La présidente nationale des femmes du Pds sur la défaite de Wade : Awa Diop se déchaîne – «Les voleurs de la République doivent rendre compte»

Date:

Les lendemains de défaite sont souvent amers. Mais, Awa Diop reste zen malgré la chute du pouvoir libéral. La présidente du mouvement des Femmes du Parti démocratique sénégalais a ausculté sa conscience dans tous les sens. La conclusion est invariable : «Je n’ai rien à me reprocher.» Ce qui n’est pas le cas de tout le monde : Dans cet entretien, l’honorable député revient sur la fin de règne de Wade, l’ambiance pathétique au Palais avec la distribution d’argent, la bousculade des leaders pour l’obtention de leur part du butin, les transhumants. Au finish, elle réclame l’audit de tous les services pour éclairer certains enrichissements rapides de certaines personnalités du pouvoir. Awa Diop sans fard.

Mme Diop, Macky Sall est le nouveau chef de l’Etat. Quelle analyse faites- vous de la défaite de votre candidat ?
Au-delà de notre défaite, on sort de cette élection dans la paix alors qu’on avait prédit le pire pour notre pays. La presse internationale, les observateurs sont venus pour voir ce qui se passait. Tout  s’est passé normalement. On a perdu. Je félicite Macky Sall pour sa victoire éclatante. On savait tous que c’était un combat inégal et que c’était perdu d’avance. Une personne qui est combattue  par 13 candidats (sic), plus la société civile, et l’implication de tous les adversaires du Président, sa défaite était inévitable. Mais le peuple sénégalais n’a pas voté pour quelqu’un. Ils ont voté pour le changement. Et c’est Macky qui a gagné. C’est quelqu’un que je connais bien, qui m’est très proche. Je suis un de ces mentors en politique.  Et je ne lui connais que du bien. Sa femme aussi est ma fille. C’est pourquoi je lui demande de ne pas dénigrer Wade. Après son père, tout ce qu’il a pu avoir sur cette terre, c’est grâce à Wade. Je lui demande donc de le respecter comme il respecterait un père. Pendant l’élection, les autres leaders ont raconté des choses très graves sur Abdoulaye Wade. Mais lui s’en est toujours tenu à la politique. L’âge du Président Wade. C’est la campagne et c’est de bonne guerre. Donc, cette défaite était dans l’ordre du possible. Dans l’entre-deux tour, tout le monde m’a entendue en dénonçant le comportement de certains leaders. J’ai vu des personnes qui ne venaient que pour chercher de l’argent. Il suffisait de les regarder pour savoir que ce n’étaient même pas des électeurs. Il y a même des leaders de notre coalition qui ne s’intéressaient qu’à l’argent. La victoire du Président Wade leur importe peu. Je n’ai pas arrêtée de dénoncer ça. Il y en a d’autres aussi qui s’étaient coalisés par-ci, en mouvement de soutien par-là. J’ai toujours combattu ça. Et je leur ai dit de réclamer des cartes d’électeur. Maintenant, on se rend compte que j’avais raison. On ne m’écoutait pas parce que je n’étais pas diplômée des grandes universités mondiales et sénégalaises. Je suis plus intelligente et plus mature que ces diplômés.

Avez-vous eu l’occasion de lui en parler pour l’alerter ?
Mais je me suis épuisée à le dire. Au point de me faire des ennemis. Des députés, des ministres dans le parti m’en ont beaucoup voulu. Ils ont dit que je ne croyais en rien. Il m’écoutait mais sa réaction je ne peux pas te le dire.  Ce n’est pas la peine. Vous avez publié dans votre journal un article qui disait que Awa Diop a parlé des voleurs de la République. C’était un scandale mais j’ai surmonté ça parce que j’ai le caractère d’une battante. Ce qui fait qu’on ne peut pas me faire faire ou m’entraîner  dans certaines choses.

J’étais considérée comme la sorcière du Parti. Ce n’est pas vrai. C’est bien parce que je crois en quelque chose que je suis entrée dans le parti en 1975 sans jamais le quitter. J’ai dénoncé toutes les pratiques, mais le Président n’a jamais pu s’en débarrasser. Il y avait trop d’opportunistes dans ce parti.  C’est dommage qu’on s’en rende compte après une défaite. Il y a même eu dans le parti, des transhumantes qui m’ont combattue pour avoir le poste de présidente des femmes.

