L’aumône, la clé du salut: une alternative au néolibéralisme Par Dr Mouhamadou Bamba Ndiaye

Toutes les religions monothéistes (Islam, Christianisme et Judaïsme) ont prêché l’importance de l’aumône dont l’objectif essentiel, dans cette vie présente, est la promotion de la solidarité et du partage, pour pallier aux inégalités qui constituent une épreuve divine, tant pour les riches que pour les pauvres. En outre, l’aumône est préconisée, comme nous le verrons un peu plus loin, comme l’alternative véritable de l’usure et de la spéculation – en somme du capitalisme. Et de préciser que l’aumône qui purifie et fait accéder à Dieu est une action de grâce qui ne doit se concevoir que dans la recherche de l’agrément (la face) de Dieu, en vue d’un salut dans la vie présente et surtout future [(42. La Consultation : 36-38 – Ach-Chûrâ’) ; (29. Le Désaveu ou Le Repentir : 60 … 99 … 103-104 – At-Tawbah].

En vérité, l’aumône – qui est un prêt  à Dieu destiné essentiellement aux pauvres et aux indigents – est  le moyen le plus sûr pour s’enrichir ; c’est-là une promesse divine – et Dieu respecte toujours ses promesses (57. Le Fer : 11 – Al-Hâdid) ; c’est dire donc que l’aumône est un moyen déterminant pour lutter contre la pauvreté, du fait de la dimension spirituelle qui la sous-tend ; cependant, pour être agréée, elle exige,  de la part des donneurs, une humilité et le respect de la dignité des ayant-droits. Oui, ‘’une parole agréable et un pardon valent mieux qu’une aumône suivie d’un tort’’ (2. La Vache : 261-264 … 271-273 – Al-Baqarah). Et de rappeler que, selon l’enseignement du Prophète (psl), l’aumône doit être perçue dans son sens large qui englobe pratiquement toutes les actions de grâce – qu’il s’agisse d’une louange à Dieu, d’un bon conseil ou même d’un acte sexuel licite (Rapporté par Muslim) ; ainsi, même si on est pauvre, on peut toujours donner une aumône, d’une manière ou d’une autre ; c’est dire donc que personne n’aura une excusée au ‘’Jour de la Rencontre’’!

(9) Ô vous qui avez cru ! Que ni vos biens ni vos enfants ne vous distraient du rappel d’Allah. Et quiconque fait cela… alors ceux-là seront les perdants. (10) Et dépensez de ce que Nous vous avons octroyé avant que la mort ne vienne à l’un de vous et qu’il dise alors : “Seigneur ! si seulement Tu m’accordais un court délai : je ferais l’aumône et serais parmi les gens de bien”. (63. Les Hypocrites : 9-10 – Al-Munâfiqûn)

Au demeurant, l’aumône prémunit contre l’avidité pour les richesses qui constitue un mal terrible réprouvé par toutes les religions monothéistes :

(15) Vos biens et vos enfants ne sont qu’une tentation, alors qu’auprès d’Allah est une énorme récompense. (16) Craignez Allah, donc autant que vous pouvez, écoutez, obéissez et faites des largesses (générosité). Ce sera un bien pour vous. Et quiconque a été protégé contre sa propre avidité… ceux-là sont ceux qui réussissent. (64. La Grande Perte : 15-17 – At-Taghabun). (1) La course aux richesses vous distrait, (2) jusqu’à ce que vous visitiez les tombes. (3) Mais non ! Vous saurez bientôt ! (4) (Encore une fois) ! Vous saurez bientôt ! (5) Sûrement ! Si vous saviez de science certaine. (6) Vous verrez, certes, la Fournaise. (102. La Course aux richesses : 1-8 – At-Takâsur)

