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Le budget-programmes consacre une ’’refondation de l’Etat » (universitaire)

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XALIMANEWS : L’adoption prochaine par le Sénégal du budget-programmes, en remplacement du budget de moyens, consacrera « une refondation de l’Etat » s’adossant sur la performance et la transparence, soutient Abdou Aziz Kébé, enseignant chercheur à la faculté de droit de l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD) de Dakar.

Avec cette réforme, on passera à « une affectation des crédits budgétaires à des finalités et non à des services », a noté M. Kébé, agrégé de droit et directeur du Centre d’études et de recherche sur l’Ingénierie juridique et financière (CERIF).
« C’est le premier point de la refondation », a souligné le professeur Kébé, mardi à Thiès, lors d’une session du Cadre multi-acteurs de suivi budgétaire (CMSB), une instance créée en 2016 par le ministère en charge de la Bonne Gouvernance.
Il intervient comme formateur dans le cadre de cet atelier de deux jours sur le suivi budgétaire, à l’intention d’agents de services étatiques, de la société civile et collectivités territoriales, entre autres participants.
La rencontre vise à renforcer les capacités des participants en matière de budget, afin d’en faire des vecteurs d’une participation des citoyens à la base au suivi budgétaire.
Dans sa communication intitulée « Le budget-programmes, une refondation de l’Etat par la réforme du droit financier », M. Kébé a essayé de montrer comment l’Etat, en changeant sa façon de dépenser, « change d’identité ».
« Le budget est la carte d’identité de l’Etat », a fait valoir l’expert, selon qui « on va vers une grande réforme de l’Etat ».
Il signale que le Sénégal, deuxième économie budgétaire de l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA), avec un budget de 4.071 milliards en 2019, contre 3.709 milliards lors du précédent exercice budgétaire, arrive derrière la Côte d’Ivoire qui était à 7.000 milliards en 2018.
« L’entrée en vigueur effective du budget-programmes au Sénégal est prévue en 2020 », a indiqué à l’APS, le secrétaire générale du ministère de la Bonne Gouvernance et de la Petite enfance, Oumar El Foutiyou Bâ, précisant toutefois que le budget 2009 intègre des aspects du buget-programmes.

Des pays comme le Burkina ont déjà mis en œuvre le budget-programmes, suite à une directive de l’UEMOA faisant obligation aux Etats-membres de la mettre en œuvre à l’horizon 2017.

Avec le budget-programmes, qui vise la performance et la transparence, les politiques publiques sont déclinées en programmes et les crédits affectés en fonction de ceux-ci. Ce qui n’est pas le cas avec le budget de moyens, suivant lequel « l’essentiel n’est pas la performance, mais la consommation des crédits ».

Si bien qu’en fin d’année, « c’est la fièvre du mois de décembre » dans les ministères qui font leur possible pour dépenser les crédits qui leur ont été affectés, au risque de les perdre s’ils ne le sont pas, a indiqué M. Kébé.

Le programme est un crédit avec un objectif, un indicateur de performance et un suivi-évaluation. Avec le budget programme, « tous les ministres seront des ordonnateurs de crédit », une prérogative jusque-là dévolue au seul ministère de l’Economie et des Finances, a-t-il ajouté.

Ainsi chaque ministère devra élaborer son Programme annuel de performance (PAP) et à la fin de l’année déposer son Rapport annuel de performance (RAP).

Des « mutations organisationnelles » ont été opérées pour faire face à cette réforme, le poste de secrétaire général (SG) s’étant généralisé dans tous les ministères, lesquels ont plus que jamais besoin de techniciens pour toutes ces tâches de planification, a fait observer Abdou Aziz Kébé.

Au sein du ministère de l’Economie et des Finances, il a été créé une direction de la programmation budgétaire, une réforme qui contribue à renforcer le droit de regard du Parlement. « Le choix du député est plus éclairé, (car) le vote porte sur des politiques publiques et non sur des services », selon l’expert.

L’assistance de la Cour des comptes à l’institution parlementaire est aussi renforcée, dit-il, précisant que dans ce cadre, une directive de l’UEMOA évoque un droit à l’information financière au bénéfice des citoyens.
Celle-ci précise que « l’information doit être exhaustive, simple et à temps réel », a relevé M. Kébé, évoquant la nécessité d’un plaidoyer de la société civile dans ce sens pour que soit votée une loi garantissant l’accès du citoyen à l’information financière comme il en existe déjà dans d’autres pays africains, afin qu’il ne se voit pas opposer le secret d’Etat, pour motiver un refus.

L’autre aspect des directives de 2009 de l’UEMOA pour la transparence et la performance, sur lequel l’universitaire souhaite voir la société civile agir, concerne la déclaration de patrimoine, qui telle qu’elle est faite au Sénégal ne permet pas selon lui aux citoyens de suivre.

« Au Niger, les gens déclarent et on voit tout. Ici, on déclare, mais on ne voit rien », a dit le professeur Kébé, avant d’ajouter : « Désormais, tous les ministres seront des ordonnateurs de crédit ».

Il a fait noter que cela rompt d’avec la pratique qui était de mise depuis 1960, où seul le ministre de l’Economie et des Finances était l’ordonnateur de crédit.

Avec ce type de budget, conclut Abdoul Aziz Kébé, la planification du budget s’effectue sur trois ans, à travers le Document de programmation budgétaire et économique pluriannuelle (DPBEP), conformément à la réforme.

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