l’Alternance, à la tête de la Cedeao, a conduit les processus qui ont permis d’éteindre les foyers de guerre civile en Côte d’Ivoire. Il a permis aux acteurs politiques de Madagascar de retrouver la paix civile et le chemin des urnes. Plus récemment, il s’est de nouveau porté sur le front mauritanien pour aider, de toutes ses forces, nos frères du Nord à retrouver la paix et la concorde. Aujourd’hui, il est à la tête de la Ummah islamique et continue d’être sollicité dans la sous-région pour la paix et la stabilité de l’Afrique de l’Ouest. Il a mené un combat opiniâtre sur le plan théorique, politique et diplomatique contre les vieilles thèses des institutions de Bretton Woods qui, aujourd’hui, acceptent de s’investir dans les infrastructures en Afrique et dans bien d’autres domaines naguère marginalisés. Il a gagné le respect et la considération de tous ses pairs africains. Le président Wade, qui reste très attentif à la qualité de nos relations séculaires avec la France, a su, dans le même temps, développer des relations de respect et de considération avec, à la fois, l’Administration Bush et l’Iran d’Ahmedinejade, avec Cuba, avec la Libye, avec Hugo Chavez, Lula da Sylva du Brésil ou encore Hu Jintao, président de la puissante Chine populaire qui a visité notre pays l’année dernière. Le tout sur la base de l’assumation courageuse et honnête de ses positions patriotiques, panafricanistes et pour la justice et l’équité dans les relations entre les nations. Qui dit mieux ?

Entretien réalisé par Habib Demba FALL

II – Les pas du système politique et institutionnel

Les réformes au Sénégal : La nouvelle peau d’un dispositif consensuel

En dix ans, le Sénégal a connu plusieurs réformes institutionnelles. Avant d’accéder au pouvoir, le président de la République, avait annoncé la suppression du premier Sénat dirigé par feu Abdoulaye Diack. Au cours de cette campagne électorale de février-mars 2000, l’opposition avait jugé inutile cette Chambre « de recasement » de dignitaires de l’ancien régime. Pour confirmer ses engagements, la suppression du Sénat a été l’une des premières mesures du nouveau gouvernement suivie de la dissolution de l’Assemblée nationale avec la convocation de nouvelles élections des députés. Le 7 janvier 2001, un projet de Constitution a été soumis à référendum au peuple sénégalais. C’est à la suite d’un large consensus des partis politiques et des membres de la Société civile que ce projet a été soumis au peuple. Au cours d’une rencontre dans la cour du Palais présidentiel, le chef de l’Etat s’était prêté à de nombreuses questions de citoyens sénégalais sur cette nouvelle Constitution. Un débat qui avait mis en vedette l’ancien président du Forum civil, Me Mame Adama Guèye. Dans le préambule de la nouvelle Constitution de 2001, il est rappelé l’attachement du Sénégal à ses valeurs culturelles fondamentales qui constituent le ciment de l’unité nationale. Tout en affirmant son adhésion à la déclaration universelle des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 et aux instruments internationaux adoptés par l’Organisation des Nations unies et l’Organisation de l’Unité africaine devenue Union africaine, notamment la Déclaration universelle des droits de l’Homme du 10 décembre 1948, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes du 18 décembre de 1979, la Convention relative aux droits des Enfants du 20 novembre 1989 et la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples du 27 juin 1981, le Sénégal a insisté sur son attachement à la transparence dans la conduite et la gestion des affaires publiques, ainsi qu’au principe de Bonne gouvernance. Cette nouvelle Constitution accorde également une bonne place à la femme. Dans plusieurs déclarations, le chef de l’Etat n’a jamais raté l’occasion de réaffirmer « qu’une Constitution n’est pas un texte ordinaire : c’est la Loi des lois ; l’acte solennel par lequel une société déclare les principes qui la fondent, qui la rassemblent et qui l’organisent ». Du référendum, il disait qu’un texte ne peut être changé si facilement d’où le choix populaire. Face aux cadres du Parti démocratique sénégalais (Pds), l’ancien ministre d’Etat, directeur de Cabinet du chef de l’Etat, Idrissa Seck, soulignait que « le projet de réforme constitutionnelle en circulation ne doit pas confiner notre réflexion », ajoutant que : « rien n’est figé. C’est seulement le produit de la réflexion d’experts ». Il disait « qu’une révision constitutionnelle, événement pas du tout courant, revêt un enjeu capital dans la vie d’une nation ». C’est cette nouvelle Constitution, qui avait décidé la réduction du mandat présidentielle de 7 ans à 5 ans avec la possibilité de se présenter pas plus de deux fois à l’élection. Deux ans après la présidentielle de 2007, une nouvelle révision ramène le mandat du chef de l’Etat de 5 à 7 ans. En Conseil des ministres, l’explication fournie est que cinq ans sont très courts pour un président élu de s’installer et prendre ses marques pour conduire sa politique. Dans l’histoire, le Sénégal n’a connu que deux référendums. D’abord, ce fut le cas le 28 septembre 1958, durant la période coloniale, pendant la période de la Loi Cadre, au moment où le général Charles se Gaule appelait à la création d’une Communauté franco-africaine. Cinq années après l’indépendance, pour mettre en place la IIème République sous Senghor. En cette date du 7 janvier 2001, le Oui avait largement remporté le vote avec un taux de participation de 66 %. Un galop d’essai concluant, avait dit le général Mamadou Niang alors ministre de l’Intérieur. La suppression du Conseil économique et social (Ces) dirigé par le Président Famara Ibrahima Sagna sera l’une des mesures du nouveau régime. Une nouvelle institution sera créée à la place avec le Conseil de la République pour les affaires économiques et sociales (Craes) qui a joué un rôle de médiateur dans plusieurs conflits entre travailleurs et employeurs. Il sera confié à Me Mbaye-Jacques Diop avant d’être dissout pour céder place quelques mois plus tard à un nouveau Conseil économique et social présidé par l’ancien maire de Saint-Louis, Ousmane Masseck Ndiaye. A l’Indépendance, le Sénégal se dotait d’une Cour suprême respectueuse pour avoir été dirigée par des magistrats de valeur comme les juges Isaac Foster et Kéba Mbaye, tous deux devenus magistrats à La Haye. Réputée comme une instance juridique de grande qualité, la Cour suprême céda la place après une nouvelle réforme de 1992 qui créa le Conseil constitutionnel, la Cour de Cassation et le Conseil d’Etat. En 2007, présidant une rentrée des Cours et Tribunaux, le chef de l’Etat, dans son intervention, annonça une nouvelle réforme qui consacre le retour de la Cour suprême. La réflexion engagée aboutira à cette nouvelle création confiée au magistrat Pape Ousmane Sakho. Enfin, la vice-présidence a été l’une des dernières créations. Depuis plus d’un an on attend la nomination officielle de celui ou celle qui va assister le chef de l’Etat dans son travail.

El Hadji Abdoulaye THIAM

La Constitution, ce socle si important

La Constitution est le socle sur lequel repose un pays. Sa modification nécessite des consultations au préalable. En 2000, après avoir pris l’engagement auprès des électeurs sénégalais de tous bords, Me Abdoulaye Wade avait promis d’apporter des réformes profondes de la Constitution. Chose promise, chose faite. Après plusieurs consultations avec les partis politiques, les différentes composantes de la Société civile, les enseignants des Universités de Dakar et Saint-Louis et même ceux établis à l’étranger, le président de la République décida de convoquer tout ce beau monde autour d’une table pour dégager les grandes lignes. Des Sénégalais de toutes les catégories sociales apporteront des propositions et suggestions pour le nouveau document. Une commission technique chargée d’élaborer la nouvelle Constitution fut mise sur pied sous la présidence du garde des Sceaux, ministre de la Justice d’alors Mme Mame Madior Boye, juriste de renommée. Plusieurs personnalités dont les professeurs Babacar Guèye, Pape Demba Sy, l’avocat et conseiller du président de la République, Me Madické Niang, le magistrat de carrière Taïfour Diop, etc. y ont siégé. Des contributions de haute facture ont été reçues de l’Assemblée nationale, du Sénat, du Conseil constitutionnel, d’organisations de la Société civile, d’Ong et plus particulièrement de particuliers comme feu Kéba Mbaye, feu Me Babacar Niang, Amsatou Sow Sidibé, Makhtar Diouf, Mouhamet Fall, Me Mamadou Diallo du barreau de Paris, etc. Par cet acte, le président de la République a voulu associer tous ceux qui de près ou de loin pouvaient apporter un plus à ce document si précieux pour une nation. En dix ans, plusieurs réformes ont été apportées, dans le but d’approfondir notre démocratie. L’une d’elles adoptée consiste à doter le Sénégal d’une vice-présidence qui assiste le chef de l’Etat.

