C’est à un tour d’horizon presque complet des problèmes auquel est confronté le secteur du tourisme du Sénégal que se sont adonnés les patrons et propriétaires d’hôtels et d’agences de voyage du Sénégal, en conférence de presse sous la houlette de leur président Mamadou Racine Sy. Une occasion pour fustiger la manière dont le ministre de tutelle gère le secteur, et qui, selon eux, les défavorise face au transport aérien.
«Nous avons l’impression que le tourisme n’est pas pris en compte dans la démarche de notre ministre, et que l’on prend plus en compte le transport aérien que nous. C’est le ressenti de l’ensemble des acteurs du secteur.» Mamadou Racine Sy, président du Syndicat patronal de l’industrie touristique et hôtelière (Sphs) et de la Fédération des organisations patronales de l’industrie touristique du Sénégal (Fopits), entouré de tout ce que le Sénégal compte comme patrons et gérants d’hôtels, d’agences de voyage et présidents de syndicat d’initiative au Sénégal, n’a pas, comme à son habitude, mâché ses mots pour mettre l’accent sur les maux qui affectent le secteur du tourisme. Et à entendre ses collègues et lui, l’un des premiers responsables du marasme du secteur n’en serait que le ministre Alioune Sarr.
Le président Racine Sy, qui a pour l’occasion, reçu les félicitations de tous ceux qui étaient présents au King Fahd hôtel pour cette rencontre du Sphs, à l’occasion de son élection à la mairie de Podor, a affirmé de manière nette que «les directives du chef de l’Etat, pour la mise à disposition du secteur du tourisme, d’un certain nombre de ressources, n’ont pas été respectées. On parle de 75 milliards qui auraient été mis à la disposition du secteur du tourisme, nous disons que ce n’est pas le cas». Les membres du Shps estiment que cet argent, qui devait servir à permettre la réhabilitation de certains réceptifs et à favoriser la relance de l’activité avec la sortie du Covid-19, semble leur avoir échappé. Résumant la pensée de tous les participants, Racine Sy explique : «Les professionnels l’ont tous dit : nous avons l’impression qu’il y a un ministre des Transports aériens, mais il n’y a pas un ministre du Tourisme. Les professionnels déplorent la marginalisation du secteur du tourisme, et nous demandons au ministre en charge du secteur de se ressaisir et de nous accorder la place que nous méritons.» Le ministre aurait dévoyé certains financements du Tourisme vers le Transport aérien, selon ses détracteurs.
Principal objet du litige, le crédit hôtelier dont les acteurs disent ne pas voir la couleur, s’ajoute aux difficultés créées par le Fisc à certains acteurs du secteur, qui font l’objet de redressements, malgré les promesses reçus de la part de l’autorité supérieure de l’Etat. Et Racine Sy déplorera : «Aussi bien en ce qui concerne le crédit hôtelier que notre mémorandum, que nous avons remis au chef de l’Etat et dont tous les points avaient été acceptés, nous avons remarqué qu’il y a eu zéro mise en œuvre. Sur le crédit hôtelier, un autre obstacle rend l’absorption des crédits difficile. Alors que l’Etat offre une garantie d’environ 80%, souvent, les banques demandent des garanties telles que le crédit en devient inaccessible. Pourtant, quand on veut soigner un malade, on lui donne au moins de l’eau pour boire un comprimé. On ne l’oblige pas à avaler le comprimé sans eau.»
En ce qui concerne la fiscalité que la Dgid commence à vouloir recouvrer, en recourant même à des Avis à Tiers Détenteur (Atd), le président du Sphs souhaite un compromis qui préserve les vaches au lieu de les pressurer à mort. Il fait valoir que «la crise est encore là. On parle encore du Covid-19 en Chine. De plus, on ne connaît pas encore les conséquences de la guerre en Ukraine sur les flux du tourisme. On les voit sur les prix du blé, parce que l’Ukraine est l’un des plus importants producteurs de blé dont la hausse des prix va se répercuter sur les prix à la consommation dans le monde. Nous disons donc aux autorités de nous permettre de souffler. Nous avons subi des dommages tels qu’il nous faut au minimum 3 ans, pour sortir la tête de l’eau. Et encore, il y a des développements qui remettent en cause ce développement. Donc, on ne peut pas aujourd’hui, payer les choses que l’on nous demande. Il faut une concertation, pour nous permettre d’évaluer la situation et prendre des mesures idoines, pour permettre au secteur de jouer sa partition».
Pour faire comprendre les enjeux, il dira : «Nous sommes un secteur fortement pourvoyeur d’emplois et si l’on ne prend pas des mesures, nous allons vers une crise certaine. Chaque Sénégalais a au moins un membre de sa famille qui travaille, de manière directe ou indirecte dans un secteur lié au tourisme. Il faudrait faire rapidement une évaluation, prendre des mesures pour maintenir le secteur à flots».
Leur situation est telle que certains membres du Sphs n’ont pas hésité hier à demander à leur président de songer à organiser une manifestation d’envergure nationale, pour leur permettre de se faire entendre. «Comme les nombreux autres qui le font», ajouteront certains.
le Quotidien