Construction de l’autoroute Thiès – Touba à 406 milliards: Pire qu’un gré à gré

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Il est bien dommage que le mandat des membres du Conseil de Régulation des marchés publics de l’Autorité de Régulation des Marchés publics (Armp) s’achève, ce lundi, sur un scandale relatif, encore une fois, aux marchés publics. La sortie express même du Directeur général de l’Autorité de régulation sur cette affaire est un scandale en soi. Toujours est-il qu’à la lecture du contrat passé entre l’entreprise China Road & Bridge Corporation et l’Ageroute relatif au projet d’Autoroute à Péage Thiès-Touba et que nous avons eu le privilège de parcourir, c’est bien pire qu’un marché de gré à gré dont il s’agit.

Alors qu’on n’a pas fini d’ergoter sur le marché de l’autoroute à péage Dakar Diamniadio confié à Eiffage par son prédécesseur, qu’une autre autoroute, sous le magistère du Président Macky Sall, vient déverser son bitume scandaleux sur le parterre des marchés publics. On ne peut s’empêcher d’ailleurs de ressasser la sortie du président Macky Sall lorsqu’il déclarait, droit dans ses bottes et sans sourciller, à l’occasion d’un récent Conseil présidentiel sur le suivi de la politique économique et sociale : «Je n’accepterai pas que les procédures nous empêchent de faire des résultats.» On a vite fait de regarder dans sa direction lorsque à quelques mois de cette déclaration, un marché gros comme 406 milliards de FCfa est passé au mépris de toute la règlementation en vigueur pour la réalisation d’une autoroute dont la rentabilité au demeurant laisse à désirer, malgré les affirmations contenues dans le communiqué de presse publié ce week end par l’autorité contractante, Ageroute, signataire du fameux « contrat commercial».

Justement, malgré la « passe d’armes » qui a prévalu la semaine dernière entre Birahim Seck du Forum civil et l’autorité de régulation sur cette affaire, à la lecture du contrat passé entre l’entreprise China Road & Bridge Corporation et l’Ageroute relatif au projet d’Autoroute à Péage Thiès-Touba et que nous avons eu le privilège de parcourir, il s’agit non pas d’un marché de gré à gré qui obéit à certaines règles, mais bien pire, d’une commande directe, procédé utilisé par certaines autorités et qui ne s’embarrasse d’aucune règle de forme, contournant ainsi allègrement toute la règlementation en vigueur au Sénégal.

Contrairement à l’entente directe, le mécanisme de la commande directe qui se limite à une négociation directe avec un ou plusieurs prestataires, fournisseurs ou entreprise, ne nécessite aucune règle de forme. C’est bien ce procédé que l’Ageroute a utilisé pour négocier directement avec l’Entreprise chinoise CRBS.

Un coup de canif porté par l’Etat dans les règles de passation d’un marché gros comme 406 milliards de FCfa (812 622 293 Dollars US) que Saer Niang, Directeur général de l’Armp, a non seulement validé en évoquant un « contrat commercial » fourre-tout, mais défendu bec et ongle. Et c’est bien là le problème.

En prenant publiquement position dans cette affaire avant même l’autorité contractante, Saer Niang, le Directeur général de l’Armp, a affirmé dans les colonnes de notre confrère l’Enquête, q’ «Aucun marché n’a encore été signé ». M. Niang de poursuivre en précisant que « C’était plus un contrat de mandat pour réserver les fonds ». Or à la lecture de l’article 1er dudit contrat portant « Objet», il s’agit de tout sauf de « réserver des fonds ».

A l’article cité plus haut, il est bien spécifié que « le présent contrat a pour objet… de confier à l’Entrepreneur la réalisation des études et l’exécution des travaux de construction de l’Autoroute à Péage Thiès-Touba située dans les régions de Thiès et de Diourbel ».

Mieux, si « aucun contrat » n’était signé, comme le prétend le Directeur général de l’Armp, peut-être pourrait-il nous expliquer à quel titre dans le « contrat commercial » signé « après de longues et intenses négociations » entre China Road & Bridge Corporation et l’Ageroute, l’Autorité de régulation des M archés publics (Armp) prévoit-elle (article 6 de leur « contrat commercial » ) de percevoir une « redevance de régulation égale à 0,3% du montant HT du contrat approuvé qui devra être prise en charge par l’Entrepreneur» ?

