CONFIDENCES – Aminata Nar Diop, Lionne du basket : «Je ne peux pas mettre de short chez moi»

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C’est seulement après s’être gavée d’un bon thiébou dieune (riz au poisson) que Aminata Nar Diop s’est prêtée à nos questions, dans un entretien décalé. En bonne ndiobéne, elle avait averti : pas d’entretien avant le repas. C’était à la résidence de l’ambassadeur du Sénégal au Mali, en pleine campagne de l’Afrobasket féminin. A la découverte de cette Saint-Louisienne qui est venue au basket par pur hasard. Aminata Nar Diop, on vous connaît comme pivot de l’E­qui­pe nationale féminine de basket du Sénégal. Mais qui êtes vous dans la vie, hors des terrains ? 
Je suis née à Pikine Nietty Poteaux de Saint-Louis. C’est là où j’ai grandi et passé toute mon enfance. C’est mon fief où se trouve toute ma fa­mille. Je suis une vraie Ndar-Ndar, comme on dit. Je ne connaissais que Saint-Louis avant que le basket ne m’emmène un peu partout à travers le monde.



La première fois que vous avez quitté Saint-Louis, c’était quand exactement ? 

Je ne me rappelle plus. Cela doit être lorsque j’étais en classe de troisième ou en seconde. Avant, à chaque fois que je quittais Saint-Louis, j’étais souvent accompagnée par un membre de ma famille. Si ce n’est pas mon père, c’était ma mère ou les autres membres de la famille. Je jouais chez les Espoirs, je crois que c’était au Saint-Louis basket club (Slbc). C’était la première fois que je sortais de Saint-Louis sans être accompagnée par un proche.

Comment cela c’est passé ? Etait-ce difficile pour vous ? 

Pas tellement. J’étais avec les copines. Et chose bizarre, c’est que j’étais quelqu’un de très curieuse. La famille me manquait effectivement. Mais souvent, cela ne durait que deux jours au maximum. J’avais cette envie de découvrir autre chose.

Peut-on dire que vous étiez en train de devenir un peu plus res­ponsable durant cette période ?

Effectivement ! Disons que j’étais devenue responsable un peu plus tôt, dans la mesure où j’ai étudié dans une école qui était très loin du domicile familial. Je partais le matin et ne revenais que le soir. Toute la journée, j’étais loin de ma famille. Il fallait apprendre à s’autogérer jusqu’au moment où l’on rentre à la maison le soir. Il y avait les entraînements qu’il fallait gérer en même temps. Donc, j’ai appris à devenir responsable bien avant de quitter Saint-Louis pour les autres régions du Sénégal ou en de­hors du pays. On sait ce qui est bien, ce qu’on doit faire et ce qu’on ne doit pas faire. On peut facilement faire la différence. Même en étant loin des parents.

L’éducation stricte des pa­rents a donc beaucoup pesé sur la balance ? 

Je ne dirais pas que celui qui n’a pas reçu une bonne éducation ne saura pas faire le bon choix dans la vie. Mais, j’avoue que c’est très important d’avoir une certaine éducation. Celui qui reçoit une bonne éducation, ce n’est pas parce qu’il a peur de faire certaines mauvaises choses, c’est simplement parce que sa conscience n’a jamais été forgée ainsi. Il y a une grosse différence. En faisant certaines choses interdites ou qui dépassent l’entendement, on n’est jamais fier de cela. C’est pour cela qu’il faut toujours garder à l’esprit que cela ne sert à rien d’avoir certains comportements parce que bénéficiant d’une certaine liberté.

Qu’est-ce qui vous a incitée à faire du basket ? 

C’est marrant quand même, puis­que c’est tardivement que j’ai commencé à faire du basket. Cela ne me disait rien au début. C’est par pur hasard que je suis devenue basketteuse. Il n’y a personne chez moi qui fait du basket. Je n’ai jamais pensé devenir basketteuse, jusqu’à jouer pour le Sénégal.

Et comment est-ce arrivé alors ? 

