Les habitants de la Cité Famara Ibrahima Sagna, Thiaroye 44, prêchent dans le désert. Chaque jour, ils frôlent la catastrophe du fait de leur cohabitation avec l’usine SENCHIM qui « pollue notre environnement et agresse la santé des populations dans toute la zone de Thiaroye sur mer », comme l’affirme le Collectif des habitants de la Cité Famara Ibrahima Sagna.
Le danger est devant leur porte et pour le chasser, les populations demandent la délocalisation de l’usine, comme le signale l’expertise des techniciens du ministère de l’environnement, notamment ceux de la Direction de l’Environnement et des établissements classés, qui ont effectué des visites sur les lieux (unité industrielle). Les recommandations des experts du ministère de l’environnement concluent à une délocalisation immédiate. Mais les autorités des Ics ne s’exécutent pas. On attend que l’irréparable se produit, certainement …
« Délocaliser l’usine Senchim immédiatement avant que l’irréparable ne se produise ». Ce cri de cœur des habitants de la Cité Famara Ibrahima Sagna, Thiaroye 44, ne semble, pour l’heure, entendu par les responsables des Ics, structure à laquelle appartient Senchim.
En effet, c’est suite aux plaintes du Collectif des habitants de la Cité Famara Sagna, Thiaroye 44, qu’une mission de la Direction de l’Environnement et des établissements classés, a visité l’usine Senchim. C’est à la suite de cette descente dans cette usine que les constats suivants ont été faits : l’unité est confrontée à des problèmes de gestion des matières réactives, de pollutions atmosphérique et olfactive, des eaux usées, des inondations etc.
Les techniciens du Ministère de l’environnement avaient conclu, à la date du 13 avril 2010, à l’alternative de la délocalisation ou de l’agrandissement de l’usine. Et la Direction de l’Environnement et des établissements classés avait demandé au Directeur de SENCHIM de lui transmettre les documents techniques précisant le process, la gestion des matières réactives, la gestion des rejets (eau, air, poussière), le suivi sanitaire du personnel , le programme biopesticide développé sur le NIM, les documents relatifs aux incinérateurs, notamment celui de la Socas (Programme tomate) etc.
La vérité, selon les Ics
Dans sa réponse du 12 mai 2010, le Directeur des ICS, Alassane Diallo, parle de certaines actions mises en place , « notamment le captage et le confinement des poussières avec l’achat de dépoussiéreurs, de compresseurs, l’amènagement de la déchèterie et un plan de gestion des déchets dangereux ». Il déclare qu’une partie des sctocks obsolètes et des déchets a été enlevée par la société TREDI avec l’appui de l’Etat sénégalais. De même que des « fosses séparées ont été installées et une politique de réduction des eaux industrielles instaurées ». Et toujours selon le directeur de Senchim, « afin de réduire les odeurs, une installation réalisée par GRIA avec des holtes aspirantes et des tours de charbons actifs ont été mises en place, mais nous constatons qu’en période de forte production comme c’est le cas en mars et avril 2010 où nous avions une commande importante sur le Mali, le problème n’est, le problème n’est pas réglé pour autant ».Et d’ajouter : « de surcroît, nous avons commandé une étude d’impact sur la santé des populations voisines avec le médecin du district de Thiaroye qui n’a pas révélé de maladies spécifiques à notre environnement ».
Déconstruction du discours de la direction des Ics
Suite à cette lettre du directeur des Ics, le Collectif des habitants de la Cité Famara Sagna, Thiaroye 44, a saisi le ministre de l’environnement, pour attirer son attention sur les dangers que constitue cette usine pour les populations. « Depuis sa création, l’usine, par ses émanations toxiques pollue l’atmosphère de Thiaroye Sur Mer et des communes environnantes. L’absorption de ces matières réactives, insidieuse, répétée, routinière, constitue, même à doses minimes un risque réel pour la santé, à moyen et long terme, risque que la Direction de SENCHIM se plaise à minimiser ». Et d’ajouter : « la Direction de la société SENCHIM ne peut ignorer que ces poisons pénètrent facilement dans le corps, par la peau, surtout par le temps chaud, mais aussi par ingestion involontaire ». Mieux, « ces poussières sont drainées par les eaux usées ou stagnantes, dont la gestion a l’intérieur même de l’usine, défectueuse, est aggravée par les inondations et l’exiguïté des locaux ». Ces poussières « s’abattent enfin sur les produits alimentaires, à découvert ». Signalons que « l’usine est implantée en 1987, à proximité des deux principaux marchés de Thiaroye dont l’existence lui est bien antérieure ».
Ca peut bien arriver à Thiaroye
Le Collectif attire l’attention des autorités, en pensant à la catastrophe de l’usine de BHOPAL en Inde, en décembre 1984 avec 2500 morts et plusieurs dizaines de milliers de personnes atteintes d’affections diverses touchant les organes internes, la catastrophe de Toulouse provoquée également dans une usine analogue, sont là pour nous rappeler qu’il serait inconscient d’écarter systématiquement, si fataliste qu’on soit, et par un simple revers de main, l’éventualité de telles calamités. Il n’est pas étonnant que le danger lié à la gestion de ces dérivés toxiques préoccupe tous les pays membres du Comité Inter-Etat de lutte contre la Sécheresse dans le Sahel (Cilss). Notre gouvernement doit avoir suffisamment pris conscience du danger.
Fada avait raison
Le Collectif des Habitants de la Cité Famara Ibrahima Sagna, Thiaroye 44 cite les propos de l’ex ministre de l’environnement, Modou Diagne Fada qui, après avoir rapporté le recensement, à travers le pays des morts victimes d’intoxication par les pesticides, soulignait, à juste raison : « qu’il valait mieux dépenser des milliards pour délocaliser ces usines dangereuses que d’attendre une catastrophe qui pourrait anéantir des milliers de vies humaines ».
Suffisant pour que le Collectif souligne que la « délocalisation de l’usine SENCHIM est un devoir national ». Pour lui, « une seule décision s’impose sans détour : pour sauvegarder l’environnement et protéger la santé des populations, c’est la délocalisation rapide de l’usine Senchim de Thiaroye Sur Mer, loin de notre commune et de toute agglomération humaine ».
Senchim, hors-la-loi ?
En effet, dans le procès-verbal de la réunion sur la question de la délocalisation des activités de la Senchim dans une zone appropriée qui s’est tenue le 24 novembre 2010 dans les locaux de la Direction de l’Environnement et des établissements classés, « l’idée de délocaliser les populations est vite écartée par les différents intervenants, à cause du coût très élevé et des contraintes socioculturelles et financières que cela pourrait engendrer. Sur ce point, il est aussi noté que la Senchim n’a pas l’autorisation, en tant qu’installation classée, de l’activité en cause : la formulation et la production de pesticides. Senchim n’a que l’autorisation de stockage et de conditionnement.
De plus ce problème dure depuis 18 ans ». Mieux, Monsieur Cheikh Kanté de la Direction de l’environnement a rappelé que « la Senchim n’est pas en règle au vu de la législation environnementale ». En plus, dit-il, aucune des prescriptions de la Direction de l’environnement n’a été respectée par la Senchim. Ce que confirme le maire de Thiaroye Sur Mer, Niaga Niang qui parle de « non respect par la Senchim des prescriptions techniques formulées au cours des différentes missions effectuées par les techniciens de l’administrations ».
Les représentants des Ics, « ont souligné, à cet effet, les aspects financiers liés à la délocalisation et également l’accompagnement de l’Etat qui pourrait être stratégique ».
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