Les départs intempestifs enregistrés ces derniers temps au sein du parti Rewmi de l’ex-Premier ministre Idrissa Seck, dont la presse et tous les relais de la «seckophobie» ambiante font leurs choux gras, posent un problème autrement plus important. Un problème qui appelle à réfléchir sans rancune ni retenue sur le péché qu’aurait commis cet homme d’envergure, objet d’une campagne de dénigrement tous azimuts qui se discrédite par ses propres excès.
Un homme dont le charisme et la résilience face aux épreuves ont fini par convaincre ses concurrents et adversaires qu’il faut le marginaliser à tout prix, même s‘il peut tenir d’autres promesses pour la Nation sénégalaise qui a cruellement besoin de toute sa réserve de talents, après deux alternances sans issue, pour se faire ouvrir la voie d’une demande sociale satisfaite.
D’autres départs non moins significatifs et peut-être plus importants, n’ont pas suscité tant de bruit. Le porte-drapeau du journalisme d’investigation n’a-t-il pas abandonné le métier qui lui vaut sa popularité pour se reconvertir dans la politique politicienne ? D’autres personnalités connues de la «société civile» ne se sont-elles pas clairement mises du côté du manche tandis que d’autres encore, plus discrets, ont changé de pied et ne manqueront pas de traverser le miroir.
C’est vrai qu’il est plus facile de parler de la paille qu’il y a dans l’œil du voisin que de la poutre fichée dans le sien. Mais si les départs des Rewmistes peuvent se justifier par la longue traversée du désert que leurs auteurs ont connue, on ne peut pas dire autant de ceux de la deuxième catégorie qui ne s’expliquent que par une ambition longtemps contenue de partager le gâteau du pouvoir.
S’est-on autant offusqué de ces départs «pour convenance personnelle», qui ne sont qu’une tempête dans un verre d‘eau, que des questions aussi cruciales qui se posent à notre jeune démocratie, encore de façade à bien des égards, et qui ont noms, entre autres, une loi interdisant la transhumance sous toutes ses formes, une autre mettant définitivement fin au cumul du mandat de président de la République avec celui de secrétaire général d’un parti politique. Ou encore la limitation du nombre pléthorique de formations politiques reconnues, sans oublier l’urgente nécessité de faire adopter une loi réduisant effectivement la mandant en cours du chef de l’Etat de sept à cinq ans, comme il l’a lui-même solennellement promis au Peuple qui l’a élu par défaut.
Tous ces hommes politiques d’horizons divers, regroupés pour l’essentiel au sein de la Cap 21, venus goûter à la sauce wadienne au cours des 12 ans de bamboula, n’ont-ils pas commis un péché plus mortel que le péché véniel qu’aurait commis Idrissa Seck pour avoir théorisé les retrouvailles de la famille libérale, et fait des va-et-vient au palais de la République, privilégiant ainsi le dialogue sur la séparation définitive qui a brouillé les cartes du jeu démocratique ?
De toute évidence, on a forcé le trait en accusant à tort celui qui aura le plus contribué, dans les rangs du Pds, à baliser la voie du retour d’exil d’un Wade désemparé et sans le sou que l’on est allé chercher en France à la veille de l’historique élection présidentielle du 22 mars 2000, la plus agréable surprise dans la vie d’un homme qui n’a cessé de surprendre depuis.
En vérité, il ne se passe rien de nouveau sous le soleil de la transhumance qui, en d’autres lieux et temps, s’est toujours traduit par le sacrifice des convictions d’hier sur l’autel des ambitions personnelles d’aujourd’hui. Et l’on entonne la même rengaine pour se disculper ! La transhumance constitue ainsi un nouveau malaise qui est venu s’ajouter au rite politique caractérisé par ailleurs par les investitures, la première cause de friction militante dans les rangs.
D’où qu’ils viennent, les transhumants butinent pour la même ruche : la quête des maroquins. Heureusement que ce n’est pas la fine fleur des militants qui fait défection. Les vrais militants sont insubmersibles ! La préférence politique est comme une plante aquatique, elle finit toujours par remonter à la surface.