El. H. A.THIAM

CA 2000, CPC, CPA, AST, BENNOO, ETC : La « real politik » efface les considérations idéologiques

De 2000 à nos jours, le Sénégal a connu plusieurs recompositions guidées par la réalité politique sur le terrain. Les considérations idéologiques n’ont pas pesé. Alliés hier, adversaires aujourd’hui. Depuis 2000, le Sénégal a vécu une intense recomposition politique. Laquelle est alimentée par les remous qui ont jalonné la vie politique du pays. Arrivé au pouvoir, en 2000 par une large coalition de l’opposition qui compte en son sein le Parti démocratique sénégalais (Pds), la Ligue démocratique, Mouvement pour le parti du travail (Ld/Mpt), l’Alliance des forces de progrès (Afp), le Parti de l’indépendance et du travail (Pit), le président de la République, Me Abdoulaye Wade, a d’abord vu son camp subir une mue. La première en date est le limogeage du Premier ministre, Moustapha Niasse, leader de l’Afp, en mars 2001. C’est le premier grand divorce entre Me Wade et ses alliés. Le départ de M. Niasse est intervenu deux mois avant les élections législatives de mai 2001. Mais cela n’a pas empêché le parti au pouvoir d’occuper la majorité des sièges au Parlement. Ce revers semble mettre la pression sur l’opposition. Même si elle rassemble de farouches adversaires en 2000, Moustapha Niasse et Ousmane Tanor Dieng notamment, l’opposition est contrainte à s’unir. Quelques jours après les législatives, 10 partis d’opposition s’unissent pour créer le Cadre permanent de concertation (Cpc). Pour riposter, 25 partis portent sur les fonts baptismaux la Convergence des actions autour du président de la République pour le 3ème millénaire (Cap 21) le 25 août 2001. Un moment de vérité arrive entre le Cpc et la Cap 21 avec les élections locales de 2002. Le duel tourne à l’avantage de la mouvance présidentielle qui remporte les scrutins locaux. Mais l’opposition parvient à contrôler quelques collectivités locales dont Ziguinchor, Tambacounda et Kédougou. Ces élections semblent consacrer la stratégie de résistance au sein du Parti socialiste. Depuis 2000, le Ps a subi des saignées. Face aux menaces nées des audits et aux appels de la mouvance qui théorise la transhumance politique, des barons socialistes rejoignent le Pds. Parmi eux, des figurent emblématiques dont Abdoulaye Diack, Sada Ndiaye, Adama Sall. Ce vent de transhumance a eu des dégâts collatéraux dans la mouvance présidentielle. Des querelles entre anciens et nouveaux vont naître. Plusieurs responsables libéraux si liguent contre le N° 2 du Pds Idrissa Seck soupçonné d’avoir mis en branle « un coup d’Etat rampant ». La presse parle d’une dualité au sommet de l’Etat. Idrissa Seck se serait également opposé à une entrée de Djibo Ka, militant de la social-démocratie et cofondateur du Cpc dans le gouvernement. Cette crise aboutit au limogeage d’Idrissa Seck alors Premier ministre du Sénégal, le 21 avril 2004. Il sera remplacé par Macky Sall. Ce dernier occupait les fonctions de ministre de l’Intérieur … La mouvance verra un autre départ après l’arrivée de Djibo Kâ et ses camarades : celui des ministres de la Ld/Mpt. C’était en mars 2005. Le pouvoir et l’opposition ont désormais en ligne de mire les élections législatives de 2006. Mais celles-ci n’auront pas lieu. Prétextant des inondations qui ont frappé le pays en septembre 2005, le président de la République a renvoyé ces joutes. Et cela en dépit d’une farouche résistance de l’opposition qui a crée en avril 2006, une nouvelle structure dénommée Coalition populaire pour l’alternative (Cpa) composée des partis d’opposition regroupés au sein du Cadre permanent de concertation (Cpc), du G10 et de la Ld/Mpt. L’objectif visé était « faire face à Wade » et de « lancer deux mois de lutte contre les dérives du régime de l’alternance ».

Boycott des législatives

Rendez-vous est donc donné en 2007. Les deux camps se remobilisent. Après la phase de résistance et restructuration, le Ps s’engage dans la reconquête du pouvoir. Il est poussé en cela par une jeune génération d’hommes et de femmes, mais aussi d’anciens soudés autour d’Ousmane Tanor Dieng. Mais l’unité du Ps sera minée par une crise. La révolte des « papys ». Un courant « Démocratie et solidarité » est née. Il est animé par Robert Sagna et d’autres figures socialistes dont Souty Touré, maire de Tambacounda. De l’autre côté, le Pds lançait l’assaut final contre son ancien N° 2 Idrissa Seck. Poursuivi pour « détournement de denier publics et d’attentat à la sûreté de l’Etat », Idrissa Seck sera traduit devant la Haute cour de justice et emprisonné le 23 juillet 2005. Il séjourne pendant 7 mois à la prison centrale de Reubeuss. La tension monte au fur et à mesure que 2007 pointe. Idrissa Seck va recouvrer la liberté. Le divorce est également proclamé entre le Ps et les animateurs du courant. Mais ces épreuves n’ont pas contribué à souder davantage les rangs de l’opposition. Au contraire, plusieurs candidatures sont annoncées à la présidentielle de 2007. Impossible d’avoir un candidat unique de l’opposition sous la bannière de la Cpa. Les nombreuses réunions au domicile d’Amath Dansokho n’y pourront rien. La pression des femmes non plus. La Cpa implose. L’opposition va aux élections divisée. Un avantage pour le candidat à sa propre succession, Me Abdoulaye Wade. Soutenu par une large coalition comptant une cinquantaine de partis politiques et plus de « 500 mouvements de soutien », le président Wade croise le fer avec une dizaine de candidats de l’opposition. Parmi ceux-ci son ancien homme de confiance Idrissa Seck. Il sort vainqueur de la présidentielle de 2007 dès le premier tour avec 55,86% des voix exprimées. Son plus proche rival, Idrissa Seck a obtenu 14,93%. Des contestations surgissent, malgré l’approbation des observateurs nationaux et internationaux. « Les irrégularités ne sont pas de nature à empêcher les sincérité du scrutin », affirmait la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’Homme (Raddho) dans une déclaration. L’opposition est loin d’être convaincue. Elle se mobilise et réclame une évaluation de la présidentielle avant de s’engager aux législatives du 03 juin 2007. « Avec les données, biométriques, il est impossible de frauder », soutenait le ministre de l’Intérieur, Me Ousmane Ngom. Pour certainement mieux faire face, l’opposition décide alors de créer un nouveau cadre d’expression : le Front Siggil Senegaal. Elle décide de boycotter les législatives du 03 juin. Ce qui semble être une aubaine pour les « petits partis politiques ». Ceux-ci se retrouvent au Parlement à l’issue du scrutin face à une écrasante majorité libérale. Même absente au Parlement, l’opposition représentative est loin de quitter l’espace politique. Elle annonce des « assises nationales ». Des organisations de la Société civile soutiennent son action. Ces consultations constituent un cadre pour proposer des changements au plan institutionnel, économique et social. Le pouvoir refuse d’y participer. Il demande à ses partenaires de ne pas s’y engager. Ces assises dureront plusieurs mois sous la conduite de M. Amadou Mactar Mbow, ancien directeur général de l’Unesco. La restitution des résultats des travaux a eu lieu avant les élections de mars 2009. Au moment où l’opposition organisait ses concertations, une autre crise éclate au sein du pouvoir. Tête de liste de la Coalition Sopi pour les élections législatives et ancien directeur de campagne de Me Abdoulaye Wade, le nouveau président de l’Assemblée nationale va devoir faire face à ses camarades. La décision de l’Assemblée nationale d’auditionner le président de l’Anoci à propos des fonds injectés dans l’organisation du sommet de la Oummah islamique est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Macky Sall sera éjecté de l’Assemblée nationale, malgré les médiations de plusieurs guides religieux et personnalités de la Société civile. Contre toute attente, il démissionne du Pds et de son poste de maire de la commune de Fatick.

Présidentielle 2012

Une recru de taille pour l’opposition. Le désormais ex-président de l’Assemblée nationale s’engage contre le régime libéral. L’Initiative citoyenne pour la République (Icr) est créée par M. Sall et d’autres forces hostiles à Wade dont Yonou Askan-wi née des flancs du Parti africain pour la démocratie et le socialisme, le Jef-Jel. Une fusion avec le Front Siggil Senegaal consacre la naissance de Bennoo Siggil Senegaal. L’opposition participe aux élections locales de mars 2009 sous la bannière de Bennoo. Son initiative connait un succès. L’opposition contrôle plusieurs collectivités locales à l’issue du scrutin de mars. Parmi celles-ci, de grandes villes dont Dakar, Pikine, Kaolack, Louga, Saint-Louis. Tirant les leçons de cette percée, le président Wade annonce la recomposition de son camp. L’Alliance Sopi pour toujours et créée. Elle regroupe toutes les sensibilités qui soutiennent Me Wade. Le Parti démocratique sénégalais devient Parti démocratique sénégalais libéral (Pdsl). La nouvelle entité a amorcé depuis quelques temps des renouvellements conduits par le chargé de la Propagande du Pds, Farba Senghor. L’Ast et le Pdsl ont pour mission d’accompagner le candidat, Me Abdoulaye Wade, à la « victoire » à la présidentielle de 2012. A la même période, Bennoo cherche une formule pour vaincre les libéraux. Une candidature unique ou plurielle ? Les positions sont partagées, même si tout le monde s’accorde pour dire qu’un candidat unique ferait l’affaire de l’opposition. Mais la réalisation d’une telle formule semble complexe. Les ambitions au sein de l’opposition sont multiples. Des raisons historiques et stratégiques sont invoquées de part et d’autre. Un séminaire pour trancher est prévu prochainement.

Babacar DIONE

Me Wade, à la fois artisan de la modernisation des cités religieuses et apôtre du dialogue islamo-chrétien

Le Sénégal a connu trois chefs d’Etat, mais jamais avant l’arrivée de Me Wade au pouvoir, on n’avait vu un président de la République, de façon aussi volontaire sur les questions religieuses. Le constat que l’on fait lorsque l’on jette un regard sur ses rapports avec toutes les confessions, c’est sans conteste l’implication tous azimuts de Me Wade sur les questions touchant aux religions au Sénégal et dans le monde, notamment au sujet du Dialogue islamo-chrétien.

