Le président ivoirien sortant Laurent Gbagbo n’est plus en mesure de payer ses fidèles et ses jours à la tête de son pays sont désormais comptés, a-t-on estimé mercredi de source diplomatique française.
La France est persuadée que le vent a maintenant tourné en faveur d’Alassane Ouattara, qu’elle considère comme le vainqueur de l’élection présidentielle avec la communauté internationale, alors qu’il est bloqué depuis le second tour du scrutin présidentiel du 28 novembre dernier dans un hôtel d’Abidjan.
« Les sanctions marchent, Gbagbo a perdu toute capacité de faire fonctionner le pays », a dit un diplomate de haut rang. « Le pouvoir de Gbagbo sur son économie est en train de disparaître. »
Les fonds obtenus lors du « casse » réalisé par Laurent Gbagbo sur les avoirs de la banque centrale sont en voie d’être épuisés et les sanctions internationales empêchent les exportations de cacao, principale ressource du pays, a-t-il ajouté.
Ce diplomate affirme que des sacs de cacao pour une valeur de 1,5 milliard de dollars s’accumulent sur les quais du port d’Abidjan faute de pouvoir être vendus à l’étranger.
La décision de Laurent Gbagbo, lundi, de spolier les entreprises des filières cacao et café présentes en Côte d’Ivoire semble inopérante, dit-il.
Après les Etats-Unis, le ministère français des Affaires étrangères a condamné mercredi cette décision, qu’il juge illégale puisqu’elle émane « d’autorités qui ne sont pas légitimes pour prendre des décisions au nom de l’Etat ivoirien ».
« Les salaires de la fonction publique ne peuvent plus être payés », a ajouté le diplomate en expliquant que le moral des soldats encore fidèles à Gbagbo est d’autant plus bas qu’ils ont été incités à tuer des femmes qui manifestent.
FIN DE PARTIE
« Ses jours en tant que dirigeant qui peut payer ceux qui le soutiennent sont comptés », a-t-il dit. « Tout cela commence doucement à ressembler à une fin de partie pour Gbagbo. »
Une série de manifestations pour le départ de Laurent Gbagbo a réuni mardi plusieurs milliers d’Ivoiriennes à Abidjan, où quatre personnes ont été tuées par les forces de l’ordre.
La semaine dernière, sept femmes avaient été tuées par des partisans du président sortant lors d’un précédent rassemblement féminin à Abobo, quartier réputé favorable à Alassane Ouattara.
Des centaines d’Ivoiriens ont trouvé la mort depuis que les Nations unies ont reconnu la victoire de Ouattara. Des dizaines de milliers d’autres ont fui vers le Liberia voisin, où l’on craint un débordement du conflit ivoirien.
« Il devra rendre des comptes, la CPI (Cour pénale internationale) devra être saisie », a dit le diplomate français.
Le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a appelé l’Union africaine (UA), qui est réunie mercredi et jeudi au sommet à Addis-Abeba, à prendre ses responsabilités.
« L’Union africaine doit faire prévaloir la voie de la raison contre la folie meurtrière », a-t-il dit mercredi à l’Assemblée nationale lors des questions d’actualité.
Laurent Gbagbo, qui devait se rendre à Addis-Abeba dans le cadre d’une médiation de l’UA, y a finalement renoncé, a déclaré mardi l’un de ses conseillers interrogé par Reuters.
Mais Alassane Ouattara a pu se rendre dans la capitale éthiopienne et les diplomates français se montrent confiants dans sa capacité, à son retour, à rejoindre l’hôtel du Golf grâce à l’aide des hélicoptères de la force de l’Onu présente à Abidjan.
Avec Laure Bretton et John Irish, édité par Gilles Trequesser
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