Pouvez-vous citer des noms pour éclairer les Sé­né­galais ?
Ce n’est pas le moment de citer des noms. On vit dans le même pays, on lit les mêmes journaux. On a tous entendu quelqu’un dire à Me Wade : «il y aura un million de femmes qui vont voter pour vous» au premier tour. Au finish, on n’a même pas un million d’électeurs au premier et au second tour. J’avais parlé d’une victoire de mon candidat au premier tour. C’est normal ! On ne va pas à une guerre en se déclarant battu. Même si on sait qu’on ne sera pas convainquant, on ne dira jamais qu’on va être battu.  Et je ne vais pas prendre ma retraite maintenant. Je suis politicienne. Je suis née dans une famille politique. J’ai trouvé mon père et ma mère dans la politique. La politique, c’est un héritage familial pour moi et je ne peux pas en sortir aussi facilement. En plus, les femmes portent beaucoup d’espoir sur moi. Et depuis ces évènements, les femmes n’ont pas quitté ma maison. Elles m’appellent de partout au Sénégal, des Etats-Unis, de la France, de partout. Je ne peux donc pas décevoir cet espoir qu’elles ont placé en moi. Je ne citerai personne, ce n’est pas important.

Sérieusement, croyiez-vous à une victoire au premier tour ?
Je n’y croyais vraiment pas. Contre 13 challengers,  c’était mission impossible. Mais Me Wade doit remercier Dieu. Parce qu’en 2007, celui qui était 2e, c’était Idrissa Seck qui est un libéral. Qu’il l’accepte ou pas, c’est Wade qui l’a formé. Aujourd’hui, c’est encore un produit de Abdoulaye Wade. Donc ce n’est pas une défaite trop amère parce que c’est un libéral qui va le succéder. Ça atténue notre peine. J’espère que Macky Sall va rester humble.

Notre parti a été parasité par des  transhumants qui ont frustré les Libéraux authentiques. On y pouvait rien. Les femmes  et les hommes qui ont transhumé nous ont dirigés. Ce n’est pas possible. Beaucoup de gens sont partis à cause d’eux. On saura qui est qui dans quelques jours. Mais, le Pds est un grand parti on ne le laissera pas mourir de cette façon. On s’en relèvera.

Après cette défaite, c’est le temps des incertitudes. A part Wade, il n’ y a plus de leaders emblématiques dans votre…
Ça on en discutera. Dans la vie, il faut être patient. On n’a pas encore atteint ce stade du débat. C’est sûr qu’on parlera de l’avenir de notre parti parce que c’est la fin d’un cycle. Un exemple a été donné par Idrissa Seck qui a dit qu’il serait le 4ème Président du Sénégal, et Dieu en a décidé autrement.  C’est comme si Dieu lui avait dit attention : «Ce n’est pas comme ça. Il ne faut pas décider avant Dieu. A chaque fois il faut dire s’il plait à Dieu (Inchalah).»

 Au vu de la situation Wade est presque à la retraite, mais après lui qui sera le leader du Pds?
Si Pape Diop et Souleymane Ndéné peuvent être leaders du parti, c’est à eux de répondre à cette question et de le prouver. En tout cas moi je serai toujours responsable des femmes de mon parti. C’est moi qui vais juger de la nécessité de continuer à l’être ou de ne plus l’être. Mais si une femme arrive de nulle part et veut me diriger j’en ferai autant pour la diriger. Il y a deux ans des femmes voulaient me sacrifier. Je leur ai dit ; «celui qui n’a pas une longue vie ne verra pas ce spectacle». D’autres avaient prédit ma sortie du Pds je leur ai répété la même chose, je ne me laisse pas faire. Mais les hommes du Pds c’est eux qui décident de celui qui va les diriger mais pour le moment c’est moi qui dirige les femmes. Je laisserai la place  quand ça me plaira. Et je choisirai mon successeur. Pour l’instant, aucune femme ne va me diriger.