Au pouvoir depuis le 19 mars 2000, par la volonté des Sénégalais à l’issue d’une alternance historique mettant fin aux quarante ans de règne du Parti socialiste, Me Abdoulaye Wade a marqué d’une pierre blanche les délicats rapports entre le spirituel et le temporel. Dès son arrivée au pouvoir, le président Wade, qui ne cache pas son appartenance à la communauté mouride, a voulu instaurer de nouveaux rapports basés sur le respect mutuel, la confiance et l’entraide entre lui et les tenants des différentes confessions religieuses (musulmanes ou chrétiennes) ainsi qu’entre les différentes confréries. L’on se rappelle sur ce point que son premier geste après la confirmation de sa victoire éclatante a été de réserver sa première sortie à son guide spirituel, le défunt Khalife général des Mourides Serigne Saliou Mbacké à Touba. Un acte plein de symboles qui montre que dans sa conduite des affaires publiques les hommes de Dieu seront consultés comme jamais avant dans la conduite des affaires du pays. Un geste qu’il n’a cessé de multiplier à l’endroit des autres responsables religieux musulmans ou chrétiens. Pour mieux raffermir la concorde déjà existante entre la majorité des musulmans et la minorité des chrétiens du Sénégal, le chef de l’Etat, Me Abdoulaye Wade, a eu l’heureuse initiative de lancer à l’échelle nationale et internationale : l’idée du Dialogue islamo-chrétien. C’était dans un contexte international marqué par le traumatisme des attentats du 11 septembre 2001. A cette époque, certains dirigeants occidentaux et une partie de leurs opinions publiques ont voulu faire la confusion entre l’Islam et la violence. L’on note aujourd’hui que les interventions incessantes du président Wade sur les tribunes internationales à propos de ce qu’est le vrai visage de l’Islam, qui veut dire la paix et ses plaidoyers pour le dialogue islamo-chrétien, ont permis de dissiper des nuages entre ces deux religions révélées. C’est dans ce contexte que, Me Wade, l’apôtre incontesté du Dialogue islamo-chrétien, a obtenu, à Dakar, la capitale, pour la deuxième fois de son histoire, l’organisation de la 11ème conférence au sommet de l’Organisation de la conférence islamique. C’était, on se le rappelle du 07 au 14 mars 2008. Cette conférence de l’Oci a été couronnée d’un succès historique grâce une organisation parfaite à tout point de vue. Pour l’occasion, l’Agence pour l’organisation de la Conférence islamique (Anoci) dirigée à l’époque par Karim Wade et Abdoulaye Baldé a réalisé des infrastructures routières de dernière génération. Ce qui a radicalement changé le visage de la capitale. Pour l’accueil des invités de marque, de nouveaux hôtels de luxe ont été également construits. La onzième conférence au sommet de l’Oci a été un succès diplomatique sans précédent. Pour cause, près de 43 chefs d’Etat et de gouvernements ainsi que des souverains ont fait le déplacement à Dakar. A cette occasion, une nouvelle charte de l’Oci a été adoptée pour remplacer celle de 1972 et le président Wade élu pour les trois prochaines années, président en exercice de l’Oci. Au titre des réalisations du gouvernement de l’alternance sur le volet religieux, le fait le plus marquant est sans doute cette ambition affichée et proclamée partout par le président de la République de « moderniser toutes les villes religieuses ». Sur ce domaine, force est de reconnaître qu’aucun des prédécesseurs de Me Wade n’a fait autant que lui. C’est d’abord la Cathédrale de Dakar qui était dans un état de délabrement assez avancé que Me Wade a réhabilité pour des centaines de millions de francs. Par la suite, il a lancé du vivant de Serigne Saliou Mbacké les travaux de modernisation de la ville sainte de Touba pour un montant global de 100 milliards. Ces travaux devront comprendre des infrastructures routières, des ouvrages d’assainissement et des structures sociales de base comme des hôpitaux, marchés et écoles.  Lors du dernier Maouloud, de passage à Tivaouane, Me Wade a annoncé un programme similaire et pour le même montant. Lors de l’inauguration de la grande mosquée de Médina Baye à Kaolack, le président a promis que la cité religieuse sera modernisée. Après ces villes suivront sans doute Ndiassane, Médina Gounass, Poponguine, pour ne citer que celles-là. L’on sait également que le président Wade est très impliqué dans la construction de certains édifices religieux comme les mosquées et les églises. Il ne cesse d’apporter son appui matériel et financier à l’occasion des cérémonies religieuses, qu’elles soient musulmanes ou chrétiennes. Une démarche qui le rapproche davantage des chefs religieux qu’il n’hésite pas à recevoir au palais souvent pour des concertations quand l’intérêt supérieur de la nation l’exige.

Babacar DRAME

Un petit pays, une grande puissance diplomatique

Le Sénégal a tôt joué un rôle prépondérant dans la diplomatie en Afrique, compte tenu de sa position géographique et surtout pour avoir été la première zone à avoir été en contact avec le système politique coloniale. Dans le sillage de la colonisation, la paix et la stabilité a toujours été le credo de la démarche sénégalaise compte tenu des impératifs de développement et dans la perspective des les Etats unis d’Afrique. Cette politique de Senghor et de Abdou Diouf a été aussi le credo du gouvernement de Me Abdoulaye Wade depuis le 19 mars 2000.

L’une des grandes réussites diplomatiques du gouvernement dit de l’alternance a été sans doute le Nepad, fusion du plan Oméga du président Wade et le Millenium african plan ou Plan Map. Apparus au cours de l’année 2000, ces deux plans cherchaient à réponde aux soucis de plusieurs leaders africains de proposer une stratégie de résorption du retard de l’Afrique, seul continent dont le développement et la présence internationale passent de la stagnation des années 70 à la régression continue. Economiste et observateur des questions économiques, le président Abdoulaye Wade, dès son entée en fonction, propose au sommet France-Afrique de Yaoundé, le Plan Oméga qui devrait, par des investissements massifs d’origine externe, coordonnés à l’échelle continentale, poser les bases du développement du continent pour combler le fossé entre pays développés et pays sous-développés De leurs côtés, Abdelaziz Bouteflika de l’Algérie, Olusegun Obasanjo du Nigeria et le président d’Afrique du Sud Thabo Mbeki ont un projet similaire : le Millenium african plan, ou Plan Map qui cherche aussi à intégrer l’Afrique à la dynamique de progrès universel. Les deux plans sont fusionnés en un plan unique : la Nouvelle initiative africaine (Nia) qui, lors du sommet des chefs d’Etat de Lusaka en juillet 2001 donnera le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (Nepad) abréviation anglaise de New partnership for african development. Pour mieux l’impulser, le sommet élargit la direction politique à dix autres chefs d’Etat, à raison de deux par région géographique sous le nom de Commission de mise en oeuvre (Implementation committee). Quelques jours après le 20 juillet 2001, la Nouvelle initiative africaine était avalisée par les dirigeants des pays du G8 et en octobre 2001, le cadre de cette politique était finalisé par le Comité des chefs d’Etat chargé de sa mise en œuvre. En plus de ce statut de « père fondateur » du nouveau Plan de développement de l’Afrique après le plan de Lagos de 1977et qui nous a valu la reconnaissance du monde à travers le G8, la diplomatie s’est illustrée au niveau bilatéral quelques mois plus tard avec les accords inter-malgaches suite à un contentieux électoral entre le président Didier Ratsiraka et son rival Marc Ravalomana. L’affaire est un véritable coup diplomatique du président Abdoulaye Wade, qui est intervenu après deux échecs de médiation de l’Ua. Les deux protagonistes malgaches, qui sont venus à parler de paix à Dakar, ont fini par trouver un accord pour un gouvernement de réconciliation nationale pour une transition démocratique de six mois. Le Sénégal s’est aussi illustré lors de la crise politique ivoirienne qui, vite, fait fractionner le pays en deux entités : l’une contrôlée par le gouvernement légitime de Laurent Gbagbo et l’autre par une rébellion venue du Nord. Le gouvernement sénégalais a joué un rôle prépondérant avec le ministre des Affaires étrangères Cheikh Tidiane Gadio, qui est monté à la ligne de front dès les premières escarmouches pour obtenir un cessez-le-feu pour favoriser la médiation de la Cedeao. Le 17 octobre 2002, un accord été signé par des représentants des mutins au lycée français de Bouaké à l’issue d’une rencontre d’une heure et demie avec en plus de Cheikh Tidiane Gadio, Mohamed Ibn Chambas secrétaire exécutif de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et le général malien Cheick Oumar Diarra chargé à la Cedeao des questions politiques, de défense et de sécurité. Un cessez-le-feu qui, de Lomé à Marcoussis, donnera les accords de Ouagadougou actuellement mis en œuvre. Le 5 avril 2004, la machine diplomatique sénégalaise monte encore au créneau en Guinée-Bissau pour surtout rassurer les populations civiles qui fuient la capitale suite à une rumeur de guerre civile qui sème la panique.  Le président de transition Henrique Rosa avait du mal à convaincre les civils de rester dans ce pays où le moins que le puisse dire est qu’il dispose d’un armée de guérilleros indisciplinés et à la gâchette facile. Un évènement marquant de l’alternance au plan diplomatique a été aussi le deuxième sommet de l’Oci qui s’est tenu à Dakar, contribuant à donner à Dakar un nouveau visage par des infrastructures notamment routières et hôtelières. Cette XIe session de la Conférence au sommet de l’Organisation s’est tenue à Dakar du 7 au 14 mars 2008 sur le thème « La Oummah islamique dans le XXIe siècle », a surtout permis de signer l’accord paix entre le Tchad et le Soudan. Les présidents tchadien Idriss Deby Itno et soudanais Omar Hassan el-Béchir ont signé le 13 mars dans la soirée, à Dakar, un accord visant à mettre définitivement fin aux différends qui opposent les deux pays voisins et rétablir la paix et la sécurité dans la sous-région. Les deux chefs d’Etat se sont engagés solennellement à interdire toutes activités de groupes armés et à empêcher l’utilisation de leurs territoires respectifs pour la déstabilisation de l’un et l’autre Etat. Le fait marquant de cet accord a été la mise en place d’un groupe de contact chargé du suivi, de la mise en œuvre de « bonne foi » du présent accord et du monitoring de ses violations éventuelles. Un groupe de contact constitué des ministres des Affaires étrangères de la Libye, de la République du Congo, du Sénégal, du Gabon et de l’Erythrée chargé d’évaluer l’avancement de l’accord. La récente visite du président Idris Déby au Soudan et la demande de fin de mission de la Minurcat entrent dans l’aboutissement logique de l’accord de Dakar. Près de nous, l’accord-cadre qui a permis de ramener la paix en Mauritanie qui avait connu une révolution de palais avec le coup d’Etat du général Mohamed Ould Abdel Aziz, chef d’état-major particulier contre le président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi. Réunis sous l’égide du président Abdoulaye Wade, les représentants des trois pôles de la crise ont adopté un accord pour un retour à l’ordre constitutionnel. Le document stipule, entre autre, le report de l’élection présidentielle, la formation d’un gouvernement transitoire d’union nationale et la formation d’une Commission électorale nationale indépendante (Ceni). Le peuple mauritanien ne s’y est pas trompé accordant un accueil triomphal au président Wade aussi bien lors de la cérémonie de signature de l’accord entre les différents protagonistes en juin 2009 que lors de l’entrée en fonction du président élu Mohamed Ould Abdel Aziz deux mois plus tard au mois d’août La diplomatie sous l’alternance a presque doublé le nombre des représentations sénégalaises à travers le monde et fait évoluer et aboutir plusieurs dossiers allant de la crise du Proche-Orient, au nucléaire en Iran, en passant par le rapprochement entre la Libye et les occidentaux.

