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[Document Exclusif] Pour non respect des convenances diplomatiques : Karim Wade tancé par l’Union européenne

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Outré par une lettre du Directeur général du Port de Dakar, le chef de la délégation de l’Union européenne a tenu à remettre les pendules de Karim Wade à l’heure des convenances diplomatiques et de l’honnêteté. Gilles Hervio, dans une lettre que Le Quotidien publie in extenso, ci-dessous, remet le ministre d’Etat Karim Wade à sa place en lui prodiguant des suggestions de bonne tenue en diplomatie.

Par Madiambal DIAGNE

ImageLe 12 mars 2010, le ministre d’Etat Karim Wade a eu un déjeuner à Dakar avec les ambassadeurs et chargés d’affaires représentants de pays membres de l’Union européenne. Officiellement, la rencontre se serait très bien passée de l’avis des deux parties. Ainsi, comme pour marquer le climat satisfaisant du déjeuner, le 15 mars 2010, Karim Wade, ministre d’Etat, ministre de la Coopération internationale, de l’Aménagement du territoire,  des Transports aériens et des Infrastructures (Micatti), envoya une lettre à Gilles Hervio, chef de la délégation de l’Union européenne à Dakar, organisateur de la rencontre. Karim Wade lui manifestait «ses remerciements et sa bonne appréciation de la rencontre».
Mais curieusement, le 8 avril 2010, Bara Sady, Directeur général du Port autonome de Dakar, d’adresser un courrier au vitriol à l’ambassadeur Hervio.  Bara Sady, qui pourtant, n’était pas présent au déjeuner, de se dévouer pour défendre l’honneur de Karim Wade ternie, à son avis, par l’ambassadeur de France. Ainsi, le Directeur général du Port de Dakar de porter en épingle des échanges tenus au cours du déjeuner entre l’ambassadeur Jean Christophe Rufin qui demandait à Karim Wade des informations sur les conditions d’attribution du terminal à containers à Dubaï Ports World et surtout le niveau de réalisation des investissements promis par les émiratis. Bara Sady, l’air très remonté, comme le révèlent les termes de sa lettre, de s’attaquer vertement à l’ambassadeur de France.
L’ambassadeur Hervio n’a pas manqué, à l’instar de ses autres collègues, de s’étonner du caractère de la missive aux antipodes des règles diplomatiques. Comment un Directeur général d’une société nationale puisse-t-il interpeler directement un ambassadeur accrédité dans son pays, sans même passer par le canal du ministère des Affaires étrangères ? De quel droit Bara Sady, qui n’était pas à la rencontre et qui de surcroît ne relève pas de la tutelle administrative de Karim Wade, peut-il se permettre de répondre à sa place et de quelle manière ? Mais diantre, qui a violé le caractère confidentiel des discussions convenu d’accord parties pour que le Directeur général du Port puisse en être informé de quelque manière que cela puisse être ? Pour les européens, le coupable ne serait personne d’autre que Karim Wade ou ses collaborateurs. Mais ce qui semble le plus heurter Gilles Hervio est la duplicité qui semble être de mise dans cette affaire. Comment Karim Wade peut-il se féliciter de l’ambiance des discussions et puis briefer Bara Sady pour qu’il trempe sa plume dans le venin pour s’en prendre à des participants à la rencontre ?
Ainsi, Gilles Hervio, non sans user d’un langage diplomatique, a tenu à remonter les bretelles à Karim Wade et ses collaborateurs qui semblent ne pas avoir bien assimilé les règles et convenances diplomatiques. Gilles Hervio, considérant sans doute que Bara Sady a agi par procuration, a préféré écrire directement à Karim Wade en lui signifiant notamment : «Monsieur Bara Sady rapporte que Monsieur Jean Christophe Rufin, Ambassadeur de France, vous aurait «apostrophé» au cours de ce déjeuner, laissant entendre une interpellation brutale et sans politesse qui me semble bien loin du climat qui était celui du déjeuner.» Il ajoute : «Les propos rapportés me semblent eux aussi éloignés de la réalité.» En conséquence, le chef de la délégation de l’Union européenne à Dakar d’asséner fermement à l’endroit du ministre d’Etat Karim Wade : «Je vous serais très reconnaissant, si vous aviez l’opportunité de rétablir les faits auprès du Directeur du Port et si cela vous est possible de rappeler à vos collaborateurs le caractère confidentiel de la rencontre que nous avons eue.»