C’est quand je faisais la troisième au collège. Un jour, alors que j’étais avec mes copines, un dirigeant, je le salue au passage, nous a appelées. Elles sont toutes parties et moi, je suis restée à l’écart. Lorsqu’elles sont revenues, vu que je suis très curieuse, j’ai été informée que le gars voulait mettre sur pied une équipe de basket. Cela ne me disait rien. Pourtant le mercredi suivant, vu que toutes les filles étaient là, je l’ai suivi et assisté à l’entraînement. C’est par la suite que j’ai commencé à jouer et fini par adorer le basket.

Et quelle a été la réaction des parents, surtout pour une fille qui fait du sport ?

C’était difficile ! A chaque fois que je devais aller à l’entraînement, je mettais un pagne au dessus ou un blouson. Je ne peux pas porter de short chez moi. Mon père est un marabout qui est très versé dans la religion. Donc, c’est pour cela que j’ai toujours du mal à mettre un short à l’intérieur de la maison, même étant professionnelle. Ce n’est pas qu’on me l’interdit, car il sait que c’est du sport. Mais souvent, il ne manque pas de me demander de faire la différence entre le terrain et la vie de famille. J’ai appris le Coran comme tout bon musulman. Je continue de l’apprendre pour me perfectionner.

Vous arrive-t-il de vous habiller sexy ? 

Bien sûr ! Souvent, je m’habille par rapport à l’endroit où je vais. Mais je ne m’habille pas vulgaire.

Etes-vous une ibadou qui joue au basket ? 

(Rires) C’est quoi être ibadou ? J’aime bien quand je vois une fille soi­gner son apparence et s’habiller très correcte. On ne sait jamais. Peut-être que demain je pourrais changer de look.

Est-ce que vous allez souvent en boîte de nuit ? 

(Eclats de rires) Là, on sort du cadre. Durant tout le temps que j’étais à Saint-Louis, je ne me rappelle pas une fois où je suis allée en boîte de nuit. Les seules fois, c’est quand l’école organise. Mais décider d’y aller comme ça, non ! Ce n’est pas ma tasse de thé. J’ai baigné dans une maison où c’était l’école, le Coran… Jusqu’à aujourd’hui, rien n’a changé.

Même étant majeure aujourd’hui, vous n’allez pas danser ? 

Ce n’est pas dans mes habitudes.

Durant votre carrière, quels ont été les moments les plus difficiles ? 

Je crois que c’est ma première année aux Etats-Unis. J’étais partie en alliant le sport et les études. Je venais dans un pays où je devais désormais vivre. J’avais l’habitude d’y aller. Mais là, c’était différent. En plus, là où je vivais, c’était loin de la maison familiale. Forcément, il y a le dépaysement. La famille te manque. On passe des heures au téléphone. Ce n’était pas facile. A un moment donné, je ne voulais que revenir au pays. La chose la plus difficile, c’est d’avoir perdu ma sœur qui vivait en Suisse entre 2009 et 2010. Cela a été un gros choc pour moi. Elle représentait tout pour moi et pour le reste de la famille. Elle était comme notre seconde mère. Notre mère est en vie, mais elle était présente dans tous les domaines. Cela a bouleversé ma vie. Depuis, je ne suis plus la même personne. Je le sais. Je ne vois plus les choses de la même façon. Je n’ai plus les mêmes rapports avec les gens. Mais voilà, nous sommes des cro­yants, on accepte la volonté divine. Même si c’est une grosse perte pour la famille.

Quels ont été vos rapports ? 

Elle était présente dans tous mes choix de la vie. Je ne faisais rien sans qu’elle soit informée. C’était l’aînée de la famille. Elle n’est plus là, mais bon, il y a les autres.

Pensez-vous au mariage ? 

Bien sûr !

Y a-t-il des prétendants ? 

(Surprise) On sort encore du cadre… Je suis une femme. On me demande en mariage. Ce n’est jamais l’inverse qui se passe. Du moins, dans mon entendement.

Et vous le voulez pour quand ? 

Je ne sais pas ! Cela dépend de Dieu.

Le prince charmant sera-t-il un basketteur comme vous ?

Pas forcément ! Un croyant, c’est le plus important.

On dit de vous que vous êtes quelqu’un de nerveuse ? 

(Surprise) Ah bon ! Je ne le savais pas. Peut-être sur le terrain. Mais en dehors du terrain, je suis plutôt timide de nature.

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