Le grand dilemme! Bosse Ndoye

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L’éducation des enfants d’immigrés africains nés en Occident : le  grand dilemme! par Bosse Ndoye
Quelle éducation donner aux enfants d’immigrés africains nés en Occident? Dans quelle(s)  langue(s) leur parler dans la vie de tous les jours? Faut-il les emmener grandir au pays d’origine de leurs parents pour une éducation par procuration dispensée par un proche parent, un parangon de vertu réputé bon éducateur, pour qu’ils puissent s’imprègner davantage de la culture africaine et en apprennent, par conséquent, les valeurs traditionnelles et religieuses… Ou alors, faut-il les laisser sur place?  Là où ils sont nés pour mieux faciliter leur intégration dans leur future société. Là où ils sont supposés vivre et travailler. Et par la même occasion leur donner l’opportunité de s’épanouir au sein de leur cocon familial afin de bénéficier d’une éducation prodiguée par leurs propres parents qui, après tout, doivent être les meilleurs à même de déterminer sur quelle trajectoire ils veulent orienter leurs progénitures. Tel un choix cornélien, ces interrogations qui font souvent l’objet de discussions, parfois passionnées entre immigrés, tout parent expatrié soucieux de donner la meilleure des éducations à ses enfants  a  dû se les poser plus d’une fois durant sa vie, loin de son pays.

La plupart des parents expatriés africains qui envoient leurs enfants vers leur pays d’origine pour les faire éduquer ne le font pas souvent de gaieté de cœur. Au contraire, c’est parce qu’ils le jugent nécessaire qu’ils le font à leur corps défendant. Pour nombre d’entre eux, l’étranger, notamment l’Occident, n’est bon que pour le travail, n’est qu’une vache à lait qu’il faut savoir traire tout en évitant de se prendre des coups de corne. Généralement, ils le voient d’un très mauvais œil et le considèrent comme la source de tous les maux : le lieu où les enfants peuvent quitter la maison familiale à leur majorité sans pour autant être obligés de se justifier; là où ces enfants peuvent amener leurs parents à une maison de retraite à leur vieillesse; l’endroit où l’homosexualité, l’individualisme, l’acculturation, la liberté sans entrave… sont omniprésents. Sans doute pensent-ils, aussi qu’en Occident, les enfants ont beaucoup de pouvoirs. D’où les notions d’enfants-rois et d’enfants-tyrans. Ce qui constitue la première pierre d’achoppement sur laquelle bute l’éducation qu’ils souhaiteraient donner à leurs rejetons. Les plus malicieux parmi les enfants, dans certains pays comme les USA ou Canada, savent très tôt qu’une menace d’un coup de fil au 9-1-1 peut être un moyen de pression, une épée de Damoclès suspendue au dessus de la tête de leurs parents pour que ceux-ci cèdent parfois à leurs caprices. Pour les adeptes « du retour aux sources,» l’Occident est aussi l’endroit où une assistante sociale mal intentionnée, à la suite de questions malicieusement posées à un enfant innocent, a le pouvoir de briser une famille en un clin d’œil en proposant de confier la garde de cet enfant aux autorités publiques compétentes en à la matière. Somme toute, pour nombre d’entre eux, l’Occident est le lieu où il est difficile, voire impossible de donner une bonne éducation à ses enfants, parce que les valeurs qui y sont tolérées, acceptées, voire prônées sont souvent en porte-à-faux avec celles de leur culture en Afrique. Or ils veulent que leurs progénitures bénéficient de la même bonne éducation qu’ils ont eu la chance de recevoir, et qui a fait d’eux supposément les bons hommes ou femmes qu’ils sont devenus aujourd’hui. Comme par pur manichéisme, ils ont généralement une vision bonne et positive, souvent trop idéalisée de leur pays d’origine et une mauvaise, négative et souvent très caricaturale de l’Occident. Peut-être pensent-ils naïvement qu’il n y a pas beaucoup d’argent dans beaucoup de pays africains, mais il y a de bonnes valeurs morales et qu’il n’y a pas beaucoup de bonnes valeurs morales en Occident, mais il y a de l’argent. Or, de bonnes comme de mauvaises choses peuvent se trouver dans tous les pays du monde, dans toutes les sociétés et dans toutes les cultures. Pourtant beaucoup de  phénomènes et de pratiques que certains de ces immigrés dénoncent dans leur pays de résidence se trouvent dans leur pays d’origine. Dans un monde globalisé, à l’instar des économies, les vices tendent aussi à se mondialiser. C’est pourquoi beaucoup de sociétés africaines sont actuellement ébranlées dans leurs assises les plus profondes, tiraillées qu’elles sont, entre l’attrait du vice importé et la résistance farouche des vertus anciennes, pour paraphraser Mariama Bâ. Mais certains phénomènes ou pratiques susmentionnés demeurent souvent un sujet tabou dans beaucoup de pays africains, souvent  par  pure hypocrisie.

