L’équipe nationale reste toujours un objectif»
Abdoulaye Diallo n’est plus à présenter aux Sénégalais. Considéré comme un des meilleurs à son poste, il a fait les beaux jours du Casa Sport et de la sélection locale, avant de rejoindre la Lituanie. Après deux belles saisons dans ce pays des Balkans, il a déposé ses valises à Atlantas, un autre club lituanien, après un bref passage dans le championnat américain (Minnesota United). Dans cet entretien exclusif qu’il a accordé ASsports, l’élégant défenseur est revenu sur diverses questions dont son expérience européenne, son transfert avorté aux USA, l’équipe nationale du Sénégal, le mondial 2018, sans pour autant oublier le Casa Sport, son club de cœur.
Laye, comment êtes-vous retrouvé en Lituanie ?
J’étais en Lettonie au Jelgava. J’ai quitté ce championnat depuis deux ans maintenant. J’avais rejoint le championnat américain où je devais m’engager avec le Minnesota United. Je n’ai pas pu signer avec ce club, car il y avait un problème au niveau des joueurs étrangers. Le club avait déjà huit joueurs étrangers et je devais attendre qu’ils puissent enlever un de ces huit pour me faire une place. Malheureusement, cela ne s’est pas passé comme on l’aurait souhaité. Je suis finalement revenu au Sénégal. Et c’est de là qu’un dirigeant de la fédération lituanienne de football m’a sollicité. Dans le passé, il m’avait vu jouer en Europa League avec Jelgava. Il m’a contacté pour que je rejoigne Atlantas. C’est également un ami au président du club et ce dernier l’avait sollicité pour qu’il lui trouve des joueurs. C’est ainsi qu’il a fait appel à moi.
Etait-il facile pour vous de gérer la frustration de ce contrat raté aux USA ?
Il y avait une petite déception. J’étais là-bas pour signer mon contrat. Mais je dirais que c’est mon visa qui m’avait retardé. Malheureusement, cela avait pris presque un mois au niveau du Sénégal. Quand je suis arrivé aux États-Unis, ils avaient déjà entamé le championnat. Ils avaient déjà leur effectif, mais ils m’ont appelé. Il y avait même un Brésilien qui devait prendre la nationalité américaine et libérer une place. Mais au dernier moment, cela n’a pas été le cas. Du coup, je suis resté là-bas à m’entrainer avec eux. C’était certes une déception, mais cela arrive parfois.
Comment trouvez-vous l’ambiance au sein de votre nouveau club ?
Dans l’ensemble, je dirai qu’elle est bonne. C’est un bon vestiaire, on se taquine, on s’amuse. C’est un club qui a un bon projet et je suis là pour relever le défi. Si j’ai signé pour ce club, c’est pour apporter mon expérience.
Aviez-vous d’autres contacts, en dehors de Atlantas ?
J’en avais, notamment au Kazakhstan. Mais quand j’ai bien analysé la situation, je me suis rendu compte que venir ici serait mieux pour moi. Comme j’ai eu à le dire, le club a un projet intéressant et cela a beaucoup pesé dans ma décision.
Quels sont les objectifs de ce club pour cette saison ?
Quand je suis venu pour signer, ils m’ont dit que l’objectif était de retourner en Europa League l’année prochaine. Mais cela passera par de bons résultats en championnat. On doit d’abord finir sur le podium. Je me suis dit que c’est intéressant comme objectif. Ce sont des objectifs réalisables. En plus, l’Europa League est une vitrine. C’est une occasion de se mesurer aux meilleurs.
Ne pensez-vous pas avoir perdu du temps, surtout avec le début que vous aviez connu à l’époque ?
C’est un peu ça. En quittant le Sénégal pour la Lettonie, c’était pour rejoindre de grands clubs. Mais vous savez, le football c’est un peu compliqué. Cela dépend des gens avec qui tu travailles. Mon agent qui m’avait emmené ici est un Russe. Il m’avait signifié qu’une fois en Lettonie, je vais jouer l’Europa League. Et qu’après cette compétition, il allait me trouver un autre club plus huppé. C’est sur cette base que j’avais rejoint ce pays. Mais une fois là-bas, cela ne s’est pas réalisé. Nous avions fait un bon parcours dans cette compétition et le club avait même passé le second tour, une première dans son histoire. Mais malgré cela, il ne m’a rien dit. J’ai fini par passer deux ans dans ce même club. Il ne me disait toujours rien et j’ai fini par prendre les choses en main. J’ai changé d’agent pour faire bouger les choses. Désormais dans le football il n’y a pas de secret. Quand tu as un bon agent, tu trouveras toujours quelque chose.
Aujourd’hui le rêve de rejoindre un championnat majeur est-il toujours d’actualité ?
Mais ce n’est rien du tout, surtout quand on est dans le domaine du football. Ce sont des choses qui arrivent. Le football, cela passe vite. Je peux même rester ici trois mois et rejoindre un autre championnat ou un autre club. C’est ça le football. Quand tu as les bonnes personnes derrière toi, ça passe très vite. Il faut juste essayer d’avoir les contacts ou de travailler avec les bonnes personnes. C’est ça le football moderne.
Vous avez connu l’équipe nationale avec les différentes catégories. La sélection A est-elle dans votre viseur ?
Cela restera toujours un objectif. L’équipe nationale, chaque footballeur rêve d’y être. Maintenant, ce n’est pas Abdoulaye Diallo qui sélectionne les joueurs. L’équipe nationale a un entraîneur et c’est à lui de voir le profil qui lui convient. Nous sommes des footballeurs et nous ne pouvons que nous mettre dans des conditions de performances. Et s’il a besoin de nous, nous répondront présents. Si on m’appelle, je serais là-bas pour défendre mon pays, mais aussi apporter ma contribution.