Quand on sait que ladite redevance n’est perçue que dans le cas de marchés passés, en application des dispositions de l’arrêté n°10145/MEF du 22 septembre 2011 fixant le taux de la redevance de régulation des marchés publics pour l’année 2012. Pourquoi donc vouloir prévoir et percevoir une redevance de régulation sur un contrat de marché qui n’existe pas ? Où bien le Directeur Général de l’Armp n’était pas au courant de cette clause dans son « contrat commercial » qu’il défend partout ? Monsieur le Directeur général semble oublier qu’ « un marché public est un contrat écrit conclu à titre onéreux…».

Cela veut dire que c’est l’Etat du Sénégal qui va payer un prix par son budget, par une convention bilatérale ou multilatérale ou par un privé. Et c’est le cas avec l’entreprise chinoise accompagné par Exim Bank Chine. Il n’y rien d’extraordinaire dans ce mode de financement. Un appel d’offre s’imposait pour mieux comparer les propositions chinoises avec celles d’autres entreprises intéressées. Mais à la lecture de l’article 1er du « contrat commercial » aucun appel d’offre n’est possible car non seulement « la réalisation des études » est confiée à CRBS mais également « l’exécution des travaux ». Qu’est ce qui reste ?

C’est d’ailleurs le même article 6 dudit « contrat commercial » qui, non seulement occasionne des pertes énormes au Trésor public, en exonérant l’entrepreneur de tous impôts, droits et taxes en vigueur en République du Sénégal et ce durant l’exécution du contrat, exceptée (bien sûr) la fameuse redevance de régulation qui tombe dans l’escarcelle de l’Armp.

En tout état de cause, en prenant ainsi fait et cause dans cette affaire qui viole en toute légalité les principes légaux, l’Armp en tant qu’autorité de régulation, se trouve ainsi disqualifiée en cas de recours à connaître du contentieux qui pourrait éventuellement naître du contrat, du fait que son Directeur général entre autres, ont publiquement pris position. C’est l’un des principes mêmes de l’autorité de régulation à savoir l’impartialité, qui est ainsi rompu.

En définitive si le président Macky Sall est prêt à sacrifier la bonne gouvernance ou la gouvernance vertueuse (c’est selon) sur l’autel des « résultats » que les procédures l’empêcheraient de faire, il y a de fortes chances que le résultat ne soit pas forcément celui qu’il croît.

Sudonline.sn

11 Commentaires

  1. Voici le pari fait par un ingénieur FRANCAIS, quand, il y a deux jours je lui ai parlé de cette autoroute à 400 milliards, dont 100 en commissions versées aux coutiers.
    A la question de savoir s’il y aurait des ponts, aqueducs et canalisations à construire tout au long de cette route, sans avoir de certitudes je lui répondis que non.
    Après avoir été informé sur la grille de salaires des Sénégalais, toutes spécialités confondues, du prix des matériaux, voici sa conclusion dès le lendemain : « Monsieur, me dit-il, si le gouvernement du Sénégal m’était à ma disposition 800 jeunes, ingénieurs, techniciens et ouvriers à former pendant moins de six mois aux techniques de construction de routes plates (linéaires) , ces 250 kilomètres ne reviendraient pas à plus de 240 milliards » !
    Même s’il est vrai que le financement nous a été accordé par les Chinois sous certaines conditions, il était possible de négocier autrement, compte tenu de l’écart entre l’évaluation faite par cet ingénieur Français et les 406 milliards.

    • @@Sadaga
      Pardonnez cette petite entorse a ma regle d’ignorer vos inepties que vous aimez balancer a tout bout de champ et souffrir que l’on vous porte la contradiction.
      Pour avoir vu les caractéristiques techniques du document de projet (trace, ouvrages d’art, etc…), je peux vous dire AVEC CERTITUDES que ce que vous avez avancer SANS AVOIR DE CERTITUDES n’est que songes: il est bien prevu des ponts, aqueducs et canalisations et autres ouvrages d’art à construire tout au long de cette autoroute

      Cato

  2. Sadaga, J’ai beaucoup de respect pour vous mais votre argument est quand même un peu léger. Aller prendre un français qui n’a aucune connaissance du marché local et qui est obligé de te demander les grilles de salaire au Sénégal (et je suis même sur que les grilles que tu lui a donné pour le batiment sont erronées) et lui demander de te faire un prix comme cela au pif en se basant juste sur la longueur excuse mois mais c’est vraiment vouloir se payer notre tête. En plus tu oses lui dire qu’il n’y aura pas d’ouvrages. Soyons sérieux et ayons de respects et de la considération pour nos ingénieurs qui ont fait les même écoles et qui ont su mainte fois prouver qu’ils savent être aussi bon.

