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De la vulnérabilité sécuritaire du Président à l’érection d’une escadrille présidentielle. (Par Ahmet Sarr)

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Les voyages fréquents du président de la République, à bord d’avions privés et pilotés par des
équipages étrangers, révèlent une problématique : celle de la vulnérabilité du Président. Est-il
vraiment en sécurité, notre Président ? Cette question mérite une réflexion et pose un problème de
sécurité d’Etat. Elle n’est point une question partisane mais nationale ; elle interpelle tous les
Sénégalais.
Peut-on imaginer, un seul instant, les Américains confier leur Président ou certains de leurs officiels
de haut rang à des compagnies aériennes privées dont les équipages sont des Mexicains ou des
Russes et vice versa ? La réponse à une telle question semble aisée pour les Sénégalais éclairés.
Ce n’est pas pour une raison d’ego immodérée, par exemple, que le Président américain ne voyage
qu’ à bord d’Air Force One, son avion de commandement, ou, que le Président français ne se
déplace qu’à bord de COTAM 0001, le sien. Les raisons sont sécuritaires et stratégiques.
Rappelons que ces présidents disposent d’une flotte de plusieurs avions.
Le Sénégal ambitionne d’être un pays producteur de pétrole et de gaz dans le moyen terme ; une
nouvelle donne stratégique qui propulse le Sénégal sur la scène géopolitique internationale. Ce qui
engendre évidemment des intérêts de groupes. Savons-nous à quel(s) groupe(s) appartiennent ces
équipages d’avions privés? Connaissons-nous le ou les groupes ou les actionnaires propriétaires
de ces avions privés ? Procédons-nous à la due diligence ou la diligence requise sur les aspects
non-techniques ? Bref !
Ces groupes peuvent émaner des cartels et/ou des lobbies, etc., et des obstacles à leurs intérêts
favorisent le chantage, les menaces ou même l’élimination physique. L’exemple des cartels de la
drogue en Amérique du Sud, qui dictent leurs lois, est assez illustratif. Ainsi, les locations

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ponctuelles d’avions n’exposent elles pas notre Président ? Disons-le nettement. Sa sécurité nous
semble précaire.
Les enjeux politico-financiers et stratégiques commandent donc que l’’armée de l’Air du Sénégal
planifie et exécute tous les déplacements présidentiels avec des équipages militaires sénégalais
en tout temps et en tous lieux.
Au-delà de la sécurité du Président, une autre problématique se dresse : celle des
télécommunications du Président et de sa délégation. Le Président doit être joignable à tout instant
et des équipements de télécommunications spécifiques cryptées doivent, en conséquence, être
installés dans l’avion. Il peut échanger sur des questions urgentes d’intérêt stratégique ou, même,
estampillées « secret d’Etat » avec des collègues ou autres officiels dans les airs. Qui prête l’oreille
à ces conversations ? Si les communications sont cryptées, qui contrôle les servers c’est-à-dire les
ordinateurs ? Par conséquent, la sécurité du Sénégal est aussi menacée.
Comme on le voit, nous avons glané quelques éléments, parmi d’autres, pour établir les risques liés
aux déplacements du Président en l’absence d’un avion de commandement du Sénégal. Les
départs décidés en urgence au gré de l’actualité ou encore les crises diplomatiques s’accommodent
difficilement d’un seul avion. Dès lors, le renforcement de la flotte présidentielle s’impose au
regard des contraintes stratégiques particulières. Il ne s’agit pas d’acquérir un nouvel avion de
type Airbus A319-CJ qui assure les vols présidentiels internationaux. Certains avions, de moindre
envergure certes, sont capables du convoyage du Président et de sa délégation. Par exemple, le
Gulf Stream G700, le Bombardier Global 7500 ou l’Embraer Lineage 1000.
Le Gulf Stream, dans sa nouvelle version G700 – que beaucoup de chefs d’Etat et d’entreprises
utilisent d’ailleurs, peut transporter un maximum de 19 passagers et atteindre un rayon d’action de
13,890 km. Il peut aussi voler à une vitesse jouxtant les 950 km/h et à une altitude de 15,545 m ;
une altitude où les turbulences sont rares. Cet avion, plus rapide que l’Airbus 319CJ et, peut-être,
moins coûteux en frais d’exploitation, est capable de faire un vol direct Dakar-Beijing, par exemple.
Donc, un avion qui répond aux exigences de mobilité du Président. Le coût d’un tel appareil
avoisine, cependant, les 40 à 45 milliards de nos francs. D’où cette intéressante question.
Est-il opportun pour le Sénégal d’acquérir un nouvel avion plutôt que de construire des
hôpitaux, des écoles, des logements, etc. ? Question légitime, certes, que tout Sénégalais doit
se poser. En d’autres termes, est ce que l’investissement dans un avion ne serait pas mieux utilisé
dans des secteurs à meilleure rentabilité sociale ou meilleure utilité comme l’éducation ou la sante ?
Vu sous le prisme du coût d’opportunité, la réponse est négative. Quoique le calcul du coût
d’opportunité, difficile du reste pour ces types d’investissement, soit au cœur de la décision
économique, les prises de décision, en matière d’investissements de cette envergure, intègrent, par
ailleurs, un instrument qui transcende les régimes politiques et dont la quantification est aussi
complexe. Il s’agit de l’héritage intangible. C’est le soft power ; c’est la place internationale du
pays dans la sphère géopolitique ; c’est l’identité nationale ; c’est aussi la fierté nationale.
Tous ces éléments contribuent à certains choix stratégiques que le citoyen non avisé appréhende
difficilement. Et cet instrument est souvent occulté par certains acteurs politiques qui évaluent
simplement la pertinence du choix des programmes du PSE – Plan Sénégal Emergent- sur la

