Les forces fidèles au président ivoirien sortant Laurent Gbagbo poursuivaient samedi soir une offensive appuyée par des
hélicoptères et blindés dans le quartier d`Abobo, fief de son rival Alassane Ouattara et nid d`insurgés en plein Abidjan.
Le camp Ouattara a dénoncé des « tueries aveugles » de « civils innocents », qualifiant l`opération, la première d`envergure depuis le début de la crise post-électorale fin novembre, d` »offensive du désespoir » du pouvoir. Cette brutale dégradation de la situation intervient deux jours après un sommet de l`Union africaine à Addis Abeba ayant confirmé le blocage politique: si l`UA a reconnu comme président élu M. Ouattara, le camp Gbagbo a catégoriquement rejeté cette position. Le président sortant « tient à rassurer la population quant à l`issue certaine de cette crise » post-électorale, selon un communiqué lu à la télévision. Il « appelle toute la population à rester calme et l`informe qu`il s`adressera bientôt à toute la Nation ». L`offensive a été lancée samedi matin dans le quartier pro-Ouattara d`Abobo (nord d`Abidjan) où des insurgés ont pris ces dernières semaines le contrôle
de larges zones. L`objectif des Forces de défense et de sécurité (FDS) loyales à M. Gbagbo est de « débarrasser Abobo des terroristes », selon une source à l`état-major. « Ca passe ou ça casse », a-t-elle indiqué à l`AFP. Selon cette source, « deux hélicoptères Puma, des lance-roquettes RPG ainsi que des blindés » sont utilisés par les FDS.
Quartier le plus peuplé d`Abidjan, ville dans la ville avec quelque 1,5 million d`habitants, Abobo est devenu l`épicentre de la crise, qui a fait près de 400 morts dans le pays selon l`ONU. Aux environs de 12H00 (locales et GMT), des tirs à l`arme lourde ont été
entendus dans Abobo, situé au nord du quartier résidentiel de Cocody, un des centres du pouvoir. Un habitant d`Abobo a dit à l`AFP avoir vu rouler vers Abobo quatre blindés, quatre transports de troupe « remplis de militaires », et « deux pick-up avec des mortiers ».
Un autre habitant a vu « deux chars qui ouvraient un convoi et deux qui le fermaient en tirant, en tirant ».
Dans les environs de la gare d`Abobo, « il y a des échanges de tirs de blindés et de kalachnikov », a rapporté un habitant.
En début de soirée, les combats se poursuivaient en différents secteurs. Dans le sous-quartier Plateau-Dokui, dans le sud d`Abobo proche de Cocody, un habitant a évoqué des tirs de mortiers: « on est tous enfermés chez nous. Personne ne peut sortir. C`est vraiment terrifiant ». Le porte-parole du gouvernement Gbagbo, Ahoua Don Mello, avait admis qu`Abobo, placé vendredi sous couvre-feu nocturne avec le quartier voisin d`Anyama, était « truffé de rebelles ».
Pour Patrick Achi, porte-parole du gouvernement Ouattara, le camp Gbagbo est « dans sa logique de tueries aveugles » car « ils sont acculés, le dos au mur. Il ne leur reste que le spectre de la guerre civile, de susciter la terreur ». « A un kilomètre de distance (d`Abobo), ils tirent des obus, à l`aveugle,
qui tombent sur des maisons de civils. La majorité des tués sont des civils
innocents, ce ne sont pas des affrontements militaires contre militaires »,
a-t-il ajouté.
Par ailleurs, un Ghanéen de la mission de l`ONU a été blessé samedi à
Abidjan dans l`attaque d`un véhicule civil de l`Onuci, a déclaré la force
onusienne. Plusieurs témoins ont identifié les agresseurs comme des jeunes
pro-Gbagbo.
Pendant ce temps, M. Ouattara enchaînait les rencontres avec ses alliés
régionaux. Après le Nigeria, il était attendu au Burkina puis au Sénégal.
Lors d`un entretien vendredi à Abuja, il a remercié de son soutien le
président nigérian Goodluck Jonathan, actuel président du Conseil de paix et
de sécurité de l`UA ainsi que de la Communauté économique des Etats d`Afrique
de l`Ouest (Cédéao).
Cette organisation avait menacé fin décembre de recourir à la force pour
déloger M. Gbagbo.
Afp