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Le renouveau de la diplomatie sénégalaise (Par Moussa DIAW)

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On peut considérer que la diplomatie est un ensemble de moyens dont dispose un Etat pour agir, en dehors de son territoire, en termes de coopération, de négociation et de représentation, mais aussi d’actions au sein d’organisations internationales, renforçant ainsi sa visibilité et sa dynamique dans l’espace mondial. Ce dispositif est généralement intégré dans la politique étrangère qui relève du domaine réservé du Président de la République selon la Constitution.

Cette action extérieure peut-être marquée par la personnalité et les orientations politiques des hommes élus à la tête de l’Etat. C’est ainsi que l’élection de Bassirou Diomaye Diakhar Faye, le 24 mars 2024, au sommet de l’Etat sénégalais se traduit par un aggiornamento dans la diplomatie sénégalaise par le choix de nouvelles méthodes et surtout par des pratiques qui confirment la rupture dans les options fondamentales. Désormais les priorités sont adossées aux intérêts du Sénégal sur la base d’un réalisme politique et économique. Il est vrai que les fondements de la politique étrangère n’ont pas varié comme l’avait subtilement noté l’ancien président Senghor dans le décryptage des ses cercles concentriques priorisant le voisinage, le continent et le monde. S’inscrivant dans cette logique, le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye a privilégié, dans ses voyages à l’étranger, les pays voisins.

La diplomatie du bon voisinage et de la ferveur continentale

En respectant ce principe de la politique étrangère, le président ne déroge pas à la tradition qui se perpétue depuis l’avènement de l’Etat et qui devient aujourd’hui un élément fondamental de l’action diplomatique du pays. C’est un symbole de l’intérêt que le pays accorde aux pays voisins puisque la paix et la sécurité dans cet environnement sont aussi gage de stabilité et de concorde internes.

Cela témoigne du nexus entre la politique intérieure et la politique extérieure d’autant que le phénomène de la mondialisation a renforcé la porosité des frontières en diluant corrélativement la notion de souveraineté. De même, la prise de conscience des sources de déstabilisation existantes dans la sous-région incite davantage à la mutualisation des stratégies de prévention et de lutte contre toutes velléités de perturbation de l’ordre social. La dimension sécuritaire prend donc tout son sens au regard des perspectives de mise en valeur des gisements de pétrole et de gaz.

Le partage en Commun de l’exploitation de pétrole et de gaz explique sans doute la première destination qui est la Mauritanie. Le Sénégal entretient, avec son voisin du nord, des relations séculaires historiques, géographiques, et socio-culturelles. Une forte diaspora sénégalaise y vit depuis très longtemps et il constitue un pays de transit pour les candidats à l’émigration clandestine vers l’Europe. Les deux pays sont également engagés dans des projets au sein de l’OMVS (Organisation pour la Mise en valeur du Fleuve Sénégal).

Cette diplomatie cible aussi le Mali, la Gambie et la Guinée-Bissau, la Guinée en s’élargissant au niveau continental à d’autres pays comme la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso, le Niger démontrant ainsi l’engouement des nouvelles autorités sénégalaises à œuvrer pour l’intégration africaine. Elles plaident pour le renforcement de la CEDEAO (Communauté Economique de l’Afrique de l’Ouest), étape importante du Panafricanisme d’autant que cet organisme communautaire traverse une crise accentuée par la volonté exprimée par les pays dits Alliances des Etats du Sahel (AES), de la signature d’un pacte de défense mutuelle. Ils décident dès lors de quitter l’Organisation pour ses prises de positions et ses sanctions à l’encontre des pouvoirs militaires, institués dans ces pays (Mali, Niger, Burkina). Dans le tropisme de la paix, la diplomatie sénégalaise pourrait jouer un rôle important afin de réconcilier les frondeurs avec l’organisation régionale. Elle est attendue par sa dynamique au niveau international, particulièrement dans les relations franco-sénégalaises.

Les habits neufs de la diplomatie sénégalaise, la France obligée de s’adapter

Symboliquement les ports vestimentaires du couple présidentiel sénégalais en France pour une première visite dans le pays de Molière donnent la dimension, sur le plan symbolique et pratique, des innovations dans les relations franco-sénégalaises. Certes, cette visite en France se déroule dans un contexte particulier où le président français est confronté à la poussée politique du Rassemblement National qui se retrouve, encore une fois, dans l’antichambre du pouvoir. Le sursaut national pourrait-il avoir un effet de ralentissement ? Rien n’est moins sûr, compte tenu des enjeux internes, de baisse de pouvoir d’achat, de la réforme des retraites, etc.

En tout cas, il en ressort de cet entretien entre les présidents français et sénégalais des relations décomplexées et une meilleure prise en compte de la volonté des autorités sénégalaises de parachever leur souveraineté nationale par la disparition progressive des bases militaires françaises dans le pays, selon un calendrier convenu mutuellement au terme de négociations entre les deux parties. D’ailleurs, la France avait déclaré sa décision de réduire drastiquement ses effectifs militaires en Afrique, conformément à sa nouvelle politique géostratégique. Une opportunité saisie par la diplomatie sénégalaise pour demander la réalisation de ce vœu.

Dès lors, il convient de dire que la diplomatie sénégalaise a gagné des points par l’impulsion d’une dynamique permettant d’échanger en partenaire égal sur des questions relatives aux intérêts du pays. Cette position est conforme aux aspirations des citoyens sénégalais qui ont exprimé le désir de changer la manière de gouverner et surtout les pratiques politiques y compris dans l’action diplomatique. Dans cette optique, le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye donne un signal fort pour la diversification des partenaires dans la coopération internationale et l’implication du Sénégal dans les grands enjeux internationaux en faveur d’un meilleur équilibre économique et de la recherche de la paix mondiale.

Par l’adoption d’une nouvelle posture dans le choix de méthode rigoureuse et rationnelle, des hommes compétents, avec le souci de ménager les ressources financières du pays, la diplomatie sénégalaise gagnera en visibilité et atteindra des objectifs fixés dans le projet largement soutenu par les Sénégalais.

Par Moussa DIAW, politologue, spécialiste des relations internationales

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