Maïmouna Sao (ex-épouse du guide des thiantacounes) – « Cheikh Béthio, notre enfant et moi… »

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C’est une Maïmouna Sao méconnaissable qui a débarqué avant-hier à EnQuête, en compagnie de son fils de 4 ans Serigne Saliou Thioune et de sa mère Sokhna Khadidiatou Niang. Visage émacié, teint noir, regard hagard, port vestimentaire modeste, l’ex-préférée de Cheikh Béthio Thioune a perdu de sa superbe et de sa splendeur. On est loin des années de faste et de paillettes au cours desquelles tout brillait pour elle aussi bien en Aquitaine qu’au Sénégal. Mariée au guide des thiantacounes en 2007, Sokha Maï, comme l’appelaient affectueusement les talibés de Serigne Béthio, est aujourd’hui en instance de divorce avec son Cheikh. Dans cet entretien accordé à EnQuête, elle revient sur son différend avec son ancien marabout et époux, parle de son fils à qui son père refuse, selon elle, de verser la pension alimentaire de 50 000 F Cfa mensuelle. Et se dit prête à se battre pour rentrer dans ses droits.

Vous êtes en instance de divorce avec Cheikh Béthio Thioune, où en est le dossier actuellement ?

Le dossier est en cours. Cela fait un an quand même que les choses n’ont pas bougé. On est toujours au même point. Au début, il voulait avoir la garde de l’enfant. J’ai fait appel et le tribunal m’a confié la garde de notre fils. Le tribunal lui avait instruit de me verser une pension alimentaire mensuelle d’un montant de 50 000 F CFA. On lui avait aussi demandé de me laisser vivre dans notre maison de Touba en attendant que le divorce soit prononcé. Après cela, on a eu deux rendez-vous au tribunal afin qu’il vienne signer des papiers. C’est le tribunal de Mbacké qui gère le dossier. Et jusqu’à ce jour, on n’a pas encore divorcé sur le plan administratif.

Est-ce qu’il verse régulièrement la pension alimentaire ?

Non, il ne le fait pas. C’est ma mère et moi qui nous occupons de l’enfant alors qu’on n’a pas assez de moyens pour cela. Moi, je n’avais rien demandé. C’est lui qui est venu avec son avocat dire au juge qu’il est un ancien fonctionnaire et ne peut verser que 50 mille F Cfa par mois. Et le juge a avalisé cela. Cela date du mois de juin 2014. Mais jusqu’à présent, il refuse de s’exécuter. Il refuse de nourrir son enfant et continue pendant ce temps à organiser des Thiant. Au mois de février dernier, il a appelé l’un des frères de ma mère qui est aussi l’un de ses talibés. Il lui a demandé de me dire de lui envoyer un numéro de compte bancaire ainsi que mon adresse afin qu’il puisse envoyer la pension alimentaire mensuelle. Je n’ai pas voulu lui envoyer mon adresse parce que cela ne me rassure pas. Je lui ai donné le numéro de compte qui, je pense, est largement suffisant. Il n’a pas pour autant réagi depuis lors. Notre enfant est né en 2011 et a aujourd’hui 4 ans. Il doit être scolarisé. Mais je n’ai même pas les moyens de l’inscrire.

Pourquoi avez-vous peur de lui donner votre adresse ?

Parce que quand j’étais à Touba, il envoyait des gens qui m’espionnaient. Ils épiaient mes moindres faits et gestes.

Avez-vous peur qu’on porte atteinte à votre vie ou celle de votre enfant ?

Quelque part oui, mais j’ai surtout peur qu’on viole mon intimité. Quand quelqu’un est capable de vous envoyer des gens surveiller vos faits et gestes, vous devez avoir peur. Ce n’est pas sûr. Ce que je peux lui assurer, c’est que s’il a besoin de voir son enfant, je peux le lui envoyer. Il n’appelle pas et n’a envoyé personne pour cela. Il a mon numéro. S’il voulait voir son fils, il m’aurait fait signe.

Avez-vous entrepris des démarches au niveau du tribunal pour qu’il respecte la décision du juge ?

Non, je n’ai rien entrepris. Car j’ai été obligée de retourner vivre à Mbour. Et c’est un peu loin de Mbacké. Je ne pouvais pas y faire des allers et retours fréquents. Finalement, j’avais arrêté toutes les démarches entreprises au début. Mais là, je me suis renseignée et je compte mener à nouveau les choses. On m’a fait savoir que je peux aller au tribunal de Mbour pour faire ma requête. Aujourd’hui, tout ce que je veux, c’est qu’il s’acquitte de son devoir envers son fils. Je n’attends absolument rien d’autre de lui.

Est-ce que vous échangez avec votre avocat ?

Oui, mais là, je veux changer d’avocat. Parce que s’il s’était bien occupé du dossier, on n’en serait plus là à ce jour. C’est moi qui l’appelle tout le temps pour ‘m’enquérir de la situation. Je ne peux plus continuer ainsi. C’est l’association des juristes du Sénégal qui m’avait mis en rapport avec lui.

Avez-vous informé les membres de l’AJS de cette situation ?

Je ne suis pas retournée là-bas.

