Brûlot d’Ousmane Sonko sur le pétrole et le gaz sénégalais: Dakarmatin vous livre les bonnes feuilles

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Samedi prochain, l’inspecteur principal des Impôt et Domaines par ailleurs président de Pastef Les Patriotes va procéder à la cérémonie de dédicace de son livre consacré à la gestion des ressources naturelles du Sénégal (pétrole, gaz, zircon). En attendant, votre site Dakarmatin vous propose les bonnes feuilles du brûlot d’Ousmane Sonko intitulé « Pétrole et gaz au Sénégal : chronique d’une spoliation ». Voici un premier jet.

« Pétrole et gaz au Sénégal Chronique d’une spoliation »

……….Quand on examine leur profil, on est frappé par la singularité des entreprises Contractantes avec l’état du Sénégal dans le domaine des hydrocarbures. Il est vrai qu’aujourd’hui, les compagnies major s’investissent de moins en moins dans l’activité d’exploration et préfèrent laisser les juniors, ou même de petites indépendantes,  prendre les risques importants inhérents à cette étape, pour ensuite négocier leur entrée sous forme de joint-venture ou de contrat d’affermage, à défaut de racheter tout bonnement les permis.

Nous pouvons donc admettre que les états non pétroliers recourent à ces dernières, pour explorer leur potentiel en hydrocarbures, en leur offrant d’ailleurs un cadre incitatif très attrayant.

Cependant, cela ne doit en aucun cas justifier de transiger avec les exigences de transparence, de crédibilité et des références de l’opérateur. Si l’on regarde attentivement le profil de la plupart des entreprises avec lesquels le Sénégal a contracté, trois constats se dégagent :

–       Des sociétés à très faible capitalisation créées pour la circonstance

Le secteur des hydrocarbures, de l’amont à l’aval, est un secteur exigeant qui nécessite de gros moyens financiers et techniques. C’est pourquoi il est requis des entreprises qui soumissionnent pour un bloc donné de justifier de références techniques et de capacités ou garanties financières conséquentes.

Tel n’est pas le cas de certaines compagnies auxquelles ont été attribués certains des blocs les plus prometteurs du bassin sénégalais.

C’est le cas de PETRO-TIM Limited, créé le 19 janvier 2012 avec un capital social de seulement 25 millions de francs CFA (50 000 Dollars US). Cette entreprise, qui d’évidence n’était qu’un écran, rétrocéda à TIMIS Corporation les blocs de Cayar et Saint-Louis offshore profond à peine deux ans plus tard. TIMIS Corporation, elle-même également créée pour la circonstance, cédera un mois plus tard 60% de ses intérêts à KOSMOS, sous la forme d’une convention d’affermage.

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C’est le cas ensuite de TENDER OIL AND GAS CASAMANCE SARL, créée le 05 septembre 2013 avec un capital social de 10 millions de francs CFA. C’est avec elle que le gouvernement a conclu des CRPP pour les blocs de Saloum et Sénégal Onshore Sud, dans une totale opacité. Au moment où j’écris ces lignes, TENDER OIL, par convention de cession de parts déposé le 08 novembre 2016 par devant Maître Alioune Ka, notaire, a cédé la totalité de ses parts sociales à une société émiratie inconnue dénommée CONSULTANCY FZE. La cession est consentie et acceptée, curieusement, au prix de 10 millions de francs CFA, soit le montant du capital social.

–       Des sociétés à la réputation souvent sulfureuse

Certains des hommes d’affaires tapis derrière ces compagnies trainent des réputations sulfureuses de mauvais garçons des affaires.

L’australo-roumain, Frank Timis, est un homme d’affaire pour le moins atypique. Sa ténacité est toutefois à saluer, il s’est lancé dans les affaires sur les quatre continents que sont l’Europe, l’Australie, l’Afrique et l’Amérique. Tout y est passé, de ses débuts dans le transport par camion, au pétrole maintenant, prolongement certes logique de ses activités minières.

Parmi ses entreprises phares,  Gabriel Resources – African Minerals –   Pan African Minerals – European Goldfields, pour les activités minières, et African Petroleum – Petroleum International – Regal Petroleum pour les activités pétrolières et gazières.

Mais l’homme a souvent essuyé des échecs[1] et a toujours été controversé, tantôt pour ses méthodes dans les affaires, tantôt pour ses techniques d’exploitation.

De 1996 à maintenant, il s’est plus distingué par des pratiques peu orthodoxes telles :

–       Difficultés financières avec ses créanciers, soupçons de collusion avec les autorités administratives et oppositions avec les populations et les organismes de défense de l’environnement[2] ;

–       Bulle spéculative autour du pétrole roumain, ukrainien mais surtout grecque, et enquête pour soupçon d’appartenance au crime organisé[3] ;

–       Propension au sous-investissement et au non-respect des engagements souscrits dans les contrats[4].

–       Il a même était déchu, depuis octobre 2014, de toute responsabilité exécutive de la compagnie African Petroleum, à laquelle deux licences d’exploration ont été attribuée au Sénégal, exigence préalable à la cotation de l’entreprise à la bourse d’Oslo.

De manière plus personnelle, la presse sénégalaise a fait relation de ses multiples démêlés avec la justice pour des délits allant du vol, de l’excès de vitesse au trafic de fortes quantités de drogue[5].

Ce n’est donc presque pas surprenant d’entendre son nom cité dans le fameux dossier des « Panama papers ».

Son compatriote, ami et partenaire, l’homme d’affaire roumain Ovidiu TENDER, ne présente guère mieux, lui à qui l’Etat du Sénégal a cédé, au mois de février 2016, deux blocs de pétrole, à savoir Saloum et Sud Sénégal Offshore. Le patron du groupe TENDER a été condamné, en juin 2015, à une peine d’emprisonnement de 12 ans et 7 mois par le tribunal de Bucarest en Roumanie pour fraude, corruption et blanchiment d’argent.