UNION EUROPEENNE
Délégation en République du Sénégal
Le chef de Délégation
Ambassadeur
Dakar, le 09 Avril 2010
GH/en D (2010) n° 0711
Monsieur Karim Wade
Ministre d’Etat
Ministre de la Coopération Internationale,
de l’Aménagement du Territoire, des Transports
Aériens et des Infrastructures
Dakar

Monsieur le Ministre d’Etat,
Je vous remercie à mon tour pour votre courrier du 15 mars faisant état de votre bonne appréciation du déjeuner que j’ai eu le plaisir d’organiser entre vous, vos collaborateurs, et les ambassadeurs et chargés d’Affaires représentant les pays membres de l’Union européenne présents à Dakar le 12 mars dernier.
Comme je l’avais dit dans mes propos liminaires, cette rencontre s’inscrit dans le cadre du dialogue politique, convenu dans les accords de Cotonou, que nous entretenons tous les mois avec un grand nombre de personnalités ces dernières années sans jamais faire l’objet de controverses.
Le déjeuner que nous avons eu avec vous nous a permis de couvrir un grand nombre de sujets à la satisfaction générale des ambassadeurs européens et dans un climat de chaleur et de convivialité qui a permis de couronner une journée marquée le matin par notre voyage à Richard-Toll.
Aussi je me dois de vous faire part de mon étonnement devant le courrier reçu le 8 avril de Monsieur Bara Sady, Directeur général du Port autonome portant sur des échanges qui auraient été tenus au cours du déjeuner sur la question du Port et dont je vous fais copie.
Monsieur Bara Sady, rapporte que Monsieur Jean Christophe Rufin, ambassadeur de France, vous aurait  «apostrophé» au cours de ce déjeuner, laissant entendre une interpellation brutale et sans politesse qui me semble bien loin du climat qui était celui du déjeuner.
Les propos rapportés me semblent eux aussi éloignés de la réalité.
S’il est exact que le terme «d’affaire du Port» a été utilisé, ma compréhension et celle de mes collègues est que ce terme a été utilisé au sens de «la question du Port». Monsieur l’ambassadeur de France n’a, par ailleurs, à aucun moment fait référence au processus de mise en concession du Port, ni a fortiori dit qu’il n’avait pas été transparent, ni fait référence à la société française ayant répondu à l’appel d’offres. Vous vous souviendrez que son propos visait plutôt à souligner l’importance, qu’il y a au-delà du processus d’appel d’offres, à s’assurer du respect des engagements pris au moment de la soumission des offres. Cette remarque avait été faite après que vous ayez noté les améliorations intervenues dans la passation des marchés publics au Sénégal.
Cette interrogation vous a d’ailleurs permis de nous dire que le processus d’appel d’offres de mise en concession du terminal à conteneurs du Port avait été fait de manière transparente, ce dont nous avons pris acte.
Je vous serais très reconnaissant si vous aviez l’opportunité de rétablir les faits auprès du directeur du Port et si cela vous est possible de rappeler à vos collaborateurs le caractère confidentiel de la rencontre que nous avons eue.
Je me félicite, par ailleurs, de l’invitation du directeur du Port, à visiter les travaux réalisés et vais y répondre favorablement.
Je reste convaincu de l’excellence de notre collaboration et vous prie de croire, Monsieur le ministre d’Etat, à l’expression de ma haute considération.
Gilles HERVIO
lequotidien.sn

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