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CRISE DE L’ELECTRICITE Les axes du mal

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S’il a pu permettre de réduire les délestages, le plan « TAKKAL » qui était censé sortir de la crise le sous-secteur de l’électricité s’est enlisé. Des sept axes qui en composent les actions, seul le premier est réalisé (pour combien de temps) et les perspectives laissent planer de grosses préoccupations sur la situation du sous-secteur de l’électricité. Pendant ce temps, force est de constater que le nouveau régime ne dispose d’aucun schéma pour changer la donne.

Quand le ministre de l’Energie, lui-même, parle d’ »incertitudes sérieuses » qui planent encore sur le sous-secteur de l’électricité, relativement à son financement, c’est que la situation est non pas désespérée, mais très préoccupante. Le plan dénommé « TAKKAL » qui était censé sortir le sous-secteur de l’électricité, de la crise, s’est plutôt enlisé. S’il a pu permettre de réduire les sempiternels délestages, la question c’est : pour combien de temps et à quel prix ?
Un Comité de Restructuration et de Relance du Secteur de l’Energie(Crrse) avait pourtant, par arrêté n° 09181 du 13 octobre 2010, été mis en place le 03 novembre 2010, sous le magistère de Karim Wade, alors ministre, entre autres, des hauts fourneaux de l’Energie. Structure « indépendante » composée de personnalités issues de différents secteurs, ledit comité était chargé de la définition du plan de relance et de restructuration du secteur, mais aussi du suivi de sa mise en œuvre. Mais depuis son premier rapport remis en début 2011 et qui donnait des propositions d’actions d’urgence, aucun rapport d’étape n’est à ce jour répertorié de la part du comité. Aussi, si la lumière a, depuis, jailli des ténèbres électriques au prix d’un coût financier qui a fini de racler les fonds des caisses de l’Etat, la situation de l’entreprise Senelec par contre est toujours dans le noir ; l’équilibre entre l’offre et la demande reste précaire ; et les investissements destinés à prendre le relais des capacités de production louées accusent un retard qui fait craindre le pire.
Vœux pieux

En 2009, sur 109 GWh d’énergie non fournie suite à des délestages par manque de production, un total de 69 GWh était imputable au manque de combustible. La question de l’approvisionnement en combustibles a été ainsi inscrite en priorité comme premier axe d’intervention dans le cadre de la relance du secteur. Aussi, les nouvelles autorités en charge constatent-elles aujourd’hui « un approvisionnement régulier et suffisant » du parc de production de SENELEC et une résorption momentanée du déficit de production d’électricité et partant une réduction des délestages… par manque de combustible car, dans certaines zones de la capitale et du pays, les délestages sont encore une réalité.
Cependant, cette « sécurisation » de l’approvisionnement en combustibles devait se faire « dans les meilleures conditions économiques ». Or, meilleures conditions économiques riment avec allègement des charges de combustibles dans le compte d’exploitation de Senelec. L’importance de ces charges de combustibles « explose » le compte d’exploitation de l’entreprise et il était question d’exonérer de la contribution au FSIPP (Fonds de Sécurisation des Importations de Produits pétroliers), les produits pétroliers destinés à la production d’électricité. Rien aujourd’hui ne permet de dire que cela a été fait.

Le Fsipp, rappelons-le, est destiné à accompagner le système des prix plafonds en vue d’assurer un approvisionnement correct et régulier du marché sénégalais en hydrocarbures raffinés sans incidences négatives sur, d’une part, la Trésorerie de l’Etat et d’autre part, celle des entreprises importatrices. Ce qui n’est pas le cas pour Senelec dont les surcoûts apportés sur les produits destinés à sa production ont contribué à renchérir ses charges. Pour la petite histoire, en 2007, ce fonds avait permis de collecter 25,8 milliards contre 3,4 milliards de FCfa en 2006, l’année où il a été institué. Aussi, une exonération des produits pétroliers destinés à la production d’électricité de la contribution au FSIPP pourrait engendrer une économie de 13 milliards de francs CFA par an. De même, un accès de Senelec au Distillat TAG (aujourd’hui presque à l’arrêt) en remplacement du gasoil (produit identique), à l’instar de GTI, entraînerait pour Senelec une économie supplémentaire de 9 milliards, portant ainsi le total d’économie à réaliser à 22 milliards de FCfa par an. Là aussi, rien ne permet de dire que ces économies ont été réalisées, encore moins le retour de la TAG 2 (Turbine à gaz n°2) et la reconversion de GTI au gaz qui, au demeurant, nécessite un plan de sécurisation gaz à court terme.
50 milliards de coût par an

