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Cécile Faye, directrice du stade Lss : La Première dame de «Senghor»

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Un vent de renouveau a soufflé sur le stade Léopold Sédar Senghor en novem­bre dernier et installé Cécile Faye comme maîtresse des lieux.
Première femme à diriger un stade, la tâche sonne comme un défi que l’enfant de Pambal (Thiès) espère relever comme elle en a fait dans d’autres missions. Handballeuse, professeur d’éducation physique, directrice de l’école des maître d’armes (Escrime), celle qui toute sa vie durant a vibré au rythme de sa passion, se retrouve encore aujourd’hui au service de celle-ci. Pas à pas avec celle qui a donné vie à l’Escrime au Sénégal.

Mbagnick Ndiaye est allé la tirer de son univers calme pour la mettre sous les feux des projecteurs du stade Léopold Sédar Senghor. Cécile Faye, jusque-là inconnue du monde du football, se retrouve tout d’un coup au milieu d’un terrain inconnu. Ses qualités de gestionnaire ont fini de convaincre la hiérarchie qu’elle est la personne idéale capable de gérer le «bijou» des infrastructures du Sport sénégalais.
«Le stade Léopold Senghor méritait qu’on se penche sur son sort tellement son état était pitoyable. Alors, connaissant les qualités professionnelles et managériales de Cécile, elle était mieux placée pour le redresser», explique le ministre des Sports. La mission qui lui est confiée est aussi vaste que les problèmes qui minent «Senghor». Mais la native de Pambal (Thiès) la prend avec toute la simplicité qui la caractérise.
Trois jours ont suivi la date de sa nomination à la direction du stade avant que Madame Faye ne prenne fonction dans ses bureaux. Dans son tailleur sur mesure, reflet de la femme raffinée et qui épouse parfaitement son physique d’athlète, la maîtresse de «Senghor» descend de son véhicule et emprunte le couloir qui mène à son bureau. Elle est accueillie par une dame qui l’aborde. «Il paraît que le stade a un nouveau directeur, est-ce que vous le connaissez ?», lui demande son interlocutrice. Avec le sourire qui ne la quitte quasiment jamais, Cécile lui rétorquer : «Oui, c’est moi». Mais la réponse servie par la dame teint noir sonne comme une blague chez son vis-à-vis qui pouffe de rires. Normal, car rien du look de la nouvelle directrice, trop simple au goût de son interlocutrice ne semble lui confèrer ce rôle.
A la place des bijoux extravaguants qu’aiment se parer les grandes dames, madame la directrice fait dans les chaînettes et des boucles d’oreilles à peine visibles.
En effet, cet épisode lui rappelle le premier jour au lycée de Ziguinchor. Fraîchement sortie de l’Inseps, le professeur d’Education physique est affecté au lycée Djignabo. La jeune femme reste dans sa peau. Pleine de vie, elle refuse une quelconque métamorphose. Jean, basket, la tête rasée à la garçon, l’enseignante débarque à son service. «Lorsque je me suis présentée à l’entrée, le vigile m’a indiquée une porte me disant que c’est par là où passent les élèves», se rappelle-t-elle en rires.
Mais que ses détracteurs déchantent. Cécile Faye n’est pas de ceux qui se laissent intimider par des préjugés. Derrière son bureau, situé au niveau trois du bâtiment qui abrite le stade, la dame dans son pagne tissé de couleur noire, imbue de ses valeurs traditionnelles, étudie à fond les dossiers. La Sérère bon teint n’a pas eu de temps de répit. Elle hérite d’un stade où tout ou presque est à refaire. La nouvelle directrice de «Senghor» entame une prise de connaissance des problèmes quand un autre plus grave surgit. En effet, un mois après sa nomination, le stade tombe sous le coup d’une sanction d’un an. «C’est regrettable, j’aurais voulu avoir plus de temps de présence à la direction», disait-elle à l’époque.

