Elle s’appelait Aissatou Diallo. Elle avait 12 ans et elle voulait vivre. .. Par Cheikh Tidiane DIEYE, Badara Diouck et Babacar Ba.

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Aissatou Diallo était une brave fille. Elle voulait vivre. Elle n’a eu de cesse de répéter à sa mère qu’elle ne partirait pas car elle n’avait que 12 ans. Pouvait-elle imaginer l’inimaginable?
Malgré la douleur atroce qu’elle ressentait et les conditions inhumaines dans lesquelles elle était internée à l’hôpital de Pikine, elle s’est battue jour et nuit, jusqu’à son dernier soupir, pour rester auprès de sa mère, retourner à son école et continuer à jouer avec les enfants de son âge.
Non, Aissatou n’est pas morte. On l’a laissée mourir. Voici son histoire.
L’histoire d’Aissatou Diallo est courte. C’est celle d’une fillette de 12 qui n’a pas connu son père décédé alors qu’elle n’avait que 2 ans. Blessée alors qu’elle effectuait de petites activités domestiques, elle a été conduite dans un hôpital où l’on était censé la soigner et la sauver. Elle y a été prise en charge en retard et au gré des humeurs et de la volonté d’un personnel soignant dont tous les actes pourraient être constitutifs du délit de non assistance à personne en danger. Le récit de la mère d’Aissatou est poignant. Elle a fait ce qu’elle a pu pour sauver sa fille. Elle a subi brimades et humiliations durant les 72 heures qu’elle a passé dans l’hôpital. Pendant ce temps sa fille Aissatou Diallo, gémissait de douleurs dans son frêle corps de 12 ans traumatisé par une hémorragie interne qui n’a pas été soignée.
Elle est arrivée à l’hôpital de Pikine le vendredi vers 11 heures pour faire une échographie qui aurait pu permettre d’identifier son mal assez tôt. Elle n’a eu droit qu’à des perfusions qui visiblement n’ont eu aucun effet sur son état. Elle a passé la nuit du vendredi dans une chambre qui n’avait ni climatiseur ni ventilateur. Elle y a supporté la chaleur suffocante et les moustiques, soulagée péniblement par l’éventail de sa maman et les morceaux de tissus qu’elle lui appliquait sur le visage pour lui nettoyer la sueur et pour la rafraichir. Lorsque cette chaleur fut insupportable pour elle, un des gardiens de l’hôpital pris par un geste d’humanisme vint dire à la maman d’Aissatou qu’une chambre venait de se libérer et que le climatiseur y marchait bien. La dame porta sa fille dans les bras pour aller la recoucher dans la chambre indiquée avant d’aller elle-même se coucher, à même le sol, dans le couloir attenant. Au bout de quelques minutes, soulagée par la fraicheur, Aissatou réussit à s’endormir.
Son sommeil n’y dura pas longtemps. Informé de la présence de la jeune fille dans cette chambre qui ne lui a pas été affectée, un membre du personnel de garde ce soir là vint la chasser sans ménagement. Il obligea cette petite qui pouvait à peine tenir debout, rongée qu’elle était par la douleur, à marcher pour rejoindre une autre chambre. Ce sont ses cris de douleur et de détresse qui ont réveillé sa mère. Elle ne put rien faire devant ce spectacle qui nous sort carrément du registre de l’humanité.
Lorsque finalement l’échographie a été faite le samedi soir, soit donc 24 heures après l’arrivée d’Aissatou à l’hôpital, le résultats était sans appel: l’hémorragie avait duré trop longtemps et sa vie était gravement en danger. Il fallait l’opérer sans délai. L’échographe prit même le soin d’inscrire sur l’enveloppe contenant les résultats le caractère urgent de l’intervention. Aissatou fut admise au bloc plusieurs heures après. C’était trop tard. Bien trop tard.

