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Kandiou, ce village qui vous soigne

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Kandiou, petit village de Bignona, perdu dans le Kalounay, cumule les conséquences de l’enclavement et les désastres  écologiques d’un barrage chinois. Mais, l’espoir n’est jamais loin.

Sira Sané, la trentaine volontaire, a perdu trois enfants à bas âge.  Il lui reste deux “bouts de bois” : une  fille et un garçon, l’aîné, huit ans. Elle a un visage marqué par l’effort, mais jovial. Elle n’a jamais été à l’école. Sira a un quotidien de femme du monde rural.

Chaque jour : réveil à 5 heures du matin. Elle prépare le nécessaire pour son mari et ses enfants avant de quitter le domicile conjugal. Elle doit arriver à Ziguinchor avant l’aube avec sa marchandise : du citron pressé dans des bidons de 20 litres. Pour faire le trajet, elle  peut compter sur la seule voiture, déglinguée, qui rallie Kandiou à Ziguinchor, environ 25 km.

Elle lui joue souvent un mauvais tour.  ‘’Si je la rate, ou si elle tombe en panne, je ne pourrai pas faire bouillir la marmite chez moi”, dit-elle.

Elle paye 600 francs pour son ticket de transport et 200 francs pour chaque bidon (elle vend à 400 francs le litre). Sira les écoule au port de Ziguinchor aux commerçantes qui les revendent deux fois plus cher à Dakar.

Kandiou est un village dans le Kalounay, en basse Casamance. C’est une longue piste serpentée qui y mène. On y vit sans électricité. Yacine Diémé travaille à la lumière de la torche pour faire ses accouchements. Elle a mis au monde la plupart des enfants qui jouent sur la place du village, entre les robustes troncs de fromagers. Elle a hérité le boulot de sa mère qui savait délivrer les femmes du village avant l’arrivée des méthodes modernes.

Kandiou dispose d’une maternité  depuis 2007 et 2008, (elle ne se souvient pas très bien). Elle manque presque de tout. Mme Diémé n’a pas de tension-mètre, ni de thermomètre. Sa balance pour peser les nouveau-nés est obsolète. Elle n’a pas de gaze, et ne dispose pas de fosses pour mettre les placentas après accouchements. “On fait à l’ancienne, on les enterre,” dit-elle.

Ce qui reste à la portée des chiens fouineurs. La zone dispose d’une ambulance basée à Niamone à plus de deux kilomètres, et est utilisée par  les 11 villages environnants. “En cas d’urgence, je suis obligée d’aller chercher un véhicule pour évacuer la malade’’, explique la matrone. Mais Yacine Diémé n’est pas débordée de travail. Elle peut rester 4 mois sans assister une seule parturiente. “Les  hommes d’ici  ne  font  pas leur travail”, dit-elle, en rigolant.

Désastre écologique

Kandiou, c’est 34 maisons  perdues dans le Kalounay, en basse Casamance. M Diémé est le chef de village. Il a été nommé il y a moins d’un an. C’est un homme d’âge mûr, à la poignée de main chaleureuse. Il est très sollicité. Il est maintenant joignable sur son portable. “Avant, on allait jusqu’à Niamone pour le charger, on vous le volait, ou on enlevait la puce’’, raconte-t-il.

Aujourd’hui, dans le village, une maison appartenant à un officier de gendarmerie à la retraite est équipée d’un panneau solaire. Du coup, elle est devenue du coup la “centrale à rechargement des portables”.

M. Diémé a donc d’autres urgences. Il cherche les fonds pour clôturer la cour de l’école primaire. “La piste passe tout près de la cour de récré et avec les enfants, ce n’est pas sûr”, dit-il. Le chef de village est tarabiscoté par un vieux problème qui semble  davantage tirer ses traits minces.

Toute cette zone du Kalounay est touchée de plein fouet par un désastre écologique : le barrage d’Affiniam. Construit à coup de milliards par la Chine populaire en 1988, cet ambitieux ouvrage hydro-agricole, non entretenu, a causé pas mal de dégâts. Il a acidifié les terres devenues inaptes à l’agriculture, et tué le poisson dans le faro. “C’est maintenant qu’on connaît le Yaboye ici, (Sardinelles). Avant, on avait du vrai poisson, du maïs, du sorgho”, évoque M Diémé, nostalgique.

Kandiou étale ses manques, mais cache bien ses secrets. Le nom signifie en diola blouf “Soigne-le”. Le village a une réputation mystique. Sa place de prières, très connue, fait sa fierté. La légende veut que tout vœu formulé sur place soit exaucé…

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