Mais l’homme qui va diriger les hommes du parti sera aussi le leader des femmes ?
C’est la parité ! Un homme peut diriger mais, il y aura juste derrière lui toujours une femme. Je ne peux pas dire notre prochain leader. Parce que depuis la défaite de notre candidat je n’ai vu personne. J’ai la conscience tranquille. Je n’attends que mon parti. S’il reste un bout  de temps sans le faire alors j’appellerai les femmes de mon parti pour parler avec elles.

On va aller bientôt aux élections législatives.  Allez-vous postuler ?
Notre parti ira à ces élections.  On doit se réunir rapidement pour arrêter une décision. Mais je ne sais pas  ce qui se passe, pourquoi les gens font le deuil. Depuis 1978, on a toujours perdu des élections. Ce n’est qu’en 2000 qu’on est arrivé au pouvoir. On a fait 26 ans d’opposition, on a juste fait 12 ans de pouvoir. On connaît donc les rigueurs de l’opposition.

C’est à croire que cette défaite vous laisse zen ?
Ça me laisse zen. Rien ne m’a surpris. Je n’ai jamais cessé de le dire. J’en ai toujours parlé aux responsables du parti. Certains ne voulaient même plus me voir à cause du discours que je tenais. J’étais stigmatisée. J’ai eu raison malheureusement. Quand il y a eu la défaite, il y a eu des gens qui pleuraient d’autres qui piquaient des crises. Mais,  je suis restée sereine et une de mes sœurs m’a dit mais toi on dirait tu as du béton près du cœur, et des yeux. Je lui ai dit j’ai foi en Dieu et en ses décisions. Dans les réunions quand je prenais la parole les gens étaient gênés, et se disaient elle fera des erreurs et dira encore du n’importe quoi. Mais ce n’était pas des erreurs c’était juste la vérité. Mais dans un parti si on va jusqu’à ce qu’un transhumant veuille te diriger et être ton supérieur ça va être difficile.

C’est votre leader qui l’a théorisé en 2000 pour massifier le parti ?
S’il l’a théorisé il a vu ce que ça a donné.  S’il l’a fait, je ne fais pas partie de ceux qui ont théorisé ça. Je n’ai jamais accepté les transhumants. Moi je pars avec le principe selon lequel d’où est-ce que tu viennes avec tes diplômes, je ne vois que la personne parce que les diplômes on les obtient  par chance. Vous savez que parfois ce sont les plus nuls des écoles qui obtiennent des diplômes, c’est juste de la chance. Des fois ils disent que Awa Diop n’a pas fait des études mais je suis allée jusqu’en troisième secondaire. J’ai toujours refusé de parler français. L’essentiel est que j’étais incontournable dans le parti. Quand on renouvelait les instances de l’Ujtl, je mettais en garde le Comité directeur qui ne savait pas comment s’y prendre. Après cela, ils ont voulu renouvelé le  mouvement des femmes, j’ai dit niet. La façon dont ils renouvelaient les instances n’était pas bonne. On renouvelle par secteur sur la base de carte d’identité. Il faut mettre les anciens du parti aux postes de responsabilité. Un parti ne se renouvelle pas sur la base de diplôme, mais sur la base des connaissances des rouages de la politique.

Par conséquent, Abdoulaye Wade est toujours victime de son entourage ?
On a toujours trompé Abdoulaye au sein du Pds. Des femmes sont venues  pour dire qu’elles ont vendu tant de cartes, d’autres disent autant de femmes ont acheté des millions de cartes. Cette histoire de «ma carte ma caution» est une arnaque. On organise des meetings transportés, on vient avec «ma carte ma caution» pour tromper le chef de l’Etat. J’ai toujours dit que la politique ne fonctionne pas comme ça. Aujourd’hui, il y aura dans notre parti des gens qui doivent avoir honte après cette défaite. Il y a des gens qui ont trahi le président de la République. Ils l’ont berné. Cela s’est reflété aujourd’hui avec cette défaite. Le Président est tellement un homme droit qu’il prend toujours pour argent comptant ce que ces gens lui racontent.  Et moi Awa Diop je lui dis toujours que ces gens te trompent. Le Président me rétorque,  Awa Diop pourquoi tu dis souvent que ces gens me trompent ? Je lui ai dit président tu es une personne qui n’a pas d’arrière-pensée sur les gens. On confectionnait des listes fictives pour le présenter au président de la République en lui disant que tous ces électeurs sont en train de battre campagne pour vous. C’était faux ! Ils venaient récupérer l’argent pour rentrer chez eux. Des leaders de notre coalition ont abusé de la générosité et de la bonté du chef de l’Etat. L’image du Palais était lamentable durant cette campagne. On se battait pour de l’argent qui intéressait les responsables qui sont censés réélire le chef de l’Etat. Ce sont des gens malhonnêtes. On va voir ce qu’ils vont faire. Vont-ils transhumer chez Macky Sall ? Je vais rester parce que je suis honnête. Et j’ai rempli mon rôle.  Le pouvoir a bouleversé les habitudes, les gens sont devenus affairistes. Je souhaite à Macky Sall que Dieu lui donne plein pouvoir pour diriger ce pays.

