L’enseignement à distance, une nécessité et un atout pour l’Afrique (Par Mary Teuw Niane)

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La nécessité de rendre accessible l’éducation et la formation, la prise de conscience que c’est une population bien formée ayant les compétences correspondant aux problèmes qu’elle doit résoudre et aux défis qu’elle se pose, ont poussé les pouvoirs publics, les institutions de formation, les éducateurs et les pédagogues à rechercher les voies et moyens d’atteindre le maximum d’apprenantes et d’apprenants dans un souci d’équité sociale, territoriale et de genre. Comment raccourcir la distance entre maîtres et élèves ? Comment surmonter l’absence d’écoles et l’insuffisance de salles de classes ? Comment tirer profit des grands groupes tout en valorisant la qualité ? Comment dans une classe où le rythme de compréhension est inégal donner à chaque apprenant une chance égale sans baisser les standards ? Comment renforcer l’autonome de l’apprenant tout en lui donnant la possibilité d’interagir avec d’autres apprenants ? Au fil du temps l’ingéniosité, l’imagination, l’innovation et l’utilisation de la technologie ont permis de résoudre ces problèmes.

Les outils et les supports de l’apprentissage ont petit à petit évolué avec la technologie : de l’ardoise, à la craie, au crayon noir, à la plume et à l’ancre, en passant par le cahier, le papier buvard, le papier millimétré, le tableau noir, la règle, l’équerre, le compas, la règle à calculer, les abaques, la calculatrice, le rétroprojecteur, l’ordinateur de bureau ou portable, le téléphone androïde, le tableau interactif, etc. Le professeur au début solitaire sur sa chaire est de plus en plus soutenu par un dispositif technologique constitué d’un ordinateur relié à un vidéo projecteur projetant des diapos, des documents sous plusieurs formats, des audio, des vidéos, etc.

La préoccupation de joindre l’apprenante et l’apprenant éloignés, sans avoir besoin de déplacer l’enseignante ou l’enseignant en face d’eux, a conduit au fil du temps à diverses solutions comme les cours par correspondances, les cours à la radio (par exemple la méthode CLAD), les cours à la télévision, les cours en visioconférence, les cours enregistrés dans des CD ou des clés et jusqu’aux cours sophistiqués en ligne dans une plateforme d’enseignement à distance. Beaucoup de collègues enseignants perçoivent l’enseignement à distance comme la fin de l’enseignant. Contrairement à cette idée reçue, l’enseignement à distance, surtout numérique, participe à la valorisation et à la promotion de l’activité pédagogique et humaine de l’enseignant qui doit user de son savoir faire, de ses connaissances, de son leadership pour bâtir une classe virtuelle centrée sur l’apprenante et l’apprenant et qui renforce leurs autonomies. D’un autre côté lorsque l’apprenante et l’apprenant peuvent suivre un nombre illimité de fois un cours, une partie d’un cours, un point d’un cours, ils sont alors bien armés pour travailler à leurs rythmes et l’adapter à leurs capacités de compréhension, etc. Lorsque le jeune qui habite Pikine à Dakar peut rester à la maison suivre le cours magistral d’un enseignant ou bien participer à un TD avec ses autres camarades chacun chez lui ou une partie en classe au campus pédagogique de l’UCAD et l’autre chez elle, ce sont des contraintes sociales qui sont levées. L’étudiante et l’étudiant, travailleurs, agriculteurs, éleveurs, pourront continuer à exercer leurs métiers tout en se formant. La notion de présence au cours change ! Elle ne se confond plus à la présence en classe. Même les examens peuvent se faire à distance avec une surveillance à distance !

La technologie a toujours été au cœur du dispositif de formation ! Certains pourfendeurs de l’enseignement à distance s’offusquent de sa présence, de son omniprésence et, pensent, à tord, que c’est la technologie qui opère à la place de l’enseignante ou de l’enseignant ! La technologie a toujours était là, simplement, elle était tellement rustique qu’on l’oubliât : le tableau noir, la craie, l’éponge, la règle, l’équerre, le compas, la radio, la télévision, etc. Aujourd’hui, grâce à l’Internet, l’ordinateur portable ou de bureau, la tablette, le téléphone androïde, la réalité virtuelle, la réalité augmentée et l’Intelligence artificielle (IA), le monde de l’éducation et de la formation disposent d’outils puissants de formation, qui brisent les barrières de la distance, poussent les apprenantes et les apprenants lents à comprendre à leurs rythmes les enseignements, les apprenantes et les apprenants maladroits, qui cassent appareils et pipettes, a se faire la main dans des TP virtuels sans aucun danger pour les équipements. Les questions techniques répétitives sans grand intérêt cognitif pourront être petit à petit cédées à une intelligence artificielle (IA) et, l’enseignante et l’enseignant libérés de ces taches fastidieuses, se consacrera aux parties les plus créatives, les plus innovantes et les plus enrichissantes de son enseignement. Ce duo, professeur et IA, pourrait être perçu comme le futur de l’éducation et de la formation, mais rassurons-nous, c’est déjà aujourd’hui.

