Malick Gakou, coordonnateur du front Mankoo Watù Senegaal : «Ce gouvernement sent le gaz»

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Président du Grand parti (Gp) et coordonnateur du Front pour la défense du Sénégal/Mànkoo Wattu Senegaal, Malick Gakou analyse la situation de la plateforme de l’opposition, à la  lumière de la marche réprimée du 14 octobre dernier, et du renouvellement de son mandat, qui a fait débat. Gakou – qui annonce une nouvelle marche début décembre – revient aussi sur l’affaire Petro Tim et le processus électoral. Entretien.

Quel bilan faites-vous de la marche du Front « Mankoo wattu Senegaal »?
La marche historique du Front pour la défense du Sénégal/Mànkoo Wattu Senegaal a connu un succès éclatant, malgré la volonté répressive du gouvernement de Macky Sall. La dynamique répressive s’est exprimée à deux niveaux. D’une part, en cassant la mobilisation à travers le blindage des artères d’accès. Et d’autre part, par la violence exercée sur nous. Nous sommes satisfaits et nous reviendrons plus forts, car rien ne peut arrêter notre  détermination à défendre les intérêts supérieurs de la patrie.

Pourquoi avoir bravé l’arrêté préfectoral?
Je suis abasourdi de voir comment le pouvoir cherche à noyer son impuissance face à la force de l’opposition en voulant manipuler l’opinion publique. Nous avons été agressés délibérément au niveau même de l’itinéraire autorisé par le préfet. Les images des télévisions en attestent. On a voulu nous empêcher d’accéder à la Place Doudou Ndiaye Rose qui était, pourtant, dans l’arrêté préfectoral, notre point de chute. C’est tout simplement scandaleux
combien les donneurs d’ordres ont voulu nous massacrer, nous humilier et nous vouer aux gémonies. Le jour de la marche du 14 octobre 2016, même si on s’était limité à la Place de l’Obélisque, le pouvoir allait nous agresser. C’était un plan savamment ourdi pour nous liquider, nous intimider et nous donner, comme ils disent, une leçon mémorable. Ces gens n’ont pas de culture démocratique et leur aversion à la critique est illustrative de la manière dont ils gèrent ce pays. Ils veulent gérer un pays couché. C’est inacceptable, et l’opposition fera face, au prix de tous les sacrifices. Nous remercions le peuple sénégalais, les forces vives
de la Nation et la diaspora, pour le soutien constant et résolu.

Le Président Macky Sall a félicité le ministre de l’Intérieur et le préfet de Dakar pour la  répression de votre marche. Vous attendiez-vous à une telle répression ?
On s’attend à tout avec ce régime. Mais tout ça, c’est la preuve absolue de l’autoritarisme qui menace la République. Mais, soyez sûr que les patriotes seront debout pour faire face. Cette répression, c’est aussi la marque de l’impuissance du régime en place face à notre  mobilisation et notre engagement sans faille pour le Sénégal.

Pensez-vous véritablement que les libertés sont menacées au Sénégal ?
De sérieuses menaces pèsent sur les libertés publiques qui sont des acquis constitutionnels.
Et les cas de Nafi Ngom Keïta et Ousmane Sonko ne sont que le côté visible du patchwork totalitaire.

Et aujourd’hui, quelles sont les perspectives du Front ?
Au terme de l’évaluation de la marche, la Conférence des leaders du Front pour la défense du Sénégal/Mànkoo Wattu Senegaal a retenu de poursuivre le combat à travers des visites de sensibilisation et d’information auprès des représentations diplomatiques, la finalisation du dossier de la plainte en relation avec nos avocats qui s’y attèlent avec panache et rigueur, la
tenue d’un meeting, en début novembre, et l’organisation d’une marche en début décembre. Nonobstant ce programme, chaque membre se battra au sein de son organisation pour faire triompher les objectifs de notre plan d’actions qui s’articule autour du triptyque : démocratie, liberté et sauvegarde de nos ressources naturelles.

