La Coordination des Associations de Presse (CAP) a appris, via le communiqué du Conseil des ministres du mercredi 3 juin, les nominations du doyen Alioune Dramé au poste de Président du Conseil d’Administration de la Maison de la Presse et de Bara Ndiaye, qui en est devenu le Directeur général.
La CAP adresse ses félicitations à ces deux confrères.
Toutefois, la CAP s’indigne de la violation du « consensus » qui avait jusque-là prévalu entre les acteurs des médias et le ministre de la Culture et de la Communication, M. Abdoulaye Diop.
En effet, le mardi 11 juin 2019, lors d’une première audience avec la CAP ( SYNPICS, le CDEPS, le CORED, l’APPEL, la CJRS, l’UNPJS, le CTPAS et l’URAC) Abdoulaye Diop avait demandé aux organisations professionnelles des médias de surseoir au mot d’ordre de boycott de plusieurs années de la Maison de la Presse. Le ministre avait plaidé pour que les acteurs désignent les membres devant représenter le patronat et les travailleurs au Conseil d’administration, et avait beaucoup insisté sur la nécessité de donner vie à ce bel édifice. Il a même été retenu que d’autres acteurs puissent être cooptés pour « corriger » le décret qui ne prévoit que deux organisations (Synpics et Cdeps) comme membres du CA.
Faisant alors confiance au ministre, et dans un souci d’apaisement, les acteurs des médias avaient alors accepté de surseoir au mot d’ordre de boycott de la Maison de la Presse.
Le ministre avait ainsi pris l’engagement de proposer au président de la République que le poste de président du conseil d’administration soit dévolu aux acteurs. Des engagements fermes ont, dans la foulée, été pris pour une application effective du Code de la presse et le démarrage des travaux sur les autres projets du secteur des médias.
Depuis lors force est de constater qu’il n’y a aucune avancée notable dans le secteur et M. Abdoulaye Diop joue au maître-boulanger qui a réussi du reste à enfariner toute la presse. L’exemple le plus patent est la répartition opaque et en toute violation des règles de transparence et de bonne gouvernance de l’aide à la presse.
Déjà avec Abdoulaye Bibi Baldé, alors ministre de la Culture et de la Communication, la CAP avait remis au ministère toute la documentation prouvant que le site est une propriété du SYNPICS. C’était la volonté du chef de l’État d’alors de donner aux acteurs des médias une maison de la presse, financée et équipée par l’État.
Depuis, cet édifice a été confisqué en excluant les acteurs des médias qui en sont les propriétaires légitimes. Cela va à l’encontre de tous les exemples des maisons de la presse en Afrique de l’Ouest et ailleurs.
Aujourd’hui, face au refus du gouvernement de restituer la Maison de la Presse, la CAP se voit obligée de réaffirmer le boycott de cette institution qui n’est nullement conforme à l’esprit qui a motivé sa création.
La CAP a élaboré un plan d’actions pour la restitution de la Maison de la Presse aux acteurs des médias. D’autres actions seront menées pour atteindre cet objectif.
De tous les acteurs sociaux, la presse semble être le mal aimé du régime actuel. Sinon comment comprendre une rupture si bruyante du consensus qui a guidé à l’érection de la plus belle et imposante maison de la presse d’Afrique de l’ouest ? Une maison de la presse peut-elle ne pas être gérée par les acteurs à qui elle est dédiée ?
Si le Président de la République en nomme le Directeur Général du fait du statut d’Epic de l’édifice, il est incompréhensible que le Conseil d’Administration, organe de gouvernance ne soit pas dirigé par les acteurs. Pis, ce Conseil ne devrait compter que deux membres issus des acteurs pour 9 fonctionnaires ! Ne s’agit-il alors pas d’une maison des fonctionnaires ?
Avec une enveloppe de 5 milliards pour sa construction et des contributions financières de plus d’un milliard depuis 2012, la Maison de la presse ne devrait pas déroger à la règle induite qui veut que des structures du genre voient les acteurs et bénéficiaires inclus dans sa gestion.
A l’image de l’IPRES, de la CSS, et même dans une moindre mesure de la Sodav, la maison de la presse devrait voir son Conseil d’administration constituée majoritairement d’acteurs des médias et au moins la présidence de celui-ci assuré par un candidat désigné par les mêmes acteurs.
Fait à Dakar, le 5 juin 2020.