C’est une sorte de défi pour vous ?
C’est la même vision que Wade.  Les grands  perdants sont les leaders de l’opposition. Ils ont perdu en 2007 quand Idrissa Seck est arrivé deuxième derrière Me Wade. Cette année ils ont perdu quand Abdoulaye Wade et Macky Sall se sont retrouvés au second tour. Idrissa Seck et Macky Sall étaient des lieutenants de Me Wade. Je pense que ces leaders de l’opposition doivent aller à la retraite. Il y a la génération de Wade qui est dans cette classe d’opposition qui doit laisser la place aux jeunes. Macky Sall est de 1961, eux dans leur parti, ils y a des gens qui sont de la même génération que le nouveau Président. Donc ils doivent  donner le relais à ces jeunes-là. Amath Dansoko, Moustapha Niasse, Abdoulaye Bathily, Ousmane Tanor Dieng, doivent partir et léguer leur parti à des jeunes.  Ils doivent être de simples conseillers. Ce sont des Libéraux qui sont au pouvoir.

N’avez-vous pas des regrets avec les départs de Macky Sall et Idrissa Seck qui ont précipité votre défaite ?
Il y a toujours des regrets. Ce qui s’est passé s’est passé. Je n’ai jamais accepté leur départ. Pour le cas de Macky Sall, j’ai refusé de voter à l’Assemblée nationale la loi qui a provoqué son départ du parti. Moi je ne peux pas faire quelque chose qui est contraire à ma libre conscience. J’ai dit Niet. Quand je suis partie pour voir le Président afin d’arrondir les angles entre lui et Macky, certains ont saboté ma tentative de réconciliation. Mais aujourd’hui ces gens doivent avoir honte. C’était  le cas avec Aminata Tall qui se retrouve aux côtés de Macky Sall.  Tout le monde connaît les relations que j’entretiens avec elle. Je l’aime beaucoup. Quand elle a eu des problèmes pour la première fois avec le Président j’ai réussi à les réconcilier. Mais les bandits au sein du Pds ont détérioré leurs relations. J’ai tout fait pour la faire revenir quand Abdoulaye Wade a voulu qu’elle revienne. Au Palais à part  Pape Samba Mboup, un produit libéral, toutes les autres sont des transhumants. Même Pape Samba Mboup est resté digne malgré les calomnies de ses détracteurs. On connaît les traitres. C’était la même chose pour Aminata Tall, Idrissa Seck, Awa Diop, Pape Samba Mboup, entre autres. Amina Tall est comme une sœur. J’ai eu trop de peine quand j’ai vu des gens lui faire du mal pour la chasser du Pds. Moi qui vous parle, des gens ont tout fait pour me mettre en mal avec Abdoulaye Wade. Je ne citerai pas de noms mais je sais aussi qu’ils le savent bien. Ils savent de quoi je parle. Il y a des gens du Pds qui n’aiment pas les hommes de vérité. Si tu leur dis la vérité, ils se fâchent. Ils ont tout fait pour créer une sorte de lobby autour de Wade. Ils se sont servis du Président Wade. Juste avant l’élection présidentielle, des derniers venus ont incarné un leadership sur nous qui sommes les fidèles compagnons de Me Abdoulaye Wade. Finalement, ceux qui jouaient les premiers rôles, avant l’élection, ont rejoint la table servie bien après l’élection de Me Abdoulaye Wade à la tête du Pays.  Il n’y avait plus de place pour les pionniers qui ont pu faire élire le camarade secrétaire général Me Abdoulaye Wade en 2000. Des anciens adversaires transhumants ont été privilégiés au détriment des fidèles des années de galère.

