Les 12 travaux d’Hercule du prochain président de la République (Alioune Diawara*)

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Le rideau est tombé sur la vraie fausse crise institutionnelle ourdie par le futur ex-président. En effet, le Conseil constitutionnel vient d’humilier Macky SALL en désavouant de la façon la plus ferme et la plus éloquente les conclusions d’un simulacre de dialogue que le président a voulu imposer au peuple sénégalais. Encore une fois, Macky SALL aura bu le calice jusqu’à la lie, avec pour seule consolation que les « Sages » ont acceptée, à savoir de se ranger à la convocation par décret le corps électoral, le 24 mars 2024.
Le toujours président (jusqu’au 02 avril 2024) s’est résolument tourné vers son camp en lambeaux, mutatis mutandis (en changeant ce qu’il faut changer) pour espérer encore gagner ou faire gagner la prochaine élection présidentielle par le « banni » Amadou BA. Pour autant, Socrate a t-il enfin bu la cigue ? Que nenni, car le vaisseau sacré n’est pas encore revenu de Délos disent certains observateurs, considérant que le président-putschiste (Pr Mary Teuw Niane) ou président-politicien (Pr Mody Niang) nous prépare encore quelques coups fourrés ou foireux dont il a le secret.

Faut-il croire que le président Macky SALL s’est acheté une conduite et qu’il est résolu à créer les conditions d’une élection transparente et conforme aux aspirations du peuple sénégalais ? Il vient peut-être de donner des gages, en redonnant à Ousmane SONKO te Bassirou Diomaye FAYE le droit de revivre normalement. Vive la liberté !
Pour l’heure, les 19 candidats viennent de quitter les starting-blocks pour se lancer à la conquête des suffrages des électeurs du pays de Ndoumbêlane. Qui parmi eux sera le prochain champion, tant cette élection est ouverte et inédite : elle est ouverte, car il y a de la qualité parmi les candidats dont les profils sont divers et variés ; elle est inédite, car c’est la première fois de notre histoire que le président en exercice ne se représente pas et que son principal opposant, du moins le plus populaire et plébiscité par les sondages de tous les marchés du pays (de Sandaga en passant par Tilène, HLM 5, Pikine, Thiaroye jusqu’au marché Saint-Maure des Fossés à Ziguinchor) ne participe pas à l’élection la plus importante de notre pays.

En tous les cas, le prochain président doit se confronter aux « 12 travaux travaux d’Hercule » pour satisfaire les demandes sociales de ses compatriotes. Ces derniers n’attendent pas de lui qu’il soit doté d’une puissance divine comme Hercule pour redresser le pays. Il n’aura certainement pas de baguette magique, mais il devra prendre son courage à deux mains et nous promettre « du sang et des larmes » durant sa première mandature, tant le chantier est énorme et le chemin difficile pour l’arpenter, mais comme disait le philosophe Sören Kierkegaard « ce n’est pas le chemin qui est difficile, mais c’est le difficile qui est le chemin ». En revanche, notre futur président doit vivre avec l’impatience grandissante des « goorgorlou », qui en ont assez de se faire rouler par des politiciens crapuleux de tous bords, qui depuis de nombreuses années confondent leurs biens personnels avec les deniers de l’ Etat , sucent le sang du peuple sans jamais se rassasier.

Que faut-il attendre du futur président de la République alors ? Tout, tou y compris l’impossible ! Et pourquoi donc ? Parce que le pays est sens dessus-dessous, fracturé et divisé comme jamais par 44 ans de mal gouvernance, de gabegie financière et de corruption endémique (de Abdou Diouf à Macky Sall en passant par Abdoulaye Wade le père du Soppi). Voici la feuille de route du futur « roi du pays », car tous les présidents africains se prennent tous pour des rois investis par Dieu le père, nous poussant à croire que « ngüur yalla mo koy diohé » (le président est dépositaire du pouvoir divin).

Sous ce rapport, le président sera attendu sur 12 fronts : la sécurité, l’emploi des jeunes, les droits des femmes, la santé, l’ éducation, la justice, la réforme des institutions, les infrastructures, la gestion des ressources minières, la gestion des ressources naturelles (agriculture, élevage et pêche), les nouvelles formes de solidarités,et la préservation de l’environnement (lutte contre le réchauffement climatique).

