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Guest-édito du président de la cour pénale internationale

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En 1998, alors que s’achevait un siècle assombri par des atrocités sans nom, les représentants de 160 Etats se sont réunis à Rome pour créer la première Cour internationale permanente chargée de juger les auteurs de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l’Humanité. Les sceptiques prédisaient un échec.

Par Judge Sang-Hyun SONG Président de la Cour pénale internationale

ImageEn 1998, alors que s’achevait un siècle assombri par des atrocités sans nom, les représentants de 160 Etats se sont réunis à Rome pour créer la première Cour internationale permanente chargée de juger les auteurs de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l’Humanité. Les sceptiques prédisaient un échec. Pourtant, en juillet 2002, 60 Etats avaient ratifié le Statut de Rome, et la Cour pénale internationale, la Cpi, entrait en activité. A la fin de ce mois, les représentants des Etats se réuniront de nouveau, cette fois à Kampala en Ouganda. Ils feront le bilan d’un système qui constitue l’une des avancées majeures du droit international. Et surtout, ils débattront de la manière de tirer parti des résultats obtenus par la Cpi en vue de traduire effectivement les auteurs d’atrocités en Justice, et, grâce à cette Justice, d’instaurer une paix durable.
Plus de la moitié des Etats du monde ont rapidement adhéré au Statut de Rome, notamment tous les pays d’Amérique du Sud, les Etats membres de l’Union européenne et 30 pays africains, lesquels constituent désormais le bloc régional le plus important parmi les Etats parties. La ratification récente du Statut par le Bangladesh a porté leur nombre à 111. L’accroissement du nombre d’Etats parties a étendu la compétence de la Cpi qui, sauf intervention du Conseil de sécurité de l’Onu, ne peut connaître que de crimes commis sur le territoire ou par un ressortissant d’un Etat partie.
La Cour est actuellement saisie de cinq situations : en République démocratique du Congo, dans le Nord de l’Ouganda, en République centrafricaine, dans la région du Darfour au Soudan, et au Kenya. Les trois premières situations lui ont été déférées par les gouvernements des Etats en question, et la situation au Darfour l’a été par le Conseil de sécurité de l’Onu. Le procureur de la Cour a demandé l’autorisation d’enquêter sur la situation au Kenya, et un collège de juges a récemment fait droit à cette demande. Deux procès sont en cours, et un troisième doit s’ouvrir en juillet prochain. Bien que les procès n’aient débuté qu’en 2009, certains observateurs indépendants, au nombre desquels l’Onu, sont d’avis que la menace de poursuites devant la Cpi a peut-être déjà permis d’éviter la perpétration de crimes. Même si, de toute évidence, cela est difficile à prouver, un tel résultat serait déjà un succès. Mais il faut aller plus loin.
A Kampala, les diplomates débattront des modifications qui pourraient être apportées au Statut de Rome, notamment sur des points tel que le crime d’agression. La Cour ne prend pas position sur ces questions, mais elle participe à un effort majeur, la réalisation du bilan qui permettra de définir l’avenir de la Justice internationale pénale dans des domaines clés.
En vertu du Statut de Rome, c’est aux Etats qu’il incombe au premier chef de mener des enquêtes et des poursuites visant les auteurs d’atrocités. La compétence de la Cour ne s’exerce que lorsque les Etats n’ont pas la volonté ou sont dans l’incapacité de le faire, car elle est une juridiction de dernier recours. Davantage d’efforts sont indispensables pour aider les juridictions nationales à renforcer leurs capacités, afin que la promesse de justice soit plus concrète et que l’intervention de la Cpi ne soit plus nécessaire.
La Cour ne dispose ni d’une Police, ni d’une Armée, et s’appuie entièrement sur la coopération des Etats pour l’exécution des mandats d’arrêts qu’elle délivre et des décisions qu’elle rend. Si elle a généralement bénéficié de la coopération attendue, des progrès dans ce domaine permettraient toutefois d’améliorer l’efficacité judiciaire. A Kampala, les Etats pourront définir leurs objectifs en matière de coopération et d’assistance, puis déterminer les actions à entreprendre pour les réaliser.
La Conférence de révision offre l’occasion aux victimes et aux communautés touchées de faire entendre leur voix, notamment sur ces questions. L’amélioration de l’assistance que le système mis en place par le Statut de Rome, dans son ensemble, apporte à ces populations est l’un des aspects du bilan qui seront réalisés. Les Etats pourront s’engager à apporter de nouvelles contributions au Fonds au profit des victimes, lequel est chargé d’administrer des projets qui profitent aux victimes et à leur communauté en utilisant les fonds constitués par les dons et les réparations ordonnées. La Cour doit également relever le défi de faire comprendre son action aux communautés touchées, démarche impérative si la Justice doit contribuer à la réconciliation et à la prévention du crime. A Kampala, les Etats pourront s’engager à entreprendre ou à soutenir de nouveaux efforts dans ce sens.
J’envisage la conférence de Kampala avec un sentiment d’optimisme. Dans cette perspective, les Etats ont mis en place un système d’engagement. Ils ont la possibilité de prendre des engagements concrets et ambitieux concernant chacun des aspects du bilan, et, une fois la conférence terminée, de se mettre en devoir de les réaliser. En s’appuyant sur le système de Justice mis en place à Rome, les Etats peuvent faire un autre pas décisif pour garantir la primauté du droit lorsque sont commis les crimes les plus horribles. S’ils y parviennent, ils feront naître l’espoir que ce siècle soit beaucoup plus pacifique que le précédent.

lequotiidne.sn

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