Alassane DIAWARA

III – L’économie tient la barre COMPÉTITIVITÉ DES ENTREPRISES SÉNÉGALAISES Les réformes structurelles relancent la machine

#Avec un Pib par habitant évalué à 1600 dollars, le Sénégal a longtemps connu des taux de croissance parmi les plus élevés de la zone Uemoa, souligne le rapport annuel 2008 du Pnud. Mais si l’économie sénégalaise en est arrivé là, c’est surtout parce que le pays a pu, pendant des décennies, initier des réformes qui ont, d’une manière ou d’une autre, porté leurs fruits en relançant l’économie.

Après les différentes politiques économiques mises en œuvre au début des années 1970-1980 et qui avaient essentiellement pour but de favoriser les investissements dans les secteurs primaire et secondaire, notamment le Plan de stabilisation des finances mis en place avec le concours de la Banque mondiale suivi de celui dit de redressement économique et financier (Pref) instauré de 1979 à 1985, le Sénégal a vecu des réformes structurelles venues s’ajouter aux fameux programmes d’ajustement structurels de 1980 à 1992. Celles-ci ont permis de jeter les bases de la libéralisation de l’économie sénégalaise. Cependant la plupart de ces politiques de libéralisation de l’économie nationale, qui étaient pour la plupart imposées de l’extérieur, se sont soldées par des échecs cuisants et elles ont appauvri la majeure partie des populations sénégalaises. Jusqu’à la la dévaluation du franc Cfa de janvier 1994 qui, malgré ses conséquences dramatiques au plan social, a relancé le secteur du tourisme, les industries agroalimentaires, chimiques et textiles, la pêche et l’horticulture, contribuant ) relever le taux de croissance économique. L’avènement de l’alternance en l’an 2000, a été une occasion pour les autorités de prendre un certain nombre de mesures pour attirer les investissements étrangers et stimuler la croissance. A cet effet, tout un dispositif institutionnel avait été mis en place pour sortir le Sénégal de la pauvreté et assurer les bases de son développement économique et social. C’est dans cette optique qu’ont été entreprises des réformes structurelles hardies permettant ainsi d’obtenir un taux de croissance 5, 5 % en 2000 par rapport à celui de 1999, estimée à 5, 1 %. L’adoption du Document de stratégie de réduction de la pauvreté (Dsrp) et la mise en place de la Stratégie de croissance accélérée (Sca), conçus pour réduire la pauvreté et améliorer la croissance économique, sont désormais devenus des cadres de référence devant inspirer toutes les politiques de développement du Sénégal dans les années à venir.

Des résultats significatifs

La poursuite des réformes structurelles et macroéconomiques a conduit à une relative maîtrise de l’inflation et rendu compétitifs les principaux secteurs de l’économie nationale avec une progression du taux de croissance qui est allé au-delà de 5 % de 2000 jusqu’en 2007 avant de chuter en 2008 à moins de 3 % du fait des effets de la crise financière internationale. Pour l’année 2010, le Fmi prévoit un taux de croissance économique qui devrait se situer à 3,4 %. Ainsi, grâce à la réduction des taux d’imposition, la simplification du système fiscal par l’élargissement de l’assiette, l’amélioration des taux de recouvrement en vue de baisser la pression fiscale et l’institution d’un impôt synthétique pour les petites entreprises en vue d’ accroître la fiscalisation du secteur informel, la mise en place d’un certain nombre d’infrastructures et le développement des ressources humaines de qualité, des résultats significatifs ont été enregistrés par les nouvelles autorités en termes de compétitivité. C’est dans ce cadre que seront poursuivis les projets et programmes de développement économique, dont la Goana, le Plan Reva, la Grande muraille verte, le Programme d’insémination artificielle. Le secteur secondaire n’a pas été en reste, le gouvernement ayant décidé de « booster » l’industrie par une amélioration de la productivité et de la compétitivité des entreprises, à travers notamment une réduction des coûts des facteurs, en particulier l’énergie qui constitue un maillon important dans la réalisation des objectifs de croissance, selon un document du ministère de l’Economie et des Finances, publié en octobre 2009 par la Dpee. Ainsi, le secteur secondaire devrait croître de 4,3 % en 2010 après le repli de 0,5 % enregistré en 2009.  S’agissant du secteur tertiaire, il devrait croître de 4,4 % en 2010 contre 1,9 % en 2009, sous l’impulsion notamment des activités commerciales et des activités de « transports et de postes et télécommunications » qui devraient respectivement progresser de 4,5% et 6,2%, indique-t-on. Pour le cas du secteur tertiaire, le gouvernement sénégalais est en train de poursuivre ses efforts pour le développement des différents sous-secteurs, dont les télécommunications, les transports, le commerce et le tourisme, par la mise en place de politiques et de stratégies adéquates. Il s’agit d’ouvrir le marché des télécommunications à la concurrence, de poursuivre le programme de construction, d’entretien et de réhabilitation des infrastructures (routières, portuaires, ferroviaires et aéroportuaires) et de rendre compétitifs sur les marchés extérieurs les produits locaux. Au chapitre des recouvrements des recettes budgétaires, ils sont arrêtés pour l’année 2010 à 1269, 0 milliards contre 1202 milliards en 2009. Quant aux recettes fiscales attendues pour l’année 2010, elles devraient s’élever à 1226,3 milliards contre 1172,0 milliards arrêtés dans la Loi de finances rectificative de 2009, soit une hausse de 4,7%. Ainsi, la pression fiscale s’établirait à 18,8% du Pib, soit au dessus du plancher communautaire de 17%. Pour ce qui est des dépenses d’investissement sur ressources extérieures, elles s’établiraient à 273, 3 milliards en 2010 contre 247 milliards en 2009, soit une amélioration de 26,4 milliards. Le Sénégal entend également poursuivre la politique de dynamisation du marché financier régional à travers l’émission de titres publics. Ainsi, le recours aux ressources extérieures nettes est projeté à 237,2 milliards en 2010 contre 263,1 milliards en 2009.

