« La CEDEAO mérite mieux que nos quolibets ou attaques mal fondées !
Il existe des postures faciles à adopter et des opinions aisées à avoir. Elles permettent d’être « à la mode» ou encore d’être « bien vu ». Ce sont de positions intellectuelles dites de facilité. Parmi celles-ci figurent, sans aucun doute, les attaques contre la CEDEAO. Il est vrai, qu’attaquer la CEDEAO est une chose aisée car nul ne la défend et tout le monde trouve légitime de l’attaquer. La cible idéale en quelque sorte. Quand les Ivoiriens n’arrivent pas à résoudre leurs propres contradictions: une certaine idée du patriotisme la désigne comme responsable des échecs ivoiriens. Quand les Maliens n’arrivent pas à résoudre l’équation d’une armée plus préoccupée par le Palais de Koulouba que par les Katiba de Kidal et de Ménéka : une certaine idée du nationalisme la désigne comme artisane des échecs de l’armée et de la classe politique maliennes. Lorsque les Guinéens n’arrivent pas à dépasser leurs propres divergences : une certaine idée du communautarisme la présente comme responsable des échecs guinéens. Certains en arrivent même à présenter les interventions stabilisatrices de la CEDEAO en Gambie ou en Guinée Bissau comme des motifs d’insatisfaction.
Face à cela, il est utile de rappeler que la CEDAO avait au moment de son installation pour finalité de promouvoir la coopération et l’intégration en Afrique de l’Ouest avec pour objectif de créer une union économique et monétaire entre ses états membres. Il est également utile de rappeler que les crises politiques et sécuritaires dans la région ouest africaine ont largement contrarié les efforts de développement, obligeant l’organisation à accorder une place centrale aux questions de paix, de défense et de sécurité. En d’autres termes, la paix pour le développement. Ainsi les conflits au Libéria et en Sierra Leone dans les années 1990, l’éclatement d’un conflit armé en Côte d’Ivoire en 2002, le retour de la guerre civile au Liberia avant l’exil de Charles Taylor en août 2003, la permanence des tensions politico-militaires en Guinée et en Guinée Bissau et les crises multiformes au Burkina Faso, au Niger et Mali depuis 2011 ont donné peu de répit aux organes de la CEDEAO. Ces tensions sécuritaires et l’interventionnisme militaro-
diplomatique qui en a souvent découlé ont installé une certaine idée de la CEDEAO dans la résolution des crises au sein des états membres.
Cette idée amène dorénavant certains à exiger de la CEDEAO un dépassement de fonction oubliant la ligne de démarcation entre souverainisme politique et intégration économique.
C’est simple : nous devons nous garder de percevoir la CEDEAO comme un substitut à des états souverains. Nous devons également éviter de croire que la CEDEAO a vocation à être utilisé pour contourner les institutions légitimes et légales d’un état souverain. En réalité, nous devons accepter que la CEDEAO ne saurait inscrire dans son agenda la légitimation d’un régime issu d’un coup d’état militaire fût-il « un coup d’état populaire ». Elle ne saurait également être l’organe légalement habilité à désigner les candidats à une élection dans un état souverain ou encore l’institution ayant en charge la désignation du vainqueur d’une élection présidentielle dans un pays souverain.
Aidons la CEDEAO à garder sa cohérence et sa légitimité en ne lui demandant pas plus que ce que ses propres textes disent. On peut sans doute contester certains choix effectués mais la CEDEAO a été généralement cohérente dans ses actions et ferme dans la défense de ses principes qui ont guidé sa création. Et à la lumière des faits, ses résultats depuis 1975 sont encourageants.
En réalité, aucun Africain convaincu de l’idéal d’intégration prôné par nos Pères fondateurs n’a intérêt à décrédibiliser la CEDEAO car elle est à l’heure actuelle l’exemple le plus abouti d’intégration africaine. Elle constitue, par ailleurs, la preuve palpable qu’il est possible sur notre continent de mettre en place des modèles et des mécanismes par des Africains pour des Africains et qui sont viables et durables. Apportant ainsi une réponse à l’Afro-pessimisme. Elle mérite à ce titre mieux que des quolibets, des invectives et des critiques mal fondées ou malhonnêtes. »
Dr Papa Abdoulaye DIOP
Docteur en Economie
Plateforme Bâtir le Sénégal
Puisque vous donnez un avis sur l’avis de certains sur la CEDEAO, que pensez-vous de la proclamation des résultats de la présidentielle en Guinée-Bissau alors que le contentieux était pendant au STJ(cour constitutionnelle) du pays. Tout le monde sait que CEDEAO a outrepassé ses prérogatives, d’ailleurs la cour de justice de la Cedeao va s’y prononcer le temps qu’il lui faudra. Cedeao doit alors déclarer CDDiallo victorieux après sa jurisprudence Guinée-Bissau!