Qu’attendez-vous maintenant des transhumants qui ont joui de tous les pouvoirs ?
Les transhumants ont bouffé tout l’argent du pays. Maintenant, ayons le courage d’être des opposants. Restons dans l’opposition, ne transhumons pas. Certains ont déjà manifesté leur volonté de rester malgré la défaite. C’est le cas de Aïda Ndiongue, Awa Diop et Léna Fall. Les militants du Pds de la première heure n’ont rien obtenu du pouvoir. Ils sont pauvres. Nous ferons en sorte que quiconque qui transhume soit audité. Nous allons dire à Macky Sall de tout faire pour que les transhumants soient audités. Je demande à Macky Sall d’auditer tous les gestionnaires de l’Etat. Les voleurs de la Ré­pu­blique doivent rendre compte de leurs gestions. Certains se sont servis du parti et de l’Etat. Les nouveaux venus ont détruit le parti, bouffé l’argent du Pds. Certains leaders n’ont pas servi le Pds. Ils vivaient des fonds politiques du Pds. Seule Aïda Ndion­gue n’a pas tiré profit du Pds. C’est une dame honnête. Elle a toujours investi son argent pour le bon fonctionnement du parti. Me Wade ne pouvait pas être au four et au moulin. Il a fait ce qu’il avait à faire et les Sénégalais pourront en témoigner. Ç’aurait été pire si quelqu’un d’autre avait gagné. C’est Macky Sall qui a gagné, tant mieux. Macky, c’est Abdoulaye Wade en miniature. Macky Sall n’est pas assez fou pour sacrifier ses militants et s’allier avec des gens qui le dénigraient quand il a quitté le parti.   Ils voudraient venir pour blanchir  leurs voitures et leurs villas. Macky Sall ne va pas l’accepter, ils n’ont qu’à rester avec nous dans l’opposition.

Aïda Mbodj promet de rester dans l’opposition pour permettre au Pds de revenir au pouvoir…
C’est une déclaration importante. Elle est venue dans le parti après l’Alternance. J’étais la première à lui souhaiter la bienvenue. Elle m’a dit : « Je demande un ndiguël d’abord.» On s’est rencontrés pour la première fois à un meeting à Linguère. On s’appréciait. Mais, le pouvoir l’a rendue folle. Et elle était vraiment ivre de pouvoir. Elle croyait à un moment qu’elle pouvait tout faire. J’ai initié la tournée des femmes du parti, on m’a taxée de jalouse. On racontait que je l’ai fait juste parce que j’étais jalouse de la campagne «Ma carte, ma caution» que Aïda Mbodj avait lancée. J’ai entendu Aïda Mbodj me dénigrer sur les ondes d’une radio. Elle disait que j’essayais de contrecarrer sa campagne avec la tournée que j’avais initiée. Pourtant elle disait qu’elle a vendu 1 million de cartes à des femmes qui vont voter pour Abdoulaye Wade. Si réellement un million de femmes avaient voté pour nous, on serait encore au Palais.  Elle a trompé le président de la République.

Avec l’arrivé de Mamour Cissé et Iba Der Thiam, nous avons constaté que le Directoire de campagne du Pds avait enregistré de nouvelles têtes, notamment au second tour de la Présidentielle. Les vrais libéraux ont été écartés…
Moi, je faisais partie du directoire de campagne du Pds de même que Awa Ndiaye. J’avais mon mot à dire, mais les responsables ne m’écoutaient pas, parce que je n’ai pas fait l’université. Je donnais mon point de vue sur beaucoup de choses. Nous avions souvent des avis différents. C’est fort de cela que nous avons été battus, du moins cela fait partie des raisons de notre défaite. La promotion de certains transhumants au sein du Directoire de campagne du Pds a été fatale à Wade. Les Sénégalais ne savent pas ce qui ce passe dans l’enceinte du Pds. Ils ne savent non plus qui est Abdoulaye Wade. Mais, Me Abdoulaye Wade n’est pas surpris de la défaite. Je vais vous dire pourquoi : Des gens faisaient venir des hommes et des femmes ou même des fils de marabouts au Palais disant qu’ils sont des porteurs de voix alors qu’il n’en est rien. Le président de la République les remettait de l’argent tout en sachant qu’on lui racontait des contrevérités. Des gens confectionnaient des listes de soi-disant porteurs de voix alors que ce n’était pas vrai. C’étaient des noms fictifs. Ils prenaient l’argent du Président Wade en usant de manœuvres frauduleuses. Ils réglaient des comptes personnels. C’était une sorte de trafic d’argent au Palais. Dieu m’est témoin. L’histoire retiendra ça.

