Agitée depuis 1965, l’idée d’établir une Banque centrale commune africaine peine à se concrétiser. Des questions de fond préalables se posent à sa réalisation.
Le Commissaire chargé des politiques économiques et de la fiscalité intérieure de l’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa) a soulevé, jeudi, à Dakar, des questions de fond qui rendent difficile la naissance de la Banque centrale africaine (Bca) en gestation. ‘A priori, la Bca en gestation peut jouer un rôle déterminant dans la recherche et la promotion de la stabilité du système financier parce que sa vocation est de gérer la monnaie. Mais dans les conditions actuelles, la création de cette banque est difficilement envisageable’, a souligné El Hadj Abdou Sakho, ex-conseiller technique au ministère sénégalais de l’Economie et des Finances.
S’exprimant en marge du symposium de l’Association des banques centrales africaines (Abca) sur le thème ‘Rôle des banques centrales africaines dans la régulation et la stabilité du système financier’, Sakho n’a pas manqué d’arguments pour conforter ses propos. ‘La mise en place d’une Bca suppose que l’on centralise les réserves de change. La question qui se pose ici est de savoir si les pays accepteront de mettre leurs réserves à la disposition de la Bca’, a-t-il soulevé. Mais ce n’est pas le seul élément explicatif. La confusion entre la monnaie unique et la monnaie commune constitue également une forte préoccupation pour l’expert en politique économique et fiscale. ‘La question de la monnaie unique et de la monnaie commune n’est pas claire. La monnaie unique suppose qu’il n’y en aura pas d’autres comme c’est le cas pour l’euro. La monnaie commune va consister à servir d’unité et d’instrument d’échange coexistant avec les autres monnaies’, a-t-il relevé.
Poursuivant ses argumentaires, El Hadj Abdou Sakho a soulevé aussi le problème des convergences politiques macroéconomiques des pays africains. ‘Il faut un minimum de convergences des politiques macroéconomiques. Or, à part la zone Uemoa, il n’y a pas de mécanisme de surveillance crédible des dites politiques. Et c’est fondamentale pour la promotion d’une monnaie unique’, a-t-il fait remarquer. Et il en veut pour preuve le taux d’inflation. ‘Prenons l’exemple du taux d’inflation. Si les différentiels des taux d’inflation sont importants dans une zone à monnaie unique, celle-ci devient en réalité une simple illusion d’optique. Car, nous allons assister à des sous – monnaies avec des valeurs internes différentes d’un pays à un autre’, a-t-il expliqué. ‘En effet, la monnaie est une créance sur les économies, c’est-à-dire sur les biens et services que l’économie produit’, a-t-il justifié.
El Hadj Abdou Sakho d’ajouter : ‘Donc, l’inflation a pour objet de dévaluer cette créance. L’ampleur de cette dévaluation est fonction du taux d’évaluation. Si celui-ci est sensiblement le même d’un pays à l’autre, la valeur interne de la monnaie reste inchangée dans une même zone monétaire. A l’inverse, c’est-à-dire lorsqu’il y a divergence des taux d’inflation, il y a désalignement des taux de change réel et apparition de ce qui ressemblerait à des sous multiples de la monnaie commune’.
Pour le Commissaire de l’Uemoa, la monnaie est un instrument de facilitation des échanges. Ce qui est fondamental à son avis, c’est d’avoir des appareils productifs complémentaires afin d’accroître les échanges.
Ndakhté M. GAYE
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