L’image est inédite, celle des deux chefs d’État, pourtant en total désaccord, qui s’affichent devant les caméras au sortir de cette audience nocturne au Palais de la State House de Banjul. Audience de la dernière chance à laquelle était suspendu l’assaut des forces déployées par la CEDEAO, à minuit.
L’expression du président Abdoul Aziz de Mauritanie est cordiale, mais elle est directe et sans fioritures tant elle tranche avec le traditionnel langage diplomatique des comptes-rendus d’audience à chaud.
Le chef de l’exécutif Mauritanien, à la surprise des quelques journalistes qui lui ont tendu le micro, a exprimé sa «déception de n’avoir pas pu rallier mon ami Jammeh à se rendre à l’évidence. Je suis très pessimiste pour la suite». Aussi sèchement !
Dès lors, nous avons cherché et trouvé qu’est-ce qui a bien pu mettre en colère le président mauritanien et médiateur de la dernière heure dans cette crise post-électorale en Gambie.
De sources très fiables nous rapportent une audience «cache» ponctuée de «franches engueulades». Le président Mauritanien a jeté toutes ses forces, dans son argumentaire «pour prévenir son ami de la détermination des autorités de la CEDEAO et des forces mobilisées à aller jusqu’au bout »
«A minuit, tu ne seras plus des nôtres. Tu ne seras même plus ancien président de la république : tu seras un chef rebelle !»
Le médiateur a joué la montre avec son hôte du soir, en lui disant qu’ « il est encore possible d’arrêter la machine ».
Yaya Jammeh ne s’est jamais démonté semble-t-il, s’accrochant à la «nécessité de vider le contentieux électoral». Jammeh a même dit à son homologue mauritanien : «qui peut le plus, peut le moins. C’est plus simple pour la CEDEAO de nous aider à mettre en place notre Cour Suprême pour étudier mon recours, plutôt que de s’engager dans la voie sinueuse d’un conflit armé ». Et Jammeh de promettre à son homologue : «crois-moi, je ferais face».
Nos sources indiquent que sur ces entrefaites, Abdoul Aziz pique une colère et apostrophe son ami : «tu ne sais pas qu’à minuit, tu ne seras plus des nôtres ? Tu ne seras même plus considéré comme un ancien président de la république : tu seras traité comme un chef rebelle».
Une réplique qui semble ragaillardir Jammeh qui indique à son homologue : «me faire traiter de rebelle par mes ennemis, les comploteurs Sénégalais et leurs amis, ne me dérange pas».
Le président Abdoul Aziz semblait en avoir assez entendu, et les deux hommes ont été obligés de constater leurs divergences et les écarts de visions des choses.
A cet instant, le président quittait son ami pensant lui avoir fait ses adieux.
Mais les voies de la paix sont tellement insondables que le destin fait que les deux hommes vont devoir se revoir une ultime fois, avec comme autre témoin leur homologue guinéen, Alpha Condé avec un nouveau deadline, ce vendredi midi.
Arriva au pouvoir un vendredi…
Décidément, Jammeh aime les vendredis. Il est arrivé au pouvoir un vendredi 22 juillet 1994, et va très vraisemblablement quitter le pouvoir ce vendredi 20 janvier 2016. C’est la mission de la dernière chance, semblent dire les autorités de la CEDEAO et son départ sera de «gré ou de force » !
sudonline.sn