Quel rôle aurait joué Karim Wade dans votre défaite ?
Je ne sais pas si Karim Wade a détruit le Pds ou pas. Je ne vais pas entrer dans les détails. J’ai décidé de ne plus en parler. Je suis un des leaders du Pds et je resterai une militante du parti. J’avais l’habitude de donner des conseils aux jeunes de la Génération du concret. Je m’en arrête là.  Je ne veux pas entrer dans un débat sans issue. Cette défaite a surpris plus d’un alors que tous les meetings étaient pleins à craquer.

On a appris que c’est Karim Wade qui a demandé à son père d’appeler Macky Sall pour le féliciter ?
C’est faux ! Personne n’a conseillé à Wade d’appeler Macky Sall. Il l’a fait de son propre chef. Quand il a appris les résultats, il a dit c’est fini. On voulait faire partir Wade par la force, il a dit non. Il avait promis de féliciter son adversaire s’il perd. Il l’a fait. Mais Karim Wade n’a rien à voir avec ce coup de fil.  Il n’a pas besoin d’être influencé par son fils pour prendre une telle décision. C’est à Macky Sall d’être à la hauteur des attentes. Je pense que les Sénégalais doivent faire très attention en évitant le vote-sanction parce que cela ne favorise pas le développement du pays. Abdoulaye Wade a laissé des chantiers. Macky Sall mettra deux ans avant de les achever. Tout ce que Macky a pris comme engagements, il va prendre du temps avant de les honorer. Après cinq ans s’il n’honore pas ses engagements, on le sanctionne lui aussi. Ce n’est pas comme ça.

En 2000 vous avez aussi bénéficié d’un vote-sanction.
Les réalisations de Abdoulaye Wade n’ont rien à voir avec les chantiers de Diouf dans le domaine de la santé, de l’éducation. Abdoulaye Wade a beaucoup travaillé. Son œuvre est visible partout dans le pays. Aujourd’hui, on ne se rappelle plus des réalisations de Diouf. Il a été élu pour ça aussi…Donc il a répondu aux attentes des populations.

Ne pensez-vous pas que c’est l’usure du pouvoir qui a précipité votre défaite ?
Ce n’est pas le moment de parler de certaines choses. Les femmes du parti ont voulu faire une sortie pour aborder cette question, mais je leur ai demandé d’attendre. Ce qu’on acceptait avec Abdoulaye Wade à la tête du parti, on ne va plus l’accepter.

 Est-ce qu’ils ne cherchent pas seulement à sauver leur peau après les scandales financiers ?
Personne ne va sauver sa peau ici. Celui qui ose transhumer pour sauver sa peau, on va balancer ses dossiers sur internet. On va leur pourrir la vie. Il faut s’inspirer de Aïda Ndiongue et Léna Fall Diagne qui ont pris le train et marche, mais elles ont beaucoup contribué dans le parti. Y en a d’autres qui étaient pauvres  et qui roulent sur de l’or en rejoignant le pouvoir.

L’arrogance des responsables de votre parti a été toujours dénoncée par les Sénégalais…
C’est exact ! Il y a trop d’arrogants dans notre parti.  Je prenais souvent mon téléphone pour demander à certains leaders de changer le ton de leurs propos. Je leur disais : «Vous parlez à des Sénégalais comme vous. On vous a connu hier avant aujourd’hui, alors pourquoi ces paroles ?»  C’était inacceptable.  Il ne faut pas mépriser les gens parce que le pouvoir émane de la volonté des Sénégalais. Ces jouissances du pouvoir, les belles voitures, les villas appartiennent aux Sénégalais. Ce n’est pas bien de les mépriser. On se retrouve dans l’opposition par la volonté des Sénégalais.

