Le 4ème art se dégrade

L’avenir du théâtre au Sénégal préoccupe au plus haut niveau ceux qui s’y adonnent. Une floraison de groupes théâtraux est constatée et un manque de formation cruciale est noté. Conséquence les prestations affectent sur la qualité des produits.

«Le théâtre ne se porte pas bien» dira beaucoup de comédiens. Les prestations montrées sur le petit écran, laissent à désirer. Les thèmes développés ne sont plus éducatifs, ni instructifs. Une situation qui est due pour la plupart du temps à l’émergence du théâtre bisness, la floraison des troupes théâtrales, le manque d’organisation et de moyens, le déficit de formation et d’encadrement des acteurs qui en sont autant de facteurs qui ont fini par constituer le déclin du théâtre. Aujourd’hui, les producteurs mettent au devant l’argent et ne se préoccupent pas très souvent de l’aspect éducation qui faisait la vocation première du 4ème art. La troupe théâtrale de la compagnie Daniel Sorano est mis en veilleuse faute de moyen, même si, elle a fait les beaux jours de ce secteur avec des prestations riches en connaissance sur l’éveil de la personne, comment elle doit se comporter dans la société. Depuis un bon moment, la troupe n’a pas sorti de production nouvelle.

L’ouverture, le développement des nouvelles technologies en sont pour quelques choses dans cette léthargie. Pour Samsédine Mané, animateur culturel à la Maison de la Culture Douta Seck : «le théâtre doit illustrer les réalités de la société en reflétant le quotidien des citoyens. Seulement au vu de ce qui se passe actuellement dans les télévisions, il y a toute une contradiction ». Et de poursuivre : « le rire doit servir de méthode pour éduquer la population, il doit aider à corriger les mœurs. Les déguisements qu’arborent certains comédiens n’ont rien à voir avec le théâtre. Au lieu de focaliser le spectateur sur le message, ils préfèrent mettre l’accent sur leur propre personne. C’est pourquoi la plupart du temps, le spectateur est détourné de l’objectif».

Face à cette situation, des acteurs ont plaidé pour le retour de certaines valeurs au niveau du théâtre. Au cours d’une journée de réflexion sur le 4ème art au Sénégal tenue l’année dernière à Dakar, différentes associations qui œuvrent autour cet art, ont soutenu que « le théâtre est loin d’être reluisante». Dans la presse, le dramaturge François Diène membre de l’association des retraités de Sorano a fait une comparaison entre ce que le Théâtre Sorano représentait dans le temps et ce qu’il est devenu maintenant.

Selon lui, cette institution culturelle a perdu son lustre d’antan. «Depuis 13 ans, il n’y a pas de décentralisation de l’action culturelle. Avant, les ensembles de Sorano sillonnaient toutes les régions. Ça ne se fait plus. La troupe dramatique faisait des productions de valeur, 2 pièces par an et faisait 40 représentations. Aujourd’hui, Sorano ne fait même pas 10 représentations et il n’y a pas de représentation scolaire», a-t-il déploré. Et de regretter le fait que le théâtre Sorano ne participe plus à des festivals comme avant. De même soutient-il, les artistes ne bénéficient plus de bourses de formation. «Aujourd’hui, les artistes du théâtre ne font pas de tournées, il n’y a pas de rencontres et les artistes n’apprennent rien du tout. Sorano est devenu une salle de location. Ce n’est pas fait pour ça. Cette salle doit être occupée par les ensembles…», a-t-il insisté. Pour Ousmane Faye, cinéaste et metteur en scène : «le théâtre est devenu un un fourre-tout.

Avant, c’était vraiment le grand théâtre. On a la nostalgie quand on pense au vrai théâtre avec les Serigne Ndiaye Gonzales et consorts. Actuellement avec les jeunes on voit du n’importe quoi. Les gens qui se disent comédiens sont généralement des humoristes. Et ils ont fini de faire du théâtre un fourre-tout. Le grand théâtre a été étouffé.»
Dans cette torpeur que traverse le théâtre, l’Etat du Sénégal est incriminé faute d’une bonne politique culturelle. Le gouvernement actuel dans sa stratégie, a adopté la promotion la diversité culture.

Ainsi a soutenu le ministre dans la culture lors du lancement de son programme : «notre pays regorge d’expressions culturelles diverses. Le Ministère de la Culture, dans le cadre de la politique de son Excellence le Président Macky Sall, s’est fixé comme troisième axe prioritaire, de promouvoir cette diversité culturelle. Pour ce faire, un programme national de promotion et de stimulation de la créativité sera mis en place.

Dans chaque département, dix produits culturels représentatifs seront documentés et promus sur différents supports de communication. L’organisation d’une semaine destinée à la mise en valeurs desdits produits, mettra fin à cette tournée nationale.»

Présentement, aucun acte n’est posé par le gouvernement actuel pour redonner au théâtre sa mission d’antan. Du coté des ténors et acteurs, ils attendent toujours le soutien de l’Etat. Mais, en attendant, le 4ème art continue de s’enfoncer.