Quand on vous a expulsée de votre maison à Touba, vous a-t-on donné une autre maison ?

Non, pas du tout. Le juge n’est pas au courant de ce que je vis. Depuis que je suis sortie de Touba, je n’y suis pas retournée.

Pour vous, qu’est-ce qui retarde le dossier ?

C’est le fait que je n’aie entrepris aucune autre démarche depuis que le juge m’a accordé la garde de notre fils. C’est dû à cela à mon avis. Je n’ai pas les moyens de faire des allers et retours entre Mbacké et Mbour.

Qu’est-ce qui est à l’origine de votre divorce ?

Des gens sont allés lui raconter des choses qui n’étaient pas vraies. J’ai vécu là-bas de 2007 à 2011. Mais comme vous savez, la vie n’est jamais facile quand on vit dans de grandes maisons.

Depuis votre divorce, personne n’a essayé de vous réconcilier ?

Si. Mes parents ont essayé mais cela n’a rien donné. C’est moi-même qui leur ai demandé d’arrêter toutes les démarches.

Quand avez-vous connu le Cheikh?

Je le connais depuis plus de 15 ans. Quand je faisais mon jébëlu (acte d’allégeance) auprès de lui, j’avais à peine 15 ans. Je me suis d’abord mariée à un de ses talibés. Deux ans après, j’ai eu des problèmes avec ce dernier. Et il a alors fait de moi sa cinquième épouse.

Vous habitiez avec vos coépouses ?

Non, mais c’est nous les plus jeunes qui accompagnions le Cheikh lors de ses déplacements.

Vos problèmes à Touba ont commencé quand ?

Le 22 décembre 2014.

Avez-vous des nouvelles de lui depuis votre départ de Touba ?

Non, je n’ai plus de contact avec lui.

Pourquoi votre oncle ne peut pas intervenir en votre faveur ?

Mon oncle est son talibé. Vu la relation qui les lie, il ne peut pas aller lui rappeler ses devoirs. Je comprends qu’il ne puisse intervenir que sur la demande du Cheikh et pas le contraire. L’autre chose est qu’il n’est pas facile de raisonner le Cheikh.

Vous ne connaissez pas ses grands enfants ?

Si ! Je les connais tous. Cependant, aucun d’entre eux n’a jamais essayé quoi que ce soit si ce n’est son fils qui vit en Italie. Il s’appelle Serigne Saliou. Il m’appelait souvent pour prendre de mes nouvelles. Et cela a même été source de problèmes entre lui et son père, m’a-t-on dit. Il m’a appelé pendant le mois de ramadan et m’a dit qu’il voulait voir son petit frère. Quand je suis venue à Dakar, je l’ai appelé pour lui dire que j’étais là et que je pouvais lui amener son frère. Il m’a dit finalement qu’il avait eu des problèmes avec mon père, et donc qu’il préférait attendre encore.

Êtes-vous toujours un talibé de Cheikh Béthio ?

Non. J’ai tourné la page, même s’il soutient toujours être mon marabout arguant du fait que son guide Serigne Saliou Mbacké lui a interdit de mettre fin à un acte d’allégeance d’un talibé. Mais qu’il sache qu’il n’est plus mon marabout ni mon mari. C’est lui qui a pris l’initiative d’amener le dossier de la garde de notre fils au tribunal, il doit donc en assumer les conséquences. Je veux juste qu’il fasse ce qu’il doit faire. Ma mère et moi demandons juste le respect du versement de la pension alimentaire mensuelle de l’enfant. Je suis fatiguée de même que ma mère. Cheikh Béthio dit partout qu’il prend bien soin de son fils et lui envoie chaque mois 300 mille F Cfa. Ce qui ne correspond pas à la réalité. C’est même de la diffamation.

SOKHNA KHADIDIATOU NIANG (MERE DE SOKHNA MAI)

‘’A l’approche de la Korité de 2014, je suis allée à Touba et j’ai vu la situation dans laquelle vivaient ma fille et mon petit-fils. J’ai dit à ma fille que si jamais elle savait que le Cheikh était à Touba, qu’elle aille le voir pour lui réclamer la pension alimentaire de son fils. Parce que moi sa mère qui les soutiens, je suis fatiguée. C’est quand ma fille est allée le voir qu’il a commencé à lui créer des problèmes. Ce jour-là, il l’a traitée de tous les noms d’oiseau. J’étais là-bas pendant le magal, chez ma sœur.

Cheikh Béthio avait coupé l’eau et l’électricité et avait même barricadé les portes. Quand j’ai vu cela, j’ai dit à ma fille qu’il valait mieux que je prenne le mobilier et qu’on s’installe ensemble chez moi. Elle m’a rétorqué qu’elle ne pouvait pas faire une telle chose vu que le dossier de divorce était en procédure. Elle ne voulait pas qu’on l’accusât d’abandon de domicile conjugal. C’est une semaine après le magal qu’il y a eu ce grand problème qui a fait qu’on l’a expulsée de Touba. C’est pour cela qu’elle est partie se réfugier quelque part au Sénégal. Ma sœur a voulu régler les choses à l’amiable mais Cheikh Béthio l’a humiliée. C’est ainsi que le dossier est arrivé au tribunal.’’

EnQuête

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