Les conditions dans lesquelles la mort de sa fille lui a été révélée sont encore plus dramatiques. Lorsqu’elle se présenta devant la salle de réanimation pour prendre des nouvelles, suite à l’opération, un homme présent sur les lieux et qui ne savait visiblement pas qu’il s’adressait à la maman d’Aissatou l’informa en ces termes:  » si vous parlez de la fille de 12 ans qui avait fait une hémorragie, elle est morte depuis 1 heures matin. Son corps est déjà déposée à la morgue ».
C’est la fin de l’histoire d’Aissatou Diallo.
C’est le début de la notre. Nous avons été nombreux à nous indigner face au drame vécu par cette fillette qui aurait pu être la fille de chacun d’entre nous.
Si nous ne faisons pas la fine bouche, nous reconnaitrions que ce fait, aussi douloureux soit-il, n’est malheureusement pas une exception. C’est la règle. Le traitement que subit le malade anonyme, qui n’est « recommandé » par personne, donc forcément présumé pauvre, dans les structures de santé est simplement inhumain et dégradant. Avatar de notre société décadente, rongée par nos irresponsables et communes démissions. Un Etat failli parce qu’incapable d’offrir à sa population le minimum nécessaire pour lui assurer une dignité d’homme: vivre et mourir dignement.
Il est temps d’agir pour amener les autorités à prendre le taureau par les cornes pour oser réformer en profondeur le système sanitaire.
Nous saluons la position du Ministre de la Santé. Mais le discours ne suffira pas. Avant lui, d’autres avaient aussi juré dans les médias et afficher une indignation qui n’a duré que le temps d’une rose. SI l’enquête ouverte est bien menée, les enquêteurs n’auront aucun mal à situer toutes les responsabilités sur les dysfonctionnements qui se sont enchainés et qui ont conduit à la mort de la petite AIssatou.
Nous n’avons pas pris position sans avoir pris le temps de comprendre les tenants et aboutissants de cette affaire. Nous avons écouté le récit du Directeur de l’hôpital de Pikine qui nous a paru superficiel et laconique. Nous nous sommes rendus ensuite dans la maison mortuaire pour dire notre peine et notre compassion à la famille et écouter aussi leur version, de vive voix.
Ceci est donc un appel en direction des autorités. Cet acte ne doit pas rester impuni. Nous invitons Monsieur le Ministre de santé à prendre tout acte administratif approprié pour sanctionner les fautifs, et ceci, sans préjudice du droit de la famille de porter plainte contre l’hôpital.
Nous invitons aussi tous les citoyens à refuser ces pratiques, à les dénoncer et les combattre. Marchons s’il le faut, crions, interpelons mais refusons de banaliser ce qui doit être exceptionnel.
Dans notre pays, la vie ne « tient qu’à un fil ». Un fil vite rompu du fait de la négligence de nombreuses personnes qui travaillent dans les hôpitaux et centres de santé mais qui n’y ont pas leur place. Plus que les infrastructures physiques et le matériel, ce sont bien dans les mentalités, les façons de faire, les pratiques et les comportements des personnels qu’il faut changer. Qui ne respecte pas la vie et la dignité humaine – la vie de tous les humains qu’ils soient proches ou anonymes – ne mérite pas de travailler dans un hôpital.
L’histoire d’Aissatou ne doit pas s’arrêter dimanche dernier. Poursuivons-la en sauvant d’autres enfants d’une mort parfaitement évitable. Rien de tout ceci ne relève de la fatalité. Nous sommes tous coupables. Les autorités en premier lieu.

4 Commentaires

  1. Tant que ces gens utilisent l’argent public pour se soigner et soigner leur famille, et leur marabout en France et au Maroc, sans aucune honte.
    Les hôpitaux seront toujours des mouroirs.
    Il n’ay aucune autre solution : si ces gens mouraient comme tous les autres sénégalais dans les hôpitaux locaux vous seriez surpris de la manière dont ils prendraient en charge ces mouroirs, tout le rester c’est du baratin.
    Vous vous rendez compte que même ce type rentre d’un séjour de soins en France et il ose tympaniser les sénégalais avec ses prétendus.
    De qui se moque-t-on ?
    Allons…….. se soigner ici c’est la mort certaine.
    Je connais personnellement des familles de médecins de professeurs de médecine qui ne se soignent jamais dans ce pays.
    Mais puisque tous les sénégalais ont d’accord n’est-ce pas ?
    Wassalam

  2. Il est vraiment rare de voir un article aussi bien écrit. En marge de ma peine, je félicite les auteurs de cet article. C’est vraiment ce qu’on attend des journalistes.
    Merci.

  3. Merci pour votre article mais je pense aussi qu’une enquête sérieuse doit être menée afin définir avec précision pourquoi et comment la fillette s’est-elle blessée.

    Je ne suis pas convaincu par les explications fournies par la mère de la défunte :  » la fillette alors qu’elle faisait le ménage a glissé et tombée sur la terrasse et une manche de raclette l’a pénétré par l’anus jusqu’à se casser et que la fillette a enlevé elle même le bout de manche qui lui a arraché de la chaire en sortant et il y a eu saignement »

    Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans cette histoire; une manche de raclette mesure plus de un mètre et ne peut pas tenir debout toute seule; soit elle est posée à même le sol ou contre un mur.

    Je précise que la maman a dit qu’elle n’était pas présente au moment de l’accident mais qu’elle a été alerté après.

    Encore une fois parallèlement à l’enquête qui est entrain d’être menée au niveau de l’hôpital,une autre enquête doit être diligentée au niveau de l’entourage de la défunte.

  4. C EST SIMPLE LE MINISTRE DE LA SANTE DOIT INSTALLER DES SERVICES D INSPECTION AU NIVEAU DE CHAQUE STRUCTURE ET RELEVER CE PETIT DIRECTEUR QUI A ETE PISTOONNER PAR DIGNE FADA ET MAME ABDOULAYE GUEYE EX DIRCAB DE DIAGNE FADA ET EVA MARIE COLL SECK 2 MINISTRES QUI N ONT PAS RIEN FOUTU AUCUNE VIGILENCE DANS LE FONCTIONNEMENT DES STRUCTURES CE DIRECTEUR N A PAS LES COMPETENCES DE DIRIGER UN HOPITAL DE CE NIVEAU IL TRIPOTER L HOPITAL DE NIVEAU IL EST LE RESPONSABLE DES MAUX DONT SOUFFRE L HOPITAL DE LA SANTE VILLE TIVAOUANE PARTAGE DE PRIMES PLUS DISCRIMINATION ENTRE LE PERSONNEL

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