Après le caractère fictif du marché des produits phytosanitaires de 5 milliards de francs Cfa, Aïda Ndiongue, auditionnée à la Section de recherche le vendredi dernier, a perdu son sang-froid en s’attaquant à un témoin qui l’a davantage enfoncée. Pourtant, elle est sortie libre de la gendarmerie.
C’est une véritable ceinture de feu qui se forme autour de Aïda Ndiongue et de Oumar Sarr. Liés par le sulfureux dossier du plan Jaxaay, ils faisaient face respectivement aux enquêteurs de la brigade des Affaires générales de la police et de la Section de recherche de la gendarmerie. Mais l’audition de l’ex-sénatrice libérale a pris des proportions inattendues dans le fond et aussi dans la forme. Le vendredi dernier, elle a perdu son sang-froid devant les gendarmes qui avaient convoqué des fournisseurs pour la confronter et aussi… la confondre sur la véracité douteuse du marché des produits phytosanitaires. Mais le face-à-face avec un témoin a tourné au vinaigre après que ses arguments ont fini de prouver les soupçons de surfacturation et les stratégies factices mises en place pour flouer l’Etat. Echaudée par la confrontation, l’ex-sénatrice libérale est passée à un état colérique à la Section de recherche de la gendarmerie. Elle n’a pas hésité à attaquer son vis-à-vis avec des mots gonflés d’insultes avant de passer à une agression physique. Une source raconte : «Aïda Ndiongue s’est déchaînée sur le témoin. Elle l’a insulté de mère à plusieurs reprises. Elle l’a giflé ensuite.» Irritée, écorchée vive, elle a fait face à un interlocuteur qui a réussi à la confondre. D’où sans doute son comportement et son exaspération devant la contradiction et son irascibilité dans son ultime débat avec la vérité. Ce qui accréditerait ce caractère de marché fictif et des accusations de surfacturation qui pèsent sur cette commande de produits phytosanitaires d’une valeur de 5 milliards.
Ces mots sont le reflet d’un traumatisme et d’une panique. Selon une source, le témoin a réussi à corroborer les arguments des autorités qui estiment que ce marché ne vaut pas plus de… 700 millions de francs Cfa. «Le témoin a prouvé aussi que ces produits ont été vendus à des prix exorbitants. Tous ces produits qui se trouvent sur la facture n’ont jamais été livrés en plus de leur surfacturation. Il a été très cohérent dans ses arguments alors que la dame ne pouvait pas confirmer ou prouver l’origine des produits mis dans la facture définitive», poursuit un interlocuteur. En vérité, le prix unitaire d’Agrigerm 2000 sur le marché est de 25 000 F et celui d’Agrisect Delta de 40 000 F. Alors que le plan Jaxaay a acheté le litre d’Agrigerm à 175 000 et l’Agrisect Delta à 75 000 F sans jamais effectuer la commande contrairement au bordereau de livraison remis au Service d’hygiène ainsi que la facture définitive.
Au fond, les autorités fouillent les marchés que Aïda Ndiongue a gagnés entre 2009 et 2012. Même si elle a commencé à les gagner en 2007. Face aux arguments d’un témoin qui détient le contrat d’exclusivité des produits cités ci-haut, la «milliardaire» a complètement perdu son sang-froid. Car elle n’en serait pas restée aux insultes et aux gifles. Elle a multiplié des menaces de mort devant les enquêteurs en se rendant compte qu’elle était dans une mauvaise posture. «Elle l’a menacé de mort et multiplié les provocations alors qu’elle aurait dû faire profil bas. Elle a dit que si elle avait un… ; elle lui aurait planté ça sans états d’âme», ajoute-t-on.
Produits achetés dans les Niayes
Pourtant, ce comportement est resté impuni alors qu’il se déroulait dans les locaux de la gendarmerie où «l’intégrité physique et morale» d’un témoin a été remise en cause. Resté très calme, l’intéressé n’a pas non plus voulu porter plainte contre elle. Mais il a tenu à préciser que ces «agressions» sont notées dans le Procès verbal d’audition. «Le commandant de la Section de recherche était absent de sa brigade lors de cette audition sinon il l’aurait mise aux arrêts», soutient-on.
Mais ses réactions épidermiques prouvent que les enquêtes sont en train de jeter le doute sur sa réputation que les produits phytosanitaires sont en train de ruiner après une succession d’auditions et de confrontations. En apparence cauchemardesque, le scénario met en scène un spectacle aux frontières du vaudeville et de la tragédie. Elle était ressortie de son audition de la Dic rassurante et pétillante de confiance en clamant que c’est l’Etat qui lui doit 5 milliards. Cuisinée sur une commande de 1000 litres d’Agrigerm 2000, elle a sorti une explication jugée «fantaisiste» par les enquêteurs. «Elle a répondu qu’elle l’a achetée dans les Niayes à l’aide d’un ancien commandant du Service d’hygiène qui est décédé depuis plusieurs mois. Ça prête à rire», explique une autre source. Le Quotidien avait écrit que l’usine Ceetal, spécialisée dans la conception et la formulation chimiques, dont le siège se trouve à Saint-Etienne en France, informait qu’aucune «société sénégalaise à part la Csge Afrique qui est notre distributeur exclusif au Sénégal depuis très nombreuses années» ne commercialise ces produits ici. Ce face-à-face a sans doute définitivement modifié les perspectives de la défense de Aïda Ndiongue et montre que cette audition est en train de faire davantage tomber les masques. Cette affaire est une véritable…bombe dont les déflagrations risquent d’atteindre les ex-responsables libéraux traqués aussi par les enquêtes sur l’enrichissement illicite. Et les destins de Oumar Sarr et de Aïda Ndiongue semblent liés pour le meilleur et le… pire.
lequotidien.sn
cachot tous les deux! omar sarr et aida diongue