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Conditions difficiles dans les maternités de Dakar: affliction en permanence !

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Faible capacité d’accueil, plateau technique inapproprié, ressources humaines insuffisantes… La prise en charge des soins obstétricaux et des nouveau-nés est un vrai problème dans les structures sanitaires de Dakar.

Environ un enfant sur huit meurt avant d’atteindre l’âge de 5 ans au Sénégal. Dans les maternités dakaroises, c’est le trop-plein. Elles ne désemplissent presque jamais. Prises d’assaut, surtout en période estivale, les salles d’hospitalisation sont toujours saturées. Au point que souvent les femmes y sont en surnombre et dans des conditions difficiles. En effet depuis la fermeture de la grande maternité de l’hôpital Aristide Le Dantec, c’est la descente aux enfers en matière d’accès aux soins obstétricaux et de prise en charge des nouveau-nés. Fermée depuis août 2005 pour subir des travaux de réfection, cette maternité, la première du pays de par son taux de fréquentation et sa capacité d’accueil de 160 lits, a fortement réduit la couverture des besoins gynéco-obstétricaux dans la région dakaroise. Causant ainsi, de réelles conséquences liées aux urgences. « Il faudrait régler la question des urgences car au niveau de Dakar, les ratios ne sont pas respectés. Souvent, certaines femmes sur le point d’accoucher n’arrivent pas à trouver de place dans aucun service de la place. C’est un problème », tranche d’emblée M. Abdou Dieye, responsable syndical, ex- polyclinique. A cette fermeture est venue s’ajouter récemment (13 octobre 2010), celle de la maternité de l’Institut d’hygiène sociale (Ihs) qui faisait environ 6000 accouchements simples par an dont 800 par césarienne.

En effet, la prise en charge des populations en particulier les plus défavorisées, souffre énormément eu égard au poids non négligeable de ces deux grandes maternités. Pour combler ce gap, leurs personnels respectifs ont été redéployés au niveau des centres de Santé périphériques de Youssou Mbargane Diop de Rufisque de Nabil Choucair de la Patte d’Oie et de Roi Beaudoin de Guédiawaye. Mais cela suffit-il ? Vraisemblablement non. A l’instar de Nabil Choucair qui, en plus de son déficit en salles d’hospitalisation, étouffe faute d’espace ; une véritable situation de promiscuité prévaut dans ces centres de santé. Même si le centre Roi Baudouin arrive tout de même à gérer à lui seul plus de 5000 accouchements par an, le compte n’y est pas encore. Malgré ses trois salles d’accouchement, sept tables d’accouchement et 70 lits d’hospitalisation, la forte demande de la banlieue dakaroise reste difficile à satisfaire. Ce qui amène la plupart des patients à reprendre désespérément l’éternel et impossible chemin des structures hospitalières de la ville. En quête d’éclaircie ? « Peine perdue ! », lance un infirmier à l’hôpital d’enfants Albert Royer. Surtout qu’au-delà du déficit en places, il y a la question cruciale des moyens matériels.

Plateau technique inadapté

En réalité, la vétusté sinon l’inexistence du plateau technique et des moyens matériels à tous les niveaux y compris dans les structures de référence, rendent presque impossible la prise en charge des cas compliqués. « Nous recevons pour la plupart des malades qui nous viennent des structures périphériques et qui présentent des tableaux cliniques très sévères. Ils ont souvent besoin de soins intensifs voire d’être réanimés. Mais 22 ans après l’ouverture de l’hôpital, rien n’a évolué. Le plateau n’a vraiment pas suivi les besoins. Du fait que la situation sanitaire n’a pas évolué avec la croissance démographique, il y a plus de monde qui vient ici et malheureusement nous n’avons pas ce qu’il faut ni en termes d’équipement comme en ressources humaines. À un moment donné même, nous n’avions plus du tout l’équipement de base. Aujourd’hui on possède trois couveuses seulement et elles nous ont été offertes récemment par une fondation », se désole Mme Haby Signaté Sy, professeur de pédiatrie et chef du service de néonatologie de l’hôpital d’enfants Albert Royer. Elle explique qu’en l’absence de ces couveuses, les nouveau-nés d’un âge très bas, n’ont pas d’autonomie pour réguler leur température.

