Par Frédéric TENDENG
Il y avait les pistolets de Djibril War et de Moustapha Cissé Lô. Farba Ngom rejoint maintenant cette liste de cowboys dépassés et encombrants de Macky Sall. Le débat aurait été autre s’il s’arrêtait à ce cercle restreint. Il y a que deux ans après la chute peu glorieuse d’Abdoulaye Wade, la gangrène qui a phagocyté et précipité son appareil politique dans l’abîme est arrivé dans les salons de l’Alliance pour la République (APR), parti politique du Président Sall. Les sénégalais en sont conscients et le disent haut et fort.
Inutile de rappeler les insultes et invectives entre hauts responsables du parti présidentiel ainsi que les coups de feu et autres réunions de l’APR terminées en queue de poisson sur l’ensemble du territoire national, depuis deux ans, pour s’en convaincre.
A peine arrivés au pouvoir, certaines personnes ont maintenant un sentiment très vif de leurs droits. Sans tenir compte des mises en garde, en mars 2012, du guignol Bébé Aliou, de la radio privée RFM, elles ont rangé au placard l’univers éthique qui a fondé l’espoir des sénégalais au moment de choisir Macky Sall et qui se matérialise dans l’expression «Yakaar» ou «Espoir».
Au lieu d’être un miroir du peuple, elles étrennent grossièrement leur nouveau statut d’autorité de la République. Plus enclins à exhiber leurs 4X4, à jeter des billets de banque ou à parrainer des combats de lutte et autres galas, elles oublient déjà que la chute d’Abdoulaye Wade et la victoire de Macky Sall sont le fruit d’une longue suite d’événements et de conditions historiques déterminées, fraîchement gardés dans la mémoire collective.
Il urge donc de rappeler à toutes ces personnes-là, qu’elles doivent leurs privilèges d’autorités de la République aux sénégalais, parmi lesquels, des héros qui ont perdu la vie en s’opposant à l’imposture et aux forfaitures d’Abdoulaye Wade qui ne voulait rien céder des délices du pouvoir à Macky Sall et encore moins aux autres qui voulaient « son » fauteuil.
A ces «cowboys» d’un autre âge et aux «gros bras» qui occupent des fonctions éminemment essentielles à la marche du Sénégal, rappelons avec force que le pouvoir est le nom donné à la relation asymétrique qui les unit à nos compatriotes, sans considération des positions et des ressources inégales sur l’échiquier social. Le pouvoir n’appartient donc intrinsèquement à personne. Dans une société démocratique comme la notre, le prétexte selon lequel une massification du parti au pouvoir justifie ces écarts, à la gravité évidente, est inacceptable.
Ces hommes et femmes de l’appareil politique de Macky Sall qui abusent de l’usage de leurs armes, usent de la violence, s’insultent et méprisent leurs concitoyens au lieu d’assumer leur mission de serviteurs du peuple, ont vite intérêt à comprendre leur condition de privilégiés comme la réalité de la relation qui doit s’exercer entre eux et les sénégalais en s’appuyant sur les règles rationnellement établies qui s’appliquent à tous. Ceci commence par le respect et la valorisation d’une démarche citoyenne pour la République du Sénégal et son peuple. En quelque sorte, il s’agit pour eux de réintégrer leur Alliance pour la République (APR).
Meilleur signal ne saurait venir du Président Sall que celui de rappeler à «ses» hommes et femmes qu’ils doivent envisager la confiance en son régime par le peuple comme le produit d’une relation réciproque entre gouvernants et gouvernés. Il s’agit pour les autorités de son camp, qui seraient tentés de l’oublier, de comprendre que c’est le résultat de l’adéquation entre les préférences des sénégalais et l’action des autorités en matière de politiques publiques.
A défaut, beaucoup parmi ces hommes et femmes auront la fâcheuse surprise de se rendre compte que leur pouvoir, du reste éphémère, s’arrête aux frontières de la volonté populaire. Or le retour à la vie de simple citoyen est laborieux sous nos cieux lorsqu’on est «ancienne autorité»… du pouvoir.