Le fait d’être né et d’avoir grandi en Afrique ne fait pas forcément qu’on soit meilleur que celui qui est né et a grandi en Occident ou ailleurs, vice et versa. Personne n’est condamné d’avance.  Il n’existe de pays ou de continent  où les gens qui y naissent et y grandissent sont destinés à être bons, comme il n’y  en a pas où ceux qui y naissent et y reçoivent une éducation sont destinés à être mauvais. Il arrive parfois même que certains parents immigrés qui avaient emmené leurs enfants à leur pays d’origine pour les faire éduquer aient la déception de leur vie une fois que ceux-ci sont retournés chez eux. Car non seulement ils sont devenus tout le contraire de ce qu’ils espéraient en les y envoyant, mais ils n’arrivent même plus à bien communiquer avec eux, car la distance et le temps ont érigé des barrières quasi infranchissables entre eux. Il arrive au même moment que d’autres parents qui avaient laissé les leurs sur place et les avaient éduqués eux-mêmes aient pu faire germer et fleurir en ces enfants une bonne éducation et un bon comportement, malgré les difficultés auxquelles ils ont dû faire face. Ce qui prouve que le plus important ne semble pas être tant l’emplacement géographique que l’engagement et le dévouement que les parents mettent dans l’éducation de leurs enfants. Ceux qui ont mieux vécu cette situation difficile d’écartèlement sont ceux qui ont su concilier intelligemment ce qui est bon dans leur pays d’origine et ce qui est bon dans le pays de résidence. Par une bonne synthèse des deux cultures,  ils ont pu donner à leurs enfants une éducation qui leur permet de bien vivre partout. Ce n’est pas une tâche facile, mais à force de persévérance beaucoup y sont parvenus. Il ne faut pas leurrer tout n’est pas à jeter en Occident, comme tout n’est pas à prendre dans les cultures africaines, tant s’en faut. L’Occident recèle de beaucoup de bonnes valeurs qui peuvent contribuer au développement de n’importe quelle société et de n’importe quel pays, tant sur le plan social et professionnel que politique pour ne citer que ceux-là. Dans un monde globalisé, n’importe qui peut trouver n’importe où, à quelques exceptions prés, toutes les bonnes valeurs et conditions qui peuvent contribuer à la bonne éducation de ses enfants, comme tout le contraire aussi. Avec Internet par exemple,  on a toute la sagesse et la bassesse du monde au bout des doigts, comme le souligne Benoît Gagnon.  Il n’en demeure pas moins que l’environnement où grandit l’enfant peut avoir une influence significative indépendamment du pays où il se trouve. Ceux qui grandissent dans un quartier résidentiel paisible et fréquentent de bonnes écoles, dans un milieu sans banditisme ou de troubles sociaux peuvent avoir plus de chances d’avoir une meilleure éducation que ceux qui grandissent et vivent dans des ghettos avec un grand taux d’échecs scolaires ou dans des quartiers défavorisés où sévissent drogue, banditisme, criminalité…Bref dans un endroit où une bonne éducation n’est pas propice. Les parents vivant dans ces quartiers défavorisés doivent alors faire beaucoup plus d’efforts dans l’éducation de leurs enfants. Il faut aussi noter que chaque parent n’éduque ses enfants qu’à son image, c’est-à-dire qu’il serait difficile, voire impossible pour des parents qui ont mauvais comportement loin d’être exemplaire de donner une bonne éducation à leurs enfants, où qu’ils se trouvent.

Ce serait toutefois une bonne chose pour les parents immigrés qui souhaiteraient rester à l’étranger pour éduquer leurs enfants d’emmener ces derniers le plus souvent possible à leur pays d’origine pour qu’ils comprennent et découvrent certains aspects de leur culture. Car nul ne peut aimer ce qu’il ne connaît pas. Mais cette question n’est pas simple, vu qu’elle dépend généralement des moyens économiques dont disposent ces immigrés-là. Elle peut être d’autant plus compliquée que le pays de résidence peut être très éloigné du pays d’origine et la famille nombreuse. Dans ces genres de situation la cherté des billets et l’organisation de vacances collectives peuvent être difficiles, surtout quand les moyens de subsistance dont disposent les familles ne sont pas très conséquents.