Mais, qu’en est-il réellement de l’unité de cette opposition ?
Face à un pouvoir qui ne recule devant rien,  l’opposition n’a aucun autre choix que de se regrouper, s’unir, mutualiser ses forces pour amorcer la résistance et triompher de la  dictature qui s’installe progressivement dans notre pays. C’est tout le sens qu’il faut donner à notre action politique pour le Sénégal à travers la plateforme du Front.

Est-ce que la question de la prorogation de votre mandat de coordonnateur a suscité un  certain malaise ?
Il n’y a aucun malaise au sein de notre Front. Au terme de mon mandat, j’ai remis ma démission à la Conférence des leaders qui a décidé souverainement de modifier le Code de conduite et de prolonger mon mandat afin de finaliser le plan d’actions en cours d’exécution. Je remercie mes pairs pour leur confiance renouvelée, et je ne ménagerai aucun effort pour la réussite de la charge. Nous sommes une opposition plurielle regroupant plus d’une centaine d’organisations et de personnalités qui marquent chacune à sa manière sa vision de notre démarche commune. C’est une tâche à la fois hybride et complexe, au regard de la diversité des convergences autour de « Mànkoo Wattu Senegaal ». Nous sommes conscients de cette  situation, et c’est pourquoi nous tirons les substrats de nos décisions sur un consensus fort au sein de la Conférence des leaders. Pour ma part, j’abhorre la pensée unique, et chacun doit garder sa liberté de ton, en toute responsabilité. Rien ni personne ne pourra distraire notre Front face à ses responsabilités historiques.

Quelles sont les motivations du Front ?
Le Front n’a qu’une ambition. C’est de faire du Sénégal une terre de paix, de démocratie, de liberté et d’opulence, par une gestion démocratique et transparente de nos ressources, au service exclusif des intérêts du peuple sénégalais. Aujourd’hui, il y a un débat sur ce que  l’opposition qualifie de rupture du consensus sur le processus électoral…
La rupture du consensus en matière électorale incombe au pouvoir qui ne veut ménager aucun effort pour un deuxième mandat de Macky Sall. Et cela, même en bravant les règles les plus élémentaires d’une démocratie saine. Le pouvoir veut se donner les moyens de vaincre sans convaincre par la triche, la fraude et les rapports de force. La démocratie ne s’accommode pas de ces desideratas. Il nous faut un consensus sur la matière électorale pour garantir à notre pays des élections libres, démocratiques et transparentes. C’est un
des socles de notre combat.

Selon vous, quelles seraient les menaces sur les futures élections ?
Sans consensus et avec la volonté fortement exprimée du pouvoir de ne pas s’entendre avec l’opposition sur la refonte du fichier et du processus électoral, les germes des convulsions post électorales guettent le Sénégal. Il faut, à tout prix, y remédier. Nous en appelons à la prise de conscience du gouvernement.

Que vous inspire l’annonce faite par le président de la République comme quoi les Législatives se tiendront avant le 29 juin 2017 ?
Vous savez, au regard de la praxis politique de ce régime, le Sénégal a atteint un degré d’autoritarisme jamais égalé. Seul le Président sait tout. Lui seul sait la date des élections
législatives. Il faut se plier à ses désirs ou être voué aux gémonies. Hélas, ce sont les tentatives d’instauration d’une République autoritaire que nous combattrons, de toutes nos forces, pour sauver le Sénégal.

Pour parler de l’affaire Petro Tim, avez-vous reçu la plainte annoncée par Frank Timis ?
C’est une grosse farce que nous attendons avec célérité afin qu’il nous rende nos 30%.
Nous sommes prêts à défendre les intérêts supérieurs de la Nation à la place de ce  gouvernement. D’ailleurs, dès que tu parles de pétrole et de gaz, le gouvernement panique.
Il n’y a pas de doute que ce gouvernement sent le gaz. C’est quand même curieux que,
quand nous interpellons notre gouvernement sur la question des hydrocarbures, le Premier ministre nous menace, et Frank Timis, un étranger parmi nous, met à exécution les volontés de l’Etat. Rien ne pourra divertir l’opposition sur la question, et nous continuerons à poser les questions idoines au chef de l’Etat, qui est notre unique interlocuteur dans ce domaine.  D’ailleurs, son silence sur la question est une forme de réponse. C’est pourquoi nous  continuerons à éclairer la lanterne du peuple sur la prise en charge de ses intérêts dans ce  domaine vital pour l’avenir de la Nation.

