Harouna Dème, vice-pdt et chef du projet organisation du gala de l’Anps : « Modou Lô a remporté l’élection parce que… »

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Le premier vice-président de l’Association nationale de la presse sportive du Sénégal (ANPS) prend la défense de sa structure, après la controverse née du choix du meilleur lutteur de la saison qui est allé à Modou Lô. Rédacteur en chef du défunt quotidien Le Populaire (devenu Vox Populi), Harouna Dème donne aussi la raison du non-décernement du titre du meilleur sportif cette fois encore. Entretien.

La consécration de Modou Lô (158 points) comme meilleur lutteur de la saison, devant Reug Reug (157), a été grandement contestée. Sur quels critères la presse sportive s’est basée pour faire ce choix ?

D’abord, je dirais que si on avait fait un choix faisant l’unanimité en lutte, ç’aurait été une exception cette année. Depuis l’instauration du ‘Trophée du meilleur lutteur’ pour récompenser ce ‘sport de chez nous’, on ne l’a pas décerné sans contestation. Parce que ce sont les ténors de la lutte qui gagnent le plus souvent. On n’ignore pas qu’ils livrent, pour la plupart d’entre eux, un seul combat par saison. Et quand ils en sortent victorieux, certains nous disent qu’il y en a parmi leurs pairs qui ont livré plus d’un combat. C’est plus un jugement de valeur. Les critères de l’ANPS sont clairs : popularité de la discipline, engouement du combat en termes de mobilisation et de médiatisation et le palmarès du lutteur. Reug Reug a failli être nominé l’année dernière, mais il ne l’a pas été parce qu’il n’avait livré que des combats de lutte simple. Cette fois, en sus des tournois de lutte simple, il a fait deux combats de lutte avec frappe. Mais au bout du compte, c’est Modou Lô qui a remporté l’élection, parce que ce sont les journalistes sportifs qui votent. Ils couvrent la lutte et savent ce qui s’y passe. Quand ils votent, nous estimons que ce sont des gens avertis et qui ont toute la science requise pour le faire.

Selon les critères évoqués, est-ce donc dire que la popularité de Modou Lô est plus importante que la compétitivité de Reug Reug sur la balance ?

Non, ce n’est pas le cas. On retiendra juste que la lutte simple n’est pas très développée. Parce que le Tolac et le tournoi de la Cedeao, par exemple, ce ne sont que huit pays qui y participent. Pour le dernier tournoi cité, toutes les 16 nations n’y prennent pas part. La lutte simple est un handicap pour les lutteurs qui ne pratiquent que cette forme de lutte. Effectivement, Reug Reug a remporté des tournois internationaux, mais le jugement porte sur ce qui se fait sur le plan national. Plus clairement, c’est la lutte avec frappe qui est déterminante. Il faut souligner cependant que ce n’est pas l’ANPS qui a choisi Modou Lô. C’est sur un vote libre et transparent qu’il a été demandé aux journalistes de choisir parmi les 5 nominés.

Combien d’organes de presse ont participé à ce vote ?

Ce sont toutes les rédactions sportives. On a eu à déposer 34 bulletins de vote entre la presse écrite, les radios, les télévisions, les sites d’informations et les agences. Il y a eu 24 votants pour le titre de meilleur lutteur et 23 dans les autres catégories. Parce qu’il y a ‘’Sunu Lamb’’ (quotidien spécialisé en lutte) qui ne vote que pour la lutte spécifiquement.

Pensez-vous que le vote du journaliste est objectif s’il couvre plus les autres disciplines que la lutte ?

On est mal placé pour aller dans les rédactions pour leur indiquer le votant. Notre rôle est de leur soumettre le bulletin. Aussi, notre conviction est qu’un journaliste sportif est suffisamment averti et informé pour porter un choix quand il s’agit de désigner un athlète, qu’il soit lutteur, footballeur ou basketteur. Parce que la compétence du journaliste sportif est la matière sportive. Dire que ces confrères ne sont pas avertis pour voter, c’est remettre en cause leur compétence. Nous pensons que ceux qui ont voté suivent la lutte de très près.