Que conseillerez-vous au président de la République après la perte du pouvoir ?
Le Président Wade est un Sénégalais. Il a de la famille et des parents ici. Abdoulaye Wade ne pourrait vivre qu’au Sénégal parce qu’il n’aime pas la solitude. Il ne peut pas vivre en France. Pour l’instant, il doit se reposer après cette déception. Si Macky est intelligent, il va beaucoup apprendre de Wade en sollicitant ses sages conseils. Il ne doit pas être rancunier. Il doit à ce propos être très ferme et catégorique et refuser d’être l’otage de certaines personnes et des maîtres-chanteurs. Il a le pouvoir.  Qu’il n’écoute pas ceux qui veulent devenir ministre en menaçant de quitter son parti. Je crois en la vérité. Je suis prête à lui donner tous les conseils nécessaires. Je ne quémande rien. C’est le Sénégal qui sera juge.

[email protected]

2 Commentaires

  1. Mais Madame le Député, il n’est pas obligatoire d’aller faire des études à Polytechnique ou ailleurs dans de grandes écoles pour être intelligent! Tous vos propos dénotent un un esprit de synthèse extraordinaire, et beaucoup d’entres-nous porraient en prendre de la graine! Vous êtes l’âme du PDS, rien ne porrait être fait à l’avenir sans vous! Le Président Wade ne s’est jamais trompé en vous maintenant à ses côté et votre sens de la dignité se reflète dans tous vos propos. Le Sénégal vous le rendra dans quelques années. Vous faites bien de demander à votre Frère Macky Sall de ne pas se priver des Conseils de son « Père » et Mentor Abdoulaye WADE et c’est le peuple tout entier qui en bénéficierait! Oui Wade n’a pas d’égal dans notre pays ni en Afrique pour avoir fait autant en si peu de temps. L’histoire retiendra qu’un Chef d’Etat a été combattu par une meute de Patrons de presse, de journalistes-opposants et de prétendus membres de la Société Civile qui n’étaient en fait que de vulgaires Politiciens .Un grand parti de l’envergure du P.D.S. et de ses alliés en cas de liste communes feraient très mal avec ses 35% obtenues lors de ces deux tours de la Présidentielle ! Il essouhaitable que le nouveau Président Macky Sall ait toutes les cartes en mains pour déterminer , sans pression la politique de la Nation. Mais, s’il advenait par le jeu démocratique que le Parti du Président Sortant et ses alliés obtenaient la majorité parlementaire à l’assemblée, ou même avoir une forte portion de députés qui pourraient faire la pluie ou le beau temps, ce ne serait que bénéfique pour l’affirmation de notre belle démocratie Sénégalaise et tout le monde devra s’y soumettre. Cette configuration mi-figue mi-raison, comme disent nos amis et « cousins » Français est souvent bénéfique, à condition aque les acteurs aient une idée très noble, haute de la République! Dans cette configuration inédite dans notre histoire(à ma connaissance), le monde entier serait définitivement convaincu que ce Sénégal là est un pays à par dans toute l’Afrique moderne !

  2. Des conseils, des conseils. Ceux qui perdent aiment bien en prodiguer des « conseils ». JE suis bien d’accord sur certains points soulignés par Madame Awa, notamment ceux concernant les transhumans. Quant à qui au sein de son parti M. Macky Sall devrait nommer ministre ou pas, alors Madame, n’essayez pas de régler des comptes à distqnce. Les vôtres au sein de votre parti, le PDS, vous suffisent. Avec tous mes respects.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

CAN 2023

DEPECHES

DANS LA MEME CATEGORIE
EXCLUSIVITE

Séminaire gouvernemental : Des orientations et des outils de gouvernance pour une transformation systémique

XALIMANEWS- Comme convenu, le gouvernement est en conclave pour...

De la saine définition des priorités (par Amadou Tidiane Wone)

En ce 21ème siècle, et dans plusieurs domaines de...

Assemblée nationale : Échanges téléphoniques entre Macky Sall et les députés de Benno Bokk Yakaar

XALIMANEWS-L’ancien chef de l’Etat, Macky Sall a eu une...