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LIBRE PROPOS: Ne brûlez pas ce pays! (Par Abdoulaye Thiam)

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Le temps d’une victoire, les Lions avaient réuni la classe politique sénégalaise autour d’un trophée continental.
L’euphorie s’est poursuivie jusqu’à l’inauguration du stade Me Abdoulaye Wade. On aurait tous aimé que cette quiétude perdure. Qu’elle s’éternise même. Hélas, nos
hommes politiques ont repris service et réveillé les démons de la division en réinstallant le pays dans une psychose de la violence. Ne se souciant guère de la répercussion de l’évasion russe en Ukraine. Chaque camp bande ses muscles et tente de chauffer l’opinion à blanc. On s’achemine ainsi vers un mortal kombat en perspective des Législatives du 31 juillet prochain et surtout de la Présidentielle de février 2024. Ce qui n’honore guère les acteurs qui, à la place de la force des
arguments avec des discours programmatiques devant sortir le Sénégal de l’ornière, s’adonnent plutôt à des attaques et contre-attaques au bas de pâquerettes. Tout y passe. Mensonges, désinformations, utopies etc. D’un côté, un régime hors la loi. En face, une opposition qui prêche le faux. Etat «hors la loi»

Le parrainage a-t-il favorisé la réélection du Président de la République lors de la Présidentielle du 24 février 2019 ? Ce qui est sûr, c’est que ce filtre que nous avions
qualifié à l’époque de «mal nécessaire» ne devrait plus figurer sur le Code électoral sénégalais parce qu’il «constitue un véritable obstacle à la liberté et au secret
de l’exercice du droit de vote d’une part et une sérieuse atteinte au droit de participer aux élections en tant que candidat d’autre part». Cette sentence est de la Cour de justice de la CEDEAO.
Pour motiver sa décision, le cour avait même rappelé la jurisprudence burkinabé, notamment dans l’affaire Congrès pour la Démocratie et [e Progrès (CDP) contre
l’Etat du Burkina Faso du 13 juillet 2015 où elle a jugé que «le Code électoral du Burkina Faso, tel que modifié par la loi n  0 005-20/ 5/CNT du 07 avril 20/5, est une
violation du droit de libre participation aux élections». En vertu donc de la supranationalité des lois, le Sénégal qui a ratifié le protocole de la CEDEAO, devrait respecter à la lettre ses décisions et refuser d’être estampillé «Etat hors la loi». L’Etat ne peut pas se prévaloir d’un droit d’organiser des élections dans l’illégalité totale. Il ne faut surtout pas se refuser derrière le prétexte plus que fallacieux d’une pléthore de partis politiques. D’autant plus qu’aux dernières élections législatives, des courtiers politiques ont avoué avoir été parrainés et financés par le régime. Quelle honte !
Quand l’opposition prêche le faux !
Si l’opposition sénégalaise a raison de contester le parrainage, en se basant sur la décision de la Cédéao, elle aura tout faux en déclarant que Khalifa Ababacar Sall
sera tête de liste de la coalition Yewwi Askan Wi (YAW).
C’est plus que l’enfumage. Cette opposition est plus que consciente qu’il y a dans notre code pénal des peines dites «infamantes et privatives de liberté». L’ancien
maire de Dakar a perdu ses droits civiques à la suite de sa condamnation définitive dans l’affaire dite de la caisse d’avance. Il a bénéficié d’une grâce présidentielle qui lui a permis de sortir de prison et de vaquer à ses occupations. Sauf que la grâce n’efface pas la peine. Pis, les tenants du pouvoir ont poussé leur machiavélisme
jusqu’à associer la qualité de l’élu à celle de l’électeur.
Une révision plus de deconsolidante puisqu’elle n’avait pour but que d’écarter un candidat dans la course à la Présidence. Soro, Gbagbo, Jean Pierre Bemba, Hama
Amadou : ces cas d’école
Ces peines dites infamantes et privatives de liberté n’ont pas fait dégât qu’au Sénégal. Un petit benchmarking démontre que des exemples font légion en Afrique de
l’Ouest. Nous pouvons citer Guillaume Soro et Laurent Gbagbo de la Côte d’Ivoire, Jean Pierre Bemba en République démocratique du Congo ou encore Hama
Amadou au Niger. Ce dernier, principal opposant nigérien d’alors, arrivé deuxième lors à la présidentielle de 2016, avait été par la suite condamné à un an de prison ferme par la Cour d’appel de Niamey pour son implication dans un trafic international de bébés.
En République démocratique du Congo (RD Congo) la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) avait jugé «irrecevable» la candidature du très populaire
Jean-Pierre Bemba à la présidentielle. Elle avait fondé sa décision sur sa condamnation par la Cour pénale internationale (CPI) pour subornation de témoins. Jean-
Pierre Bemba passait pourtant pour l’un des favoris à la succession du président Joseph Kabila. Ce qui avait ouvert un boulevard à l’actuel président de la République
Félix Tshisekedi, président du parti d’opposition UPDS, et fils de son fondateur, Étienne Tshisekedi, décédé à Bruxelles le 1 er février 2017.
En Côte d’Ivoire également, Laurent Gbagbo et Guillaume Soro ont subi le même sort. Leurs candidatures avaient été invalidées car ils ont tous les deux été radiés des listes électorales après avoir été condamnés par la justice ivoirienne.
L’ancien président et fondateur du FPI, Laurent Gbagbo, qui résidait alors à Bruxelles en attendant la fin de sa procédure devant la Cour pénale internationale (CPI),
avait été condamné par contumace par la justice ivoirienne à vingt ans de prison dans l’affaire de la casse de la BCEAO. En outre, sa déclaration de candidature
n’était pas signée de son nom et, selon les Sages, la signature de son mandataire n’a pas été authentifiée.
Quant à l’ex-président de l’Assemblée nationale et ancien allié de Ouattara, Guillaume Soro, il a pour sa part été condamné à vingt de prison pour recel de deniers publics détournés et blanchiment de capitaux. Khalifa Ababacar Sall et Karim Meïssa Wade ne devraient donc faire partie de la course aussi bien pour les Législatives que pour la Présidentielle que grâce à une loi d’amnistie qui va effacer définitivement les peines qui leur ont été infligées. Or, en réalité, une telle loi risquerait de chambouler l’ordre établi et faussé beaucoup de calculs politiques voire politiciens.

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