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dimension économique. Pourquoi tel projet ou tel choix et non pas tel autre ? Pourquoi tel
fournisseur ou tel investisseur et non tel autre ? Le Sénégal évolue dans une dynamique de
partenariat win-win ou gagnant-gagnant. Il est donc illusoire de penser qu’il opère dans un jeu
mondial à somme nulle.
Ainsi, certains investissements obéissent plus à une logique politique ou stratégique qu’économique.
C’est la quête de cet héritage intangible qui a conduit le Brésil, par exemple, à l’organisation de la
Coupe du monde de football de 2014, en dépit de l’opposition des Brésiliens qui réclamaient des
hôpitaux et des écoles plutôt que des stades. Il en est de même de la Russie qui a organisé les
Jeux olympiques d’hiver de Sotchi en 2014 pour affirmer sa place sur la scène internationale.
Ce Sénégal émergent assoit intelligemment sa place sur la scène régionale et internationale.
L’invitation du Président Macky Sall aux grandes rencontres internationales, où se réunissent les
dirigeants des grands pays de ce monde, confirme notre sentiment. Nous devons en être fiers !
Toutefois, cette assise sur la scène internationale ou encore cette fierté nationale s’est écornée lors
du dernier sommet de l’UEMOA quand notre Président s’est trouvé dans l’obligation de faire de
l’avion-stop. Il urge, en définitive, de mettre en place une flotte présidentielle pour faciliter les
déplacements sécurisés du Président et des futurs Présidents du Sénégal.
Ahmet Sarr, MBA
APR, New York, USA

2 Commentaires

  1. Vous avez raison. Par ces temps qui courent, il ne doit pas voyager par vols réguliers y notre compagnie nationale.
    Quelque soit le coût , même 100 milliards de XOF , il faut budgétiser et à travers une LFR, si besoin, acquérir très rapidement un type d’avion mixte (civil + militaire) très confortable.
    La sécurité du Président de la République du Sénégal n’a pas de prix.

  2. Je partage totalement tes analyses Ahmet
    Le président de la république a besoin de sécurité et de moyens pour faire son travail dans les meilleures conditions possibles. Le développement économique de notre pays y dépend par conséquent on ne peut pas parler de gâchis lorsqu’il s’agit des investissements de fonction.
    Merci pour la réflexion

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