« De Bologne, ville de la Renaissance en Europe, siège de la plus ancienne université du monde occidental depuis sa fondation en 1088, je voudrais lancer un appel. L’Europe ne peut continuer à prétendre promouvoir les droits de l’homme et la liberté tout en cédant à la tentation du populisme et de la xénophobie. Ce faisant, l’Europe se trahit elle-même », a déclaré Dr. Bakary Sambe.
Invité par le Ministère italien des Affaires étrangères et de la coopération internationale par le biais de l’Ambassade d’Italie à Dakar, dans le cadre de la Session 2019 de l’Académie européenne de religion, le chercheur sénégalais est intervenu dans le panel dirigé par Professeur Jocelyne Cesari de Gorgetown University.
Dans cette session, il a été noté qu’au cours des trois dernières décennies, un nombre important de centres de «Religion et vie publique» ont émergé dans les universités européennes. Au-delà d’un objectif commun d’améliorer la compréhension du public de religion, ces centres varient considérablement en termes de mission, portée, programme de recherche, et ils collaborent rarement les uns avec les autres. La session dans laquelle est intervenu le chercheur sénégalais portait sur les modes de communication sur la religion en Europe afin de se pencher sur les espaces publics d’après différentes perspectives nationales et religieuses.
Certes, pour l’enseignant au Centre d’étude des religions (CER) de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, « avec la montée du terrorisme, les esprits sont surchauffés, l’émotion est à son comble, mais l’Europe ne doit pas abandonner son combat pour la défense des principes en cédant le pas aux minorités extrémistes. Le choc des extrêmes tant redouté et qui semble se profiler à nos yeux n’apportera rien de positif à l’essentiel du vivre-ensemble»Loin de souscrire au sentiment d’un « choc inéluctable entre Islam et Occident », le Directeur du Timbuktu Institute a surtout invité à se départir des « discours dichotomiques et des conceptions manichéens » à propos des relations interculturelles : « Je n’ai jamais cru à l’opposition systématique entre l’Islam et l’Occident, qui est une construction simpliste. L’islam est devenu une religion européenne depuis longtemps. Les langues européennes sont les langues de l’islam à travers lesquelles des millions de musulmans se parlent et s’expriment. C’est en français que des millions de jeunes acquièrent les connaissances de base de l’islam en Afrique comme en Europe. Si, aujourd’hui, la représentativité à l’organisation de la Conférence islamique devait être déterminée par le nombre de musulmans sur un territoire ou un pays donné, la France mériterait plus de sièges que le Koweït ou encore la Jordanie »Appelant à une approche privilégiant « une étude comparée des religions, toujours prônée par le Professeur Mohamed-Chérif Ferjani dans ses différents travaux qui ont démontré que l’islam n’était pas une exception dans le cadre de l’évolution du discours religieux », Dr. Bakary Sambe a déploré le peu d’intérêt à la démarche islamologique critique, depuis peu supplantée par « une malheureuse mode d’étudier l’islam en tant que simple problème dans les sociétés européennes »