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L’Etat nous ôte le bout de pain de la bouche (Par Pape Ndiaye)

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Le gouvernement a finalement cédé à la flambée des cours du blé sur le marché international en augmentant le prix du pain. Ce alors qu’il pouvait trouver d’autres mécanismes pour satisfaire la revendication des meuniers et boulangers que de faire payer les pauvres consommateurs sénégalais.

Surtout pour un produit de survie comme le pain, base de tous les « repas » de fortune. Il se mange à toutes les sauces et est assaisonné à tous les goûts. D’où les multiples variations autour de cet aliment pour « goorgorlous » fait avec de la farine : Du « pain-thon » au « pain-boulettes » en passant par le « pain-ndambé », le « pain-chocolat », le « pain-beurre », le « pain-mayonnaise » ou le « pain-omelette », il y en a pour tous les goûts ainsi que pour toutes les bourses ! Objection ?

Même le pain « sec » dépourvu de sauce existe dans certains foyers ayant atteint le seuil de l’extrême pauvreté. Hélas, au Sénégal des années Wade et Macky, le dîner du soir autour d’un grand bol tel qu’on le connaissait dans les décennies 60-90 voire 2000 n’existe plus. Et le bout de pain qui nous restait, jusqu’à hier, a été ôté de notre bouche car devant être vendu beaucoup plus cher : 175 fcfa. A prendre ou à mourir de faim ! Evidemment, à prendre la mort dans l’âme car ce petit morceau parvient à tromper notre faim du soir. Or, le pain est un aliment ancré dans nos habitudes alimentaires.

Et si le Sénégal n’a jamais connu des émeutes du riz, c’est parce que nos compatriotes ont toujours pu se rabattre sur le bon vieux « mbourou » ! Mais si le riz reste et demeure l’aliment de base par excellence des Sénégalais, le pain constitue son compagnon inséparable dans nos ventres ! Un compagnon idéal et incontournable puisque jamais un repas sans pain. Cela est valable aussi bien pour les riches que pour les pauvres. Surtout pour les pauvres d’ailleurs puisque, dans les ménages les plus démunis, le pain constitue le principal complice des repas en tartes : petit déjeuner, déjeuner et diner. D’où des millions de baguettes de pain vendues chaque jour à Dakar et sa banlieue.

De même que dans les villages les plus reculés où le « tapalapa » ou pain traditionnel se vend comme de petits… pains. Sans compter les miches de pain rassis collectées dans les boulangeries et expédiées dans les villages où ils retrouvent une seconde vie dans les panses des… Ndiobènes. Il s’y ajoute qu’avec la multiplication des recettes de tartes sucrées ou salées, la dépendance alimentaire vis-à-vis du pain s’est aggravée. Comme quoi, les Sénégalais ne peuvent plus vivre sans pain. Pour eux, c’est le pain ou la mort !

Sous d’autres cieux, le pain ou la mort !

Sous d’autres cieux, c’est la mort comme ce fut le cas lors des émeutes du pain (1983 et 1984) en Tunisie où des dizaines (70) de personnes ont été tuées dans des manifestations contre la hausse du prix du pain. Et malgré la proclamation de l’état d’urgence et le couvre-feu décrétés par le président Habib Bourguiba, les émeutes se sont poursuivies dans tout le pays jusqu’à faire vaciller le régime. Et pour sauver sa peau et éviter de se faire « tartiner » par le pain de la rue, le président de la République avait convoqué la télévision nationale à 5 h du matin pour annoncer avoir annulé toutes les augmentations du prix du pain !

En Algérie aussi, 31 ans avant les actuelles manifestations pour exiger que le Système (Bouteflika en tête) dégage, il y avait eu en 1988 des émeutes du pain qui avaient fait une centaine de morts. Comme quoi, on ne plaisante pas avec le pain ! Récemment, au Soudan, c’est le triplement du prix du pain qui a d’abord fait trembler le régime soudanais jusqu’à provoquer la chute du président Omar El-Béchir. Cette augmentation avait provoqué un soulèvement des populations dans un pays dirigé d’une main de fer depuis plus de 30 ans par un dictateur féroce.

Certes, le pain n’est pas le riz et comparaison n’est pas raison ! Seulement, ils sont tous les deux des aliments « siamois » qui volent quotidiennement à nos secours. Autant de choses qui font que l’Etat devait tout augmenter sauf le prix du pain. Car, gare à la colère des « Ndiobènes », elle peut être terrible !

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