Suspension du stade, un mal pour un bien
Mais le vin est déjà tiré par des supporters inconscients et il faut le boire. Alors, pour Cécile Faye, l’heure est au travail. «Nous allons profiter de l’année que va durer la suspension pour nous attaquer aux travaux de réfection du stade».
Dans l’accomplissement de sa mission, la première femme à diriger la plus grande infrastructure sportive du Sénégal ne souhaite pas faire moins que ses prédécesseurs. «Je veux faire un pas de plus sur ce qu’ils ont déjà réalisé à la tête de la structure», se fixe-t-elle comme objectif. Une ambition qui sonne comme un défi que l’agent du ministère des Sports compte relever et ainsi faire taire tous ceux qui douteraient de ses capacités à mener à bien cette tâche. «Nous avons réclamé la parité donc à nous de prendre nos responsabilités», admet-elle.
Cette dame de fer n’est pas à son coup d’essai. Tout le temps qu’elle a passé dans le milieu du sport a été un combat pour se faire une place dans le terroir des hommes. «Si vous êtes une femme dans le milieu sportif, on vous colle beaucoup de choses. Mais il faut faire la sourde oreille», tempère madame, comme il lui arrive de riposter.
«C’est une dame avec une grande force de caractère. Elle ne se laisse jamais faire. Je me souviens, un jour elle a giflé un homme pour ça», témoigne Alain Monteiro, un encadreur de Cécile, alors handballeur au collège à Thiès. Une qualité que lui reconnaît également Mbagnick Ndiaye. «C’est une dame dotée de caractère qui ne veut pas souvent qu’on déborde», témoigne le minis­tre.
Son choix pour le sport est guidé par la passion. Leur histoire commence à la Cité du Rail où Cécile a été amenée pour poursuivre son cursus scolaire. Pensionnaire du Collège privé catholique Sainte-Ursule de Thiès, elle flirte avec la pratique sportive. Le premier contact avec le handball lui donne goût à la chose. La jeune femme, excellente dans les arrêts de balle, finit de faire l’unanimité dans son établissement et même au-delà. Alors qu’elle est en seconde au Lycée Saint-Gabriel, Cécile tape dans l’œil des détecteurs de talents. Ils voient en elle la joueuse idéale pour garder les cages de l’Us Rail. Cécile Faye se lance dans une carrière prometteuse. «Elle était bien partie pour réussir dans la discipline. Déjà elle a été championne avec son club», se rappelle son encadreur de l’époque. Mais le Bac siffle la fin de la partie sans même que son désir ne soit assouvi.

Escrime : une tireuse sans armes
Elle décide de jouer la prolongation, mais sur un autre terrain. Madame la directrice tourne le dos aux autres études qui faisaient rêver ses camarades et prépare alors le concours d’entrée à l’Institut Supérieur de l’Education Populaire et du Sport (Inseps). Son physique de titan, son mental de fer majoré par son intelligence, ne laissent aucune possibilité à l’échec.
En octobre 1982, l’ancienne pensionnaire du Lycée Saint-Gabriel fait son entrée à l’Institut qui forme les professeurs d’Education physique. Durant sa formation, la gardienne de but est coptée par la Jaraaf de Dakar où elle continue sa pratique. Et ce jusqu’à l’obtention de son diplôme, cinq ans plus tard. Elle décroche le ticket pour le lycée Djignabo. Au bout de deux années passées dans la Casa­mance, l’enseignante est affectée au lycée John Kennedy où elle va servir pendant une année, avant de faire cap vers le Nord.
Mme Faye est affectée au Lycée Ahmet Fall de Saint-Louis. Après sept années de service, sa trajectoire d’enseignante est coupée nette par une maladie qui l’éloigne de ses amours. «Je souffrais de ce qu’on appelle le sciatique qui a fait que j’ai arrêté l’enseignement», confie-t-elle. La rupture et brusque et dure à accepter. Cependant, Cécile n’a pas eu le temps de s’apitoyer sur son sort qu’une nouvelle opportunité s’offre à elle. La présidente de la Commission éducation et culture du Cnoss est affectée au ministère du Sport où elle sert de 1997 à 1998 à la direction de l’Edu­cation physique et des activités sportives, devenue la Daps. Avant d’être invitée par feu Wahab Ba, alors président de la Fédération sénégalaise d’escrime à l’appuyer pour la promotion de cette nouvelle discipline. «Puisqu’elle avait une bonne maîtrise de l’Anglais, elle a aidé Wahab dans la mise sur pied de la structure en charge de l’Escrime», indique Alain Monteiro. Une nouvelle histoire, cette fois avec l’Escrime.
Le professeur d’Education physique, passionnée de handball se lance dans un terrain inconnu. «Je me posais des questions parce que je n’avais aucune notion de l’Escrime auparavant», dit-elle. Wahab Ba était là pour lui donner l’assurance qu’il fallait. C’est lui qui guidera ses pas jusqu’à son rappel à Dieu en 2008. La perte du maître est un coup dur pour la jeune dame qui prenait ses marques dans cette discipline. Mais elle avait déjà fini de convaincre qu’elle avait sa place dans la manie de l’Epée, du Sabre et du Fleuret. Cécile se voit confier la Direction administrative et financière de l’Ecole nationale des maîtres d’armes, avant d’accéder à la direction générale. «Nous avons été satisfait de son travail. C’est ainsi que nous l’avons totalement responsabilisée en la nommant directrice de ce centre qu’elle dirige avec beaucoup de brio», se félicite Mbagnick Ndiaye.
La voie était toute tracée pour accéder au plus haut niveau. Sa gestion de l’école est appréciée jusqu’au niveau de la Fédération internationale où elle a été admise dans la Commission de promotion de la discipline. La dernière trouvaille de l’ancienne pensionnaire de l’équipe de hand du Jaraaf a été une nomination comme présidente de la Commission chargée de la promotion et de la publicité à la Fédération internationale d’Escrime. Et c’est avec un immense plaisir que Mbagnick Ndiaye l’annonce devant tout le monde sportif réuni au Terrou-Bi, lors de sa première rencontre avec le Cnoss. «Elle est devenue la première femme noire africaine à diriger une commission au sein de la Fédération internationale d’escrime et c’est tout à l’honneur de l’escrime sénégalais et africain», s’est réjouit M. Ndiaye.