L’enseignement à distance numérique est une question de société, de projet de société. Au système où l’apprenant est solitaire avec sa machine, nous pouvons opposer la conception de l’enseignement à distance au Sénégal, avec les espaces numériques ouverts (ENO), qui mise sur le développement chez les apprenantes et apprenants de la culture du travail en équipe, de l’esprit d’appartenance, de l’autonomie, du service à la communauté et de l’inclusion sociale.

L’enseignement à distance numérique a donné naissance à de nouveaux métiers et renforcé d’autres comme : les techno pédagogues, les techniciens multimédia, les concepteurs et gestionnaires de plateformes d’enseignement à distance, etc.

Le nouveau monde de l’enseignement à distance numérique est déjà assez ancien dans notre pays. Avant la création de l’Université virtuelle du Sénégal (UVS), plusieurs institutions publiques et privées ont développé cette modalité d’enseignement : UVA, EBAD, FASTEF, UFR SJP de l’UGB, FSJP de l’UCAD, ISEG, etc.
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Dans une démarche inclusive, en mettant l’accent sur la formation, l’équipement et en sensibilisant sur le changement de paradigme, il est possible de tirer profit du numérique pour renforcer notre système éducatif, de formation et d’enseignement supérieur, en promouvant l’accès universel, l’équité social et territorial, l’accès et le maintien des filles, l’inclusion sociale notamment la prise en charge des personnes vivantes avec un handicap, etc.

Construisons l’écosystème nécessaire à l’enseignement à distance numérique pour tirer profit de nos forts potentiels dans ce domaine afin d’accélérer la démocratisation et la pertinence de l’éducation, de la formation et de l’enseignement supérieur !

Unis et engagés nous vaincrons !

Mary Teuw Niane
10 mai 2020

2 Commentaires

  1. C’est bien théorique tout ce que vous dites, nouveau pca.
    Vous datez votre article le 10 mai, vous auriez pu y ajouter pca petrosen.
    Unis et engagés dans cette gouvernance mafieuse, injuste, protectrice des voleurs et autres détourneurs des derniers publics par milliards, une gouvernance sans aucune dignité ni humanité, vous ne vaincrons jamais.
    Une gouvernance incapable de comprendre la souffrance de compatriotes à qui on refuse, sans aucune raison valable, d’enterrer ses morts dans leur terroir.
    De dignes fils de ce pays qui avaient demandé d’être enterrer à Touba, à Tivaoune, ou dans leurs villages attendent dans des morgues de l’Europe la volonté du président de les laisser revenir, avec les honneurs au bercail, pour un repos bien mérité.
    Le gouvernement leur propose d’être enterrer dans des cimetières surchargées ou, après 5 ans voir un peu plus, il vont être déterrer pour que les restes soient enterrées en fosses communes ou brûlées.
    LA DIASPORA SEMBLE PAYER LE FAIT DE NE PAS AVOIR VOTER MACKY SALL.

  2. Merci M. Niane ! Article instructif, responsable et prévoyant ! Le digital et le travail à distance sont les seules issues pour l’Afrique et pas seulement dans l’enseignement. J’ai eu honte d’entendre nos syndicats d’enseignants appeler à l’année blanche pour nos élèves ! C’est un crime de dire cela au moment où partout dans le monde et même en Afrique les enseignants font tout leur possible pour sauver l’année dans leur pays. Sauf au Sénégal ! Le Congo a même institué l’enseignement par la radio et des millions d’élèves de ce pays continuent de suivre des cours et de faire leurs exercices et leurs devoirs chaque semaine. Et toutes les radios grandes et petites de ce pays sont mobilisées et transmettent en même temps les mêmes programmes à tous les niveaux du primaire, du moyen et du secondaire. C’est une solution très efficace, plus équitable et à moindre coût car la radio est accessible à toutes les populations africaines, même dans les villages les plus reculés. Même dans un village sans électricité, les gens peuvent accéder aux enseignements par radio avec des batteries. L’exemple du Congo doit vraiment inspirer le Sénégal où nos paresseux enseignants ne revendiquent que l’argent matin midi soir ! Sur les 9 mois de l’année scolaire, les syndicalistes eux-mêmes disent qu’on a perdu 4 mois d’enseignement. Pourtant pendant tous ces 4 mois ils continuent de percevoir leurs salaires sans travailler. Pendant tous ces 4 mois qu’ils n’ont pas enseigné dans le public, ils ont pourtant continué à donner des cours juteusement payés dans le privé ! C’est injuste, c’est choquant, c’est égoïste, c’est méchant dans un pays où des milliers de personnes travaillent plus dur tous les jours sans revenu assuré ! Nos enseignants doivent vraiment avoir honte d’appeler à une année blanche. Mais l’État doit rester extrêmement ferme là dessus : s’ils refusent de reprendre les cours le 2 juin et de terminer tous les examens prévus, leurs salaires doivent être immédiatement coupés. Il n’y a aucune négociation là-dessus…

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