ENVIRONNEMENT DES AFFAIRES : Les axes d’un retour d’investissements massifs

Auparavant, le Sénégal pouvait miser sur sa simple position géographique très favorable pour attirer les investisseurs. Mais au fil du temps, l’environnement des affaires est devenu très hostile face à des contraintes liées aux normes internationales. Ce qui nécessitait plus d’imagination afin de rendre le Sénégal plus attractif pour les investisseurs. Et cela les autorités de l’alternance l’ont sans doute bien compris pour avoir mis en place dès leur arrivée au pouvoir les structures nécessaires. Grands travaux – promotion de l’investissement – Environnement des affaires, ce sont là sans doute des mots auxquels les sénégalais se sont bien familiarisés ces dernières années qui ont marqué l’avènement de l’alternance au Sénégal. En effet, depuis l’année 2000 et l’arrivée au pouvoir du Président libéral, Me Abdoulaye Wade, d’importantes réformes structurelles ont modifié le paysage économique du pays. La création dans la même année de l’alternance de l’Agence nationale chargée de la promotion de l’investissement et des grands travaux (Apix) a été sans doute déterminante dans la stratégie de promotion des investissements. Et dans la perspective de créer un environnement favorable aux affaires, un guichet unique a été mis en place dans la même année, même si cette structure n’a été véritablement opérationnelle que plusieurs années plus tard. Mais aujourd’hui, le guichet unique fait partie des facilités qui ont permis de réduire considérablement les lenteurs dans la mise en place des entreprises. Un nouveau code des investissements instauré en 2004 a également permis des exonérations douanières et fiscales dans un certain nombre de secteurs. Depuis janvier 2005, les autorités sénégalaises ont même lancé la stratégie de croissance accélérée (SCA), mise en œuvre en 2007. Avec comme objectif d’atteindre une croissance soutenue de 7 à 8 % afin de faire du Sénégal un pays émergent à l’horizon 2015. C’est un véritable défi qui a été lancé à travers cette stratégie par les autorités de l’alternance puisqu’il s’agit pour le régime libéral de transformer considérablement l’environnement des affaires qui était alors très pesant, en un environnement des affaires de classe internationale (EACI). Et pour y arriver, 5 grappes à fort potentiel ont été identifiées autour desquelles il s’agit de bâtir de véritables pôles de compétitivité. Ce sont notamment : agriculture et agro-industrie, NTIC, Tourisme et produits dérivés, Textile et confection, Industrie culturelle artisanat d’art , et Produits de la mer. Les Grands Travaux et la promotion de l’investissement, ont été donc le nouveau slogan fortement soutenu par le Chef de l’Etat, Me Abdoualye Wade, à travers le Conseil présidentiel de l‘investissement (CPI) et sur lesquels il fallait bâtir une vision forte et des stratégies adaptées pour atteindre un taux de croissance soutenu d’au moins 8 % à l’horizon 2015. Et petit à petit, depuis 2000, le Sénégal a réalisé des progrès reconnus par tous les acteurs économiques dans l’amélioration de son environnement des affaires. Cela lui a d’ailleurs valu de figurer en bonne place sur la liste des réformateurs établie par le rapport Doing Business 2009 de la Banque mondiale. Ces progrès sont aujourd’hui bien suivis par le conseil présidentiel de l’investissement qui s’évertue chaque jour à donner les orientations nécessaire afin de maintenir le cap sur les objectifs. De grands travaux routiers ont également été engagés et achevés par le régime de l’alternance. On peut notamment souligner la route du Sud, la boucle du Blouf, la route Linguère – Matam, etc. L’autoroute à péage dont une partie a été réalisée à travers un partenariat innovant public -privé vise à mettre le Sénégal sur la voie de l’émergence économique.

Adama MBODJ

INFRASTRUCTURES, MINES, INDUSTRIES : Un choix stratégique affirmé

Depuis 2000, le gouvernement du Sénégal a considérablement misé sur les infrastructures. Ce qui change considérablement le visage du pays. L’objectif étant d’offrir de meilleures conditions de vie et de travail aux populations. Aujourd’hui, dans presque tous les secteurs de l’économie nationale, une bonne place est faite aux investissements dans les infrastructures. Des milliers de milliards y sont investis.

Dans le cadre d’un gigantesque projet routier, beaucoup d’infrastructures ont été réalisées au Sénégal depuis 2000. Dakar qui se taille la part du lion a vu non seulement ces routes principales réhabilitées, mais la construction d’une des plus belles corniches d’Afrique, la poursuite de l’autoroute à péage Dakar Diamniadio et le nouvel aéroport Blaise Diagne de Diass. Ce dernier joyau d’un coût 237 milliards de Francs Cfa sera délivré en 2011. L’on peut noter aussi la réalisation du pont de Médina Ndiathbé, d’un coût de plus de 5 milliards de Fcfa. Pour désenclaver la partie nord du pays, les autorités ont misé sur la route Linguère-Matam. Pour ce qui est de la région naturelle de Casamance, les autorités ont signé avec la Gambie un accord pour construire un pont sur le fleuve Gambie. Il sera financé par la Bad. Pour remplacer le bateau Joola, elles ont d’abord mis en circulation Le Wilis puis Aline Sitoé Diatta. Au Sud-Est, à Tambacounda, le pont Goloumbo est déjà réhabilité. D’autres routes stratégiques comme la national 1 et plusieurs autres routes de l’intérieur du pays ont été réhabilitée. Ce développement des routes s’est accompagné par celui du parc automobile avec la création de « Dakar Dem Dikk », le renouvellement des taxis et des cars de transport en commun, grâce surtout à l’implantation d’unités de montage de véhicules à Thiès. Lors d’un sommet sur le transport organisé en Afrique du Sud, le Secrétariat du Nepad a décerné un prix au président Wade pour les efforts soutenus qu’il ne cesse de consentir depuis l’an 2000 dans la réalisation des infrastructures routières. Le tourisme qui fait entrer annuellement dans l’économie nationale 273 milliards Fcfa, 142 milliards de valeur ajoutée et 41,6 milliards de recettes fiscales, est renforcé par la construction en cours d’un hôtel avec un centre de formation à Joal Finio, la réforme sur le foncier, l’extension des compétences de la Sapco, etc. Dès son accession au pouvoir, Me Wade a demandé aux différents ministres des Mines de « s’attacher à la mise en œuvre effective de l’exploitation des mines de Sabodala ». A présent Sabodala a produit 241 lingots d’or. Ces mines ont une production moyenne estimée à 4,229 tonnes par an, pour les dix prochaines années. Elles permettent la création de 430 emplois permanents. « Je pense qu’aujourd’hui la preuve est faite que le Sénégal est entré dans la sphère des pays producteurs d’or du monde », insistait le président lors de la présentation du premier lingot. Par ailleurs, grâce à l’Union Européenne, le Programme d’appui au secteur minier (Pasmi), dans sa composante « Appui à l’orpaillage », souteint les orpailleurs traditionnels. Le Sénégal a récemment signé un accord avec des partenaires étrangers pour la production de verre à partir du sable extra siliceux, où la production journalière ptentielle est estimée à 600 milles pièces par jour. Outre la reprise des Ics, la production du phosphate aussi s’est bien comportée avec la mise en œuvre de l’unité industrielle de granulation de Matam. Dans ce secteur, les potentialités du Sénégal sont estimées à 1 milliard de tonnes, ce qui le place dans le top 5 mondial des producteurs. Le secteur de l’énergie n’est pas en reste. Lors d’un conseil interministériel sur la question, le Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye a rappelé que l’ensemble des projets réalisé ou en cours de réalisation dans le secteur, entre 2000 et 2010, se chiffre à 720 milliards de nos francs. Il s’agit entre autres de l’électrification rurale, de la construction de centrales ou du renouvellement d’autres déjà existantes. En effet, grâce à une politique attractive mise en œuvre par les autorités, beaucoup d’investissements privés ont été réalisés depuis 2000. On peut citer, entres autres, les Ciments du Sahel, l’extension de la Sococim, la construction de plusieurs infrastructures hôtelières, etc. Résolument, pour les autorités les infrastructures constituent un choix stratégique.

Aly DIOUF

Un réseau routier de plus en plus moderne

Le gouvernement du Sénégal a toujours fait de la construction de routes une sur-priorité. Cela explique en partie la somme de 1640 milliards Fcfa investis de 2000 à aujourd’hui dans ce domaine. On note ainsi un regain d’activités partout dans le pays tendant à réhabiliter les anciennes routes ou d’en construire de nouvelles autres.

Le 12 mars dernier à Richard-Toll, le ministre d’Etat, ministre de la Coopération internationale, de l’Aménagement du territoire, des transports aériens et des Infrastructures procédait, en compagnie du délégué de l’Union européenne au Sénégal Gille Hervio, au lancement des travaux de réhabilitation de la route Saint-Louis-Rosso-Richard-Toll. En plus d’assurer l’intégration globale de toutes les villes de la région septentrionale du Sénégal, ce projet routier financé à hauteur de 36 milliards par l’Union européenne à travers le Sixième Fonds européen de développement (FED) va permettre le renforcement de 127 km de route de liaison interurbaine. Il profitera ainsi à l’axe RN2 allant de Saint-Louis à Richard-Toll, route de Gandiol, bretelles de Rosso et aéroport de Saint-Louis. Ce projet prévoit également la réhabilitation de 75 km de voie de désenclavement ayant pour exutoire la RN2 à savoir Ngalelle-Maka, Toubé, Colonat Gnitt et Richard-Toll-Mbane-Diaglé. Dans le même temps, il est prévu dans ces travaux le renforcement et le traitement des surfaces de 16 km de voiries au niveau des traversées urbaines se trouvant entre les deux grandes villes que sont Saint-Louis et Richard-Toll. Ces travaux du Nord entrent dans le cadre du vaste chantier de réhabilitation du réseau routier sénégalais entrepris, depuis quelques années, par le gouvernement du Sénégal. En effet, avec l’avènement du régime de l’Alternance, un intérêt particulier a été accordé à la construction d’infrastructures routières. En terme de chiffres, Karim Wade a également annoncé que ce sont 1640 milliards qui ont été investis par l’Etat dans la construction de nouvelles routes ou leur réhabilitation entre la période 2000-2010. En de ces dernières dix années, on a ainsi assisté à une densification du réseau routier partout dans le pays. Dans la partie Sud du pays, des travaux d’extension du réseau routier ont été entrepris dans le but de désenclaver la nouvelle région de Sédhiou. La réalisation de la Boucle du Boudhié allant de Sédhiou-Bambaly-Jirédji-Marsassoum va donner un coup de fouet à la culture de la banane, des légumes et à l’évacuation des pistes de production. Cet axe routier qui mesure 179 km va être réalisé à hauteur de 2,6 milliards Fcfa grâce au concours de la Banque africaine de développement (Bad). Aussi, la route Ziguinchor- Cap Skiring, longue de 72 km et Ziguinchor Mpack (18 km) ont été refaites avec des ronds points consolidés en béton afin de les rendre plus solides face à une fréquentation intense.