I – La sécurité pour tous et partout

Elément nécessaire voir indispensable du Vivre Ensemble, la sécurité des Sénégalais doit être au cœur des préoccupations majeures du prochain président de la République. L’actualité criminelle brûlante tel que l’assassinat du chauffeur du bus Tata sur la VDN, Mahécor Ndiaye, il y a quelques jours, ajouté à l’agression sauvage dont a été victime la journaliste Maïmouna Ndour Faye, est la preuve que les délinquants ne respectent pas la trêve des confiseurs alors que le pays est en pleine campagne électorale.

Pour autant faut-il en conclure que le Sénégal est un pays violent ? Non, assurément non, mille fois non. Faut-il confondre insécurité et sentiment d’insécurité ? Certes, il est du rôle de l’ Etat de veiller sur l’intégrité du territoire, sur la sécurité des personnes, des biens et des services ainsi que sur la cohésion sociale, et d’assurer la promotion de la citoyenneté et des comportements civiques. Néanmoins, depuis quelques années, les cas de violences tels que les agressions, vols à mains armées, viols, cambriolages et meurtres se multiplient, notamment à Dakar. L’effectif de la population carcérale est en hausse, passant de 11014 en 2018 à plus de 12617 en 2023 pour 37 établissements pénitentiaires selon Africa Check, organisme de surveillance des prisons en Afrique (publication du 31 mai 2023). Ne sont pas compris dans ce chiffre tous les délinquants en attente de leur jugement.

Les Sénégalais relèvent un sentiment d’insécurité dans leurs quartiers et dans une moindre mesure la crainte de subir un crime dans leurs propres maisons. Cette inquiétude est encore plus élevée en milieu rural, les moins instruits et les plus pauvres. A coté de ce sentiment d’insécurité, les citoyens déplorent l’inégalité devant la justice et l’impunité des officiels qui commettent des crimes.
Comment faire reculer ce sentiment d’insécurité ou l’insécurité elle-même ? Force doit rester à la Loi, car les honnêtes gens n’ont pas à pâtir des agissements de quelques bandes armées qui sillonnent le pays pour commettre leurs forfaits et disparaître dans la nature. Il faut accroître le nombre de commissariats de Police et de brigades de Gendarmerie dans tout le pays d’une part (1 quartier, un poste de police) et renforcer les effectifs de défense du pays. L’image gravement écornée des FDS (Forces de Défense) par les émeutes de mars 2021 et juin 2023, doit être rapidement corrigée. Cela passe par la formation des acteurs sur le terrain pour en faire une police citoyenne et républicaine, car rien, absolument rien ne doit conduire les FDS à tirer à balle réelle sur une population qui manifeste son mécontentement dans la rue. Bien entendu, il n’est pas question de mettre un policier ou un gendarme derrière chaque « goorgorlou » mais plutôt d’effectuer des sorties régulières sur le terrain pour repérer et éliminer les « zones de non droit » comme certains quartiers de Pikine, la Corniche Est, la Corniche Ouest, Soumbédioune, Colobane, Yarakh, etc…Cela ne doit pas non plus encourager les violences policières dans l’exercice de leurs fonctions.
Le futur président doit s’attaquer à la croissance démographique de la région de Dakar avec une urbanisation sauvage source de mal vivre pour les populations de certains centres urbains comme Guédiawaye, Parcelles assainies, Grand Yoff, Keur Massar, Rufisque, Malika, Thiaroye, Diamaguène, Yeumbeul, etc…Les rue de ces localités sont devenues de véritables coupe-gorges où il est déconseillé de s’attarder la nuit tombée.

Que dire de la délinquance routière ? Dakar est devenue une ville accidentogène en raison des incivilités notoires de tous les usagers de la route, avec un parc automobiles vieillissant et des véhicules qui sont de véritables engins de mort. Le respect du Code de la Route ne fait plus partie de nos mœurs et ceux qui s’y risquent se font hurler dessus et insulter comme des rats morts. Il n’est pas rare de voir deux automobilistes s’enguirlander et même en venir aux mains pour un refus de priorité ou pour deux tôles de véhicules légèrement froissées. Dakar est l’une des rares capitales au monde à ne plus avoir presque pas de feux tricolores en état de marche et respectés par les usagers de la route. Il y a des embouteillages à toutes les heures de la journée et dans presque tous les quartiers de la ville.
Il faudra mettre de l’ordre dans cette mégalopole, pour éviter que la capitale se transforme en jungle, ou en « far-west » où, seuls peuvent survivre les citoyens capables de s’offrir une garde prétorienne, une société de vigiles ou des caméras de surveillance dernier cri et pourquoi pas des nervis.