Doté à l’époque de 19 lits, de cinq couveuses et d’un équipement de base assez sommaire (un respirateur, moniteur) qui permettait de contrôler les nouveau-nés, aujourd’hui cet hôpital de référence, seul spécialisé dans la prise en charge, se trouve dans une terrible impasse. Au centre hospitalier Abass Ndao aussi, le décor est le même. Certes les activités y reprennent timidement après une longue période de crise, mais la maternité disposant de 20 lits et de sept couveuses, n’arrive pas non plus à couvrir la demande. « Beaucoup de malades qui fréquentaient la polyclinique sont renvoyés au niveau de notre structure. Ce qui fait que naturellement nous n’arrivons pas à répondre convenablement à la forte demande », constate M. Arona Diop. Seule rescapée de cette précarité, l’hôpital Principal de Dakar (Hpd) offre un service exemplaire dans le domaine. Mais cette maternité reste inaccessible au Sénégalais lambda au regard des prix pratiqués (…) qui n’ont presque rien à envier aux structures privées.

Mortalité infantile élevée

Ce sont ainsi moins de trente couveuses et tout juste une centaine de lits pour assurer les besoins d’une bonne frange de la population dakaroise. Et, au regard de ce tableau inquiétant, les centres de santé de Dakar ne peuvent point respecter les ratios. Si l’on sait que « les normes d’implantation des centres de santé indiquent qu’il faut un centre de santé pour une population comprise entre 100.000 et 150.000 habitants et doivent disposer de capacités d’hospitalisation en médecine, chirurgie et gynéco-obstétrique et doivent assurer les disciplines de soins en médecine générale, soins obstétricaux d’urgence… ». Devant ces conditions aussi déplorables, comment songer donc à l’atteinte des Omd ?

Pourtant les objectifs 4 et 5, il est question de réduire de trois quarts la mortalité maternelle et de deux tiers la mortalité infanto-juvénile. Alors que « les composantes de la mortalité infantile se situent à 35 ‰ pour la mortalité néonatale et à 26 ‰ pour la mortalité post-néonatale. Globalement, le risque de mortalité infanto-juvénile, c’est-à-dire le risque de décès avant l’âge de 5 ans est de 121 ‰ », note-t-on dans le rapport de l’enquête démographique et de santé de 2005. En d’autres termes, au Sénégal, environ un enfant sur huit meurt avant d’atteindre l’âge de 5 ans. « On est vraiment en deçà de ce qu’on doit avoir pour pouvoir faire fonctionner correctement nos services. Et la conséquence n’est rien d’autre qu’une mortalité toujours très élevée. La mortalité néo-natale est la plus élevée au niveau national. La plupart des décès d’enfants surviennent dans la période néo-natale », regrette Mme Sy du service de néonatologie d’Albert Royer. Par conséquent cette dernière préconise « une véritable réorganisation des soins de nouveau- nés au niveau de la région de Dakar et du pays et qu’il y ait une réelle volonté politique afin que soit pris en charge de façon hiérarchique à tous les niveaux de la pyramide sanitaire ».

Toutefois, la réfection des maternités de Le Dantec et de l’ex- polyclinique ainsi que l’érection de dix centres de santé en établissements publics de santé de niveau 1 (Eps1) représentent aujourd’hui les imminentes issues pour augmenter la capacité d’accueil et assurer une bonne prise en charge. Mais faudrait t-il encore que les mesures d’accompagnement suivent et que ces structures soient bien dotées pour ne pas finir comme le service de chirurgie pédiatrique d’Albert Royer. Ouvert depuis un an, ce service ultramoderne qui pourrait permettre de réaliser certaines opérations nécessitant jusqu’ici un déplacement à l’étranger, attend encore son équipement estimé à seulement 800 millions francs Cfa. en attendant, on préfère laisser les personnels dans la débrouille et regarder les femmes et les nouveau-nés perdre leurs vies…

Papa Adama TOURE

lagazette.sn

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