Corridor Dakar-Bamako et intégration

Ce développement des infrastructures routières est noté sur l’axe Mbirkilane-Tambacounda, long de 238 km et permettant de relier la région centre de Kaolack à Tambacounda. Cette route réputée dangereuse à cause de ses nombreux nids de poule et de son intense fréquentation va bientôt connaître un nouveau visage. Dans la région orientale, les vastes projets routiers concentrés entre Tambacounda et Kédougou vont permettre de finaliser le corridor Dakar-Bamako long de 1659 km. Ce corridor qui dispose en ce moment de 806 km de bitume va également permettre de réaliser l’intégration sous-région parce qu’il pourra desservir à la fois à Conakry, en Guinée-Bissau, à Bamako et dans le reste de la sous-région occidentale. Ces projets routiers à l’intérieur s’ajoutent au programme de modernisation du réseau routier à Dakar à travers notamment la réhabilitation des routes telles la Voie de dégagement nord (Vdn), la construction d’échangeurs de dernière génération dans les carrefours Malick Sy, Patte D’oie et Pikine. Ce nouveau visage de la capitale sénégalaise est articulé au vaste Programme d’Amélioration de la mobilité urbaine (Pamu) et à l’opération « Zéro nid de poule », lancé en décembre 2009 par le ministre d’Etat, ministre des Infrastructures, Karim Wade. Dans le but de désengorger Dakar de son trop plein de monde et de véhicules, le projet d’Autoroute à péage a été entrepris par l’Etat en collaboration avec ses partenaires au développement que sont l’Union européenne et la Banque mondiale. Actuellement dans sa deuxième et dernière phase, l’autoroute à péage Dakar-Diamniadio va permettre d’entrer ou de sortir de la capitale sénégalais en l’espace de 20 minutes. Les sénégalais n’auront plus que de vieux souvenirs des embouteillages. « Le souci de moderniser le dispositif infrastructurel s’illustre à travers la volonté de procéder au réseautage des axes routiers, l’amélioration de la mobilité urbaine à Dakar et l’ouverture des pistes de production et la réhabilitation des ponts », avait déclaré le ministre d’Etat Karim Wade à l’occasion du lancement de l’Opération « Zéro nid de poule » en banlieue en décembre 2009. Cette déclaration qui démontre encore la ferme détermination des autorités à doter le pays d’un réseau routier moderne, dense et durable.

Maguette NDONG

MOUSTAPHA mamba guirassy, ministre de la communication, porte-parole du Gouvernement : « Le régime de l’Alternance n’a laissé en rade aucun pan de la vie économique, sociale et culturelle »

19 mars 2000-19 mars 2010 et c’est toujours : « Oui ! » Après les Sénégalais qui, dans leur majorité, ont validé le projet de gouvernance proposé par Me Abdoulaye Wade et ses alliés, le ministre de la Communication, Porte-parole du Gouvernement, reste affirmatif sur la prise en charge de la demande sociale. Moustapha Mamba Guirassy passe en revue les différentes mesures destinées à offrir un meilleur pays aux Sénégalais, dans les domaines de l’emploi, de l’habitat, du pouvoir d’achat des ménages, de l’émigration clandestine, de la presse, etc. S’y ajoutent des dispositions fermes pour la transparence et un cadre macro-économique performant. Dix ans, c’est, pour M. Guirassy, le temps de dire : « le Sénégal a la chance historique d’avoir un homme de cette trempe à la tête de l’Etat, dans un contexte marqué par la perte des repères sur tous les plans ». Exemples à l’appui.

Monsieur le ministre de la Communication, Porte-parole du Gouvernement, l’Alternance fête ses dix ans. Pouvez-vous nous dresser un bulletin de santé du Sénégal aux plans économique, social, politique, sportif et culturel ?

Permettez-moi tout d’abord de rendre grâce à Dieu de nous avoir donné la chance d’être là pour fêter les dix ans de l’Alternance. Dix ans au cours desquels, le Sénégal, notre pays, s’est repositionné de façon visible et durable sur le plan international à travers les initiatives salutaires du président Wade qui ne rate jamais une occasion pour affirmer la position du Sénégal et de l’Afrique sur toutes les questions qui agitent le monde. Il n’est un secret pour personne, que le Sénégal est non seulement respecté et considéré sur le plan diplomatique, mais notre pays est surtout consulté et écouté sur toutes les questions de l’heure, qu’il s’agisse du système des Nations Unies, des questions africaines ou celles liées à la sous-région. Ne serait-ce que pour ces raisons, les Sénégalais devraient être fiers, non seulement de leur Président, qui est un chef d’Etat visionnaire, mais aussi de leur diplomatie qui en est une véritablement offensive, orientée vers la paix, la sécurité et la stabilité en Afrique et dans le monde. Vous savez bien le rôle que notre pays est en train de jouer pour que l’Afrique soit présente au Conseil de Sécurité des Nations Unies. Le combat pionnier, singulier, que le Président Wade est en train de mener, pour que justice soit rendue à notre continent aux Nations Unies, est en train de trouver une oreille attentive à travers le monde. Je n’évoquerai pas les efforts du Sénégal pour asseoir une paix durable dans notre sous-région, et qui se sont traduits à travers les initiatives de paix en Côte d’Ivoire, en Mauritanie, en Guinée-Bissau et en République de Guinée et tout récemment au Niger. Je ne vous parlerai pas du rôle joué par le Président Wade et la diplomatie sénégalaise dans le retour à une vie institutionnelle normale à Madagascar, ni des initiatives entreprises au Zimbabwe pour la stabilité dans ce pays. Vous savez également le rôle discret, mais efficace, que joue le Sénégal pour le retour de la paix au Proche-Orient, et surtout pour la sauvegarde des intérêts inaliénables du peuple palestinien.

Au plan économique et social, comment appréciez-vous, Monsieur le ministre, les réponses du Sénégal aux chocs exogènes ?

Au plan économique, le Sénégal a, malgré la crise internationale et le renchérissement exponentiel du prix du pétrole, réussi à maintenir ses grands équilibres macro-économiques. Rares sont aujourd’hui les pays, non pétroliers et non producteurs de matières premières stratégiques, qui peuvent se targuer de résister de façon aussi courageuse et aussi déterminée à ces deux phénomènes. Si le Sénégal l’a réussi, c’est certes grâce à la vision du Président Wade qui a su prendre, de façon pertinente et opportune, les mesures qui s’imposent, mais aussi grâce à l’engagement, à la détermination et à l’esprit de solidarité du peuple sénégalais. Il va de soi que si vous arrivez à soulager les populations par une modération, une modulation et une atténuation des prix des denrées de première nécessité et une politique volontariste de subvention sans rompre les équilibres macro-économiques sur lesquels repose la stabilité du pays, vous créez les conditions d’une véritable prise en main de la demande sociale. C’est en fait cela qui a permis de poursuivre et de renforcer les investissements dans tous les secteurs, qu’il s’agisse des infrastructures, du renforcement de la carte scolaire par la réalisation de lycées et de collèges en particulier, la création d’Universités et de centres universitaires régionaux, le renforcement du tissu sanitaire avec la création de nouvelles infrastructures et la prises en charge des catégories fragiles, telles que les femmes enceintes, les enfants, les personnes du troisième âge et les personnes porteuses du VIH/Sida, avec des initiatives aussi hardies que la gratuité des consultations prénatales, les césariennes, le plan sésame et la prise en charge gratuite des séropositifs. Il a donc fallu des sacrifices extraordinaires de l’Etat pour répondre à cette forte demande sociale. La réponse du Gouvernement aux attentes dans d’autres secteurs, tels que la culture et le sport, obéit au même souci de créer les conditions d’un épanouissement physique et moral des Sénégalais. Le programme de construction de stades omnisports dans toutes les régions et de mise en place d’infrastructures culturelles aux cotés des vastes chantiers culturels que sont, entre autres, le Théâtre National, le Monument de la Renaissance Africaine, etc. répondent à cette même logique. C’est vous dire que le régime de l’Alternance n’a laissé en rade aucun pan de la vie économique, sociale et culturelle du pays, comme en témoignent, au demeurant, les multiples chantiers qui naissent tous les jours et qui viennent renforcer ceux réalisés sur les routes, les aéroports et les ports du Sénégal.

Me Wade, un libéral à forte conviction sociale, a-t-il réussi à formuler des réponses efficientes à la demande sociale qui a eu raison de 40 ans de régime socialiste, notamment en matière d’éducation, de santé, d’emploi et d’agriculture ?