Avez-vous les nouvelles de Aliou Cissé, l’entraîneur des «Lions» ?
Aliou, on a des contacts et cela, c’est bien avant qu’il ne soit entraîneur du Sénégal. C’est un de mes grands. Mais nos contacts n’ont rien à voir avec le travail. Si j’ai besoin de lui, il me donne des conseils. Mais ce ne sont pas des contacts où on parle de l’équipe nationale ou de sa profession.
Comment trouvez-vous la poule du Sénégal pour ce Mondial ?
C’est avant tout un groupe très difficile. Les gens ont tendance à dire que cette poule est la plus facile. Mais moi je ne pense pas de la même manière. Dans ces équipes, il y a de très bons joueurs qui jouent dans de très grands championnats. Ce que je leur demande, c’est d’être solidaire. Que tout le monde soit derrière l’équipe et cela doit commencer par le peuple. Il faut qu’on protège l’équipe et mette les joueurs dans de bonnes conditions. Pour gagner quelque chose dans cette compétition, il faudra forcément de la solidarité. Chacun doit être prêt à mourir pour l’autre.
Pour les matchs amicaux, certains disent que les adversaires choisis ne sont pas à la hauteur. Pensez-vous que cela pourrait avoir des répercussions ?
Non, cela n’a rien à voir. Nous sommes à quelques mois de la Coupe du monde. Soit tu es prêt ou soit tu ne l’es pas. Ce n’est pas le moment de se mesurer à telle ou telle autre équipe. Ces matchs peuvent certes servir à quelque chose, mais il y a aussi des risques. On peut par exemple se retrouver avec des blessés, alors que la compétition est pour bientôt. Quel que soit l’adversaire, il faut jouer ces matchs amicaux avec des objectifs clairs. Nous avons juste besoin de voir le groupe à l’œuvre. C’est une occasion de voir si les tactiques sont assimilées et c’est l’essentiel.
Pensez-vous que le Sénégal a un effectif capable de rivaliser avec les autres équipes du groupe ?
Sur ce plan-là, je pense que oui. Pour s’en rendre compte, il faut juste essayer de voir dans quels clubs jouent les footballeurs sénégalais. Le Sénégal est tellement respecté à travers le monde. Là où tu passes, ils vont t’appeler. Ce sont des professionnels, de grands joueurs. On a un très bon groupe et on peut faire très mal. On doit juste les soutenir d’avantage. Que les Sénégalais formulent des prières pour cette équipe.
Sadio Mané est considéré comme le leader technique de ce groupe. Partagez-vous cet avis ?
Si quelqu’un porte Liverpool sur son dos, pourquoi pas le Sénégal ? A mon avis, il peut le faire. C’est juste qu’il doit avoir le soutien du public. Il doit carrément avoir le soutien des Sénégalais. Ils doivent le dire «actuellement, c’est toi». Mais nous avons un public très difficile aussi. Parfois c’est une partie de la presse (rires). Je pense qu’on doit les protéger. En club, ces joueurs ont une protection totale. Les gens chargés de la communication des clubs ne vont jamais dire du mal d’un joueur. Même si tu fais des bêtises, ils vont te remonter le moral, ils te gonflent pour que tu puisses te relever. Si au Sénégal les gens le font, on aura tout ce qu’on de Sadio Mané, car il a le talent pour ça. Moi je pense que ce n’est pas uniquement lui qui pourrait jouer ce rôle. L’équipe nationale dispose de nombreux talents, capables de nous valoir des satisfactions. C’est atout majeur et les joueurs doivent juste sentir le soutien du public.
En tant que défenseur, comment jugez-vous l’axe Kara-Koulibaly ?
C’est une défense très compatible. Ils se connaissent et se comprennent facilement. Je dirais que le Sénégal a eu la chance de les avoir, car ce sont de très grands défenseurs.
La situation du Casa Sports
Le Casa Sport, c’est le club de cœur. C’est tout pour nous. Ce club nous a tout donné et partout que l’on soit à travers le monde, on va le représenter. C’est une manière d’être reconnaissant envers ces personnes qui ont œuvré pour des générations de footballeurs.
Comment jugez-vous leurs parcours en championnat cette saison ?
Le début a été compliqué pour eux. L’équipe avait presque perdu la moitié du groupe. Il fallait se renforcer en recrutant d’autres joueurs. Et le temps de se retrouver, le club a peiné en début du championnat. Mais je pense qu’il commence à se stabiliser. L’équipe va de mieux en mieux et je suis convaincu qu’ils vont faire un bon championnat.
Quelle appréciation faites-vous de l’affaire USO/Stade de Mbour, après la décision du TAS de réintégrer le club ouakamois ?
C’est inacceptable dans un pays comme le nôtre. Nous sommes des frères et pour une finale, on n’est pas obligé de se retrouver avec des morts. C’est désolant et cela n’en vaut pas la peine. Qu’est-ce que les gens y gagnent ? Et cela risque de perturber le championnat. Ce n’est pas facile de jouer au football dans ces conditions-là. Le championnat sénégalais ne mérite pas cela. Je pense qu’il est temps que l’Etat se lève pour faire revenir la paix. Il doit aider la Fédération à faire une médiation entre les deux camps et que les gens continuent de jouer avec tranquillité. Il y a aussi le cas de Guédiawaye. Il faudra trouver des solutions durables. Ils doivent avant tout voir l’intérêt de jeunes footballeurs qui rêvent de faire carrière dans le football.