Pis encore, il est difficile de tourner casaque en politique sans pratiquer la révérence ni la déférence. Bien souvent, on est obligé d’assister, passif, à la mise en œuvre d’orientations et de mesures que l’on désapprouvait hier, si tant est qu’on s’en soucie.
Transhumer, c’est accepter de tirer les marrons du feu sans avoir la garantie de se faire renvoyer l’ascenseur au delà du court terme. Et il ne sert à rien de chercher à gagner la confiance de ceux qui te l’ont refusée en perdant celle de ceux qui te l’ont accordée. La règle de survie par excellence, pour un politicien, est d’être préparé à rompre toutes les amarres, à prendre le risque de mourir pour être digne de la vie.
Le Rewmi et son leader n’ont donc pas à prendre ombrage du mauvais procès qui leur est fait. Les voix discordantes qui s’élèvent au sein de la mouvance présidentielle et les nombreuses vagues de sympathie qui nous viennent de partout incitent à ne pas s’offusquer de la bave du crapaud qui, comme on le sait, n’atteindra jamais la blanche colombe. Il y a assurément plus de souteneurs silencieux que de détracteurs véhéments.
Ce ne sont pas les départs qui font la nouveauté, mais la légèreté avec laquelle la classe politique, toutes tendances confondues, s’évertue à donner tort à un homme pourtant victime «du plus gigantesque complot d’Etat de l’histoire politique du Sénégal au cours de la décennie écoulée», comme il aime à le dire lui-même. Quelle injustice !
Avons-nous besoin d’instruire un procès en diffamation contre un homme dont le seul tort est de refuser la dictature d’une famille qu’il a pourtant aidé à accéder au pouvoir, et le mérite d’avoir exigé de celle-ci qu’elle s’occupe des urgences du pays au lieu de tomber dans les travers du régime qui l’a précédé ?
A-t-on déjà oublié que si l’alternance de 2000 n’a pas tenu ses promesses, c’est surtout en raison du conflit, auquel aucune solution n’a pu être trouvée de l’intérieur, qui a opposé Wade à l’homme qui aurait pu l’aider à les tenir ?
En place et lieu, on a eu droit au retour en grâce de ceux qui, jusque là en pénitence, avaient fait défection pendant les moments de braise, aujourd’hui réduits au silence ou en attente de leur heure pour rebondir, et à la valse des transhumants venus de l’autre côté du miroir pour éviter la traversée du désert à laquelle ils étaient condamnés.
Avoir commis une faute ne justifie pas qu’on la répète. Ces derniers doivent se convaincre que la reconstitution de la famille qui leur a valu leur gloire d’hier ne peut se faire qu’autour de Idrissa Seck, personnage le plus rayonnant et héritier le plus légitime. C‘est cela le sens de l’histoire et l‘orientation que dictent les réalités politiques du moment, si l’objectif est de changer la donne.
Tout se passe comme si, par amnésie, on oublie que c’est précisément la même cécité politique qui a empêché le Parti socialiste (Ps) de soutenir la candidature de Niasse en 2012 -ce qui aurait été un ticket gagnant- qui explique que le Parti démocratique sénégalais (ou la famille libérale) n’ait pas réussi à susciter en son sein le débat démocratique qui l’aurait sauvé des dangers de la pensée unique, résultant autant de pensées convenues que d’une absence de pensée dans laquelle Wade l’avait d’abord enlisé, pour lui faire perdre le pouvoir ensuite, sans s’imaginer le moins du monde le tsunami qui allait les engloutir.
Cette tendance à l’égotisme pur et dur, si mal venue sur le terrain politique où la réflexion pure doit l’emporter sur toute autre considération, n’a fait que compliquer les choses. Ne faut-il pas, à ce point précis, réfléchir sur l’état de la pratique politique qui décidément vole trop bas au pays de Ndiadiane Ndiaye, où la frénésie des politiciens professionnels sert de repoussoir à l’absence des vrais intellectuels de la scène politique nationale ?
Si les considérations égotistes peuvent à ce point fausser le jeu politique, de manière à rendre aléatoire l’élection du président de la République, comment ne pas s’inquiéter d‘une telle dérive de l’art politique ? Sommes-nous enfin aux antipodes de la marche actuelle du monde où, de plus en plus, l’activité politique vise à se rapprocher des préoccupations des populations, au lieu de lâcher la bride à une classe politique qui ne brille que par son indifférence, sa déconnexion des réalités du pays ?