Enfin, Cairn Energy et KOSMOS ont été exclu de l’univers d’investissement du Fond de Pension de l’Etat norvégien, sur recommandation de son Conseil de l’Ethique[6] ; à cause notamment de leur

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investissement continu dans l’exploration pétrolière au large des côtes du Sahara Occidental.

Voilà le profil des « investisseurs » auxquels nos gouvernants ont confié notre pétrole et notre gaz, et dont parle le Premier de nos ministres lorsqu’il déclare : « Par contre, d’autres évoquent la question en versant dans l’invective et la désinformation, véhiculant de fausses allégations et des contrevérités pour tromper les sénégalais, décourageant en même temps les firmes internationales engagées dans l’exploration et le développement de ces ressources potentielles. ».

Lesquels de nous, pauvres citoyens désarmés, ou d’eux, « investisseurs téméraires », devraient-ils avoir peur des autres ?

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–       Des compagnies nichées dans des paradis fiscaux

Le troisième constat, qui a son importance en la matière, c’est que beaucoup de ces compagnies, contractantes avec l’Etat du Sénégal pour l’exploration ou l’exploitation d’hydrocarbures, sont domiciliées dans des paradis fiscaux.

Et ce n’est pas une simple coïncidence que celles qui y résident soient celles-là même dont la crédibilité technique et financière et la réputation en affaire  restent à démontrer.

Le paradis fiscal, ou tax haven en anglais (refuge fiscal), peut être défini comme un pays ou territoire à fiscalité réduite ou nulle, où le taux d’imposition est jugé très bas en comparaison avec les niveaux d’imposition existant dans les pays de l’OCDE[7]. Il réunit donc quatre critères que sont : des impôts inexistants ou insignifiants, une absence de transparence, une législation empêchant l’échange d’informations avec les autres administrations et enfin une tolérance envers les sociétés écrans ayant une activité fictive.

La domiciliation dans les paradis fiscaux répond généralement à un souci planifié d’échapper à tout ou partie des impôts et taxes du pays d’exercice des activités, par des mécanismes d’optimisation fiscale ou, pire encore, de fraude fiscale.

Pas étonnant de trouver dans le tableau suivant, les mêmes sociétés « douteuses » dans ces zones de non droit fiscal.

A noter également que le trio Frank Timis, Eddy Wang et Ovidiu Tender détient à lui seul 6 blocs pétroliers au Sénégal, qui s’avèrent d’ailleurs parmi les plus prometteurs.

RAISON SOCIALE

ADRESSE

SENEGAL HUNT OIL

FILIALE HUNT OIL, société de droit des Iles Cayman

ELENILTO Sénégal LLC

régulièrement enregistré à Anguilla, Kamilah House, Rock Farm, British West Indies

PETRO-TIM LIMITED

Société de droit des Iles Cayman ayant son siège à Georges Town, Grand Cayman

KOSMOS SENEGAL

REX Atlantic Ltd

Filiale à 100% de REX OIL & GAS, société de droit des Iles Vierges Britanniques

TENDER CASAMANCE OIL & GAS Ltd

8 Rue 2 Chalkidos, Larnaca, Cyprus

TIMIS CORPORATION Limited

société anonyme assujettie à la Loi des Iles Vierges Britanniques, enregistrée au Registre de Commerce de Road Town

Cet état de fait prépare à n’en point douter, quand surviendra la période d’exploitation, une évasion ou fraude fiscale à grande échelle. Ce qui sera d’ailleurs facilité par la très grande porosité de notre administration fiscale confrontée à des difficultés telles le manque d’effectifs en quantité et en

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qualité, le clientélisme dans la gestion des carrières, mais aussi et surtout la gestion malsaine des grands dossiers, qui instaure toujours un climat de suspicion de corruption et, plus grave encore, démoralise les agents sérieux et intègres.

Le refus injustifiable du directeur général des impôts et des domaines de tirer les conséquences fiscales des cessions d’intérêts dans l’affaire PETRO-TIM en donne un avant-goût inquiétant.



[1] Echecs dans ses premières activités : ses débuts par le transport en Australie, les premiers balbutiements dans le secteur minier En 1992 ( Morwest Holdings Pty Ltd). Echecs aussi avec trois autres sociétés: Riverdale Mining, Timis Corporation et Carpathian Investments, avec Ioana Timi? et sa sœur, Ioana Majdik, toutes liquidées par Timi?.

[2] Projet  « Rosia Montana » en Roumanie, avec sa compagnie GABRIEL RESOURCES.
[3] Acquisition par sa société REGAL PETROLEUM, de 60% d’un champ pétrolifère grecque de Kavala en Septembre 2003. Timis, après un battage médiatique sur les capacités du champ qui a élevé la valeur marchande de sa société et mobilisé des investisseurs, a secrètement accepté de vendre les actifs et a démissionné de la direction de celle-ci.
[4] Sa société PAN African, gestionnaire des mines de Tambao au Burkina FASSO, a été épinglée par un récent rapport d’enquête parlementaire burkinabé pour n’avoir pas honoré les engagements contenus dans l’Accord-cadre de partenariat public privé (PPP), notamment ceux relatifs au chemin de fer Kaya-Dori-Tambao et la route Dori-Tambao.
[5] Journal « Enquête Quotidien » du 19 octobre 2016.
[6] Communiqué du BP de l’ACT n°6 du 30 juillet 2015 ;
[7]  Rapport de l’OCDE de 1987 relatif à la fiscalité internationale

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