Il est question de plaintes croisées, alors où en est la plainte du Front ?
Nos avocats travaillent sur le dossier, et ils nous feront leur exposé assez bientôt. C’est une problématique sérieuse que nous traitons au meilleur profit des intérêts du Sénégal.

On annonce aussi une plainte de l’opposition sur le dossier de la Banque de Dakar contre  Aliou  Sall pour son implantation ?
Je n’en ai pas connaissance.

Pour en venir à votre formation, à quand la prochaine étape de  la caravane de l’espoir du Grand parti ?
La caravane de l’espoir que nous avons entamée depuis octobre 2015 se poursuivra cette semaine dans le monde rural. Nous avons déjà sillonné 11 régions. Il nous reste à faire  Diourbel, Matam et Dakar, que nous ferons avant fin décembre 2016 par la grâce de Dieu.

Sur un autre aspect, on a comme l’impression que vous avez choisi d’ignorer les invectives des responsables du régime ?
Je dirai comme le général De Gaulle que je ne fais pas de politique à la corbeille. Pour moi, la politique est un sacerdoce au service exclusif des intérêts supérieurs de la Nation. Et comme je l’ai appris dans ma verte jeunesse politique, un homme d’Etat se met toujours sur les  hauteurs. Les invectives et les calomnies sont l’arme des faibles et traduisent assez  éloquemment leur carence face à la force de la vie des idées et de la confrontation des  projets. Je suis contre la crétinisation de la politique.

Vous êtes Docteur en Économie et acteur politique, votre commentaire sur l’appréciation  positive des bailleurs de fonds sur l’économie sénégalaise ?
Les bailleurs multilatéraux font certainement leur job de coaching économique qui dresse des bilans diplomatiquement parlant. Il faut s’entendre à retenir, et tous les spécialistes  s’accordent à le dire, que l’économie sénégalaise se trouve dans un cycle de décapitalisation
hardie. C’est-à-dire que nous consommons systématiquement plus que nous ne produisons. En langage simplifié, nous vivons au-dessus de nos moyens. On s’endette vite et mal. Notre croissance n’est pas inclusive. La création de richesses est en panne. La vulnérabilité du chômage est chronique. La dépendance économique étrangère s’accentue vertigineusement  et les principaux secteurs de l’économie sont en dépression. Le secteur privé national est en décadence absolue. C’est cela le décor non exhaustif du Plan Sénégal émergent. De plus, confronté à la réalité des paramètres du bien-être social et humain des populations, le Pse va accélérer le processus de paupérisation des couches vulnérables. A terme, le Pse ne mènera nulle part le Sénégal.

Qu’est-ce qui justifie votre position radicale par rapport à la politique de Macky Sall ?
Je n’ai pas de position radicale. C’est juste que mon appréciation de la politique économique du gouvernement est objective et se base sur la réalité du terrain. Ma conviction est qu’il faut redresser le Pse en mettant l’agriculture comme levier central du développement et premier véhicule de la croissance économique.

(Source : Le Populaire)

1 COMMENTAIRE

  1. Oui , pour relever le pse en mettant
    l agriculteur comme levier .
    Mais comment ?
    Pourquoi notre agriculture paysane
    ne nourrit pas son homme ?
    Pourquoi l aviculture doit etre errigee
    en Secteur Economique Prioritaire comme dans les plus grands pays du
    monde « en sourdine » ?
    Le remplacement de l outil de travail
    (houe ,hilaire …) par l equipement agricole moderne .
    Et enfin pour perenniser l activite agricole ,il faut veritablement mettre
    A jour une veritablement
    Gastronomie Senegalaise ,
    en faisant aimer a nos compatriotes
    les recettes tirees de ce qu ils produisent eux memes .
    C est la ou commence le developpement durable .
    Vive le Senegal .

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