Pour paraphraser le Président Mamadou Dia, je ne suis pas au-dessus de la mêlée, je suis dans la mêlée. Lorsque cette fameuse réforme sur le parrainage est arrivé à l´Assemblée nationale, nous avons organisé une manifestation de rue pour nous y opposer. J´ai été arrêté à cette occasion et gardé à vue au commissariat central de Dakar avec d´autres leaders de l´opposition. Il s´y ajoute que les listes de notre parti aux élections législatives ont été rejetées du fait de cette loi sur la parrainage. Par conséquent c´est à partir du dedans que je m´exprime.
Dans ce pays, nous avons toujours pu, de part et d’autre, savoir jusqu´où ne pas aller trop loin. Que se passe-t-il donc pour que nous décidions aujourd´hui de nous engouffrer dans ce tonneau que nous nous acharnons à installer confortablement au bord du gouffre ?
L´opposition, toute obédience confondue, avait réussi à installer une certaine dynamique de victoire depuis le lendemain de la présidentielle de 2019. L´élection des maires au suffrage universel obtenue au dialogue politique avait renforcé cette dynamique en consacrant la victoire de nombreuses listes de l´opposition dans des localités et centres urbains dont la capitale.
Cependant si l´on n´y prend garde, une logique de déconstruction de cette dynamique pourrait s’enclencher au détour des perspectives d’affrontements qui se dessinent. Le peuple sénégalais qui, il n´y a même pas six mois, est allé voter dans la paix et la tranquillité de la manière que nous savons, ne mérite pas qu´on lui installe une situation de non paix. Qu´on en soit conscient ou pas, personne, du pouvoir ou de l´opposition, n´y a intérêt. S´il est vrai que chacun d´entre nous proclame que le pays et le peuple sont au-dessus de sa personne, alors il nous faut créer les conditions de s´asseoir et de discuter. Il faut une désescalade qui commence par arrêter de se faire peur. Nous sommes tous des sénégalais issus de cette société, pétris de sa culture et de ses traditions. Fii kenn du fi xoqatal kenn. Personne ne peut faire peur à personne. On peut tout juste allumer le feu mais les héros ne sont pas ceux qui allument le feu.
Le slogan « Force doit rester à la loi » apparaît désormais comme un slogan de menaces. Ça ne fera pas reculer ceux qui sont dans l´opposition tout comme le slogan « de gré ou de force » ne peut avoir aucun effet sur ceux qui gèrent l´État. In fine, la preuve que l´on compte donner de son courage se mesurera aux nombres de victimes qui seront tous, de quelque bord qu´ils se situeront, nos enfants, les fils et filles de ce peuple auquel les acteurs politiques sans distinction promettent nuit et jour bonheur prospérité et surtout paix et sécurité.
Le Président Macky Sall est le garant de la paix, de la sécurité et de la stabilité du pays. Il doit s´y attacher quels que soient les quolibets et les critiques, fondés ou pas. Pour cela, il faut absolument qu´il travaille à rétablir des règles consensuelles qui permettent une dévolution démocratique et pacifique du pouvoir telles qu´elles ont existé de 1992 à 2014.
Le moment est aussi venu pour des secteurs de l’opposition de contribuer substantiellement à cette désescalade pour qu´il soit possible de s´asseoir dans la sérénité et atteindre un tel objectif.
Les crises, on sait toujours quand elles éclatent mais on ne sait jamais quand ni comment elles se terminent. Les seuls qui ont intérêt à ce que le pays s´installe dans la chienlit sont ceux qui n´attendent que cela pour aller puiser notre pétrole et notre gaz en haute mer pendant que nous serons là à nous étriper sur la terre ferme. J´ai l´absolue conviction que nous sommes plus intelligents que cela.