Non Monsieur le prochain président, il n’y a pas de développement possible sans ordre, ni sécurité.

II – L’emploi des jeunes
« Du travail pour la jeunesse, ici et maintenant » ; cela doit être le slogan du prochain PR. Celui-ci doit donner des gages à notre jeunesse, qui est en déliquescence ces dernières années. Y a t-il une sorte de fatalité qui pousserait nos jeunes à se ruer vers l’océan pour aller chercher bonheur ailleurs à bord de bateaux-mouroirs ? Pourquoi actuellement, beaucoup d’entre eux ont choisi de s’envoler vers le Nicaragua pour tenter ensuite de rejoindre le pays de l’Oncle Sam (USA), au péril de leurs vies ? C’est parce que la jeunesse du pays ne croit plus aux sirènes des hommes politiques de tous bords, je devrais dire des politiciens ou pire des politicards.
Oui, Monsieur le prochain PR, le chômage est une bombe à désamorcer. Selon une étude réalisée récemment par l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie 15,7% des Sénégalais âgés de 15 ans ou plus sont en quête d’un emploi, dont 18,6% en milieu urbain. Ces statistiques ne tiennent évidemment pas compte de ceux, plus nombreux, sans aucune qualification professionnelle. Chaque année, environ 200.000 diplômés arrivent sur le marché du travail, qui a du mal à les absorber.
La question de l’emploi des jeunes est une affaire sérieuse, qui si elle n’est pas prise à bras le corps très rapidement pourrait devenir l’adversaire politique le plus redoutable pour le prochain locataire du palais Léopold Sedar Senghor. Il est déjà clair que le prochain PR et son gouvernement n’auront pas de baguette magique pour, en l’espace d’un mandat de 5 ans, assurer le plein-emploi et résorber le chômage endémique des jeunes. Ils doivent cependant créer les conditions favorables à l’émergence d’emplois nouveaux ou traditionnels. La tâche est ardue, car les experts tablent sur une croissance de 9 à 10% pendant au moins une décennie, alors que celle-ci oscille actuellement entre 5,8 et 7% selon le FMI. Mais les structures de notre économie actuelle sont-elles prêtes ? Les observateurs pointent le fait que les investissements des grandes firmes internationales, ainsi que les emprunts internationaux, restent les principales sources de croissance du pays. Ce qui n’est ni inclusif, ni soutenable.

Pour y arriver « il faut mettre en place des politiques cohérentes de soutien au tissu de PME et au secteur primaire, afin qu’ils soient les principaux générateurs de cette croissance » selon El Hadj Alioune Camara, économiste-chercheur à l’université de Thiès.
En effet, les PME et le secteur primaire représentent des gisements d’emploi à expérimenter, à condition d’investir massivement et rationnellement, avec des objectifs clairement définis et facilement atteignables. Il ne sert à rien de raisonner comme des funambules, mais d’attaquer le mal à la racine. Le prochain PR doit faire mentir tous ceux qui nous bassinent en longueur de journée avec des méthodes ou des théories venues d’ailleurs et qui ne tiennent pas compte de nos réalités locales. Les « dragons » (Japon, Taïwan, Corée du Sud et Singapour) ne sont pas sortis de la misère en singeant les pays occidentaux, mais plutôt en adaptant leurs structures à leurs réalités et en faisant preuve d’une grande imagination de l’esprit.

Oui, Monsieur le prochain président, vous devez redonner à la jeunesse sa fierté, réinventer un « nouveau type de jeunes » Sénégalais , qui ont le « djom » chevillé au corps pour redessiner les contours d’un Sénégal indépendant et prospère ; dans « l’ancien monde » de Macky Sall, certains auraient dit Sénégal émergent.
Dans un pays où le SMIC est à 64.223F CFA (97,90€) , qu’on ne vienne pas nous dire qu’il est impossible de créer des centaines de milliers d’emplois, chaque année, pour la jeunesse en injectant quelques petits milliards dans l’artisanat, le petit commerce, les PME. Si ça bloque, c’est tout simplement que l’ascenseur social ne fonctionne pas ou ne fonctionne plus. Il faut juste arrêter de jeter des milliards par la fenêtre, comme le fait l’actuel président.
Prochaines étapes: l’émancipation de la femme, l’éducation, la santé.

(*) juriste et militant syndical à Bordeaux, enfant de Ndoumbélane

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