Reug Reug a dit dans L’Observateur du vendredi dernier qu’il était déçu…

C’est normal. Mais ce qui m’étonne est qu’on veuille en faire un débat. Deux ou trois ans derrière, on nous a reproché d’avoir pris Balla Gaye 2 parce qu’ils pensaient que ce n’était pas parce qu’il avait battu Yékini qu’il devait remporter ce prix. Pourtant ceux qui avaient fini deuxième n’avaient pas dit que le vote avait été mal fait. Mais c’est un combat que les grands lutteurs font et c’est sur cette base qu’on les désigne. Le président Alioune Sarr (CNG) dit souvent que son entité ne reconnaît pas le titre de ‘’Roi des arènes’’, car elle n’a plus organisé le tournoi de désignation depuis Manga 2, le seul lutteur (retraité) qu’elle reconnaît officiellement. C’est la presse qui a créé ce titre (Roi des arènes). Nous ne sommes pas cependant réfractaires à la critique, mais nous faisons des choix que nous assumons.

Concernant le titre de ‘’meilleur sportif de l’année’’ qui n’a pas été décerné, le Grand maître international (GMI) du jeu de dames Ndiaga Samba, lui, a déclaré dans Stades qu’il était choqué par la décision de l’ANPS de ne pas octroyer cette distinction…

C’est parce qu’il ne maîtrise pas les critères et les règlements qui régissent le vote. Nous mettons d’abord en avant la discipline olympique. Pour les titres que nous décernons, la médaille olympique passe en premier, le titre mondial ensuite, puis le titre continental, le titre zonal en cinquième position avant de situer le titre national. Nous n’avons pas décerné le titre de meilleur sportif depuis 4 ou 5 ans, car nous estimons que les sportifs sénégalais n’ont pas fait assez de performances. En 2008, nous n’avions pas décerné le titre de ‘’meilleur footballeur’’, communément appelé ‘’Ballon d’or sénégalais’’ car cela coïncidait avec la déception de la Can (Tamale, au Ghana) et les footballeurs étaient passés à côté. C’était la même chose aussi en 2012. Il est dans son droit, mais il pratique un sport non olympique. Toutefois, l’ANPS a prévu de récompenser ces genres de champions dans des disciplines non olympiques à travers les trophées spéciaux.

L’ANPS est-elle conservatrice ou progressiste dans ses textes, quand elle se fie sur les critiques actuelles ?

Pourquoi revoir nos textes juste parce qu’il y a des gens non contents de ce qu’on fait ? Nous faisons des choses pour participer à la promotion et au développement du sport sénégalais. On prend en compte ces critiques effectivement. S’il faut réajuster certaines choses par rapport à ces remarques, on les prendra en compte.

Sadio Mané a réagi, juste après sa distinction comme meilleur footballeur, indiquant qu’il était content. Quelle est valeur de la distinction de l’ANPS pour un athlète sénégalais ?

La question devrait être posée aux lauréats. Prenez le cas des footballeurs locaux, tous les lauréats depuis 2005 (sauf Pape Ibnou Ba du Stade de Mbour) ont eu des contrats en Europe ou en Afrique du nord l’année suivante. C’est un titre de prestige, c’est comme le Ballon d’or au niveau international. Il figure dans le palmarès du joueur. Parfois, les clubs des joueurs nominés (au niveau international) nous répondent en disant qu’ils sont heureux de voir la nomination de leurs pensionnaires. Moussa Sow, Mamadou Niang, El Hadji Diouf, Henri Camara… ont gagné ce titre. Même si ça n’a pas joué un rôle déterminant dans la suite de leur carrière, c’est quand même prestigieux et une fierté d’avoir la reconnaissance de son pays. C’est peut-être dans ce cadre que Sadio Mané a dit qu’il était fier et heureux.

Est-ce que l’ANPS rêve de faire comme France Football (magazine français), précurseur du ‘’Ballon d’or’’ européen, sur le plan africain ?

Pourquoi pas ! C’est une ambition de pouvoir avoir une récompense qui dépasse le cadre du Sénégal. Mais notre vocation est de faire la promotion du sport et des sportifs sénégalais. Nous nous battons afin qu’ils soient reconnus comme des ambassadeurs de ce pays ayant rendu des services. Ce sont des trophées qui servent à impulser des carrières. Et aujourd’hui, à part l’ANPS, les sportifs n’ont aucune autre structure qui les récompense. Il y avait le ‘’Lion d’or’’ qui remplissait ce rôle mais il a disparu aujourd’hui. L’Etat aussi n’organise pas ce genre d’événement. Nous nous substituons à lui pour combler ce vide car nos sportifs ont besoin de cette reconnaissance.

(Source : EnQuête)

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