    • Loin de moi l’idée de manquer de respect à nos ingénieurs, au contraire, je milite depuis plus de vingt ans pour que l’Etat, dans les passations de marchés publics leur fassent enfin une plus grande confiance tant leurs compétences sont reconnues dans le monde entier !
      Je veux mettre ici en exergue la grande arnaque qui consiste à donner ces marchés publics des travaux publics à des entreprises étrangères, quelles que soient les formes d’attributions !
      Avouez avec moi que deux milles de nos jeunes, tous niveaux confondus feraient aussi bien que les entreprises le plus souvent étrangères, qui s’accaparent les marchés depuis plus de quinze ans pour ne pas dire plus !
      Avez-vous une fois seulement remarqué comment des dizaines d’autoroutes 2X2 voire 4×4 voies étaient construites en France plus particulièrement ?
      Figurez-vous que sur ces chantiers, je n’y ai jamais vu plus d’une vingtaines d’Ingénieurs, techniciens et ouvriers avec quelques engins, et le travail y est réalisé à la satisfaction générale des donneurs d’ordre !
      Ce qu’il fallait simplement retenir de l’analyse certes à la va vite de notre ami Français est qu’on nous arnaque depuis des années alors que la construction d’une route telle que c’est dans notre pays pouvait l’être grâce à la mobilisation de nos milliers de jeunes qui devraient être formés dans des centres de formation pour adultes en moins de 12 mois, comme cela est fait en Europe!
      Que cela vous convainc ou pas, construire 50 kilomètres de route est à la portée de nos jeunes, s’ils étaient formés en peu de temps!
      Pour le fameux tuyau de Keur Momar Sarr, mon frère et ami l’ingénieur Abdou Aziz Guèye nous en a fait des révélations qui prouveraient que l’expertise locale, dans ce domaine est aussi valable que celle des autres pays développés, mais encore faudrait-il leur faire confiance !

  3. Il ne faut s’étonner de rien dans notre pays. Tout ce que font nos gouvernants a pour but principal leur enrichissement personnel et celui des copains,des parents et amis placés à tous les niveaux et cotés. Dans les pays développés et émergents, et même certains pays sous développés, les marchés de gré à gré sont bannis à jamais. PARTOUT LES MARCHES DE GRÉ A GRÉ SONT SYNONYMES DE MAGOUILLES, DE CORRUPTION A TOUS LES ÉTAGES. Ce marché avec les chinois doit être attaquer en justice.
    TOUT LE MONDE SAIT QUE NOS DIRIGEANTS SONT SURTOUT MOTIVES ET SE TUENT POUR ALLER AU POUVOIR POUR LES CAISSES NOIRES ET LES MARCHES DE GRÉ A GRÉ. CE SONT DES MAGOUILLES ÉTAT. CELA N’EXISTE DANS AUCUN PAYS DÉVELOPPÉ. ON SE DÉVELOPPERA JAMAIS AVEC AUTANT DE MAGOUILLES QUI PUENT PARTOUT.
    SUR QUI ON PEUT COMPTER POUR NOUS SORTIR DE CETTE CORRUPTION GENERALISEE. J’AVAIS CRU EN MAKKY SALL, CELA NE VIENT PAS.
    OU EST LA SOCIÉTÉ CIVILE ? OU SONT LES PARTIS D’OPPOSITION ? QUI VA SAUVER CE PAYS A LA DÉRIVE ?

  4. Ce qu’on ne dit pas dans cet article et parceque tout simplement on est animé d’une volonté de nuire c’est que le financement pour la réalisation de cette infrastructure vient de la Chine qui comme beaucoup d’autres pays dans le monde met en place ce qu’on appelle des financements liés qui sont destinés à appuyer leurs entreprises et leur permettre de gagner des marchés à l’international. Le financement est conditionné à ce que les travaux soient réalisés par des entreprises qui garantissent directement les marchés. Il y a 10 000 milliards mis en place par la Chine pour ces genres de travaux. en plus des autres pays. A nous de choisir. Si on a pas autant besoin de ce financement il faut tout simplement retourner à nos bailleurs traditionnels. A bon entendeur

    • El Amin,

      Vrai ce que vous dites, meme si je n partage pas l’idee d’une volonte de nuire. Le choix des Chinois est bien meilleur que ce qui nous a ete imposé par la Crapule Wade (commandeur de la legion d’honneur) qui nous a fait emprunté 320 milliards pour ensuite donner l’exploitation de l’A1 a ses maitres francais.

      Cependant j’aurais préféré une conscription financière locale/nationale/sous regionale (emprunt obligatoire) pour lever ces fonds et en faire l’exécution par les entreprises locales suivant des standards bien en pratiques dans des projets de références dans le secteur.

