« Le protocole de l’Elysée : confidences d’un ancien ministre du Pétrole sénégalais », le bradage des ressources au cœur du nouveau livre de Thierno Alassane Sall

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XALIMANEWS : L’ancien ministre de l’énergie a sorti un ouvrage intitulé « le protocole de l’Elysée : confidences d’un ancien ministre du Pétrole sénégalais ». Dans ce livre, Thierno Alassane Sall fait le procès des régimes de Wade et Macky Sall.
Plusieurs thèmes sont évoqués dans ce livre dont la gestion du pétrole et du gaz sénégalais. Thierno Alassane Sall y révèle révèle les rôles joués par les acteurs dans le bradage des ressources naturelles en faveur des intérêts français. Voici quelques extraits.

Les connexions au sommet de Frank Timis

En août 2016, je me trouvais dans une profonde perplexité, à la lecture des quelques documents disponibles dans les archives du Ministère, lorsqu’un coup de tonnerre se produisit. Abdoul Mbaye, ancien Premier ministre, cosignataire des deux décrets d’approbation des contrats relatifs aux blocs de Cayar Offshore Profond et de Saint-Louis Offshore Profond, fit une déclaration sensationnelle. A l’en croire, il détenait des preuves que les deux rapports de présentation signés par Aly Ngouille Ndiaye pour motiver la signature des décrets d’approbation des CRPP recelaient des allégations intentionnellement fausses. Les déclarations d’Abdoul Mbaye confortaient les certitudes qui naissaient progressivement en moi.
Le Président Sall fut vivement affecté par les déclarations d’Abdoul Mbaye.
(…) C’est à partir de cet instant que je conçus l’idée d’adresser une lettre au président de la République pour demander le retrait de Petro-Tim. Désormais, une partie rude commençait. Dans l’immense brouhaha d’accusations et de rumeurs de toutes sortes provoqué par l’affaire Petro-Tim, je ne voyais pas le Président prendre le risque d’apporter des munitions à l’opinion publique en me dessaisissant du dossier. Or j’avais besoin de temps pour avoir le fin mot de l’histoire.
Mon premier objectif était de parvenir à récupérer le 30 % que détenait encore illégalement Timis. Je n’avais pas encore entendu parler du rapport de l’IGE ni vu la lettre de Tullow. Je ne disposais que du dossier incomplet (…). Pour débouter Timis, je devais prouver que la société n’avait pas engagé des ressources propres à ce stade de la recherche où des découvertes conséquentes avaient été faites et, n’entendait pas non plus le faire dans le futur. Il apparaissait en effet nettement que Frank Timis guettait le meilleur moment pour vendre au plus offrant les 30 % qu’il détenait encore. Les travaux avançaient, de nouveaux puits étaient forés avec succès, augmentant la valeur des parts dé- tenues par Timis Corp. Le bloc de Cayar, où des découvertes bien moins importantes que celles de Saint-Louis Offshore Profond avaient été faites durant l’année 2016, n’avait fini de révéler tout son potentiel.
(…) Dans l’immédiat, le retrait de ConocoPhillips affectait la poursuite des opérations de forage dans ce bloc où du pétrole avait été découvert en 2014. En effet, ConocoPhillips avait notifié sa cessation de participation à l’association, Woodside ne pouvait l’intégrer sans une approbation formelle par le ministre de l’énergie de l’accord de transaction. En conséquence, le financement des opérations en était affecté. Or, je ne pouvais approuver l’accord sans un éclairage juridique irréfutable qui me faisait défaut.
(…) Je rendais compte par des rapports circonstanciés au Président et au Premier ministre aussi bien qu’au Conseil des ministres. Ils manifestaient un intérêt modéré à ce dossier ; mes courriers n’ont eu aucun écho.
Ce déficit d’enthousiasme pour les opérations en cours dans le bloc de Sangomar et l’intérêt débordant que le Président manifestait sur les blocs COP et SLOP commencèrent à m’intriguer.
(…) A plusieurs reprises le Président me transmit très nettement les alertes de Timis sur le double-jeu supposé de Kosmos. Au début, je prenais ces informations pour une invite à la vigilance. Tant va la cruche à l’eau qu’à la fin… A la longue, le comportement de Timis finit par m’agacer. Je me souviens d’une réplique de ma part à une des critiques de Frank Timis qui dédaignait s’adresser au ministère ou Petrosen à l’instar des autres : « il devrait venir m’exposer ses griefs s’il a des documents à l’appui ».
(…) J’appris ainsi, lors d’une audience que le Président avait accordée aux habituels responsables de Kosmos que des négociations exclusives avec Timis avaient été entamées à leur initiative. Timis Corporation Timis avait reçu de Kosmos une proposition financière substantielle en contrepartie des 30 % que la société détenait encore dans les deux blocs de Cayar Offshore Profond et de Saint-Louis Offshore Profond. L’offre consistait en une partie fixe de cent (100) millions de dollars payables immédiatement et une partie variable sous forme de royalties. Les discussions avaient été rompues de manière abrupte par Frank Timis qui avait annoncé avoir reçu des propositions plus alléchantes d’une tierce partie. Ils déploraient les méthodes peu loyales de Timis Corp. qui n’avait pas observé le temps imparti à ces négociations exclusives et surtout, ouvrait de nouvelles discussions sur la base de l’offre de Kosmos pour obtenir plus de ces nouveaux pourparlers. L’arrivée éventuelle d’une autre compagnie dont les objectifs stratégiques pourraient ne pas s’aligner à ceux de Kosmos risquait de retarder le début de production du gaz. Clairement, ils sollicitaient le Président pour raisonner l’indésirable Frank Timis. Le Président Sall promit de parler à Frank Timis (…)

