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Atteinte de l’autosuffisance en riz : Si loin de l’objectif !

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XALIMANEWS : Depuis son lancement en 2010 sous le magistère du président Abdoulaye Wade et sa relance accélérée en 2014 par le président Macky Sall, le Programme national d’autosuffisance en riz (Panar) n’a pas atteint les résultats escomptés. L’objectif de produire 1600.000 tonnes n’a pas eu lieu en 2017. Les producteurs disent être confrontés à des problèmes qui ne riment pas avec une production suffisante. Du côté de la tutelle, l’espérance repose sur des projets à initier pour accroitre la production.

Sur impulsion de l’ancien président de la République, Abdoulaye Wade, il a été créé en 2010 le Programme national d’autosuffisance en riz au Sénégal (Pnar) avec comme objectif, assurer l’approvisionnement en riz fortement dépendant des importations comme les autres produits alimentaires.

Avec des importations qui se chiffrent à 800.000 tonnes en 2007, le riz représentait 106 milliards F Cfa pour les importations nettes et est responsable pour 16% du déficit de la balance commerciale. L’Etat s’était fixé à réduire et même mettre un terme à ces importations par une disponibilité du riz local. Un objectif de production de 1 000 000 tonne de riz blanc compétitif et répondant aux goûts et exigences des consommateurs, avait été fixé au Programme national d’autosuffisance en Riz (Pnar) à l’horizon 2012. Ce but n’a pas été atteint. Selon des chiffres de l’Agence Nationale de la statistique et de la démographie (Ansd) en 2013, les importations étaient à 902 526 tonnes soit plus de 191 milliards f Cfa pendant ce temps, le projet engagé par le régime du président Wade n’a permis que d’amener la production à 436 153 tonnes de Paddy équivalant à 283 500 tonnes de riz blanc soit à peine le tiers du niveau des importations en ces temps. C’est dans ce contexte que le régime du président Macky Sall, a décidé de relancer ce programme aux premières années de son magistère avec comme arme de guerre, le Programme d’accélération de la cadence de l’agriculture sénégalaise (Pracas).
Son objectif est de renforcer la promotion et le développement de la filière riz local par l’augmentation des superficies, la modernisation des moyens et méthodes de production et de transformation et la professionnalisation des acteurs en vue d’améliorer la sécurité alimentaire et contribuer ainsi à la lutte contre la pauvreté à l’horizon 2017.

La production devrait s’élever à 1 600 000 tonnes de Paddy avec une contribution de 60% des zones irriguées (vallée du Fleuve Sénégal et Anambé) et de 40% des productions pluviales du Sud du pays. La méthodologie utilisée est l’appui aux producteurs notamment avec la fourniture d’une semence de qualité, l’octroi de matériels agricoles, l’aménagement des surfaces cultivées entre autres. L’atteinte de l’autosuffisance en riz en 2017 devrait coûter 424,7 milliards de F Cfa.

Les semences et les engrais devraient consommer 55% de ce montant tandis que les aménagements hydro-agricoles en irrigué et pour le pluvial se situent à 33%. Les coûts des équipements représentent 8,98%. L’appui technique (2,32%) et la formation (0,47%) se partagent moins de 3% du budget global. Cependant, plusieurs années de mise en œuvre, une échéance dépassée, des chiffres justificatifs d’une augmentation de la production sont brandis par le gouvernement ce qui n’est pas synonyme de l’atteinte d’une autosuffisance selon les producteurs.

DES PÉRIMÈTRES NON AMÉNAGÉS, ABSENCE DE STOCKAGE, PRÉSENCE DES OISEAUX GRANIVORES ET DES RATS

Pour le producteur et membre de la fédération des périmètres auto-gérés du Sénégal, Ass Niang, «il y a une progression au niveau de la production mais, pour atteindre l’autosuffisance, beaucoup de manquements doivent être résorbés aussi bien au niveau des aménagements que des conditions de production ».

Les oiseaux granivores et les rats continuent d’attaquer les rizières sans qu’on ne parvienne à les éradiquer. Les superficies à cultiver sont également des difficultés. Les défauts d’aménagements sont des problèmes qu’on doit régler. «Dans certaines zones, il y a des terres qui doivent être exploitées mais presque la moitié est vétuste et nécessite un aménagement», indique-t-il et de soutenir «qu’il est difficile d’atteindre l’autosuffisance si on ne règle pas tous ces problèmes».