      L’autre aspect que je deplore c’est l’opacite dans laquelle tout cela se deroule alors que l’on est cense agir en mon nom, en notre nom. Ceci donne de l’eau dans le moulin de ceux qui pensent qu’il doit avoir anguille sous roche. Et qui connait la propension de l’Ageroute a faire de serieux candidats pour une CREI rellement democratique, on est plus que mystifie par la facon de proceder des autorites sur ce dossier.

      Pour la petite histoire, je trouve ironique et désolant que la route Dkr-Touba soit réalisé par des Chinois alors que dans les années 29-30, les Mourides diriges par le 1er Calife Cheikh Moustapha Mbacke avaient commissionné, payé et participé a la realisation de 50km de rails pour pouvoir acheminer les materiaux necessaires a la construction la Grande Mosquee (jamais fait par l’Etat senegalais post-independance). Aujourd’hui, 80 annees plus tar avec plus de monde, d’argent, de connaissance les Mourides seront bientot condamne a payer un etranger un peage pour pouvoir aller a Touba en empruntant cette autoroute.

      Cette enieme expérience montre que cette expérimentation appelée indépendance est un échec total pour nos populations.

      Cato

  5. El Amin : Nous sommes tous d’accord, je le pense, que nos Etats doivent se tourner vers d’autres sources de financements de notre développement mais la question est de savoir, ici à quel prix ! Devrions accepter tout, au prétexte que c’est plus souple?
    Devrions-nous hypothéquer l’avenir des générations futures qui devraient rembourser ces 10.000 milliards destinés à l’Afrique ?
    Les chinois devraient-ils avoir toute latitude pour évaluer les coûts pour ensuite nous exiger leur remboursement quelle qu’en soient les échéances et la durée, aussi douces soient-elles ?
    Je pense que non !

  6. Les amis merci pour la pertinence de vos arguments. Ce que je voudrais juste vous faire remarquer est que l’auteur dans tout son long deroulement n’a parle nulle part de surfacturations. Ce qui le derange et qu’il ne cesse de repeter est que le marche a ete donne sans appel d’offres. Ce qui je le repete est normal dans ces types de financement lie et que l’auteur s’il a fait une bonne recherche journalistique devrait savoir. Egalement je fais la difference entre mode de selection de l’entreprise et cout du projet. Ce financement est un pret que nous allons rembourser et c’est a nous de nous entourer de toute l’expertise pour ne pas nous faire arnaquer

    • 100% d’accord avec vous.
      je rappelerai que c’est bien une personne ci-haut, coutumier des faits, qui a parle de commissions de 100 milliards, sans en donner ni preuves ni sources verifiables.
      Les attaques contre ce projet sont des motivations politiques: denigrer tout ce que le Pdt Sall fait de bien pour encenser (ou passer sous silence) les forfaitures d’une Crapule (TM) avere et honni par les Senegalais.

      Si les Chinois financent ce projet, il est de leur interet de faire travailler leur societes et ressortissants. A nous de veiller sur nos interets (meme si c’est bien la regle de nos gouvernants de sacrifier ces interets nationaux a l’autel de leurs petites/etroites considerations faussement egoistes).

      Si le Pdt Sall parvient a faire des « realisations » sans engager directment le BCI comme il transparait dans ce dossier de BOOT, c’est a son honneur. Pourvu qu’il ne le donne aux francais pour 30 ans comme l’a fait wade-la-crapule avec la A1 donnee a la societe d’exploitation SENAC de Gerard Senac, PDG d’Eiffage qui n’avait verse que 15% du cout de construction.

      Cependant le comportement du DG de l’ARMP donne un mauvais gout a l’affaire sachant que sa boite « autonome » va toucher 1,2 milliards dans cette affaire. Qui a dit conflit d’interet?

      je ne preterai pas bcp d’attention a Seck du Forum civil (ces arguments sont faibles, legers et son information pas complets) ni aux journalistes (idem) car ils aiment faire dans le sensationalisme pour exister. Comme dit le chanteur: kuy wodoo lamign soo nopee rafle.

  7. A Mr Sadaga DIOP sans l’intention pour moi de vexer

    Un ingénieur « même français » ne peut pas vous renseigner sur le coût même approximatif de de 250 km d’autoroute et en plus les éléments sur les quels il se base proviennent de vous.
    C’est un concours de métier qui donne le coût d’un marché.
    Et comment il n’y aurait pas de ponts ou de canalisations? C’est impossible et votre ingénieur « français » devrait le savoir.
    Quand même, parler l’aqueduc c’est une aberration.
    Tout ceci parce que vous voulez donnez votre avis pointu sur tout.

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