Il m’a semblé avoir répondu en partie à cette question. Je pense d’ailleurs que tous les Sénégalais de bonne foi partagent ma conviction que le Président Wade qui, dans sa vision stratégique, a inventé le nouveau concept de libéralisme social, a bien traduit, de façon concrète et pertinente, cette nouvelle philosophie de pensée et d’action. Je vous ai énuméré, sans être exhaustif, les multiples réalisations qui participent toutes à la réponse de la demande sociale. Comme vous le savez, le Sénégal a la chance historique d’avoir un homme de cette trempe à la tête de l’Etat, dans un contexte marqué par la perte des repères sur tous les plans. La mondialisation, du fait des nouveaux rapports qu’elle induit, des ruptures qu’elle engendre, des remises en cause qu’elle provoque, ne peut être portée, du point de vue de la réflexion et de l’action, que par des hommes comme Me Wade, des hommes capables d’apporter des réponses alternatives pertinentes aux idées souvent imposées par les grandes puissances ou les organisations financières internationales. Ne serait-ce que par cette posture, le Président Wade aura assurément rendu service au Sénégal, à l’Afrique et au reste du monde. Sans entrer dans les détails et pour ne parler que des 40 % du budget consacrés à l’Education, citons par exemple la Case des Tout Petits, un concept adopté aujourd’hui par l’UNESCO, les bourses et aides aux étudiants, le renforcement du tissu scolaire et universitaire, les 10 % alloués à la santé, l’augmentation substantielle du budget des structures de santé, les augmentations successives des salaires des fonctionnaires et des autres catégories professionnelles, les initiatives en direction des jeunes à travers le FNPJ, l’ADPME, le plan REVA, la GOANA, etc. Dans le secteur agricole, par exemple, des avancées notables ont été enregistrées ces dix dernières années tant en matière de production, de productivité qu’en matière de diversification des produits agricoles. Aujourd’hui, on ne parle plus de monoculture de l’arachide, on ne colle plus au Sénégal l’étiquette d’un pays typée arachide. Le Sénégal s’est libéré ainsi du fardeau imposé aux paysans par une pratique coloniale qui avait spécialisé nos pays dans un seul produit, en les maintenant sous le joug des produits importés. C’est en cela que le Président Wade provoque une rupture avec un ordre colonial préétabli en créant les conditions d’une diversification de l’agriculture sénégalaise avec, innovation majeure, l’introduction aux côtés des cultures vivrières, des cultures comme le jatropha qui entrent parfaitement dans le renforcement de notre indépendance énergétique.

Après les railleries sur les « éléphants blancs », les infrastructures sont saluées comme des œuvres d’art sur Dakar et à l’intérieur du pays. Selon vous, ces ouvrages ont-ils l’impact positif escompté sur les secteurs de la productivité ?

Ceux qui, au départ, formatés aux politiques d’ajustement structurels, pensaient qu’il n’était pas possible d’envisager une politique de construction des infrastructures, ont sans doute été les premiers à être surpris par la façon dont Dakar et le reste du pays sont en train d’être transformés. Sur ce plan, le Président Wade aura fait preuve d’audace et de générosité, en posant la question des infrastructures comme une exigence de tout premier plan dans la politique de développement du Sénégal et dans le processus d’intégration de notre pays dans l’espace sous-régional et africain. C’est en vérité sur ce chapitre que l’on découvre la forte personnalité du Président Wade et la dimension panafricaniste de son œuvre. En initiant des projets structurants dans les transports, les télécommunications, les projets communs, comme la Grande Muraille Verte, le Président Wade positionne le Sénégal dans une perspective d’intégration africaine. Comme vous l’imaginez, la politique de désenclavement du Sénégal dans l’entité régionale est en train d’être parachevée par le ministre d’Etat, Karim Wade, avec la finalisation des corridors sur les différents axes frontaliers. Les produits sénégalais pourront désormais atteindre tous les marchés africains par la route, en attendant la remise définitive en état du chemin de fer à grand écartement. La facture sociale, avec la crise alimentaire, le chômage, les inondations, l’émigration clandestine notamment, reste assez préoccupante dans certains milieux. Pensez-vous que, pour les années à venir, l’Alternance puisse encore formuler des solutions efficaces pour justifier une reconduction du candidat de la majorité ? Au regard des importants efforts consentis par l’Etat, en vue de résorber le chômage et l’émigration clandestine par le recrutement ; l’accès au foncier et la création de nouveaux emplois ; de mettre en place un cadre de travail approprié pour les marchands ambulants ; de permettre aux ménages de maintenir leur pouvoir d’achat et surtout, avec les initiatives comme le Plan Jaxaay qui, en attendant sa deuxième phase, a déjà permis de construire et de livrer 1900 logements au prix subventionné de 4 millions de FCFA, je peux affirmer que la question de la demande sociale est prise à bras le corps par le Gouvernement de l’Alternance. Les initiatives, dans ce cadre, se poursuivent avec des programmes de logements pour les fonctionnaires et les émigrés. Je suis convaincu que, conscients de l’apport décisive du Président Wade dans la prise en charge des questions les concernant directement, les Sénégalaises et les Sénégalais lui accorderont, sans ambages, leurs suffrages en 2012. Au plan économique, le Sénégal a traversé des moments difficiles. Quelles sont, selon vous, aussi bien dans le leadership que dans les choix de gouvernance, les vertus qui ont permis à ce pays de tenir et de bénéficier de la confiance des bailleurs ? Aucun pays n’a été épargné par les récentes crises. A fortiori le Sénégal qui ne possède quasiment pas de richesses naturelles comme le pétrole ou l’uranium. Mais notre grande richesse, ce sont nos ressources humaines. Grâce à la hardiesse, au réalisme et à l’intelligence de nos options économiques et politiques, nous avons pu bénéficier de la confiance de nos partenaires.

La transparence, à travers les audits, exprime-t-elle une réelle volonté de Me Wade d’ériger la bonne gouvernance en règle ?

Le Président Wade a, dès son accession au pouvoir, manifesté la ferme volonté de faire de la bonne gouvernance, autrement dit, de la transparence, de la participation et de l’obligation de rendre compte, un principe de vie, voire un réflexe chez ses concitoyens. Les audits, l’exploitation objective de leurs résultats et les mesures appropriées prises sur la base de ces mêmes résultats montrent bien qu’au Sénégal il y a, depuis l’Alternance, un changement radical de paradigme en matière de Gouvernance.

Existe-t-il trop de « scandales » financiers sous l’Alternance ou est-ce parce que le Sénégal se débarrasse du « tout politique » pour entrer dans l’ère du « tout pour le citoyen et la République » ?

S’il existe « trop » de scandales comme vous dites, c’est parce que le style de gouvernance permet de les découvrir. Il n’y a plus de cloisonnement, plus d’hermétisme comme du temps de l’ancien régime… Je ne crois pas qu’il y ait plus de détournements et de malversation depuis l’Alternance. Il y en a peut-être même moins. La différence, c’est que maintenant, l’Etat s’est donné plus de moyens pour les débusquer et les sanctionner. C’est l’ouverture et la transparence qui permettent cela. Il ne s’agit plus de protéger qui que ce soit. Nous devons en être fiers.

La communication, sous l’Alternance, a connu des hauts et des bas. Se dirige-t-on, enfin, vers un espace médiatique apaisé et fédéré par la nécessité objective d’installer l’excellence, même si ce secteur continuera de bruire de ses accords et désaccords ?

Les organes privés d’information servent des intérêts dans le prolongement desquels se trouve celui de la Nation. C’est dans ce cadre que les médias privés représentent un trait d’union entre l’Etat et les populations. La réorganisation du secteur de la presse vise, d’une part, à asseoir une « Politique de Communication Gouvernementale Ordonnée, Complète et Régulière » et, d’autre part, à créer des relations de confiance avec l’ensemble des médiats, basées sur le diptyque : Liberté et Responsabilité. Le processus de réforme de l’environnement des médias a été engagé sur le plan opérationnel à travers la mise sur pied de la commission préparatoire chargée de définir une position uniforme et concertée. Il s’agira d’harmoniser les positions et de veiller à avoir un point de vue consensuel et clair sur les points suivants : le cadre juridique des médias (accès à l’information, statut professionnel, régime juridique des entreprises des médias, instances de régulation et d’autorégulation) ; l’environnement économique (appui et financement du secteur public et du secteur privé, mutualisation des ressources de la plate-forme régulatrice, conditions de rémunération et de prise de participation des professionnels des médias dans la structure du capital des entreprises médias) ; les aspects professionnels (formation et identité des professionnels des médias, conditions d’agrément et d’accréditation des opérateurs et de leurs personnels). La nécessité d’un nouveau code de la Presse au Sénégal s’avère nécessaire et urgente. Ce code s’inscrit en droite ligne des directives de Monsieur le Président de la République visant à dépénaliser les délits de presse et à mettre les journalistes dans les conditions idoines d’exercice de leur métier en toute liberté, mais aussi en toute responsabilité.

2012, est le nouvel horizon. Quel rôle doit jouer la communication gouvernementale ? Propagande comme l’en accusent certains, attentisme, comme estiment d’autres ou unité d’analyse et d’alerte ?