L’Evangile ne dit pas autre chose : (16) Et voici, quelqu’un s’approcha de Jésus et lui dit : « Mon bon maître, que devrais-je  faire pour avoir la vie éternelle ? (17) Et il lui dit : Pourquoi m’appelles-tu bon ? Il n’y a qu’un seul bon : c’est Dieu. Si tu veux entrer dans la vie, observe les commandements. (18) Il lui dit : Lesquels ? Et Jésus dit : Tu ne tueras point ; tu ne commettras point d’adultère ; tu ne déroberas point ; tu ne diras point de faux témoignage ; (19) honore ton père et ta mère ; et, tu aimeras ton prochain comme toi-même. (20) Le jeune homme lui dit : J’ai observé toutes ces choses ; que me manque-t-il encore ? (21) Jésus lui dit : Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu as, et donne-le aux pauvres ; et tu auras un trésor dans le ciel ; et ensuite viens me suivre. … En vérité, je vous le dis, un riche entrera difficilement dans le royaume des cieux ; (24) et je vous le dis encore : Il est plus facile qu’un chameau entre par le trou d’une aiguille, qu’un riche n’entre dans le Royaume de Dieu. (25) Et les disciples, l’ayant entendu, furent fort étonnés et dirent : Qui donc peut être sauvé ? (26) Et Jésus, [les] regardant, leur dit : Pour les hommes, cela est impossible ; mais pour Dieu, tout est  possible. (Matthieu 19 : 16-26)

Actuellement, le néolibéralisme qui est fondé sur le profit par tous les moyens, légalisant la spéculation et l’usure, est certes le système dominant sur la planète, mais il est entrain de montrer ses limites, avec la très grave crise économique et financière  qui continue d’accabler l’Occident matérialiste et capitaliste. Et il ne pouvait pas en être autrement, car les gains illicites partent toujours en fumée – Un défi coranique et biblique !

(276) Allah anéantit l’intérêt usuraire et fait fructifier les aumônes. Et Allah n’aime pas le mécréant pécheur. … (278) Ô les croyants ! Craignez Allah ; et renoncez au reliquat de l’intérêt usuraire, si vous êtes croyants. (279) Et si vous ne le faites pas, alors recevez l’annonce d’une guerre de la part d’Allah et de Son messager. .. (280) À celui qui est dans la gêne, accordez-lui un sursis jusqu’à ce qu’il soit dans l’aisance. Mais c’est mieux pour vous de lui faire une remise de sa dette par charité ! Si vous saviez ! (2. La Vache : 276-280 – Al-Baqarah) [Voir aussi la bible : (Lévitique 25 : 35-36) ; (Ezéchiel  22 : 12-13)]

A l’évidence, ces références (coranique et biblique), d’une importance capitale, confirme que la culture de l’aumône est véritablement l’alternative la plus crédible au néolibéralisme (capitalisme) ; elle suggère cependant un véritable changement de comportement et donc une prise en compte de la dimension spirituelle (repentir et réévaluation des motivations de l’aumône, en vue d’un culte pur), pour l’édification d’une cité juste. Oui, ‘’Allah ne modifie point l’état d’un peuple, tant qu’ils ne modifient pas leurs comportements (13. Le Tonnerre : 11 – Ar-Ra’d). Et comme nous l’avons vu tantôt, l’aumône qui expie les péchés et purifie son auteur est incontestablement une ‘’porte du repentir’’ et préserve donc de la sécheresse, de la pauvreté et du vieillissement de la population par baisse de la natalité (71. Noé : 10-13 – Nûh).

Certes, dans notre pays, on donne beaucoup l’aumône, en dépit d’une pauvreté quasi endémique ; mais malheureusement, il faut reconnaître qu’on la ‘’sort’’ le plus souvent pour se départir d’un mauvais sort, sur la prescription de marabouts (devins), alors que la divination et toutes les autres formes d’idolâtrie (dont le culte des Djinns) – qui sont des pratiques sataniques – sont formellement proscrites dans l’Islam (et les autres religions monothéistes) ; à l’évidence, de telles aumônes ne peuvent pas être agréées par Dieu et ne contribuent qu’a accroître l’incrédulité et les angoisses de leurs auteurs. En outre, la mendicité tel que pratiquée dans notre pays peut irriter ou agacer certains citoyens, mais, à notre avis, il n’est ni sage ni réaliste de l’interdire ; c’est aux citoyens d’en prendre conscience et de donner l’aumône avec discernement pour dissuader ceux qui  seraient tentés d’en faire un bisness. Et l’idéal serait, en plus du circuit traditionnel, de faire des guides spirituels et imams, des relais pour la collecte et la distribution aux ayant-droits. Et de rappeler qu’un Etat laïc doit se garder de s’immiscer dans de telles affaires (mutualisation de l’aumône).

DOCTEUR MOUHAMADOU BAMBA NDIAYE

Ancien Interne des Hôpitaux de Dakar

Pédiatre à Thiès

Recteur de l’Université Virtuelle ‘’La Sagesse’’ de la Fondation Serigne Babacar SY Ihsaan – Bienfaisance (Thiès).

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