Orage dans le bureau présidentiel

Le 20 avril 2012, Timis Corp. envoya au ministre de l’énergie une demande d’approbation d’une cession, avec en pièce- jointe, l’intégralité de l’accord de transaction conformément aux dispositions du Code Pétrolier. Je puis donc connaître une partie des arrangements qui comportaient des clauses cachées, y compris au ministre habilité à les valider.
En échange des 30 % des droits, Timis recevrait une contrepartie financière composée des trois termes suivants :
Un montant de deux cent cinquante millions (250 000 000) de dollars, payable 5 jours ouvrables au plus tard après l’approbation de la cession par le ministre de l’énergie ;
Un montant de cinquante (50) millions de dollars pour tout puits d’exploration foré avec succès dans un des deux blocs Cayar Offshore Profond ou Saint-Louis Offshore Profond, à concurrence de deux puits maximum ; et
Des royalties objet d’un accord séparé, non parvenu au Ministre ;
Au début des négociations, la proposition de Kosmos relatives aux royalties était de 0,4 % d’équivalent baril de la production journalière de gaz sur une durée de production prévue de 45 ans. A la suite des nombreux marchandages, les royalties avaient enflé jusqu’à 1 %, chiffre qui a été communiqué à l’occasion de rencontres officielles. Le taux final est un secret bien gardé.
Le moment que je guettais depuis longtemps était enfin arrivé. Contrairement à mon passage au Ministère des infrastructures, je ne nourrissais plus aucune illusion sur la faculté de changer le cours des évènements. J’avais gardé une circonspection étudiée, attendant le moment d’agir du peu que je pouvais, non pour prévenir la spoliation de biens de la République, mais pour jeter une lumière crue sur cette funeste entreprise. Face au jeu monstrueux de ceux qui en- tendaient sucer un des peuples les plus pauvres sur Terre, je dis que oui, j’ai épié ce moment. La pieuvre, dont les innombrables tentacules avaient brisé les résistances, étouffé les décrets non numérotés et les rapports d’IGE, manipulé les sociétés étrangères pour tordre un peu plus les mains de BP et Kosmos, croyait être parvenue à ses fins. Sans doute. Mais j’avais mon mot à dire…

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