«Je voulais être une religieuse»
Avec ce riche parcours, la directrice du stade «Senghor» ne regrette pas d’avoir raté sa vocation de départ. En effet, quittant son village natal pour se rendre à l’internat du collège Sainte-Ursule de Thiès, elle s’était déjà mise dans les habits d’une bonne sœur. «Je voulais être une religieuse», se souvient-elle, dans un rire fou. Mais évoluant dans un environnement sportif où le sport scolaire et universitaire faisait ses beaux jours, Cécile finit par se laisser entraîner. Et la rigueur des bonnes sœurs n’a pu rien y faire. «Il m’arrivait de mentir à la sœur pour avoir l’autorisation de sortir et aller m’entraîner», confie celle qui aujourd’hui s’est fait un nom dans le landerneau sportif.
Présidente de la Commission éducation et culture, membre du Comité directeur et de la commission femme et sport du Cnoss, en plus de ses responsabilités au niveau international, Mme Faye est aussi formatrice dans le cadre des cours avancés en management du sport. Si elle n’est pas allée au bout de sa vocation, elle a gardé de son passage chez les nonnes, des qualités intrinsèques. Catholique, réservée, Cécile fait de la rigueur son maître mot. «C’est ma nature forgée par l’éducation que j’ai reçue.  J’ai des principes qui font que quand on vous confie une tâche et qu’on vous donne un délai, je pense que la moindre des choses c’est d’essayer de la faire», dit-elle. Une attitude pourtant que certains lui reprochent. «C’est sa rigueur qui crée souvent son différend avec les autres membres de la fédération. Elle est tellement rigoureuse sur les principes, les méthodes et les décisions prises que souvent elle dérange», indique le ministre des Sports.
A défaut d’être une bonne sœur, Mme Faye est bonne mère. Mariée et mère de famille, cette femme trouve le temps, malgré un agenda très chargé, de s’occuper de ses deux enfants. Même si ces derniers trouvent à redire sur le look «trop juvénile» à leur goût de leur maman. «Un jour, je devais accompagner ma fille à son école pour récupérer son bulletin. J’ai mis mon jean et mes baskets et je lui ai dit de venir avec moi. Elle me dit qu’elle n’y va plus parce que j’avais l’air d’un garçon manqué», rappelle-t-elle en éclatant de rires. Une remarque qui ne l’a pas dérangée outre mesure. «Ça ne me dérange pas, je suis à l’aise. En plus, c’est ma nature. Mes cheveux ne sont pas très longs et ça se dégarni de plus en plus», se justifie-t-elle. Justement, c’est avec cette même simplicité que madame la directrice assure ses nouvelles fonctions de Première dame de «Senghor».

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