En deuxième axe, un processus de location (auprès de l’américain APR Energy) d’une capacité additionnelle de production a été entamé. Or, ce processus devait intégrer des options qui minimisent la durée de la location d’unités fonctionnant au diesel oil (à 126 FCfa/kwh), en vue d’un passage rapide à des équipements utilisant le fuel lourd (à 68 FCfa le Kwh ) comme combustible jugé moins chère, au demeurant. L’un dans l’autre, les deux actions (réhabilitation-location) devraient tenir compte, en termes de dimensionnement et de coût, de l’impératif d’accélération de l’arrivée du charbon. Non seulement la location perdure au-delà du raisonnable avec des coûts exorbitants du fait notamment d’un cours du baril au plus haut, mais le charbon s’avère… plus dure à cuire avec une centrale dont on n’est pas près de voir la cheminée. Il se trouve que chaque année de retard pour la mise en place de la centrale à charbon qui devait être mise en cohérence avec la location, coûterait la bagatelle de 50 milliards de nos francs.

L’urgence est relative à l’obsolescence actuelle d’une partie du parc d’ailleurs relevée récemment par les nouvelles autorités en charge, liée non seulement au déficit projeté de 200 MW, mais aussi à une demande latente actuelle de 150 MW ainsi qu’à à une croissance de cette demande de 8 % (l’un des taux les plus élevés d’Afrique) par an. Sous ce rapport, le Crrse s’était d’ailleurs fondé sur les estimations du Cabinet McKinsey pour noter que l’année 2013 pourrait être « l’année de tous les dangers ». Mais cela pourrait bien être 2012 déjà, avec l’hivernage qui s’annonce et qui va grossir de danger la problématique de la demande liée à l’offre, qui constitue l’axe 3 du Takkal.

Autant dire que les axes sur lesquels repose le plan TAKKAL : Construction de capacités de production permanentes pour l’accélération de la sortie de crise ; Restructuration financière ; Qualité de service à la clientèle et accès à l’électricité ; Gouvernance et management du plan d’urgence, ne sont toujours pas une réalité, loin s’en faut. Surtout si l’on considère que la restructuration financière de Senelec passera par la résolution des facteurs structurels de dégradation de la situation financière de SENELEC notamment : la régulation des tarifs et en particulier la nécessité d’une révision intérimaire suite au retard du charbon ; la surcharge que représente le FSIPP sur les factures de combustibles, le problème du différentiel de TVA qui se traduit par la hausse continue de la rubrique « autres créances » passée de 49 milliards de FCfa en 2007 à 110 milliards en 2009 (TVA récupérable, frais de douane à récupérer ; exonération des deux premières tranches en basse tension et compensation des revenus en hors TVA). Doit-on s’attendre à une hausse des tarifs de l’électricité ? D’autant plus que le bilan dressé alors par la Commission de Régulation du Secteur de l’Electricité (CRSE) sur la dernière période tarifaire 2005-2009, parle de l’incidence sur les revenus de Senelec de la non-atteinte des objectifs de disponibilité des centrales et de rendement de l’exploitation qui se chiffrerait à 100 milliards de FCfa.

Au passage, le TAKKAL qui aura coûté à nos pauvres finances la faramineuse somme de 650 milliards de FCfa, pour pas grand-chose, aura royalement mis de côté une réforme institutionnelle qui, dans son principe, établissait le dégroupage en trois entités (Distribution, production, transport) de l’entreprise qui deviendrait une holding, avec l’objectif d’une meilleure efficience de la gestion. Or, le gouvernement de Macky est venu sans aucun schéma de substitution et le ministre de l’Energie, Aly Ngouille Ndiaye le confirme bien en parlant d’ »incertitudes sérieuses » qui planent encore sur le sous-secteur de l’électricité.

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