Les questions de l’éducation des enfants d’expatriés nés à l’étranger ne préoccupent pas toutefois tous les parents immigrés. Pour certains d’entre ces derniers, adeptes du moindre effort, moins responsables et plus mus par l’esprit de lucre, la présence de leurs enfants à leurs cotés les empêche non seulement de se consacrer pleinement à leurs activités professionnelles qu’ils mettent au premier plan, mais leur coûte beaucoup d’argent et de temps. Comme pour se débarrasser d’eux,  ils préfèrent se soustraire à leurs rôles et responsabilités de parents en les envoyant à leur pays d’origine. Ce faisant, ils ont beaucoup plus de temps pour eux-mêmes et des revenus supplémentaires, parce que des allocations qu’ils reçoivent pour ces enfants, ils n’auront plus à payer des frais de garderie  et à faire d’autres dépenses, bien qu’ils puissent envoyer de l’argent à ces enfants une fois qu’ils se trouvent dans leur pays d’origine. Mais les sommes peuvent être nettement inférieures, à cause de l’avantage des fortes monnaies qu’ils ont dans beaucoup de pays occidentaux. Beaucoup de parents immigrés, attirés par l’appât du gain que pourrait constituer un grand nombre d’enfants dans certains pays développés encourageant la politique de natalité par beaucoup d’avantages sociaux ou financiers, sont tombés dans les traquenards et les dédales des allocations familiales, d’où ils ne peuvent plus s’extirper. Il leur est souvent difficile de donner une bonne éducation à leurs enfants qui sont pour la plupart du temps sources de profit plutôt que fruits de l’amour.

«Où l’on est bien, là est la patrie. » Cette citation d’Aristophane semble trouver tout son sens dans ce monde moderne globalisé. Même si au moment où certaines barrières chutent entre certains pays, d’autres peuples se barricadent.

 

Bosse Ndoye

 

 

5 Commentaires

  1. Vérités pures. Et l’autre dilemme est de trouver maris aux filles nées en Occident et ayant atteint l’âge de mariage. Et cela donne d’ailleurs naissance à un nouveau phénomène: revenir en Afrique prendre un mari qui se trouve être un chercheur de visa.

  2. Les africains (noirs et arabes) qui ont grandi en europe sont essentiellement des gens difficiles qui n’aiment ni les études, ni un comportement sérieux, ils causent trop de problèmes à leurs parents. drogue, sex, vol, agression etc c’est leur monde de prédilection.

  3. Dans ce beau pays si généreux, où l’enfant, riche ou pauvre est mis dans de très bonne conditions pour réussir jusqu’à BAC + 10 si ses capacités intellectuelles le lui permettent, il y a au moins 30.000 jeunes âgés de 18 à 30 ans qui y sont nés ou qui sont arrivée à un très jeune âge ! Dans ce pays, moins vos parents ont des revenus, plus la République vous aide aussi longtemps que vous êtes capables de suivre ! Malgré cela, combien de jeunes Sénégalais ont profité de ce système pour suivre des études pouvant être utiles à la leur pays ? Cette question peut être posés pour tous ces jeunes Africains qui n’ont rien dans le crâne, sinon la danse, les filles et le sport, si ce n’est la » Sap » ! Si on ne peut pas faire des études poussées dans ce pays si généreux pour ceux qui veulent travailler dur et bien, ce n’est pas à Dakar, à Thiès, ou à Diourbel qu’on le ferait mieux !

  4. Belle analyse.
    En definitive, il n’y a pas de formule unique pour le bonheur.
    Idéalement, aucun enfant ne devrait vivre séparé de ses parents.
    À chaque parent, selon sa réalité de prendre la décision qu’il juge la meilleure pour sa famille.
    Cependant, Seul Allah peut garantir l’éducation d’un enfant. On a vu le fils d’un Prophète désavouer son père. On a vu un prophète grandir sans parents dans le milieu le plus païen qui soit.
    Donc le résultat n’est pas lié au milieu, ni aux conditions d’éducation, ni aux moyens financiers du parent ou du pays. Sinon, les enfants des quartiers huppés ne tourneraient pas mal ou encore il, n’y aurait pas d’enfant qui tourne mal au Bled.
    L’essentiel est que chaque parent fasse ce que lui dicte sa conscience, en toute bonne foi. L’essentiel étant que chaque parent ne se laisse pas dicter sa conduite à l’égard de sa progéniture par qui ou quoi que ce soit d’autre que ses propres convictions personnelles, par ses propres principes de vie.

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