Le financement injecté, les résultats glorieux brandis n’est qu’un mirage bien au-delà des progrès qui ont été certes réalisés. «Le montant, c’est juste des chiffres qu’on annonce. Par rapport au matériel, l’Etat fait des efforts mais, les producteurs en demandent plus. On ne voit que des véhicules qui roulent de gauche à droite et des missions à n’en finir. C’est juste des chiffres qu’on annonce et qu’on ne voit pas l’exécution de ces montants sur le terrain». La présence des herbes dans les périmètres exploités est un mal qui ronge la production, selon Ass Niang. Il y a aussi la qualité des semences et de l’engrais qui fausse les prévisions d’amener la production au record de plus d’un million de tonnes. Les différentes dénominations du Programme d’autosuffisance en riz sont des slogans. «Le Pracas, c’est tout simplement un slogan, qu’on ne prend pas le temps d’évaluer. On revient pour nous donner un autre avec tous les problèmes qu’il y’a eu auparavant». Mariama Baldé encadre des associations de producteurs dans le département de Médina Yoro Foulah. Elle liste l’absence de barrages, de magasins de stockage et de matériels comme des entrave développement de la filière.

NÉCESSITÉ D’ÉVALUER LES FINANCEMENTS

Ousseynou Ndiaye est le président de la filière riz et du comité interprofessionnel riz. Pour lui, « il y a une évolution mais le Pracas qui est basé sur la culture intégrale avec l’exploitation des mêmes superficies aussi bien en contre saison qu’en hivernage, n’a pas atteint son objectif». C’est ce qui a faussé au départ dit-il, «l’atteinte du programme national autosuffisance en riz».

Le problème est que les superficies produisent une quantité beaucoup plus importante en contre saison qu’en or en hivernage. «Après la récolte en contre saison, on a beaucoup de problèmes pour aller en hivernage, libérer rapidement les parcelles en procédant à une récolte et il faut une mécanisation adaptée. Le problème majeur est qu’on a des baisses de rendements observées en hivernage depuis quelques temps ; ce qui décourage les producteurs », déplore-t-il. L’une des raisons qui justifie l’absence de couverture suffisante du marché en riz local est, affirme-t-il, «le prix n’est pas incitatif». «Il n’y a que le Sénégal qui vend le riz à 130 F/ Kg.

En Mauritanie le Kg coûte 190 F CFA. Ce qui fait que beaucoup de producteurs sont plus intéressés à y vendre leur récolte». Face à tous ces manquements qui ont entravé l’atteinte de l’objectif fixé de produire 1.600.000 tonnes en 2017, -ce qui n’est pas toujours le cas-, Ousseynou Ndiaye juge nécessaire une analyse des initiatives qui ont été mises en œuvre. « On devait faire une évaluation à mi-parcours ; on ne l’a pas fait. A la fin du programme, on devait faire aussi une autre évaluation pour voir qu’est ce qui a marché et ce qui ne l’est pas afin que les résultats soient beaucoup plus intéressants», recommande-t-il avant d’affirmer «qu’atteindre les objectifs fixés, il y a 4 ans, d’avoir 900.000 tonnes de Paddy pour la zone irriguée en cultivant 150.000 ha en raison de 6 tonnes à ha, n’a jamais été possible».

La superficie actuellement cultivée n’est que 80.000 ha avec un rendement très en dessous de l’attente. Selon toujours Ousseynou Ndiaye, l’Etat a fait beaucoup d’efforts en subventionnant le matériel agricole subventionné à 60% mais, les producteurs n’en bénéficient pas suffisamment. Pour lever les contraintes liées à la production et qui ne garantissent pas un meilleur approvisionnement du marché, Ousseynou Ndiaye propose à ce que le prix du riz local soit revu à la hausse. «Le riz ne doit pas être vendu à moins de 150/Kg », soutient-il. Il trouve aussi que le Paddy doit être subventionné à 20/Kg ou bien que les charges de concurrence soient réduites. L’Etat doit aussi protéger le riz local en instaurant une taxe sur celui importé .

WALY DIOUF, COORDONNATEUR DU PROGRAMME NATIONAL D’AUTOSUFFISANCE EN RIZ (PNAR) «D’ici 5 ans, quand on aura fini de réaliser l’ensemble des activités prévues, on aura un grand bond en avant»

Le coordonnateur du Programme national d’autosuffisance en riz, Waly Diouf justifie l’échec de l’atteinte de l’objectif fixé par le respect de l’engagement pris par les producteurs et les difficultés qu’il y a eues à mettre en œuvre un programme inscrit dans la politique. Il soutient qu’avec les deux autres nouveaux projets qui seront engagés permettront de combler le gap d’ici 5 ans.

