En nous rendant le terrain sur la corniche, vous nous ferez la plus belle des preuves d’amitié.
Madame l’Ambassadeur,
Je voudrais, dès l’entame de mon message, vous présenter mes compliments et vous dire le profond respect que j’ai pour vous-même et pour le pays que vous représentez chez nous.
J’écris cette lettre pour partager avec vous le sentiment d’un patriote sénégalais à propos du terrain que notre gouvernement a accordé à votre pays sur le domaine public maritime de la corniche ouest de Dakar. Si cela peut vous rassurez, sachez que nous comprenons parfaitement que votre pays n’a aucune responsabilité dans les actes qui ont occasionné ce malheureux différend. Je vous ai entendu il y a quelques jours exprimer votre gêne de voir le nom de votre pays cité dans une affaire de cette nature. J’en suis aussi peiné que vous. Et je suis sûr que de nombreux sénégalais partagent cette peine.
Vous avez dit que le terrain de la corniche est donné par le gouvernement du Sénégal à la Turquie suite à l’attribution au Sénégal d’un terrain d’une superficie équivalente dans un prestigieux quartier d’Ankara. Cet échange de bons procédés entre votre pays et le mien m’honore au plus haut point car il témoigne de la qualité des relations entre la Turquie et le Sénégal et marque, je l’espère, le point de départ pour la construction d’un partenariat renforcé et mutuellement avantageux entre nos deux pays.
Madame l’Ambassadeur,
Le terrain accordé au Sénégal à Ankara ne se trouve sûrement pas dans un domaine protégé par vos lois. Par respect pour le peuple Turc, votre gouvernement ne donnerait pas au Sénégal ni à aucun autre pays, fut-il le plus puissant, un terrain sur un domaine public maritime.
Notre gouvernement n’a pas le même respect pour nous. Il n’a pas l’ambition de voir sa population marcher sur des promenades bien aménagées le long de l’océan, avec des espaces verts et des aires de jeux pour nos enfants. Nos dirigeants ne rêvent pas de nous voir sortir avec nos familles et proches pour pique-niquer, jouer et discuter afin d’échapper, le temps d’un week-end, à la désagréable vie qu’ils nous ont imposée par leur incompétence. Notre gouvernement a agi par incompétence, peut-être même par intérêt, mais sûrement par irresponsabilité.
J’ai marché sur les rives du Bosphore. J’ai vu les paysages idylliques d’Istanbul et ses environs. J’ai admiré cette ville des mosquées aux minarets majestueux. J’ai pu sentir la joie de vos enfants sur les plages qui s’étendent à perte de vue.
Vous comprendrez, j’en suis sûr, que nous ayons la même ambition pour nous-mêmes.
La procédure d’attribution du terrain est illégale et illégitime. Le mur que vous y ériger est comme une insulte à notre conscience. En le conservant, il sera perçu comme une barrière symbolique qui séparera nos deux peuples.
Je sais, Madame l’Ambassadeur, que vous saurez décrypter le message que je vous adresse et que de nombreux citoyens vous ont déjà adressé. Le gouvernement qui vous a donné ce terrain a été chassé du pouvoir par notre peuple, justement à cause des pratiques nébuleuses, illégales et irrespectueuses. Celui qui l’a remplacé a visiblement soit de la gêne soit un manque de courage politique pour le reprendre. Il préfère se cacher derrière le principe de la continuité de l’Etat.
Vous pouvez mettre tout le monde à l’aise en y renonçant. Dakar a de nombreux autres sites où vous pouvez construire une belle et majestueuse Ambassade, à l’image de la grandeur de votre pays. Quel que soit son emplacement, nous vous y retrouverons avec joie.
Madame l’Ambassadeur, si j’étais vous, je ferai une déclaration publique pour dire que la Turquie rend ce terrain à la population Dakaroise et s’engage à aider la mairie à aménager l’ensemble de la Corniche Ouest pour en faire la plus belle promenade de l’Afrique. Ce serait un merveilleux signe d’amitié.
Dr Cheikh Tidiane DIEYE
Patriote et Citoyen Sénégalais
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