Déconnecter un pays d’Internet n’est pas une tâche facile. Sauf dans certaines régions du monde, comme en Corée du Nord, où les infrastructures sont peu nombreuses et sous le contrôle d’un État.
La coupure d’Internet durant plus de neuf heures en Corée du Nord lundi pose la question de la facilité avec laquelle on peut choisir de déconnecter un pays entier du réseau. Il n’existe pas de bouton d’urgence permettant d’instaurer un couvre-feu sur Internet, par un pays ou par un État qui voudrait lui nuire. Des méthodes peuvent néanmoins conduire à des coupures à grande échelle. Avant la Corée du Nord, des déconnexions massives sont déjà survenues en Syrie, en Égypte ou en Chine.
Si le Web est souvent présenté comme virtuel, l’infrastructure par laquelle transitent les données est bien réelle. Internet est composé de dizaines de milliers de réseaux de fibres optiques, tirées sur terre et dans les mers, et connectées les unes aux autres. Dans les pays bien desservis, comme la France, lorsqu’une route est encombrée ou en panne, les données empruntent des «itinéraires bis». La probabilité de réussir à couper le trafic Internet, en neutralisant d’un coup toutes ces routes, est infime. Internet fait preuve dans ce cas d’une grande résilience.
La situation est différente dans les pays où Internet est moins bien desservi. En mars 2011, une bonne partie de la Géorgie et de l’Arménie s’était retrouvée sans connexion à Internet durant plusieurs heures. En voulant récupérer des câbles pour les revendre, une femme de 75 ans avait sectionné une fibre optique essentielle à l’acheminement d’Internet dans cette région.
Un risque de déconnexion «sévère»
Les coupures les plus graves et durables interviennent là où les réseaux sont à la fois peu denses et sous contrôle étatique. En 2012, les experts de Dyn Research avait listé plus de 130 pays où les risques de déconnexion sont «significatifs» ou «sévères». La coupure en Égypte en 2011 est intervenue après que les opérateurs télécoms eurent reçu l’ordre de déconnecter l’Égypte d’Internet pour contrecarrer des manifestations anti-Moubarak. Ces opérateurs n’ont pas coupé physiquement les câbles, mais effacé le nom de leurs routes dans leurs registres informatiques. Les données transitant vers l’Égypte croyaient s’engouffrer dans une impasse. Des routes de secours ont été proposées aux opposants du régime pour leur permettre de poursuivre leurs actions. Dans l’autre sens, la Syrie a été coupée du monde en 2012, à la suite d’une action de la NSA qui a dégénéré.
La Corée du Nord est très exposée à ce type de coupure. Les quatre réseaux à l’intérieur du pays sont alimentés depuis la Chine, par des câbles de l’opérateur China Unicom. Un reseau de secours, par satellite, un temps utilisé, ne serait plus actif. Internet peut avoir été coupé de l’intérieur, sur ordre, ou neutralisé en s’attaquant à ces quelques points de passage.
Le Figaro