La Communication reste très mal comprise par une large frange de professionnels. Elle est constamment réduite à l’information. La fourniture d’information reste une réalité trop vaste et complexe. Dans la kyrielle des acceptions de la communication qui a engendré tout un secteur d’activité qui constitue ce qu’on appelle le « 4ème pouvoir », il y a certes en filigrane, et de façon intrinsèque, le mot information, car on ne peut parler de communication sans information. Mais communiquer, c’est aussi se comprendre, parler le même langage, et mieux, avoir les mêmes attributs sociaux. Regarder l’ampleur du champ dès lors que nous disons que la communication est un acte, un moyen qui permet de transférer, de ventiler, de relayer, de véhiculer l’information qui reste ici un produit. Si l’information est un produit, une ressource vitale pour l’humanité, si l’information prime, car nous, communicateurs, disons : « au commencement était l’information », la communication, quant à elle, est un acte, mais un acte sociétal, c’est-à-dire qui s’effectue au sein de la société, dans un environnement où l’espace et le temps revêtent une dimension capitale dans l’accès à l’information. Vous voyez bien que ce n’est pas en l’espace d’une communication que nous allons faire toucher du doigt les ruptures envisagées. Alors faire voir le champ à investir. Nous avons choisi de ne pas évoluer de façon isolée et cloisonnée, mais intégrée. La communication reste un domaine où il n’y a pas de certitude. Que de pistes à explorer ! Par exemple, notre interrogation sur la formation reste qu’en cette période d’avènement des TIC, le département des Sciences et Techniques de l’information et de la Communication doit apparaître comme une illustration d’intégration des systèmes d’information, car journaliste, relationniste, documentaliste et autres professionnels de la communication doivent, pour ainsi dire, être formés dans le même moule… C’est par rapport à tout cela que, sous l’orientation de Monsieur le président de la République, le Gouvernement a entrepris de définir et d’orienter ses programmes de développement sectoriel et national, en concertation étroite avec toutes les parties concernées. Par ailleurs, les acteurs de la société de communication proviennent d’origine et de catégories socioprofessionnelles aussi différentes que variées : les décideurs institutionnels publics ou privés, les groupes organisés du monde du travail, des secteurs sociaux, culturels, économiques, les dépositaires des cultes traditionnels, les agences et ONG de développement, les organisations communautaires de base, agents de développement, producteurs, etc.

Autour de quels autres axes s’articule, aujourd’hui, la démarche du chef de l’Etat dans ce domaine ?

La démarche de M. le Président de la République, au niveau de la communication gouvernementale, est aujourd’hui autour de la consolidation de cette société de communication en émergence pour que se forme, dans notre pays, une opinion publique plus informée, consciente et imprégnée des valeurs démocratiques et des diverses formes de libertés. Dans le domaine de la communication gouvernementale, le Ministère travaille avec la presse nationale et internationale, les partenaires sociaux, les instances ou mécanismes de régulation et d’autorégulation.

Le champ investi reste tout de même immense. L’on peut noter la pluralité des lignes éditoriales dans le paysage médiatique sénégalais. Dans ce contexte, et en application de la politique de l’Etat, je travaille à la création d’un environnement propre à améliorer la visibilité et la lisibilité de l’action publique ; normaliser de façon consensuelle l’information et la communication par la création d’un environnement juridique, législatif, institutionnel et fiscal adéquats ; répondre aux besoins d’information et de communication de l’ensemble des segments de la communauté nationale ; démocratiser l’accès à l’information et à la communication ; favoriser la mise en place de systèmes d’information, de veille informationnelle ainsi que des voies de retour de l’information ; favoriser l’expression libre de toutes les couches sociales. En parlant de communication, je ne voudrais pas me limiter à la presse. Les moyens de communication de masse se multiplient et se développent à une vitesse vertigineuse : grâce à une qualité de réseau téléphonique en constante amélioration, la communication interpersonnelle connaît un fulgurant essor. La messagerie électronique et tous les dérivés des TIC facilitent les échanges et les accès au savoir et au savoir-faire. Avec un parc de plus d’un million de lignes téléphoniques fixes et autant en téléphones mobiles, le Sénégal, notre pays, fait partie des figures de proue dans le domaine des télécommunications, et signe ainsi son entrée dans l’ère moderne de la communication globale. Jusqu’au milieu des années 90, c’est-à-dire, plus de 30 ans après l’indépendance, l’essentiel des moyens de communication de masse et des réseaux de télécommunications, étaient aux mains de l’Etat. Depuis 2000, il en est autrement. L’émergence de nouveaux outils de communication entièrement sous contrôle privé, l’arrivée sur le marché d’opérateurs privés dans les divers réseaux de messagerie électronique, ont libéré de nouveaux espaces d’expression et de liberté. Cette explosion de la communication a réveillé les consciences, suscité des initiatives et impulsé des énergies longtemps endormies. Dans un tel contexte, l’Etat du Sénégal a érigé la concertation comme mode d’emploi et le Gouvernement en fait une priorité dans son programme de travail.

Dites-nous en un peu plus sur la communication gouvernementale…Dans le domaine plus précis de la communication gouvernementale. Faut-il comprendre que son champ reste limité à celui des ministères et des structures gouvernementales ?

Vous voyez bien la pluralité d’acteurs qui intervient dans l’analyse et la fourniture de l’information gouvernementale. Mais il est aussi bon de savoir que, dans son contenu, la communication gouvernementale comprend la documentation, le journalisme et les relations publiques. Loin de l’approche propagandiste comme certains nous en accusent, à tort d’ailleurs, loin de l’attentisme, il nous fallait travailler au-delà de nos personnes pour la postérité, pour l’histoire. Le Sénégal, pour la première fois de son histoire, depuis son indépendance, vient d’en connaître une démarche élaborée et construite. L’histoire a voulu que ce soit sous la magistrature du Président de la République, maître Abdoulaye Wade. Loin de toutes ces accusations, la communication c’est tout ce sentier ouvert et qui connaîtra bientôt une mise en œuvre réelle sous l’impulsion de Monsieur le Premier Ministre avec le Conseil Interministériel prévue la semaine prochaine sur la question. Rien qu’avec les Technologies de l’Information et de la Communication, le Gouvernement va travailler à l’intérieur du dispositif informatique de l’Etat. Les ministères vont utiliser de plus en plus utiliser les supports conçus et disponibles à l’ADIE (le e-gouvernement – la messagerie électronique – la téléphonie IP – e-liane – la formation des acteurs sur les postes de travail – la SAFI (e-citoyen) – la viséoconférence – la téléphonie avec écran). Les ministères, en utilisant les systèmes d’information et de communication, ne peuvent plus évoluer de façon isolée et cloisonnée, mais intégrée. C’est tout cela le champ de travail sur la communication gouvernementale.

Vous êtes le leader d’une région où la demande sociale est forte et où il faut fédérer les forces.

Quelle sera la formule « Guirassy » pour être un relais efficace à l’œuvre de Me Wade en vue de la présidentielle 2012 ?

Les réalisations du Président, dans la région, constitueront mon viatique : infrastructures routières de dernière génération entre Dakar-Tamba, Kedougou-Bamako, le développement de l’industrie minière, le taux de scolarisation, les infrastructures sanitaires, l’érection de Kédougou en région, etc. M’inspirant par ailleurs de la mésaventure de notre parti aux dernières élections locales, je compte privilégier la cohésion et l’intelligence d’équipe. Parce que, pour gagner, il faut être un bon leader politique, et pour cela, il faut être capable de rassembler et non pas avoir la volonté de diviser. Un leader, comme nous l’enseigne le Président Wade, c’est quelqu’un qui s’ouvre, pas quelqu’un qui vit en vase clos. Il refuse le sectarisme pour pratiquer la tolérance. Cet état d’esprit nous a gravement fait défaut aux locales passées. Toujours dans la logique de rassembler, il s’agira aussi de s’intéresser à tous ceux qui trouvent que la politique est avilissante et c’est une frange importante de la population sénégalaise ; car disent-ils, un vrai intellectuel ou « quelqu’un de propre » ne milite pas dans des partis, que la politique n’est donc pas bien. L’abstinence ou la société civile serait mieux indiquée pour eux. Il nous faudra bien affronter cette fausse idée. Il est au contraire noble de s’engager au service de ses idées et au service de sa cité. Pour qu’il y ait un développement, il faut une démocratie, et pour cela il faut bien qu’il y ait des partis politiques et des militants. En général, quand on tourne le dos aux partis politiques, ce n’est pas pour renforcer la démocratie, ce n’est pas pour défendre les intérêts du Sénégal, c’est plutôt le contraire ; enfin, ne pas choisir son candidat politique, c’est choisir de ne pas s’intéresser au devenir de sa cité.

Entretien réalisé par Habib Demba FALL

Tout le dossier en pdf

Lesoleil.sn

3 Commentaires

  1. Je trouve l’intervention du Mr Decroix d’une grande pertinence.je pense que le Pr Wade a besoin de ces gens pour assurer sa défense
    A travers cette interview , on se rend vraiment compte que cet homme a beaucoup fait pour ce pays.Nous tous nous nous souvenons de ses prises de positions courageuses du temps du FRTE.
    Quant au bilan de WADE tout le monde sait que c’est un bilan trés positif tant sur le plan des infrastrutures, sociales , culturels et Economique.Bravo Wade!! et Bon courage à Decroix.
    Bita(Cellules de veille internet AST)

  2. Tout a fait Bita je partage ton avis; je pense que Decroix est un homme constant depuis les evenement de Mai 68 cet homme se bat pour l’avancement de la démocratie et aujourd’hui avec l’avenement de l’alternance dont il a ete un acteur ; il continue a travailler dans ce mme sillage! je crois que aujourd’hui il est en train de soutenir loyalement le president un soutien sans condition et sans calcul!
    nous lui disons bonne continuation!
    Beugsarew Section numerique AJ/Pads

  3. 2.

    out a fait Bita je partage ton avis; je pense que Decroix est un homme constant depuis les evenement de Mai 68 cet homme se bat pour l’avancement de la démocratie et aujourd’hui avec l’avenement de l’alternance dont il a ete un acteur ; il continue a travailler dans ce mme sillage! je crois que aujourd’hui il est en train de soutenir loyalement le president un soutien sans condition et sans calcul!
    nous lui disons bonne continuation!
    Beugsarew Section numerique AJ/Pads

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