C’est vrai que Idrissa Seck aurait pu privilégier la démarche consistant à briguer le suffrage des Sénégalais isolément, à celle qui a consisté à vouloir coûte que coûte s’emparer de l‘appareil du Pds. Mais peut-on reprocher à un homme politique de vouloir sauver sa famille politique en lui proposant des retrouvailles qui lui auraient permis non seulement d’éviter de connaître le même sort que le Ps avant, mais aussi de garder le pouvoir pendant encore longtemps ?
Mieux, quand bien même cette démarche peut être considérée comme une faute (grave), elle ne suffit pas pour expliquer la levée de boucliers qu’elle a provoquée, contre un homme pourtant aimé des Sénégalais et capable d’être une alternative crédible. La justice immanente a déjà commencé à faire son œuvre, en attendant que celle des hommes lui emboîte le pas.
C’est pourquoi ceux qui s’acharnent à décréter la mort politique de Idrissa, tout comme ceux qui le quittent en désespoir de cause, n’ont qu’à se convaincre que si l’état des connaissances en matière de pratique politique au Sénégal se limite à la légitimation éhontée de la trahison, il y a de quoi s’arrêter un moment pour réfléchir sur le dévoiement de celle-ci.
Cette pratique, ici comme ailleurs, n’a jamais permis de changer quelque chose dans le camp de ses adeptes, encore moins dans la République tout entière. Les partisans et/ou promoteurs de la transhumance n’ont brillé que par la laideur de leur geste qui jure d’avec nos valeurs culturelles fondamentales, le génie créateur de l’homo senegalensis.
Du reste, venons-en aux arguments servis çà et là pour justifier la trahison de la cause prétendument défendue, et de l’homme que l’on s’était choisi comme guide, un leader qui leur a tout donné, jusqu’aux portefeuilles ministériels qu’ils auraient dû remettre, ne serait-ce que pour rendre leur action crédible.
On a reproché à Idrissa d’avoir critiqué l’action gouvernementale après seulement un an d’exercice, d’avoir réclamé des consultations plus larges et ouvertes sur les questions d’intérêt national, ou d’avoir pris une décision jugée prématurée que la suite des événements tranchera.
Au lieu d’être son fossoyeur, les auteurs de ces départs pour le moins gênants et sans lendemain, venus si tard alors que les signes avant-coureurs s’accumulaient, seront sans le vouloir le fourrier d’un homme qui continue de faire son petit bonhomme de chemin, avec ceux qui savent rester dans les clous.
Pour conclure, la leçon qui s’impose à tous les chefs de parti, à gauche comme à droite, au pouvoir comme dans l’opposition, tous tentés par le règne sans partage, est qu’ils doivent s’abstenir de pratiquer le culte de la personnalité, pour valoriser les responsables qui les entourent au lieu de faire le vide autour d’eux, et être assez consensuels pour vouloir travailler avec tous, s’ils aspirent à une démocratie digne de ce nom, tant au niveau micro (au sein des partis) que macro (entre les partis).
Papa Mandialbère MBOUP
Rewmi Khombole
[email protected]
Vous l’avez dit mr MBOUP,et je vous cite
Un homme dont le charisme et la résilience face aux épreuves ont fini par convaincre ses concurrents et adversaires qu’il faut le marginaliser à tout prix, même s‘il peut tenir d’autres promesses pour la Nation sénégalaise qui a cruellement besoin de toute sa réserve de talents, après deux alternances sans issue, pour se faire ouvrir la voie d’une demande sociale satisfaite.
mais contrairement à beaucoup,je pleins ceux las qui ont quitté la barque,parce que pour beaucoup d’entre eux,je connais leur amour pour REWMI et son leader; et je suis convaincu,que partout ou ils se trouvent,ils sont tristes et malheureux.
je vous felicite pour ce texte tres reflechi,et qui devrait servir à tous les hommes qui ont de l’ambition pour ce pays
Idrissa Seck est la seule alternative crédible