Les manœuvres qui ont emporté l’ambassadeur Rufin

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NICOLAS NORMAND S’INSTALLE A DAKAR LE 1ER JUILLET

Le jeu subtil entre l’Elysée et le Palais de l’Avenue Léopold Sédar Senghor continue de plus belle. C’est au lendemain de la passation symbolique de la base militaire de Bel-Air au Sénégal que l’annonce du départ de Jean Christophe Rufin est tombée. La décision a été prise, à l’issue du conseil des ministres à l’Elysée et signifiée à ce dernier par un télégramme lapidaire. Celui qui représente l’Etat français à Dakar depuis le 20 juin 2007, quitte, après presque trois ans de fonction pour être remplacé par Nicolas Normand qui prend les commandes de l’ambassade, le 1er juillet prochain.

Ce départ prématuré de Rufin ressemble à un film inachevé. L’académicien tenait à organiser le 8 août prochain une cérémonie au Centre culturel française le 8 juillet prochain. Une « politesse » de sa part pour présenter son ouvrage, Katiba, aux sénégalais. Rufin devra ainsi reprogrammer cette cérémonie. Il s’agit bien là d’un élément qui renseigne sur fait : ce dernier a bien été surpris par la rapidité d’exécution de la décision de l’Elysée de le faire remplacer pour Normand, qui était en poste à Brazzaville. Mais c’est surtout là une partie dans la bataille féroce que se mène deux clans à l’Elysée : celui de l’avocat Bourgi parrainé par Claude Guéant et le camp du ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner. La lutte à mort, par lobbies interposés que se mènent ces deux camps a atteint son pic, après la défaite du parti de Nicolas Sarkozy aux dernières élections municipales en France. On a vite fait de voir dans la chute de la cote de popularité du leader de l’Ump, une des conséquences directes des « mauvais conseils » de Claude Guéant. La bataille est féroce et Dakar s’est très vite transformée en ring entre ces deux camps. Mais la goutte d’eau qui a fait déverser le vase, c’est ce commentaire de Parant sur la situation politique au Sénégal ; repris la presse française : « la lutte pour la succession va être extrêmement vive et susciter des tensions. (…) Il y a un risque d’explosion sociale et donc politique, extrêmement élevé. Les deux années à venir vont être cruciales pour le Sénégal. » Venant d’un diplomate chevronné comme Parant, que l’Elysée est parti dénicher au Liban où Chirac l’avait casé avant de quitter le pouvoir, cette prophétie vaut bien son pesant d’or. Parant connaît bien le Sénégal pour y avoir servi comme ambassadeur, après le très critiqué Didier Roisin et avant Rufin avec qui il entretient de bonnes relations. Et sans doute, le spécialiste des questions américaines, Jean David Levitt, qui est le conseiller diplomatique N°1 de Nicolas Sarkozy, est en phase avec son adjoint Parant, avec qui il s’entend également à merveille. Les deux conseillers diplomatiques, aguerris par les nombreuses missions qu’ils ont eu à mener au nom de la France à travers le monde, émettent sur la même longueur d’onde que le Quai d’Orsay. Mais ces propos de Parant installent un malaise entre Dakar et Paris. L’avocat Bourgi, qui a ouvert les portes de l’Elysée à Karim Wade, est très remonté contre le conseiller diplomatique de Sarkozy, qui a ainsi osé mettre du sable dans son « couscous ». En Afrique comme en France, ce mot garde tout son sens.

Depuis, Dakar a crispé son discours contre Paris. Et par divers canaux, on a fait comprendre à Sarkozy qu’il serait dans l’intérêt des deux pays que Rufin quitte le plus rapidement possible et qu’il soit remplacé par quelqu’un de plus conciliant. Cette demande, nous assure-t-on, avait même agacé les services diplomatiques français. Mais l’Elysée a choisi de jouer la carte de ses intérêts vitaux ; la France n’ayant pas encore fini de négocier avec le Sénégal, sur de nouveaux accords de défense. La partie est loin d’être épuisée.
nettali.net

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