Quand j’ai été nommé, l’image de la riziculture était peu reluisante. En plus de la faiblesse des aménagements ils s’y ajoutaient les problèmes liés à l’écoulement des eaux d’irrigation et de drainage, le manque de moissonneuse batteuse qui obéit aux normes… Il y avait un réel problème d’écoulement des eaux dans la vallée du fleuve Sénégal où il n’avait pas suffisamment de digues. Dans la riziculture fluviale, on peut considérer qu’elle était simplement abandonnée à elle-même. Le rendement était très faible. Il n’y avait quasiment pas d’équipements. C’est pourquoi, nous avons alerté les autorités et des ressources massives ont été investies pour essayer de résoudre les problèmes parce qu’on ne peut pas aller vers l’autosuffisance quand on n’a pas levé les goulots d’étranglement qui étaient là et qui empêchaient à la riziculture de se développer. La riziculture s’est grandement modernisée même si des retards ont été notés dans l’exécution de certains projets, on a constaté qu’il y a un non-respect des engagements. Quand on faisait le diagnostic on l’a fait avec les acteurs qui étaient engagés en disant : «si vous, gouvernement, faites ceci, nous ferons cela». Quand on a fait l’évaluation, nous nous sommes rendus compte et ça c’est à partir de 2017/ 2018 que sur pratiquement tout ce que l’Etat s’était engagé à faire sauf le retard de certains projets, il a grandement respecté ses engagements contrairement aux producteurs. L’un des engagements majeurs que les producteurs avaient pris c’était la double culture. C’est-à-dire, là où on faisait l’irrigation, ils y cultivent pendant la contre saison et l’hivernage encore un hectare. C’est ce qu’on appelle la double culture intégrante. Nous nous sommes rendus compte que les producteurs n’ont pas été en mesure de respecter cet engagement qui a couté à la production nationale presque 200.000 tonnes. S’ils avaient respecté leur engagement, on aurait une augmentation d’environ 200.000 tonnes. Le retard qui a été noté dans un des projets phares financé par Exim Bank Inde qui devait permettre au Sénégal avant même l’hivernage 2015 d’exploiter 2000 ha additionnels en double culture intégrale s’il avait été réussi, aurait permis une augmentation de 300.000 tonnes sur la production. Le cumul des 300.000 tonnes du fait de retard d’un projet plus 200.000 tonnes à cause du non-respect d’engagement des producteurs, fait 500.000 tonnes. En 2018, nous étions à 1100.000 tonnes c’est cela qui nous permettrait d’aller à 1600.000 tonnes. Voilà donc la combinaison de ces difficultés qui ont entrainé les blocages dans l’atteinte des objectifs qui étaient initialement fixés.

Où en êtes-vous avec la politique d’avoir une production suffisante en riz ?

Le programme national d’autosuffisance en riz a permis au Sénégal d’enregistrer de grandes avancées. On peut les résumer en trois points. Premièrement, la production a été multipliée par 3, entre 2008 et 2020 en passant de 408.000 tonnes à 1.450.000 tonnes actuellement. Deuxièmement, le riz sénégalais est présent sur tout le territoire national et en excellente qualité toute l’année. Il y a moins de 7 ans ce riz n’était présent que dans la vallée du fleuve Sénégal et un peu en Casamance de façon sporadique et la qualité était très mauvaise. Partout au Sénégal, y compris dans les villages qui ne produisent pas de riz, on y trouve la variété nationale. C’est parce qu’on a augmenté très fortement la production et qu’on a investi dans la transformation qu’aujourd’hui le riz est de bonne qualité. Les acteurs de la chaine de valeur reconnaissent tous aussi de très grands changements dans leurs conditions de travail. Il est vrai que malgré tous ces acquis continuent d’être importants. On vient de bénéficier de deux projets importants qui devraient aider à faire encore à la riziculture un très grand bond. L’un de ces projets est financé par la Banque islamique de développement (Bid) pour aider à lever un certain nombre de goulots d’étranglement. L’autre est cofinancé par le gouvernement du Japon. Nous pensons que d’ici 5 ans encore quand on aura fini de réaliser l’ensemble des activités prévues dans ces deux projets, on aura encore un grand bond en avant pour la riziculture.

A combien s’élèvent les investissements faits dans le domaine ?

Entre 2014 et 2019, l’Etat du Sénégal a investi sur ressources propres 75 milliards dans la riziculture pour améliorer le niveau d’accès des producteurs aux intrants. Quand on parle d’intrants ce sont les semences, les engrais, les produits phytosanitaires pour renforcer et moderniser les équipements de production. Le président de la République avait promis 2000 tracteurs. L’objectif a été dépassé. Il n’y avait pas de moissonneuses batteuses ; aujourd’hui on a un parc. Les équipements de récolte ont été fortement augmentés, les équipements de transformation aussi. On a amélioré sensiblement la maitrise de l’eau agricole ou l’on entend plus parler du problème d’eau qui n’arrive plus dans les bassins parce qu’on a investi dans l’aménagement.

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